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Au début du 20<sup>e</sup> siècle, le mouvement révolutionnaire était trop restreint pour avoir une influence sur la réalité politique russe. Des cercles social-démocrates, d'intellectuels ou d'ouvriers, se forment un peu partout dans l'Empire russe, mais avec une certaine hétérogénéité et sans coordination. Le [[Parti_ouvrier_social-démocrate_de_Russie|Parti ouvrier social-démocrate de Russie]] (POSDR) avait tenu un premier congrès en 1898, mais sans parvenir à surmonter cet état de fait. La répression du régime tsariste obligeait à la [[Clandestinité|clandestinité]].
 
Au début du 20<sup>e</sup> siècle, le mouvement révolutionnaire était trop restreint pour avoir une influence sur la réalité politique russe. Des cercles social-démocrates, d'intellectuels ou d'ouvriers, se forment un peu partout dans l'Empire russe, mais avec une certaine hétérogénéité et sans coordination. Le [[Parti_ouvrier_social-démocrate_de_Russie|Parti ouvrier social-démocrate de Russie]] (POSDR) avait tenu un premier congrès en 1898, mais sans parvenir à surmonter cet état de fait. La répression du régime tsariste obligeait à la [[Clandestinité|clandestinité]].
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Un petit groupe de marxistes qui se retrouve dans le milieu des exilés russes en Europe cherche à fonder un véritable parti, autour d'un organe central, un [[Journal_ouvrier|journal]]. Ce groupe est composé d'anciens, comme [[Plekhanov|Plekhanov]], et de jeunes, comme [[Martov|Martov]], et [[Lénine|Lénine]], qui est particulièrement convaincu et investi dans ce projet, qui débouche sur la création de l'''[[Iskra|Iskra]]'' (L’Étincelle) en décembre 1900.
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Un petit groupe de marxistes qui se retrouve dans le milieu des exilés russes en Europe cherche à fonder un véritable parti, autour d'un organe central, un [[Journal_ouvrier|journal]]. Ce groupe est composé d'anciens, comme [[Plekhanov|Plekhanov]], et de jeunes, comme [[Martov|Martov]], et [[Lénine|Lénine]], qui est particulièrement convaincu et investi dans ce projet, qui débouche sur la création de l'''[[Iskra|Iskra]]'' (L’Étincelle) en décembre 1900. Celle était acheminée clandestinement en Russie au prix de très nombreux efforts et de risques.
    
Suite au [[Second_congrès_du_POSDR|Second congrès du POSDR]] (1903), la rédaction de l'''[[Iskra|Iskra]]'' se divise et passe aux mains des [[Menchéviks|menchéviks]]. Deux ans plus tard, [[Lénine|Lénine]] et ses partisans (les [[Bolchéviks|bolchéviks]]) décident de doter leur fraction de leur propre journal, nommé ''[[Vperiod|Vperiod]]''. A dater de mai 1905, ''Vperiod'' est remplacé par le ''[[Prolétari|Prolétari]]'', au [[Troisième_congrès_du_POSDR|Troisième congrès du POSDR]].
 
Suite au [[Second_congrès_du_POSDR|Second congrès du POSDR]] (1903), la rédaction de l'''[[Iskra|Iskra]]'' se divise et passe aux mains des [[Menchéviks|menchéviks]]. Deux ans plus tard, [[Lénine|Lénine]] et ses partisans (les [[Bolchéviks|bolchéviks]]) décident de doter leur fraction de leur propre journal, nommé ''[[Vperiod|Vperiod]]''. A dater de mai 1905, ''Vperiod'' est remplacé par le ''[[Prolétari|Prolétari]]'', au [[Troisième_congrès_du_POSDR|Troisième congrès du POSDR]].
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Après l’échec de l’[[Révolution_russe_(1905)|insurrection de 1905]], une tentative de réunification des [[Menchéviks|menchéviks]] et des [[Bolchéviks|bolchéviks]] a lieu mais échoue. Les différences stratégiques se creusent encore plus. Dans cette situation de reflux et de répression, le [[POSDR|POSDR]] rétrécit et des tendances [[Liquidationnistes|liquidationnistes]] de droite et de gauche apparaissent.
 
