Interventions sur la question agraire au IVe Congrès de l’IC

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Varga au IVe Congrès de l’IC

(Novembre 1922)

21ème Séance du 24 novembre 1922 : Rapport sur la question agraire[modifier le wikicode]

Kolarov, Président : La séance est ouverte. Ordre du jour : la question agraire. La parole est au cam. Varga.

Varga (Hongrie) : Camarades, la question agraire a été déjà discutée en détail au II ème congrès de l’Internationale Communiste. Les thèses abordées par ce Congrès constituent la base de notre travail. Le programme d’action que la commission agraire vous présente n’est pas une modification de ces thèses, mais un complément. Ce complément a été nécessité par les changements historiques qui se sont produits au cours des deux dernières années. Au II ème Congrès, nous étions tous convaincus que la révolution allait s’étendre rapidement vers l’Ouest. C’était l’époque de l’avance victorieuse de l’armée rouge en Pologne, de l’extension du mouvement communiste dans toute l’Europe, et c’est sous l’impression de cet essor révolutionnaire que les thèses du II ème Congrès ont avant tout trait aux questions qui touchent de près la prise du pouvoir. Actuellement nous devons considérer que l’époque de la prise du pouvoir en Europe n’est pas proche. D’où la nécessité d’amener à nous de grandes masses de troupes auxiliaires afin de grossir l’armée de l’Internationale Communiste.

C’est cette idée qui est à la base de la tactique du front unique et du programme d’action agraire qui vous est présenté. Si nous voulons parvenir à établir en Europe la dictature du prolétariat, nous devons nous assurer tout d’abord l’appui actif de larges couches de la population rurale et neutraliser d’autres couches. Car nous devons nous rendre compte que la bourgeoisie a également beaucoup appris de la révolution russe. Alors qu’à l’époque de la prise du pouvoir par les bolcheviks, elle était persuadée que la dictature prolétarienne ne pouvait pas durer, elle se rend compte aujourd’hui, par l’expérience de la Russie des Soviets, de l’importance du danger qui la menace, et elle se tient partout sur ses gardes. Il ne peut plus être question de surprendre la bourgeoisie au moyen d’une petite minorité révolutionnaire. Si donc nous nous proposons de gagner à nous les couches qui sont susceptibles d’être acquises à la cause de la révolution, et d’en neutraliser d’autres, nous devons avant tout fixer la méthode de notre travail. Cette méthode consiste à exploiter les intérêts quotidiens des couches en question de la population rurale au sein du régime capitaliste. Pour gagner ces couches, il ne suffit pas d’établir un programme. D’une façon générale elles ont une attitude de méfiance vis à-vis du Parti communiste. Il ne suffit pas, pour entrer en contact avec elles, de rédiger un bon programme, mais il faut les gagner par l’action en participant à leur lutte quotidienne. C’est le seul moyen d’arriver à écarter la méfiance qu’elles ont à l’égard du Parti communiste. Il faut avant tout gagner les couches inférieures de la population paysanne, c’est à dire les paysans pauvres qui n’ont pas assez de terre pour pouvoir en vivre et qui sont obligés de se procurer une partie de leurs ressources en travaillant comme salariés. Pour cela, il faut avant tout les arracher à l’emprise morale des gros paysans et des grands propriétaires fonciers. C’est un travail difficile, car la classe paysanne en Occident n’est pas une masse aussi inorganisée que l’était la classe paysanne russe avant la révolution. La classe paysanne d’Europe possède ses organisations politiques, économiques et coopératives, dont les gros paysans ont partout la direction. C’est pourquoi nous devons nous efforcer d’exploiter les intérêts des paysans pauvres afin de les arracher à l’influence des gros paysans. Ce travail est extrêmement difficile. Les difficultés résident surtout dans la nature des partis communistes d’Occident.

Aucun de ces partis ne dispose des forces nécessaires pour mener pareille campagne.

Beaucoup même ne disposent pas des forces nécessaires pour pouvoir travailler suffisamment au sein du prolétariat industriel : il reste donc très peu de camarades pour la propagande parmi les paysans et c’est pourquoi il est possible que le parti communiste d’un pays déterminé soit complètement coupé de la population paysanne.

Prenons un exemple. J’ai adressé aux camarades de la délégation roumaine à la commission agraire la question suivante : quelles conséquences politiques a eu le grand partage des terres en Roumanie parmi la population paysanne? Le camarade m’a répondu : nous ne savons pas. Je ne veux pas en faire un reproche au Parti communiste roumain, nous savons tous dans quelles conditions particulièrement difficiles il a eu à militer. Mais je veux seulement montrer par cet exemple qu’il y a beaucoup de partis communistes qui ne sont pas encore en état de faire un travail méthodique parmi la population paysanne. Naturellement la solution ne doit pas consister à renoncer à ce travail, mais à s’efforcer de tirer de la population paysanne elle-même des chefs, des agitateurs, des fonctionnaires du parti, et à les renvoyer dans le mouvement après leur avoir donné une éducation spéciale.

J’ai dit que l’action qui consiste à profiter des intérêts quotidiens des différentes couches de la population paysanne pour les gagner à nous se heurte à de grandes difficultés. La plus grande, à mon avis, est le caractère social indécis des différentes catégories de cette population. Dans l’industrie la différenciation des classes est beaucoup plus claire et plus nette. Il est facile de distinguer un ouvrier industriel d’un artisan et d’un petit patron, le passage d’une classe à l’autre est rare et difficile. Naturellement, il arrive souvent, dans la période actuelle de déclin du capitalisme, qu’un ouvrier exerce en même temps un petit commerce, ou qu’il travaille indépendamment chez lui. Mais en général la différenciation est nette.

Il en est tout autrement dans la population rurale. Il y a à la campagne une transition insensible de l’ouvrier agricole, du prolétaire absolument sans terre, au semi- propriétaire; au petit paysan, au moyen paysan et au paysan riche. Ou passe facilement d’une catégorie à l’autre. La différenciation de classe n’y est pas permanente. Un paysan pauvre peut très facilement devenir un employeur de main d’œuvre. D’autre part il peut être obligé par les circonstances extérieures de se louer comme salarié, ce qui fait que les classes, non seulement se chevauchent, mais ne sont pas permanentes.

En outre il y a la différence quantitative qui existe entre les classes moyennes dans l’agriculture et dans l’industrie. Dans les villes, nous pouvons négliger dans notre agitation les couches petites-bourgeoises, petits artisans, petits commerçants, etc... Mais il y a beaucoup de pays où le prolétariat agricole est numériquement très faible, et où les petits et moyens paysans constituent l’immense majorité de la population. C’est pourquoi nous devons consacrer à ces couches sociales dans notre travail à la campagne une plus grande attention que dans notre travail dans les villes.

