Désarmement et politique coloniale

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Cher camarade, - Le colonel A. Keene, écrivant dans Justice du 11 mai, fait remarquer que j'ai déclaré que si les États d'Europe s'entendaient en matière de désarmement, ils pourraient procéder beaucoup plus énergiquement que jusqu'à présent à l'ouverture du territoire de l'Asie. Il est d'avis que c'est le contraire. Le désarmement doit amener les peuples d'Asie à se soulever pour obtenir leur indépendance totale vis-à-vis de l'Europe.

Cet argument serait correct si j'entendais par désarmement l'abandon complet de toutes les armes. Mais ce n'est pas du tout le cas. Tant que le capitalisme existera, il y aura des antagonismes entre les nations et la paix éternelle restera un rêve. Au début de mon article, j'ai souligné que l'idée du désarmement, prise au sens littéral, était irréalisable. Le désarmement dans la société capitaliste ne peut, dans le meilleur des cas, être réalisé que de cette manière, en diminuant de plus en plus l'étendue des armements et surtout en interdisant l'introduction de nouveaux armements.

Le désarmement sous cette forme n'empêche nullement les nations capitalistes de s'ouvrir les terres de l'Extrême-Orient. L'Empire allemand, par exemple, compte aujourd'hui 600 000 soldats dans son armée permanente. Si ce nombre était réduit à 300 000, cette armée serait encore quatre fois plus importante que celle des États-Unis ; et pourtant, les États-Unis sont assez forts aujourd'hui pour jouer un rôle très énergique dans l'ouverture de l'Asie orientale aux fins du capitalisme.

Si l'on utilise le mot désarmement dans ce sens, comme je l'ai fait en le traitant dans mon article, alors disparaît l'apparente contradiction que le colonel Keene a cru y découvrir.

Je suis, cher camarade, fraternellement vôtre,

K. Kautsky