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La rupture au sein de la [[Ligue_de_la_Paix_et_de_la_Liberté|Ligue de la Paix et de la Liberté]] entre la minorité socialiste et le radicalisme bourgeois se produit au congrès de Berne, en septembre 1868. Les [[Socialistes_révolutionnaires|socialistes révolutionnaires]] claquent la porte et décident de fonder l'Alliance internationale de la démocratie socialiste, laquelle demande son adhésion en bloc à l'[[Association_internationale_des_travailleurs|Association internationale des travailleurs]]. L'Alliance est la face publique de la Fraternité Internationale, les deux structures existant parallèlement, l'une en plein jour, l'autre dans l'ombre. L'Alliance fonctionne avec un «&nbsp;Bureau central&nbsp;» qui réside à Genève, des groupes nationaux pour chaque pays et des groupes locaux. Le groupe local de Genève est constitué le 21 novembre 1868. Il compte d'emblée 145 membres. En février 1869, Bakounine se rend au Locle avec l'objectif d'y constituer un groupe. [[James_Guillaume|James Guillaume]], [[Adhémar_Schwitzguébel|Adhémar Schwitzguébel]] ou encore [[Auguste_Spichiger|Auguste Spichiger]] en font partie. Le ''«&nbsp;socialisme [[Anti-autoritaire|anti-autoritaire]]&nbsp;»'' trouve dans le Jura suisse une implantation forte et durable grâce à ces militants de la Première Internationale. On a pu discuter des raisons du succès des idées bakouniniennes auprès de ces ouvriers et de ces artisans jurassiens, souvent pour en conclure que les jurassiens avaient sans doute davantage influencé Bakounine que le contraire<ref>Voir par exemple [[Jacques Droz]], ''Le socialisme suisse des origines à 1914'', dans Jacques Droz (dir.), ''Histoire générale du socialisme'', volume 2, pages 336-337.PUF, Quadrige, 1997 [1974].</ref>. Cependant, la demande d'adhésion de l'Alliance est rejetée par le Conseil Général de l'AIT.<ref>Conseil général de l'AIT, ''[http://marxists.anu.edu.au/archive/marx/iwma/documents/1868/bakunin-resolution.htm Résolution sur l'Alliance internationale de la démocratie socialiste]'', 22 décembre 1868</ref> Celui-ci considère en effet ne pas pouvoir intégrer une organisation internationale dont les structures feraient en quelque sorte double emploi avec celles, fédérations régionales ou locales, de l'AIT. Après de vives discussions internes, les alliancistes reconnaissent le bien-fondé du raisonnement du Conseil Général et le Bureau central de l’Alliance est dissout en février 1869, les groupes divers dont elle était composée adhérant à l'Internationale séparément. Par courrier daté du 28 juillet 1869, [[Johann_Georg_Eccarius|Johann Georg Eccarius]], au nom du Conseil Général, accepte l'adhésion du groupe de Genève de l'Alliance comme section de l'Internationale.
 