J’indiquerai rapidement quelle est la base économique de ce caractère indécis des différences de classes à la campagne. Il est dû au fait que dans l’agriculture le moyen de production le plus important, c’est-à-dire la terre est facilement, partageable. On peut la partager sans qu’il en résulte une diminution sensible de la production. Il est absolument impossible de partager une ligne de chemins de fer, une station électrique, un grand chantier naval ou une fabrique de machines, ce serait une stupidité, car cela aboutirait à ruiner la production. Mais dans l’agriculture on peut partager le sol sans diminuer le produit d’une façon appréciable. Si le paysan est intelligent, le partage du sol n’entraîne aucune mauvaise conséquence pour la production. On peut acheter et vendre la terre à volonté. La base elle-même est partageable : c’est ce qui fait que la catégorie sociale qui repose sur cette base économique a un caractère de classe changeant et indécis.

Enfin, j’indiquerai la difficulté qui réside dans la différence de situation des différents pays. Alors que les problèmes du prolétariat industriel, les conditions dans lesquelles il vit, sont à peu près partout les mêmes, il existe dans l’agriculture de profondes différences. On peut distinguer trois types principaux : 1) les pays coloniaux, avec une population paysanne indigène asservie, par exemple l’Egypte et l’Inde. Le paysan y est exploité par les conquérants étrangers qui sont en liaison étroite avec les grands propriétaires féodaux du pays, par les grands princes alliés de l’impérialisme anglais. Dans ces territoires, la lutte contre l’impérialisme est en même temps la lutte sociale des paysans asservis contre leurs propres seigneurs, et la lutte pour la libération nationale est en môme temps une lutte de paysans contre leur propre asservissement.

Un deuxième type est fourni par des pays où il existe encore de fortes survivances féodales et où la révolution bourgeoise n’a pas encore terminé son œuvre. Môme en Allemagne, il existe encore de forts restes de féodalité, et si nous marchons vers l’est, en Pologne, dans les Balkans, en Roumanie, en Asie Mineure, nous trouverons de plus en plus le type d’exploitation féodale.

Le troisième type est fourni par les Etats purement capitalistes, par exemple l’Amérique, où l’agriculture constitue une branche de la production capitaliste, ou comme les colonies anglaises, par exemple le Canada, l’Australie et l’Angleterre même. Il existe entre les exploiteurs et les exploités les mêmes relations que dans l’industrie. L’exemple de la YougoSlavie prouve à quel point la situation est compliquée : dans les provinces nouvellement annexées de Bosnie et d’Herzégovine, nous trouvons des relations complètement féodales entre les ouvriers agricoles et les grands propriétaires fonciers; dans l’ancien territoire de la Serbie, pays complètement démocratique, dans les territoires enlevés à la Hongrie, Hongrie du Sud et Croatie, nous avons une agriculture complètement capitalisée, de grandes entreprises agricoles avec installation moderne; de sorte que sur cette petite surface nous avons trois types sociaux et politiques différents, ce qui naturellement complique extraordinairement notre propagande dans les campagnes, étant donné que les mots d’ordre correspondant aux revendications quotidiennes doivent être tout autres dans la Vieille Serbie, en Bosnie et en Herzégovine et dans la Croatie ou dans les territoires enlevés à la Hongrie.

La deuxième grande différence consiste dans la question de la terre. Il y a des pays où le besoin de terre concentre toute l’attention de la population paysanne, et il y en a d’autres où la question de la terre ne joue pour ainsi dire aucun rôle. Si nous prenons par exemple la Pologne ou la Hongrie, ou même certaines parties de l’Allemagne ou de l’Italie, nous constatons que la question de la terre joue le rôle principal, tandis qu’ en Amérique ou dans les colonies anglaises, ce n’est pas du tout le cas, étant donné que la terre y est en abondance. En France, la question de la terre a une moindre importance, parce que la population croit très lentement : au cours de la guerre, un million et demi de paysans ont été tués, de sorte que l’on ne saurait parler actuellement d’un grand besoin de terre. D’autre part il existe en Bulgarie un besoin de terre, mais comme il n’y a pas de grandes propriétés à partager, on peut dire que ce besoin de terre est sans objet. On voit donc que les situations sont complètement différentes. J’ai dit que le caractère principal des couches petites-bourgeoises à la campagne est le manque de clarté de leur situation de classe. Ce fait détermine aussi leur rôle politique. Il change constamment. De même que leur base économique est changeante, leur rôle politique change également très facilement. Tantôt près du prolétariat, tantôt près des paysans riches, ce sont des éléments très oscillants qu’il faut tenir ferme et travailler d’une façon intelligente. Sous ce rapport, j’indiquerai les transformations qui se sont produites par suite de Ia guerre dans la situation de classe et dans le rôle politique de la population paysanne. La répartition du revenu entre l’agriculture et l’industrie s’est transformée pendant la guerre en faveur de l’agriculture : donc certaines catégories paysannes qui avant la guerre ôtaient près du prolétariat se sont élevées et se sont rapprochées des paysans riches, de sorte que la ligne de démarcation séparant les couches sociales susceptibles d’être gagnées à la cause prolétarienne a ôté rapprochée par la guerre et que la catégorie que nous pouvons englober aujourd’hui est moindre qu’avant la guerre. D’autre part la guerre a séparé plus nettement les éléments susceptibles d’être gagnés à la révolution et ceux qui ne le sont pas. Les paysans se sont enrichis pendant la guerre du fait que le prix des denrées alimentaires s’est élevé plus rapidement que celui de toutes les autres marchandises. Les paysans qui avaient des produits à apporter sur le marché se sont enrichis, mais ceux qui ôtaient obligés de gagner leur vie en se louant comme salariés se sont appauvris, ce qui a renforcé la séparation, mais non pas d’une façon aussi nette que dans l’industrie.

J’ajouterai que, dans ces deux dernières années, la situation a empiré. Je rappellerai la grande crise agraire en Amérique, en Argentine, et ce fait que, vu l’augmentation des prix des produits manufacturés, le paysan ne peut plus vendre cher ses produits et acheter à bon marché ceux de l’industrie. C’est pourquoi nous assistons actuellement dans différents pays à un endettement croissant des paysans.

Ce caractère indécis de la situation des paysans fait comprendre pourquoi, là où existe un prolétariat agricole, celui-ci doit être considéré comme le facteur principal du mouvement révolutionnaire. C’est parmi les ouvriers agricoles que le parti puisera ses meilleurs combattants. C’est ce que nous avons dit dans le programme d’action.

Je dois indiquer ici que dans la traduction française, on a commis une erreur tout à fait incompréhensible je dirais presque une altération. Dans le texte allemand, il est dit très clairement au paragraphe 6 : « Il est le facteur de plus important du mouvement révolutionnaire ». Dans le texte français, cette phrase a ôté traduite ainsi : « Un des facteurs les plus importants ». Je prie donc les camarades qui ont en main cette traduction de tenir compte que le texte allemand signé est le texte définitif, le seul qui compte.

Comment entrerons-nous en contact avec les ouvriers agricoles? Je ne crois pas qu’il soit nécessaire d’en parler beaucoup. Nous pouvons entrer en contact avec eux en exploitant leurs revendications quotidiennes comme salariés, comme prolétaires, en soutenant leur lutte pour l’élévation de leurs salaires, pour l’amélioration de leurs conditions de travail, pour l’extension de la législation sociale, etc... Et non seulement soutenir cette lutte, mais l’organiser pour la diriger et pour la relier aux luttes du prolétariat industriel, pour prouver ainsi au prolétariat agricole que le parti communiste est véritablement le parti du prolétariat. Je crois qu’il n’est pas nécessaire d’en dire davantage. Le programme lui-même contient tout ce qu’il faut dire là-dessus.