Après l’échec de l’[[Révolution_russe_(1905)|insurrection de 1905]], une tentative de réunification des [[Menchéviks|menchéviks]] et des [[Bolchéviks|bolchéviks]] a lieu mais échoue. Les différences stratégiques se creusent encore plus. Dans cette situation de reflux et de répression, le [[POSDR|POSDR]] rétrécit et des tendances [[Liquidationnistes|liquidationnistes]] de droite et de gauche apparaissent.
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== La ''Pravda'' de Trotski ==
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Le système de distribution des journaux, qui jusqu’en 1910 étaient tous imprimés à l’étranger, se rompit après 1905 et ne fut jamais véritablement rétabli. En plus, les membres des comités se plaignaient souvent que les journaux publiés à l’étranger étaient tellement coupés des réalités intérieures qu’ils étaient pratiquement inutiles. En 1909, Staline écrivait :
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… en ce qui concerne les organes qui sont publiés à l’étranger, en dehors du fait qu’ils ne parviennent en Russie qu’en quantités extrêmement limitées — ils restent naturellement extérieurs à la réalité russe, sont incapables de noter et de considérer à temps les questions qui agitent les ouvriers, et de ce fait, ne peuvent pas unir par des liens solides nos organisations locales.<ref>Staline, [https://www.marxists.org/russkij/stalin/t2/party_crisis_goals.htm Партийный кризис и наши задачи], 1909.</ref>
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[[Ossip Piatnitsky|Piatnitsky]] se plaint à la conférence de Prague de 1912 :
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« J’ai attaqué le comité de rédaction violemment parce qu’il oublie parfois que l’organe central – le ''[[Sotsial-demokrat|Sotsial-Demokrat]]'' – n’existe pas seulement pour les camarades de l’étranger qui sont familiers avec les querelles du parti, mais surtout pour les camarades de Russie. »<ref>O. Piatnitsky, ''Memoirs of a Bolshevik'', London n.d., p. 57.</ref>
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==La ''Pravda'' de Trotski==
 
Un journal nommé Pravda fut publié en 1905.
 
Un journal nommé Pravda fut publié en 1905.
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==La ''Pravda'' bolchévique==
 
==La ''Pravda'' bolchévique==
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=== Origine ===
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===Origine===
 
La décennie 1910 commença avec un nouveau départ des luttes. Les luttes [[Mouvement étudiant|étudiantes]] connaissent un essor à partir de 1910, suivie de luttes ouvrières. Le [[chômage]] diminue à ce moment, et la combativité augmente. Il y aura 100 000 grévistes en 1911, dans des grèves partielles, et 400 000 le 1<sup>er</sup> mai. La [[fusillade de la Léna]], en avril 1912, enflamme les masses. Cette remontée convainc Lénine de l'urgence de rebâtir un appareil prêt. Sous la direction de [[Grigori Zinoviev|Zinoviev]], les bolcheviks organisent à Longjumeau une école de cadres : les militants ainsi formés pénètrent illégalement en Russie pour y resserrer les contacts et préparer une conférence nationale. Mais la police veille : successivement [[Alexeï Rykov|Rykov]], puis [[Noguine]] sont arrêtés ; c'est finalement [[Grigory Ordjonikidze|Ordjonikidzé]] qui parvient à mettre sur pied en Russie un comité d'organisation, avec l'aide du clandestin [[Leonid Sérébriakov|Sérébriakov]].
 