La rupture au sein de la [[Ligue_de_la_Paix_et_de_la_Liberté|Ligue de la Paix et de la Liberté]] entre la minorité socialiste et le radicalisme bourgeois se produit au congrès de Berne, en septembre 1868. Les [[Socialistes_révolutionnaires|socialistes révolutionnaires]] claquent la porte et décident de fonder l'Alliance internationale de la démocratie socialiste, laquelle demande son adhésion en bloc à l'[[Association_internationale_des_travailleurs|Association internationale des travailleurs]]. L'Alliance est la face publique de la Fraternité Internationale, les deux structures existant parallèlement, l'une en plein jour, l'autre dans l'ombre. L'Alliance fonctionne avec un «&nbsp;Bureau central&nbsp;» qui réside à Genève, des groupes nationaux pour chaque pays et des groupes locaux. Le groupe local de Genève est constitué le 21 novembre 1868. Il compte d'emblée 145 membres. En février 1869, Bakounine se rend au Locle avec l'objectif d'y constituer un groupe. [[James_Guillaume|James Guillaume]], [[Adhémar_Schwitzguébel|Adhémar Schwitzguébel]] ou encore [[Auguste_Spichiger|Auguste Spichiger]] en font partie. Le ''«&nbsp;socialisme [[Anti-autoritaire|anti-autoritaire]]&nbsp;»'' trouve dans le Jura suisse une implantation forte et durable grâce à ces militants de la Première Internationale. On a pu discuter des raisons du succès des idées bakouniniennes auprès de ces ouvriers et de ces artisans jurassiens, souvent pour en conclure que les jurassiens avaient sans doute davantage influencé Bakounine que le contraire<ref>Voir par exemple [[Jacques Droz]], ''Le socialisme suisse des origines à 1914'', dans Jacques Droz (dir.), ''Histoire générale du socialisme'', volume 2, pages 336-337.PUF, Quadrige, 1997 [1974].</ref>. Cependant, la demande d'adhésion de l'Alliance est rejetée par le Conseil Général de l'AIT.<ref>Conseil général de l'AIT, ''[http://marxists.anu.edu.au/archive/marx/iwma/documents/1868/bakunin-resolution.htm Résolution sur l'Alliance internationale de la démocratie socialiste]'', 22 décembre 1868</ref> Celui-ci considère en effet ne pas pouvoir intégrer une organisation internationale dont les structures feraient en quelque sorte double emploi avec celles, fédérations régionales ou locales, de l'AIT. Après de vives discussions internes, les alliancistes reconnaissent le bien-fondé du raisonnement du Conseil Général et le Bureau central de l’Alliance est dissout en février 1869, les groupes divers dont elle était composée adhérant à l'Internationale séparément. Par courrier daté du 28 juillet 1869, [[Johann_Georg_Eccarius|Johann Georg Eccarius]], au nom du Conseil Général, accepte l'adhésion du groupe de Genève de l'Alliance comme section de l'Internationale.
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Le problème n'est toutefois pas résolu et la question de l'Alliance reste jusqu'à l'exclusion de Bakounine et de Guillaume au congrès de La Haye en 1872, jusqu'à la scission définitive, un point de crispation considérable. Il suffit pour s'en convaincre de consulter le volumineux rapport, plus volumineux encore que le compte-rendu intégral du congrès de La Haye, que le Conseil Général consacre à l'Alliance<ref>''[http://marxists.anu.edu.au/archive/marx/iwma/documents/1872/hague-conference/bakunin-report.htm Report on the Alliance presented in the name of the General Council to the Hague Congress]'', fin août 1872</ref>. Marx est persuadé que l'Alliance n'est pas véritablement dissoute, ce en quoi il n'a pas tort puisque la Fraternité Internationale existe encore. Marx et ses amis, dans le feu de la polémique, tendent cependant à exagérer les machinations de l'Alliance et à minimiser ce qui pouvait relever de véritables divergences théoriques. Ainsi, par exemple, la réception en Espagne du programme de l'Alliance et l'adhésion que ce programme y trouve ne doivent rien à l'existence de supposées conspirations&nbsp;: ''la Alianza'' en Espagne est une organisation à part entière, sans lien organisationnel avec l'Alliance bakouninienne. Par ailleurs, selon Arthur Lehning, l'Alliance de Bakounine ne serait, dans son fonctionnement, au fond pas tellement différente du réseau que Marx entretient par voie épistolaire avec divers correspondants en Europe.
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Le problème n'est toutefois pas résolu et la question de l'Alliance reste jusqu'à l'exclusion de Bakounine et de Guillaume au congrès de La Haye en 1872, jusqu'à la scission définitive, un point de crispation considérable. Il suffit pour s'en convaincre de consulter le volumineux rapport, plus volumineux encore que le compte-rendu intégral du congrès de La Haye, que le Conseil Général consacre à l'Alliance<ref>''[http://marxists.anu.edu.au/archive/marx/iwma/documents/1872/hague-conference/bakunin-report.htm Report on the Alliance presented in the name of the General Council to the Hague Congress]'', fin août 1872</ref>. Marx est persuadé que l'Alliance n'est pas véritablement dissoute, ce en quoi il n'a pas tort puisque la Fraternité Internationale existe encore. De son côté, Bakounine croit que Marx reste secrètement membre de la [[Ligue_des_communistes|''Ligue des communistes'']], qui a pourtant bel et bien disparu depuis longtemps.
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Mais Marx et ses amis, dans le feu de la polémique, tendent à exagérer les machinations de l'Alliance et à minimiser ce qui pouvait relever de véritables divergences théoriques. Ainsi, par exemple, la réception en Espagne du programme de l'Alliance et l'adhésion que ce programme y trouve ne doivent rien à l'existence de supposées conspirations&nbsp;: ''la Alianza'' en Espagne est une organisation à part entière, sans lien organisationnel avec l'Alliance bakouninienne. Par ailleurs, selon Arthur Lehning, l'Alliance de Bakounine ne serait, dans son fonctionnement, au fond pas tellement différente du réseau que Marx entretient par voie épistolaire avec divers correspondants en Europe.
    