J’en viens maintenant à notre travail parmi les couches semi-propriétaires. Je veux indiquer ici les dangers qui nous y menacent. Ces dangers sont de deux sortes, dangers de droite et dangers de gauche. A droite il y a le danger que dans les pays où existe une couche nombreuse de demi- propriétaires et de petits paysans, notre agitation ne se transforme en une agitation paysanne, et qu’il n’y ait plus aucune différence fondamentale entre l’action du parti communiste et celle d’un parti paysan radical. A ce propos j’indiquerai qu’en France la méthode de travail du cam. Renaud Jean comporte le danger que l’on oublie les intérêts du prolétariat agricole en faveur des intérêts des demi-propriétaires et des petits paysans. De même à propos du rapport de le délégation américaine, où l’on ne demande rien d’autre que des prix minima fixés par l’Etat pour les produits agricoles, ce qui contredit non seulement les intérêts de la population agricole, mais aussi ceux du prolétariat industriel, en tant que consommateur. Ce sont là les dangers de droite.

Il y a également des dangers de gauche, Il y a des camarades qui ont peur des paysans et qui croient que seul le prolétariat agricole et industriel fournit des combattants actifs pour la révolution, que les paysans pauvres ne peuvent pas être acquis à la cause révolutionnaire. C’est là une erreur aussi grave que la précédente, car il y a de nombreux pays où une révolution prolétarienne est absolument impossible sans la collaboration active des paysans pauvres. Je pourrais dire qu’à l’exception de l’Angleterre il n’y a pas en Europe un seul pays où une dictature pourrait se maintenir si elle avait contre elle la bourgeoisie, les paysans riches et les paysans petits et moyens.

Je considère donc que la peur de la collaboration des paysans, le manque de foi dans la possibilité de révolutionner de grandes masses paysannes constituent une erreur politique analogue à la négligence des intérêts des travailleurs ruraux. La chose est bien claire : des troupes sûres pour notre lutte, des troupes de combat permanentes ne peuvent nous être fournies que par le prolétariat rural. Mais dans les moments de mouvement révolutionnaire, il faut entraîner les plus larges couches de la population travailleuse agricole. Sans cela, la prise du pouvoir sera impossible dans beaucoup de pays et dans les autres la dictature ne pourrait se maintenir sans leur appui actif.

Voici la question qui se pose : comment atteindre les diverses couches de la population paysanne ? Dans notre programme d’action, les différents rapports de dépendance des paysans à l’égard du capital sont nettement indiqués : dépendance du capital d’emprunt, du capital d’usure, dépendance de la spéculation qui achète aux petits paysans leurs produits très bon marché pour les revendre ensuite très cher dans les villes, dépendance du capital industriel qui élève artificiellement les prix des produits industriels grâce au monopole, dépendance du Capital des transports qui, par exemple en Amérique, est d’une importance décisive puisque 50% parfois de la production passe en frais de transport. Il y a probablement ici des camarades qui ont lu le très intéressant roman de Norris où il raconte ce qui suit : En Amérique la Compagnie des chemins de fer change toutes les deux semaines ses tarifs. Alors un pauvre diable qui, par un dur labeur de prolétaire était devenu cultivateur de houblon demande au directeur : dites-donc, comment déterminez-vous les tarifs? Celui-là de répondre : « Nous les déterminons aussi hauts que vos affaires peuvent les supporter ». Ainsi donc, ils enlèvent tout ce qui reste après payement du travail.

En outre, il faut encore considérer la lutte des paysans contre l’Etat capitaliste qui, sous forme d’impôts et de guerres, c’est-à- dire de l’impôt du sang, écrase durement le paysan.

Je pense que notre véritable travail doit consister à soutenir les diverses revendications de la population paysanne envers le Capital. Voilà où, à mon avis, se trouve la solution de la question des prix. Naturellement, nous ne devons pas dire : les paysans doivent obtenir des prix élevés. Mais nous devons transformer la question des prix en une lutte des paysans contre le Capital. Nous devons dire : Il faut contraindre le Capital à fournir aux paysans des moyens de production, des machines, des engrais, etc... tout cela bon marché, afin de permettre aux paysans de vendre les vivres aussi bon marché. Nous ne devons pas dire. Nous voulons tel ou tel prix élevé, mais les capitalistes doivent fournir aux paysans tous les produits industriels à bon marché.

Camarades, le point central de notre travail se trouve dans la question de la terre. Car le désir de posséder la terre constitue la facteur le plus actif de tous les mouvements révolutionnaires à la campagne. La question se pose très clairement : le Parti Communiste doit-il soutenir le mouvement des paysans pauvres demandant plus de terre dans le cadre du Capitalisme ou ne doit-il pas le soutenir ? Doit-il se prononcer en faveur de cette revendication ou non ? On ne saurait éluder cette question. Dans la plupart des pays, elle se pose avec une telle intensité que les partis communistes sont absolument obligés d’y répondre par oui ou par non.

Je disais donc, camarades, que le Parti Communiste doit partout répondre nettement par un oui à cette question. Ce Parti doit soutenir tous les efforts faits par les petits exploitants pour obtenir plus de terre. La tactique doit consister à opposer notre solution révolutionnaire de la question agraire de la manière la plus constante et la plus énergique à toute réforme agraire bourgeoise et à diriger l’action de ces couches paysannes dans la direction de la solution préconisée par nous.

Tous les paysans pauvres et les petits fermiers exigent la réduction du loyer de leur terre. Le Parti Communiste ne saurait dire : non, nous ne sommes pas en faveur d’une telle mesure. Il doit dire au contraire : oui, nous sommes pour cette mesure, mais nous vous disons en même temps que ce n’est pas là une solution, car seule l’expropriation de ces terres que vous avez aujourd’hui en fermage, seule leur confiscation révolutionnaire peut donner une solution. Les paysans qui n’ont que peu de terre veulent en acheter, ils veulent que l’Etat. leur en fournisse à bon marché. Le Parti Communiste ne saurait dire qu’il s’y oppose. Il doit dire au contraire; nous sommes pour cette mesure, mais nous voulons encore plus, nous voulons que vous obteniez la terre gratuitement; et nous luttons ensemble avec vous pour ce but. Pour le moment nous tâchons que vous obteniez immédiatement de la terre bon marché. Nous continuerons la lutte pour que vous l’obteniez gratuitement en môme temps que de l’outillage, du bétail, des machines, etc...

C’est ainsi, camarades, et seulement ainsi que l’on peut prendre activement contact avec ces couches qui aujourd’hui sont, je dirai, séparées du Parti, qu’on peut les entraîner dans notre cercle d’influence et relier leur mouvement révolutionnaire à celui du prolétariat urbain. On peut objecter ce qui suit. Lorsque les Gouvernements bourgeois verront que le mouvement devient vraiment révolutionnaire, ils tenteront d’étouffer ce mouvement en distribuant de la terre aux éléments dirigeants les plus actifs des paysans. C’est ce qui est arrivé dans tous les pays limitrophes de la Russie : en Finlande, on Lettonie, en Esthonie (en Pologne la promesse a été faite, mais pas encore réalisée) et en Roumanie. Un correspondant du journal anglais : L’ E c o n o m i s t, écrit nettement dans un de ses derniers numéros en date du 21 octobre 1922 au sujet de la Roumanie :

« II est notoire que c’est la peur et non les circonstances économiques qui ont amené la réforme agraire en Roumanie. C’est le prix que les classes régnantes ont payé pour sauvegarder le pays du Bolchévisme ».

Cela est tout à fait clair et juste. L’idée pourrait alors venir : s’il en est ainsi, pourquoi devons-nous appuyer de tels mouvements, des mouvements qui, à un certain moment pourraient avoir des effets anti-révolutionnaires ? Mais je dois dire que la question se pose avec trop d’intensité, le Parti Communiste doit absolument y répondre par oui ou par non ; or, il ne saurait répondre par non, il doit dire oui et risquer le danger d’un succès partiel qui émousserait quelque peu le mouvement révolutionnaire. L’idéal du mouvement révolutionnaire serait naturellement que la lutte des ouvriers de la ville et le mouvement révolutionnaire des paysans pauvres augmentent parallèlement jusqu’au moment où simultanément le prolétariat industriel des villes s’emparerait du pouvoir et le prolétariat agricole ainsi que les paysans pauvres saisiraient les terres. La population rurale recevrait légalement la terre des mains de la dictature du prolétariat, ainsi que cela est arrivé en Russie; ce ne serait pas la bourgeoisie, mais le prolétariat révolutionnaire, maître du pouvoir, qui distribuerait les terres. Voilà quel serait l’idéal. Mais nous ne sommes pas seuls sur le terrain de combat, la bourgeoisie lutte aussi et elle peut avoir la chance de distribuer la terre précisément pour étouffer le mouvement révolutionnaire général.

Si elle fait cela, nous serons obligés de tout recommencer. Nous devons donc exploiter immédiatement toutes les lacunes d’une réforme agraire bourgeoise. Nous devons immédiatement indiquer que c’est là une réforme agraire limitée par son caractère bourgeois môme. Une réforme bourgeoise ne saurait en effet rien donner au véritable prolétariat sans terre, car elle ne distribue la terre que contre paiement ou en imposant une lourde dette. Elle ne peut donner de terres à des gens qui n’ont pas de moyens de production, pas de bétail de semences, de machines, d’étable, etc... S’ils essaient, comme par exemple en Yougo-Slavie où les terres conquises chez les Hongrois ont été distribuées aux soldats sans terre, on n’arrivera à rien, car, comme cela est arrivé dans le cas indiqué, les bénéficiaires de ces distributions ont donné leur terre en terme et la chose n’est pas allée plus loin.

Pour me résumer, je dis : nous devons envisager en toute conscience le danger d’une réforme agraire bourgeoise et si elle est accordée, nous devons immédiatement transformer notre tactique en nous appliquant à exploiter tous les défauts de cette réforme bourgeoise. Le résultat social d’une telle réforme est le suivant.

Elle étouffe momentanément le mouvement révolutionnaire. Elle crée une grande couche de gros paysans liés au Capitalisme, mais d’autre part elle aggrave profondément les antagonismes de classe entre paysans pauvres et paysans riches, c’est-à-dire entre les paysans sans terre ou qui n’obtiennent de terre qu’à des conditions qui les rendent esclaves des banques et les ramènent dans le plus court intervalle de temps à leur précédente misère, et les paysans riches beaucoup plus avantagés.

Camarades, dans notre agitation, nous devons toujours préconiser clairement et de la façon la plus énergique notre programme : confiscation de la terre, confiscation de tous les moyens de culture, remise gratuite de ces terres, avec tout leur outillage, aux prolétaires sans terre et aux paysans pauvres. Pour gagner les couches moyennes neutres, nous devons sans cesse leur répéter que la révolution prolétarienne supprime les hypothèques et le fermage; tous ceux qui avaient cultivé jusqu’à présent leurs terres en qualité de fermiers reçoivent ces terres gratuitement pour les exploiter librement. Sans cesse nous devons faire ressortir la différence profonde qu’il y a entre une réforme agraire bourgeoise et une révolution agraire prolétarienne.

Pour conclure, je dois ajouter quelques mots relatifs aux mesures d’organisation prévues dans le programme d’action qui vous est soumis. Naturellement, camarades, notre tâche est d’organiser le véritable prolétariat rural là où il n’est pas encore organisé syndicalement ; il faut constituer des noyaux communistes dans les syndicats ruraux si ces syndicats existent, et les amener ainsi sous notre direction. Il faut cependant ajouter que nous devons montrer que notre intérêt consiste à transformer ces syndicats ruraux en syndicats industriels, de telle sorte que tous les ouvriers industriels occupés en permanence dans l’agriculture, c’est-à-dire les serruriers, forgerons, charrons, maçons, mécaniciens, etc... soient organisés dans les syndicats des ouvriers ruraux, ce qui donnerait à ces derniers un meilleur point d’appui.

D’autre part, camarades, il est à souhaiter que les communistes habitant la campagne, pénètrent dans les syndicats jaunes, dans les syndicats bourgeois, dans les syndicats fascistes, dans tous les syndicats contre-révolutionnaires des paysans, pour y former des noyaux et y montrer que ces syndicats ne remplissent pas leurs buts, qu’ils ne luttent pas contre les patrons. De même les communistes doivent pénétrer aussi dans les diverses organisations des petits paysans, dans les organisations économiques, dans ces coopératives, pour y former également des noyaux et les amener sous la direction du Parti Communiste.

En faisant ce travail parmi les paysans pauvres, le Parti Communiste essaye de les amener sous sa direction. Il doit essayer d’influencer le mouvement, de lui donner des mots d’ordre toujours plus révolutionnaires — naturellement suivant la situation tactique à l’instant considéré pour démontrer de cette façon à la population paysanne, au prolétariat, aux paysans pauvres que le Parti Communiste ne se considère pas seulement dans son programme, mais aussi dans sa pratique, comme le représentant des intérêts de tous les éléments pauvres de la campagne. Nous devons essayer, quand nous en avons l’occasion, de relier le mouvement des prolétaires ruraux et des paysans pauvres avec le mouvement du prolétariat international en les faisant s’appuyer l’un sur l’autre. Ce n’est pas une utopie. En Allemagne, nous connaissons des cas où les paysans pauvres ont par exemple soutenu la grève des ouvriers métallurgistes de l’Allemagne du Sud en leur donnant des produits alimentaires, et il existe sûrement d’autres circonstances où les ouvriers de l’industrie ont pu soutenir la lutte des paysans pauvres. On doit essayer de réunir ces deux branches du mouvement qui jusqu’ici ont été sans liaison. Là où existe un fort mouvement de Conseils ouvriers, on peut former des conseils agraires dans les grands domaines et. des conseils de petits- paysans, afin de relier les deux mouvements des Conseils ouvriers agraires et industriels, et de donner aux petits paysans un point d’appui dans le mouvement des conseils d’Usines. Je ne peux naturellement pas énumérer ici tous les cas qui se sont produits, mais seulement donner des exemples. Camarades, je termine. Le programme d’action, tel que nous l’avons et qu’il a été unanimement adopté par la Commission, ne signifie pas que dans certaines délégations, il n’existe pas de différence d’opinions. Ces différences existent, par suite de la difficulté du sujet et de la diversité des conditions objectives. Un camarade, je crois que c’était un Polonais, a employé une expression frappante en disant que le programme agraire était un omnibus dans lequel chacun pouvait monter. Il en est ainsi camarades. Il ne peut pas en être autrement. A la campagne, le partage ne se fait pas d’une façon nette et précise, la différenciation des classes change continuellement, c’est pourquoi notre programme d’action doit être établi de façon à permettre à toutes les couches ouvrières de la campagne de participer au mouvement révolutionnaire du Parti Communiste, en soulignant le primat du paysan vraiment prolétarien. (Applaudissements prolongés.)