En janvier 1869 est fondée, entre les différentes sections suisses de langue française, la fédération romande. Son siège fédéral est fixé à Genève pour l'année suivante. Elle se dote d'un règlement et décide la publication d'un journal, ''L'Égalité''. Au sein d'un comité de rédaction de neuf membres, Perron et Bakounine abattent le plus gros du travail. Les collaborations de [[Benoît_Malon|Benoît Malon]], [[Eugène_Varlin|Eugène Varlin]], [[Elisée_Reclus|Elisée Reclus]], [[Hermann_Jung|Hermann Jung]] ou encore Eccarius ont été sollicitées et obtenues.
 
En janvier 1869 est fondée, entre les différentes sections suisses de langue française, la fédération romande. Son siège fédéral est fixé à Genève pour l'année suivante. Elle se dote d'un règlement et décide la publication d'un journal, ''L'Égalité''. Au sein d'un comité de rédaction de neuf membres, Perron et Bakounine abattent le plus gros du travail. Les collaborations de [[Benoît_Malon|Benoît Malon]], [[Eugène_Varlin|Eugène Varlin]], [[Elisée_Reclus|Elisée Reclus]], [[Hermann_Jung|Hermann Jung]] ou encore Eccarius ont été sollicitées et obtenues.
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L'idée centrale chez Bakounine est la liberté, le bien suprême que le révolutionnaire doit rechercher à tout prix. C'est avant tout au nom de cette liberté qu'il considère qu'il faut abattre ces obstacles que sont Dieu, l'État, et le Capital.
 
L'idée centrale chez Bakounine est la liberté, le bien suprême que le révolutionnaire doit rechercher à tout prix. C'est avant tout au nom de cette liberté qu'il considère qu'il faut abattre ces obstacles que sont Dieu, l'État, et le Capital.
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Certes Bakounine a rationalisé sa définition de la [[liberté|liberté]], et n'en faisant pas un mot creux comme les [[Démocratie_bourgeoise|démocrates bourgeois]]. Sa notion de liberté s'est séparée de celle des [[Lumières_(philosophie)|Lumières]] et de la [[Révolution_française|Révolution française]], dans ce qu'elle n'est pas une affaire individuelle mais une question sociale. Ainsi, dans ''[[Dieu_et_l'État|Dieu et l'État]]'' en 1882, il réfute [[Jean-Jacques_Rousseau|Jean-Jacques Rousseau]]&nbsp;: le bon sauvage, qui aliène sa liberté à partir du moment où il vit en société, n'a jamais existé. Au contraire, c'est le fait social qui crée la liberté&nbsp;: ''«&nbsp;Je ne deviens libre vraiment que par la liberté d'autres, de sorte que plus nombreux sont les hommes libres qui m'entourent et plus profonde et plus large est leur liberté, et plus étendue, plus profonde et plus large devient ma liberté.&nbsp;»''<ref>Michel Bakounine, ''L'Empire Knouto-Germanique et la révolution sociale 1870-1871'', [[Institut international d'histoire sociale]], Champ libre, 1982, page 173.</ref> La véritable liberté n'est pas possible sans l'égalité de fait (économique, politique et sociale).
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Certes Bakounine a rationalisé sa définition de la [[Liberté|liberté]], et n'en faisant pas un mot creux comme les [[Démocratie_bourgeoise|démocrates bourgeois]]. Sa notion de liberté s'est séparée de celle des [[Lumières_(philosophie)|Lumières]] et de la [[Révolution_française|Révolution française]], dans ce qu'elle n'est pas une affaire individuelle mais une question sociale. Ainsi, dans ''[[Dieu_et_l'État|Dieu et l'État]]'' en 1882, il réfute [[Jean-Jacques_Rousseau|Jean-Jacques Rousseau]]&nbsp;: le bon sauvage, qui aliène sa liberté à partir du moment où il vit en société, n'a jamais existé. Au contraire, c'est le fait social qui crée la liberté&nbsp;: ''«&nbsp;Je ne deviens libre vraiment que par la liberté d'autres, de sorte que plus nombreux sont les hommes libres qui m'entourent et plus profonde et plus large est leur liberté, et plus étendue, plus profonde et plus large devient ma liberté.&nbsp;»''<ref>Michel Bakounine, ''L'Empire Knouto-Germanique et la révolution sociale 1870-1871'', [[Institut international d'histoire sociale]], Champ libre, 1982, page 173.</ref> La véritable liberté n'est pas possible sans l'égalité de fait (économique, politique et sociale).
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Mais l'idée de liberté chez Bakounine reste quelque chose de très émotionnel. Il n'hésitait pas à écrire : ''«&nbsp;Il est fort possible que Marx puisse s’élever théoriquement à un système encore plus rationnel de la liberté que Proudhon, mais l’instinct de la liberté lui manque : il est, de la tête aux pieds, un autoritaire. »<ref name="NoticeBio">https://fr.wikisource.org/wiki/Bakounine/Œuvres/TomeII2</ref>''
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Mais l'idée de liberté chez Bakounine reste quelque chose de très émotionnel. Il n'hésitait pas à écrire&nbsp;: ''«&nbsp;Il est fort possible que Marx puisse s’élever théoriquement à un système encore plus rationnel de la liberté que Proudhon, mais l’instinct de la liberté lui manque&nbsp;: il est, de la tête aux pieds, un autoritaire.&nbsp;»<ref name="NoticeBio">https://fr.wikisource.org/wiki/Bakounine/Œuvres/TomeII2</ref>''
    