22ème séance, 25 novembre 1922 : Discours de clôture[modifier le wikicode]

Neurath Président : Une proposition de clôture des débats est parvenue au bureau. Y a-t-il quoiqu’un qui veuille parler sur cette proposition ?... Non. Y a t il quelqu’un contre cette proposition ?... Non. La proposition est adoptée. Le camarade Varga a la parole pour conclure.

Varga-(Hongrie): Les débats qui se sont déroulés ici n’ont pas été ce que j’aurais attendu. J’avais pensé que les camarades des divers pays qui ont milité au sein de la population rurale viendraient nous exposer ici leurs méthodes de travail, les obstacles auxquels ils se sont heurtés, les résultats qu’ils ont obtenus et les leçons qui s’en dégagent. Or les débats ont eu un caractère beaucoup trop général.

En résumant les opinions exposées ici, j’y retrouve ces mêmes dangers de droite et de gauche que j’avais déjà indiqués dans mon rapport. Un grand nombre de camarades semblent ignorer complètement la question. Cela résulte du fait que le Parti Communiste est avant tout le Parti du prolétariat industriel. Il y a des camarades qui pensent que le prolétariat industriel qui est appelé à exercer la dictature peut faire la révolution sans l’aide des masses paysannes. C’est là naturellement une erreur. Sans le secours du prolétariat rural et des paysans pauvres, aucune Révolution n’est possible dans- aucun pays d’Europe. De même aucune Révolution ne pourra durer sans cette aide.

Il y a des camarades qui ont posé la question de la façon suivante. Les paysans sontils révolutionnaires ou contre-révolutionnaires ? C’est ainsi que les camarades Renaud Jean et Rieux l’ont posée. On ne peut pas poser une question de cette manière. On ne peut pas, comme l’a fait le camarade Rieux, dire: Renaud Jean a tort, le paysan français n’est pas révolutionnaire, il est contre-révolutionnaire, conservateur. Ce n’est pas juste. Ce qui caractérise eu effet la population paysanne, c’est sa nature changeante. Il y a des moments où le paysan est contre-révolutionnaire. Mais on ne peut pas dire une fois pour toutes, comme l’a fait le camarade Rieux, que le paysan français est contre-révolutionnaire. Parler ainsi, c’est renoncer à notre travail parmi les paysans. Nous ne pouvons mener ce travail à bien si nous disons: il n’y a rien à faire, ces gens sont contre-révolutionnaires, tout ce que nous pouvons, c’est de neutraliser les petits paysans. C’est là une conception absolument fausse. Je suis d’avis que cette méfiance vis-à-vis des paysans n’est pas justifiée. Nous savons, comme l’a dit la camarade Kotchewa, que les paysans ne constituent pas l’élite révolutionnaire, mais à certaines périodes de l’histoire ils constituent un grand réservoir de forces révolutionnaires. C’est pour cette raison que je voudrais souligner tout particulièrement la déclaration de la camarade Kochtchewa, que nous ne pouvons pas gagner les paysans si nous ne procédons pas à une analyse minutieuse de leur situation.

Autrement nous arrivons à des conceptions figées comme celles du camarade Rieux et en partie aussi du camarade Renaud Jean. Il faut continuellement étudier la situation de la population paysanne et la mettre en branle quand elle est susceptible d’être gagnée au mouvement.

C’est pour cela aussi que je ne condamne pas le travail du camarade Renaud Jean, comme sont disposés à le faire un certains nombre de camarades. Il y a, certes, dans les conceptions du camarade Renaud Jean des traits qui ne sont pas absolument communistes, mais nous devons tenir compte qu’il milite parmi les paysans, qu’il acquiert des adeptes à la révolution et qu’il organise des couches qui sont difficilement susceptibles d’être gagnées, et que c’est là un travail très important. Ce qu’il a dit, à savoir que le paysan est sorti de la guerre avec une psychologie transformée, est très important. Il ne faut pas être figé et déclarer : oui, le paysan a toujours ôté ainsi, il est maintenant ainsi il sera toujours ainsi, il faut étudier la situation réelle.

Le camarade anglais a dit en substance ceci: Chez nous la révolution est rendue difficile par le fait que l’Angleterre ne peut subsister plus de quelques mois sans importation de produits alimentaires. Je voudrais par contre indiquer que la situation en Angleterre n’est pas du tout aussi mauvaise qu’on pourrait le croire sur la base des statistiques. Un professeur allemand, Oppenheimer, a prouvé que l’Angleterre ne mourrait pas du tout de faim si elle était complètement coupée de ses importations. Il s’appuie surtout sur ce fait que l’Angleterre possède de grands territoires incultes et qu’on pourrait mettre en valeur en moins d’un an. L’Angleterre dispose continuellement de stocks considérables de denrées alimentaires, elle possède un cheptel nombreux, elle peut tirer beaucoup de la pèche. Si l’Angleterre était bloquée elle pourrait très bien se nourrir elle-même, naturellement avec une ration moindre, comme par exemple celle de la population italienne. C’est pourquoi je dis qu’il est dangereux de répandre en Angleterre la légende que l’Angleterre ne peut pas faire la révolution parce qu’elle ne pourrait pas se suffire à elle-même. Naturellement il y aurait une très grosse disette, mais on ne mourrait pas de faim.

Le camarade roumain est le seul qui ait apporté des objections contre le programme d’action. Il a dit que nous n’avons pas voulu prendre position au sujet de sa proposition de combattre la taxe d’exportation levée par le gouvernement roumain. J’y étais très opposé, car qu’est-ce que cela signifierait si nous disions en Roumanie : nous ne voulons pas que l’Etat lève une taxe sur l’exportation des vivres ? Que ce soit l’acheteur étranger où le vendeur roumain qui paye cette taxe, je prétends que le prolétariat est incapable dans les deux cas de rien faire contre. En effet, supposons qu’elle soit payée par l’acheteur étranger, sa suppression obligerait l’Etat roumain à imposer davantage les ouvriers. Si c’est le vendeur roumain qui la paye, elle diminue les bénéfices des propriétaires fonciers, mais ne pèse pas sur les paysans qui ont très peu à vendre.

En terminant, je répéterai ce que j’ai déjà dit au début, à savoir qu’il ne suffit pas d’avoir fait un programme d’action. Il faut que les différents partis se rendent compte que la révolution est impossible sans l’appui des paysans pauvres. Ils ne doivent pas utiliser mécaniquement les instructions contenues dans le programme, mais les employer en analysant constamment la situation politique de la population rurale. C’est de cette façon que nous arriverons à organiser, à influencer et à révolutionner les larges couches de la population paysanne. (Applaudissements).

27e séance, 30 novembre 1922 : Rapport de la commission agraire[modifier le wikicode]

Marchlewski – président : Nous passons maintenant au point suivant de l’ordre du jour. Le camarade Varga rapportera sur les décisions de la nouvelle commission agraire qui a apporté quelques modifications à la première résolution.

Varga (Hongrie) —Camarades, comme vous le savez, une commission de rédaction a été nommée à l’issue des débats sur la question agraire pour apporter quelques modifications au projet primitif. Le travail de la Commission de rédaction a été surtout inspiré par une lettre du camarade Lénine. Dans cette lettre, qui est connue de la plupart des camarades — elle a été traduite en quatre langues — le camarade Lénine a dit qu’il faut éviter même l’apparence qu’entre la résolution du IIème Congrès sur la question agraire et le programme d’action agraire actuel, une contradiction existe, qui pourrait donner à nos ennemis la possibilité de nous faire le reproche que nous changeons notre opinion tous les deux ans. C’est pourquoi la commission de rédaction a comparé très soigneusement les thèses du IIème Congrès avec le programme d’action actuel et modifié tous les endroits où il pouvait y avoir la possibilité d’un malentendu. Les modifications ont déjà été réparties en langues allemande et française. Je vais les indiquer ici très rapidement.

La modification la plus importante est l’adjonction d’un sous-titre, le voici :

« Indication pour l’application des thèses agraires du IIème congrès. »

Nous voulons ainsi indiquer au moyen de ce sous-titre que notre programme d’action agraire est en rapport immédiat avec les thèses du IIème Congrès et qu’il ne veut en rien contredire ou modifier ces thèses.

Dans le paragraphe 1, une phrase a été ajoutée. A la fin de la définition de ce qu’on appelle un paysan pauvre, on a ajouté les mots suivants :

« Ou, qui est exploité d’une façon ou d’une autre par les grands propriétaires fonciers ou les capitalistes ».

Nous avons pensé aux catégories qui ne font aucun travail salarié, mais qui, soit par suite de leur endettement, soit au moyen du métayage ou du fermage, sont exploitées dans des conditions extraordinairement difficiles et appartiennent en fait au mi-prolétariat rural, malgré une apparence d’indépendance.

On a changé également le 2ème alinéa du paragraphe 5, qui parle du mouvement dans les pays coloniaux parce qu’il y là-bas deux types de pays. Le premier type est représenté par exemple par la Turquie où, actuellement, les paysans combattent avec les seigneurs féodaux contre l’impérialisme étranger. L’autre type, auquel nous avions pensé au début, est le type de l’Inde où les seigneurs féodaux combattent avec les impérialistes contre les paysans.

En Turquie, la lutte des paysans contre les seigneurs féodaux commencera lorsque sera finie la lutte de libération nationale, la lutte contre la France et l’Angleterre.

Dans l’Inde, la lutte contre l’impérialisme est en même temps une lutte contre les seigneurs féodaux. Nous avons divisé cette section en deux parties pour faire ressortir cette différence.

Dans le paragraphe 6, où nous disons que le parti communiste doit soutenir les grèves des ouvriers agricoles, nous avons ajouté la phrase suivante :

« Contrairement aux social démocrates, qui poignardent dans le dos le prolétariat agricole en lutte ».

Cela est arrivé dans un grand nombre de pays, surtout en Allemagne, où la socialdémocratie prit officiellement position contre les grèves et les ouvriers agricoles, parce que, disent-ils, l’agriculture est une « entreprise vitale ». C’est pourquoi nous voulions indiquer les différences entre l’attitude du Parti Communiste et celle du Parti social-démocrate.

Dans le paragraphe 7, nous avons ajouté une phrase qui avait disparu par erreur en inscrivant la résolution à la machine à écrire ; c’est la phrase suivante :

« Contre l’exploitation du capital usuraire, qui soumet les paysans pauvres à l’asservissement des dettes ».

Dans le paragraphe 9, nous avons ajouté les mots suivants là où nous disons qu’une réforme agraire bourgeoise ne peut rien offrir aux éléments purement prolétariens :

« Et demi prolétariens », étant donné qu’un certain nombre d’éléments demi prolétariens qui ne possèdent pas une quantité suffisante de moyens de production, lorsqu’ils reçoivent de la terre aux conditions bourgeoises tombent inévitablement dans la servitude vis-à-vis des banques et sont incapables d’améliorer leurs conditions d’existence.

Dans le paragraphe 10, nous efforçant de faire ressortir plus fermement l’unité de notre programme d’action avec les thèses du IIème Congrès, nous avons ajouté une longue citation de ces thèses à l’endroit où nous écrivons. « Dans le sens des thèses du IIème congrès ». Je pense qu’il n’est pas nécessaire de lire cette citation, étant donné que le texte est dans les mains des délégations.

Enfin, dans la conclusion dans le dernier paragraphe où nous disons que les partis agraires, les paysans riches et les grande propriétaires fonciers s’efforcent de faire disparaître toutes les contradictions d’intérêt apparentes ou accessoires entre les ouvriers agricoles et les petits paysans, nous avons supprimé les mots : « et accessoires ».

Nous nous sommes inspirés de ce fait qu’il s’agit ici d’antagonismes d’intérêts tout à fait accessoires dont nous pouvons tranquillement ne pas tenir compte. Pour ne pas donner à nos ennemis la possibilité de pouvoir dire que l’Internationale Communiste reconnaît elle même qu’entre les ouvriers agricoles et les petits paysans peuvent exister des contradictions d’intérêts, même accessoires, nous avons pensé, qu’il était préférable de supprimer ces deux mots.

Je crois donc que la crainte qu’exprimait le camarade Lénine, à savoir qu’une contradiction entre ce programme d’action et les thèses du IIème congrès puisse être aperçue, est ainsi complètement disparue.

En ce qui concerne la véritable différence qui existe entre les thèses du IIème Congrès et le programme d’action, c’est l’indication dans le programme d’action de la nécessité d’exploiter les besoins du prolétariat agricole ainsi que ceux de toutes les couches laborieuses à la campagne. Cette différence, ainsi que je l’ai dit dans mon premier rapport, est déterminée par la situation historique présente et par la nécessité d’exploiter, de la même façon que nous le faisons dans la tactique du front unique pour les ouvriers industriels, les intérêts quotidiens de la population laborieuse à la campagne. Cette différence est naturellement nécessaire, mais ce n’est, pas une différence essentielle mais une différence déterminée par le changement de la situation historique et des méthodes de la conquête des larges couches de la population rurale.

Je crois donc camarades, qu’après ces modifications rédactionnelles, le congrès peut accepter ce programme d’action en toute tranquillité et que les différents partis, s’ils se mettent au travail avec suffisamment d’ardeur, peuvent réaliser de grands succès sur cette base. (Applaudissements).