=== Matérialisme et athéisme ===
 
=== Matérialisme et athéisme ===
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Bakounine défendait une conception [[Matérialiste|matérialiste]] du monde. Il reprochait par exemple à l'anarchiste [[Proudhon|Proudhon]] d'être ''«&nbsp;resté toute sa vie un idéaliste incorrigible&nbsp;»'', et reconnaissait à [[Marx|Marx]] sa pertinence dans ce domaine :
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Bakounine défendait une conception [[Matérialiste|matérialiste]] du monde. Il reprochait par exemple à l'anarchiste [[Proudhon|Proudhon]] d'être ''«&nbsp;resté toute sa vie un idéaliste incorrigible&nbsp;»'', et reconnaissait à [[Marx|Marx]] sa pertinence dans ce domaine&nbsp;:
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<blockquote>''«&nbsp;Marx, comme penseur, est dans la bonne voie. Il a établi comme principe que toutes les évolutions politiques, religieuses et juridiques dans l’histoire sont, non les causes, mais les effets des évolutions économiques. C’est une grande et féconde pensée, qu’il n’a pas absolument inventée&nbsp;: elle a été entrevue, exprimée en partie, par bien d’autres que lui&nbsp;; mais enfin, à lui appartient l’honneur de l’avoir solidement établie et de l’avoir posée comme base de tout son système économique.&nbsp;»<ref name="NoticeBio" />''</blockquote>  
''«&nbsp;Marx, comme penseur, est dans la bonne voie. Il a établi comme principe que toutes les évolutions politiques, religieuses et juridiques dans l’histoire sont, non les causes, mais les effets des évolutions économiques. C’est une grande et féconde pensée, qu’il n’a pas absolument inventée : elle a été entrevue, exprimée en partie, par bien d’autres que lui ; mais enfin, à lui appartient l’honneur de l’avoir solidement établie et de l’avoir posée comme base de tout son système économique.&nbsp;»<ref name="NoticeBio" />''
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Bakounine était par conséquent [[Athée|athée]], Dieu n'étant pour lui que ''«&nbsp;l'être universel, éternel, immuable, créé par la double action de l'imagination religieuse et de la faculté abstractive de l'homme&nbsp;»''<ref>Michel Bakounine, ''Théorie générale de la révolution'', textes assemblés et annotés par Étienne Lesourd, d'après G.P. Maximow, Éditions Les Nuits Rouges, 2008, page 103.</ref>, pure spéculation dont l'origine se trouve dans la dépendance et la peur de phénomènes naturels inexpliqués. Au nom de la liberté, Bakounine attachait une grande importance au combat contre la soumission à l'idée de Dieu&nbsp;: ''«&nbsp;Dieu est, donc l'homme est esclave. L'homme est libre, donc il n'y a point de Dieu. Je défie qui que ce soit de sortir de ce cercle, et maintenant, choisissons.&nbsp;''»<ref>Michel Bakounine, ''Catéchisme de la franc-maçonnerie moderne''. Cité par Jean Préposiet, ''Histoire de l'anarchisme'', Tallandier, 1993.</ref>. On peut voir aussi dans le titre de sa brochure [[Dieu_et_l'Etat|''Dieu et l'Etat'']] la centralité qu'avait la critique de la religion chez Bakounine, et qu'elle gardera globalement dans le mouvement [[Anarchiste|anarchiste]] (avec par exemple le slogan [[Ni_Dieu_ni_maître|''Ni Dieu ni maître'']]).
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Bakounine était par conséquent [[athée|athée]], Dieu n'étant pour lui que ''«&nbsp;l'être universel, éternel, immuable, créé par la double action de l'imagination religieuse et de la faculté abstractive de l'homme&nbsp;»''<ref>Michel Bakounine, ''Théorie générale de la révolution'', textes assemblés et annotés par Étienne Lesourd, d'après G.P. Maximow, Éditions Les Nuits Rouges, 2008, page 103.</ref>, pure spéculation dont l'origine se trouve dans la dépendance et la peur de phénomènes naturels inexpliqués. Au nom de la liberté, Bakounine attachait une grande importance au combat contre la soumission à l'idée de Dieu : ''«&nbsp;Dieu est, donc l'homme est esclave. L'homme est libre, donc il n'y a point de Dieu. Je défie qui que ce soit de sortir de ce cercle, et maintenant, choisissons.&nbsp;''»<ref>Michel Bakounine, ''Catéchisme de la franc-maçonnerie moderne''. Cité par Jean Préposiet, ''Histoire de l'anarchisme'', Tallandier, 1993.</ref>. On peut voir aussi dans le titre de sa brochure [[Dieu_et_l'Etat|''Dieu et l'Etat'']] la centralité qu'avait la critique de la religion chez Bakounine, et qu'elle gardera globalement dans le mouvement [[anarchiste|anarchiste]] (avec par exemple le slogan [[Ni_Dieu_ni_maître|''Ni Dieu ni maître'']]).
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Par contraste, on peut souligner que dans la propagande [[marxiste|marxiste]], la critique de la [[religion|religion]] n'a pas ce rôle central.
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Par contraste, on peut souligner que dans la propagande [[Marxiste|marxiste]], la critique de la [[Religion|religion]] n'a pas ce rôle central.
    