Marchlevski Président. — Nous allons passer au vote sur le programme d’action agraire. Si personne n’y fait d’objection, je ferai voter la résolution avec les modifications apportées par le camarade Varga.

Pas d’objection.

Nous allons passer au vote.

La résolution est adoptée avec les modifications.

27e séance, suite : Lecture du Programme d’action agraire de l’IC par son rapporteur, Eugène Varga[modifier le wikicode]

Le programme agraire sera donc rédigé tout de suite :

Programme d’action agraire de l’Internationale Communiste.

Indications pour l’application des thèses sur la question agraire du IIème Congrès.

Les bases de nos rapports vis à vis des masses laborieuses de la campagne ont déjà été fixées dans les thèses agraires du IIème Congrès. Dans la phase actuelle de l’offensive du Capital, la question agraire acquiert une importance primordiale. Le IVème Congrès demande à tous les partis de s’efforcer de gagner les masses laborieuses à la campagne et établit pour ce travail les règles suivantes :

1. La grande masse du prolétariat agricole et des paysans pauvres qui ne possèdent pas assez de terre et sont obligés de travailler une partie de leur temps comme salariés, ou qui sont exploités d’une manière ou d’une autre par les propriétaires fonciers et les capitalistes, ne peut être libérée définitivement de son état actuel de servitude et de guerres inévitables dans le régime capitaliste que par une révolution mondiale, une révolution qui confisquera sans indemnité et mettra à la disposition des ouvriers la terre avec tous les moyens de production, et qui instaurera à la place de l’Etat des propriétaires fonciers et des capitalistes l’Etat Soviétiste des ouvriers et des paysans et préparera ainsi la voie au communisme.

2. — Dans la lutte contre l’Etat des capitalistes et des propriétaires fonciers, les petits paysans et les petits fermiers sont les camarades de combat naturels du prolétariat industriel et agricole. Pour relier leur mouvement révolutionnaire à la lutte du prolétariat à la ville et à la campagne, la chute de l’Etat bourgeois est nécessaire, ainsi que la prise du pouvoir politique par le prolétariat industriel, l’expropriation des moyens de production, ainsi que de la terre, et la suppression de la domination des agrariens et de la bourgeoisie à la campagne.

3. — Afin de gagner à une neutralité bienveillante, les moyens paysans et les ouvriers agricoles ainsi que les paysans pauvres à la révolution, les moyens paysans doivent être arrachés à l’influence des paysans riches liés aux grands propriétaires fonciers. Ils doivent comprendre qu’ils doivent lutter avec le parti révolutionnaire du prolétariat, le parti communiste, étant donné que leurs intérêts s’accordent non avec ceux des gros paysans riches, mais avec ceux du prolétariat. Pour arracher ces paysans à la direction des grands propriétaires fonciers et des paysans riches, il ne suffit pas d’établir un programme ou de faire de la propagande: le parti communiste doit prouver par une action continue qu’il est véritablement le parti de tous les opprimés.

4. C’est pourquoi le parti communiste doit se mettre à la tête de toutes les luttes que les masses laborieuses à la campagne mènent contre les classes dominantes. Exploitant les intérêts quotidiens de ces masses, le parti communiste réunit les forces dispersées des travailleurs à campagne, élève leur volonté combative, soutient leur lutte en la faisant appuyer par le prolétariat industriel, et la mène vers des buts conduisant dans la voie de la révolution. Cette lutte menée en commun avec les ouvriers industriels, le fait, que les ouvriers industriels luttent sous la direction du Parti communiste pour les intérêts du prolétariat agricole et des paysans pauvres, convaincra ces derniers que, premièrement, seul, le parti communiste les défend réellement, tandis que tous les autres partis tant agraires que social-démocrates, malgré leurs phrases démagogiques ne veulent que les tromper, et servent en réalité les intérêts des capitalistes et des grands propriétaires fonciers, et, deuxièmement, qu’à l’intérieur du capitalisme une amélioration véritable de la situation des ouvriers et des paysans pauvres est impossible.

5. Nos revendications concrètes doivent se conformer à l’état de dépendance et d’oppression dans lequel se trouvent les ouvriers, les petits et moyens paysans à l’égard des capitalistes et des grands propriétaires fonciers, comme aussi à leurs intérêts réels.

Dans les pays coloniaux ayant une population paysanne opprimée, la lutte de libération nationale sera ou bien conduite par toute la population, comme c’est le cas par exemple, en Turquie, et, dans ce cas la lutte des paysans opprimés contre les grands propriétaires fonciers commence inévitablement après la victoire de la lutte de libération nationale, ou bien les seigneurs féodaux s’allient avec les impérialistes étrangers, comme c’est le cas par exemple dans l’Inde, et alors la lutte sociale des paysans opprimés concorde avec la lutte de libération nationale.

Dans les territoires ou il reste encore de fortes survivances du féodalisme, où la révolution bourgeoise n’a pas été terminée et où des privilèges féodaux sont encore liés à la propriété foncière, ces privilèges doivent disparaître au cours de la lutte pour la possession de la terre, qui est ici d’une importance décisive.

6. Dans tous les pays, où il existe un prolétariat agricole, cette couche sociale constitue le facteur le plus important, du mouvement révolutionnaire à la campagne. Le parti communiste soutient, organise, approfondit, contrairement aux social-démocrates qui poignardent dans le dos le prolétariat agricole en lutte, toutes les luttes de ce prolétariat pour l’amélioration de sa situation politique, économique et sociale. Pour hâter le révolutionnement du prolétariat rural et pour l’éduquer pour la lutte en vue de la dictature du prolétariat qui seule, peut le libérer définitivement de l’exploitation dont il souffre, le parti communiste soutient le prolétariat agricole dans sa lutte pour : l’élévation du salaire réel, l’amélioration des conditions de travail, de logement et de culture.

Pleine liberté de réunion, d’association, de grèves, de la presse etc...

pour obtenir au moins les mêmes droits que les ouvriers industriels : journée de 8 heures, assurance contre les accidents, assurance contre la vieillesse, interdiction du travail des enfants, construction d’écoles techniques, etc... et au moins extension de la législation sociale dont jouit actuellement le prolétariat.

7. Le parti communiste luttera jusqu’au jour où les paysans seront définitivement libérés par la révolution sociale contre toutes les sortes d’exploitation des petits et moyens paysans par le capitalisme, contre l’exploitation par les usuriers, qui jettent les paysans pauvres dans la servitude de l’endettement.

Contre l’exploitation par le capital commercial qui achète à bon marché les légers excédents de production des petits paysans et les revend à des prix élevés au prolétariat des villes.

Le parti communiste lutte contre ce capital commercial parasitaire et pour la liaison immédiate des coopératives des petits paysans avec les coopératives de consommation du prolétariat industriel, contre l’exploitation par le capital industriel, qui utilise son monopole pour élever artificiellement les prix des produits industriels. C’est pourquoi nous luttons pour la fourniture aux petits paysans de moyens de production (engrais artificiels, machines etc...) à bon marché. Les conseils d’entreprises industrielles devront contribuer à cette lutte en établissant le contrôle des prix, contre l’exploitation du monopole privé des compagnies de chemins de fer, comme cela existe surtout dans les pays anglo-saxons; contre l’exploitation de l’Etat capitaliste , dont le système fiscal surcharge les petits paysans en faveur des grands propriétaires fonciers. Nous réclamons la complète liberté d’impôt pour les petits paysans.