=== L'organisation et l'action révolutionnaire ===
 
=== L'organisation et l'action révolutionnaire ===
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Bakounine reprochait à Marx une trop forte [[Centralisme|centralisation]] autour du Conseil général de Londres, prônant un fonctionnement plus fédéral. Certains [[Anarchistes|anarchistes]] ont défendu par la suite que le marxisme conduisait à la notion d'[[Avant-garde|avant-garde]] [[Léniniste|léniniste]] et que le léninisme conduisait au [[Stalinisme|stalinisme]].
 
Bakounine reprochait à Marx une trop forte [[Centralisme|centralisation]] autour du Conseil général de Londres, prônant un fonctionnement plus fédéral. Certains [[Anarchistes|anarchistes]] ont défendu par la suite que le marxisme conduisait à la notion d'[[Avant-garde|avant-garde]] [[Léniniste|léniniste]] et que le léninisme conduisait au [[Stalinisme|stalinisme]].
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Les marxistes répondent généralement que l'avant-garde est une réalité de fait dans tout mouvement politique, et que la méthode de Bakounine centrée sur l'insurrection encouragée par des sociétés secrètes ne permet pas l'émancipation des travailleur-se-s.
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Les marxistes répondent généralement que l'avant-garde est une réalité de fait dans tout mouvement politique, et que la méthode de Bakounine centrée sur l'insurrection encouragée par des [[sociétés_secrètes|sociétés secrètes]] ne permet pas l'émancipation des travailleur-se-s.
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=== Paysannerie et prolétariat ===
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=== Lutte des classes ===
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Les marxistes attribuent au prolétariat le rôle de seule [[Classe_révolutionnaire|classe révolutionnaire]], même s'ils considèrent que la paysannerie peut être entraînée dans un mouvement révolutionnaire si le prolétariat offre une perspective différente de celle de la bourgeoisie. Bakounine était moins tranché. Il disait que seule l'union entre les mondes rural et industriel est riche de potentialités révolutionnaires, et que la paysannerie était source de révolte anti-étatique, et pouvait trouver sa complémentarité dans l'esprit de [[discipline|discipline]] des ouvriers.
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Les marxistes attribuent au prolétariat le rôle de seule [[Classe_révolutionnaire|classe révolutionnaire]], même s'ils considèrent que la paysannerie peut être entraînée dans un mouvement révolutionnaire si le prolétariat offre une perspective différente de celle de la bourgeoisie. Bakounine était moins tranché. Il disait que seule l'union entre les mondes rural et industriel est riche de potentialités révolutionnaires, et que la paysannerie était source de révolte anti-étatique, et pouvait trouver sa complémentarité dans l'esprit de [[Discipline|discipline]] des ouvriers.
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Lors de sa demande collective d’adhésion à l’AIT, l'Alliance comprenait dans son programme ''«&nbsp;l’égalisation des classes et des individus&nbsp;»''. Marx critique cette formule en disant qu'il ne s’agit pas d’égaliser les classes, mais de les supprimer.
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Lors de sa demande collective d’adhésion à l’AIT, l'Alliance comprenait dans son programme ''«&nbsp;l’égalisation des classes et des individus&nbsp;»''. Marx critique cette formule en disant qu'il ne s’agit pas d’égaliser les classes, mais de les supprimer. Dans sa lettre à Marx du 22 décembre 1868, Bakounine lui donne raison et explique cette confusion de vocabulaire par la nécessité d’avoir à convaincre l’auditoire bourgeois de la Ligue de la Paix et de la Liberté.
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Sur ces questions, voir la brochure du Conseil général de 1872, ''Les prétendues scissions dans l’Internationale,'' p.&nbsp;7-9 (pour le texte complet, voir Marx et Engels, ''Textes sur l’organisation,'' Paris, Spartacus, 1970.) Dans sa lettre à Marx du 22 décembre 1868, Bakounine lui donne raison et explique cette confusion de vocabulaire par la nécessité d’avoir à convaincre l’auditoire bourgeois de la Ligue de la Paix et de la Liberté.
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=== L'abstentionnisme électoral ===
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Alors que les marxistes ont toujours considéré qu'il était utile pour le mouvement ouvrier de faire de la politique au sein des institutions créées par la bourgeoisie, au moins pour y faire de l'[[agitation|agitation]], Bakounine défendait une position d'[[abstentionnisme|abstentionnisme]]. Par exemple ses partisans au congrès régional de la fédération romande (avril 1870) écrivaient :
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«&nbsp;toute participation de la classe ouvrière à la politique bourgeoise gouvernementale ne peut avoir d'autre résultat que la consolidation de l'ordre des choses existant, ce qui paralyserait l'action révolutionnaire socialiste du prolétariat. Le congrès romand commande à toutes les sections de l'AIT de renoncer à toute action ayant pour but d'opérer la transformation sociale au moyen des réformes politiques nationales, et de porter toute leur activité sur la constitution fédérative de corps de métiers, seul moyen d'assurer le succès de la révolution sociale. Cette fédération est la véritable représentation du travail, qui doit avoir lieu absolument en dehors des gouvernements politiques.&nbsp;»
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=== Opposition à l'État ===
 
=== Opposition à l'État ===
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*[https://fr.wikisource.org/w/index.php?title=Polémique_au_sujet_des_prétendues_scissions_de_l’Internationale_»&action=edit&redlink=1 Polémique au sujet des prétendues scissions de l’Internationale],1872  
 
*[https://fr.wikisource.org/w/index.php?title=Polémique_au_sujet_des_prétendues_scissions_de_l’Internationale_»&action=edit&redlink=1 Polémique au sujet des prétendues scissions de l’Internationale],1872  
 
**Voir aussi Marx-Engels, [https://www.marxists.org/francais/marx/works/1872/03/scissions.htm ''Les prétendues scissions dans l'Internationale'']  
 
**Voir aussi Marx-Engels, [https://www.marxists.org/francais/marx/works/1872/03/scissions.htm ''Les prétendues scissions dans l'Internationale'']  
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*[https://fr.wikisource.org/w/index.php?title=Étatisme_et_anarchie&action=edit&redlink=1 Étatisme et anarchie], 1873  
 
*[https://fr.wikisource.org/w/index.php?title=Étatisme_et_anarchie&action=edit&redlink=1 Étatisme et anarchie], 1873  
 
*[https://fr.wikisource.org/wiki/Dieu_et_l’État Dieu et l’État], posthume 1882  
 
*[https://fr.wikisource.org/wiki/Dieu_et_l’État Dieu et l’État], posthume 1882  
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=== Oeuvres complètes ===
 
=== Oeuvres complètes ===
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[https://fr.wikisource.org/wiki/Bakounine/Œuvres]
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[https://fr.wikisource.org/wiki/Bakounine/Œuvres [1]]
    
== Bibliographie ==
 
== Bibliographie ==

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