8. Mais l’exploitation la plus grave dont souffrent les paysans pauvres dans les pays non coloniaux provient de la propriété privée du sol des grands propriétaires fonciers. Pour pouvoir utiliser pleinement leurs forces de travail et surtout pour pouvoir vivre, les paysans pauvres sont obligés de travailler chez les grands propriétaires fonciers pour des salaires de famine ou d’affermer ou d’acheter de la terre à des prix très élevés, par quoi une partie du salaire des petits paysans est accaparée par les grands propriétaires fonciers. L’absence de terres oblige les paysans pauvres à se soumettre à l’esclavage moyenâgeux sous des formes modernes. C’est pourquoi le parti communiste lutte pour la confiscation de la terre avec tout l’inventaire au profit de ceux qui la cultivent réellement. Jusqu’à ce que cela soit réalisé par la révolution prolétarienne, le parti communiste soutient la lutte des paysans pauvres pour : a) l’amélioration des conditions d’existence des métayers, par la réduction de la part qui revient aux propriétaires, b) la réduction des fermages pour les petits fermiers, la remise obligatoire d’une indemnité pour toutes les améliorations apportées à la terre par le fermier au cours du contrat de fermage, etc... Les syndicats des travailleurs agricoles dirigés par les communistes soutiendront les petits fermiers dans cette lutte et n’accepteront de faire aucun travail dans les champs qui auront été enlevés aux petits fermiers par les propriétaires fonciers à cause de litiges se rapportant au fermage, c) la cession de terres, de bétail et de machines à tous les paysans pauvres à des conditions permettant d’assurer leur gagne-pain, et non pas de parcelles de terres qui lient leurs propriétaires à la glèbe et les obligent à chercher du travail pour des salaires de famine chez des propriétaires ou paysans voisins, mais de quantité de terres suffisantes pour pouvoir employer toute l’activité des paysans. Dans cette question, il faudra avant tout tenir compte des intérêts des ouvriers agricoles.

9. Les classes dominantes essayent d’étouffer le caractère révolutionnaire du mouvement des paysans au moyen de réformes agraires bourgeoises, de répartitions de terres entre les éléments dirigeants de la classe paysanne. Elles ont réussi à provoquer un fléchissement temporaire du mouvement révolutionnaire à la campagne. Mais toute réforme agraire bourgeoise se heurte aux limites du capitalisme. La terre n’est donnée que contre indemnité et à des personnes qui sont déjà en possession de moyens de production. Une réforme agraire bourgeoise n’a absolument rien à offrir aux éléments prolétariens ou semiprolétariens. Les conditions extrêmement sévères qui sont imposées aux paysans recevant de la terre lors d’une réforme agraire bourgeoise et qui par suite n’ont pas pour résultat d’améliorer véritablement leur situation, mais au contraire de les plonger dans l’esclavage de l’endettement, mènent inévitablement à une recrudescence du mouvement révolutionnaire et à une aggravation de l’antagonisme existant entre les petits et gros paysans de même qu’entre les ouvriers agricoles qui ne reçoivent pas de terre et perdent des occasions de travail par suite de la division des grandes propriétés.

10. Seule, une révolution prolétarienne pourra apporter la libération définitive des couches laborieuses à la campagne, révolution qui confisquera sans indemnité aucune la terre des grands propriétaires fonciers ainsi que tout l’inventaire, mais laissera intactes les terres cultivées par les paysans, et délivrera ceux-ci de toutes charges, fermages, hypothèques, restrictions féodales qui pèsent sur eux, et soutiendra de toutes les façons les couches inférieures de la classe paysanne.

Les paysans qui cultivent la terre décideront eux -mêmes de la façon dont la terre enlevée aux grands propriétaires fonciers devra être exploitée. A ce sujet les thèses du IIe Congrès déclarent ce qui suit :

« Pour les pays capitalistes les plus développés, l’Internationale Communiste croit qu’il est bon de maintenir le plus possible les grandes exploitations agraires et de les mener sur le modèle des domaines soviétistes en Russie.

Il faudra également soutenir la création, de l’exploitation collective (coopératives agraires, communautés agricoles). Le maintien des grandes exploitations agricoles sauvegarde les intérêts des couches révolutionnaires de la population paysanne, des ouvriers agricoles et des petits propriétaires semi-prolétariens qui sont obligés de gagner leur vie en travaillant une partie de leur temps dans les grandes exploitations agricoles. D’autre part, la nationalisation des grandes exploitations agricoles rend la population des villes au moins en partie dans la question du ravitaillement, indépendante des paysans.

Là où existent encore des survivances du féodalisme, des servitudes, ou le système du métayage, il peut être nécessaire, dans certaines circonstances, de remettre aux paysans une partie de la terre des grandes propriétés.

Dans les pays où les grandes exploitations agricoles ne jouent qu’un rôle relativement petit, et où par contre il existe une grande quantité de petits propriétaires paysans qui veulent conserver la terre, la répartition de la terre des grandes propriétés est le meilleur moyen de gagner les paysans à la révolution, tandis que le maintien des grandes exploitations n’est pas d’une importance primordiale pour le ravitaillement des villes.

Là où se produit une répartition des grandes propriétés, entre les paysans, il faudra tenir compte en premier lieu des intérêts du prolétariat agricole. »[ ?]

*

* *

Tous les communistes qui travaillent dans l’agriculture ou dans les entreprises industrielles liées à l’agriculture, sont tenus d’entrer dans les organisations des ouvriers agricoles et d’y grouper et de conduire les éléments révolutionnaires, en vue de transformer ces organisations en organes révolutionnaires. Là où il n’existe aucun syndicat, c’est le devoir des communistes de travailler à leur création. Dans les organisations jaunes, fascistes et contre-révolutionnaires, ils doivent mener un travail d’éducation intense en vue de détruire ces organisations contre-révolutionnaires. Dans les grandes entreprises agricoles, ils doivent créer des conseils d‘entreprise, en vue de la défense des intérêts ouvriers, du contrôle de production et pour empêcher l’introduction du système d’exploitation extensive. Ils doivent appeler le prolétariat industriel au secours du prolétariat agricole en lutte et incorporer celui-ci dans le mouvement des conseils d’entreprises industrielles.

Etant donné l’importance formidable des paysans pauvres pour le mouvement révolutionnaire, c’est le devoir des communistes d’entrer dans les organisations des petits paysans (coopératives de production, de consommation et de crédit) pour les révolutionner, pour faire disparaître les antagonismes apparents d’intérêt, entre les ouvriers agricoles et les paysans pauvres, antagonismes grossis artificiellement par les propriétaires fonciers et les paysans riches, et relier étroitement l’action de ces organisations avec le mouvement du prolétariat rural et industriel.

Seule, la collaboration de toutes les forces révolutionnaires de la ville et de la campagne permettra d’opposer une résistance victorieuse à l’offensive du capitalisme et, passant de la défensive à l’offensive, d’obtenir la victoire finale.