La décennie 1910 commença avec un nouveau départ des luttes. Les luttes [[Mouvement étudiant|étudiantes]] connaissent un essor à partir de 1910, suivie de luttes ouvrières. Le [[chômage]] diminue à ce moment, et la combativité augmente. Il y aura 100 000 grévistes en 1911, dans des grèves partielles, et 400 000 le 1<sup>er</sup> mai. La [[fusillade de la Léna]], en avril 1912, enflamme les masses. Cette remontée convainc Lénine de l'urgence de rebâtir un appareil prêt. Sous la direction de [[Grigori Zinoviev|Zinoviev]], les bolcheviks organisent à Longjumeau une école de cadres : les militants ainsi formés pénètrent illégalement en Russie pour y resserrer les contacts et préparer une conférence nationale. Mais la police veille : successivement [[Alexeï Rykov|Rykov]], puis [[Noguine]] sont arrêtés ; c'est finalement [[Grigory Ordjonikidze|Ordjonikidzé]] qui parvient à mettre sur pied en Russie un comité d'organisation, avec l'aide du clandestin [[Leonid Sérébriakov|Sérébriakov]].
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La conférence, organisée en janvier 1912 à Prague, réunit suffisamment d'organisations clandestines de Russie pour amorcer une réunification, même si elle provoque la rupture de groupes (surtout [[menchéviks]]) de l'émigration, qui ne la reconnaissent pas (''«&nbsp;bloc d'août&nbsp;»'').
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La conférence, organisée en janvier 1912 à Prague, réunit suffisamment d'organisations clandestines de Russie pour amorcer une réunification, même si elle provoque la rupture de groupes (surtout [[menchéviks]]) de l'émigration, qui ne la reconnaissent pas (''«&nbsp;[[bloc d'août]]&nbsp;»'').
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=== Lancement en mai 1912 ===
 
Sur proposition de [[Alexandre Voronski|Voronski]], l'idée d'un journal légal quotidien est retenue. Pour cela, la rédaction de la ''[[Zvezda]]'' (organe de la fraction social-démocrate à la [[Douma d'État de l’Empire russe|Douma]]), qui était passée aux mains des bolchéviks, sera réutilisée.
 
Sur proposition de [[Alexandre Voronski|Voronski]], l'idée d'un journal légal quotidien est retenue. Pour cela, la rédaction de la ''[[Zvezda]]'' (organe de la fraction social-démocrate à la [[Douma d'État de l’Empire russe|Douma]]), qui était passée aux mains des bolchéviks, sera réutilisée.
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Le premier numéro de la ''Pravda'' fut publié à Saint-Pétersbourg sous la direction de Lénine le 5 mai 1912 ([[a.s]] : 22 avril). Avant son lancement, une grande compagne d’agitation s’était tenue dans les usines pour encourager les souscriptions publiques. Pendant plus d'une année encore,  [[Gueorgui Plekhanov|Plékhanov]] sera parmi ses collaborateurs.
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Le premier numéro de la ''Pravda'' fut publié à Saint-Pétersbourg sous la direction de Lénine le 5 mai 1912 ([[a.s]] : 22 avril). Avant son lancement, une grande compagne d’agitation s’était tenue dans les usines pour encourager les souscriptions publiques.  
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Pendant plus d'une année encore,  [[Gueorgui Plekhanov|Plékhanov]] sera parmi ses collaborateurs. En août 1913, il cesse de collaborer à la ''Pravda'', et tente d'organiser sa propre fraction avec le journal ''[[Edinstvo]]'' (Unité) et rallie finalement le [[bloc d'août]].
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Lénine, qui s'est installé à Cracovie (alors en [[Empire austro-hongrois|Autriche-Hongrie]] et proche de la frontière avec l'[[Empire russe]]), dirige de là l'activité des bolcheviks, pousse [[Yakov Sverdlov|Sverdlov]] à la direction de la ''Pravda'' à la place de [[Staline]].
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Au lancement de la revue, deux membres clés sont des agents infiltrés de l'[[Okhrana]] : [[Miron Tchernomazov|Tchernomazov]], éditorialiste et rédacteur en chef, et  [[Roman Malinovski|Malinovski]], trésorier. De Malinovski, la police obtint une liste complète des donateurs du journal et des abonnés. Staline et Sverdlov seront arrêtés à cause de lui.
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=== Esquiver la censure ===
 
Interdite au bout de 40 jours, elle reparaît sous le titre de ''Rabotchaïa Pravda'' pour 17 numéros; à nouveau interdite, elle sera successivement la ''Severnaïa Pravda'' pour 31 numéros, la ''Pravda Trouda'' pour 20, ''Za Pravkou'' pour 51, ''Proletarskaïa Pravda'' pour 16 numéros, ''Pout Pravdy'' pour 91 : à cette date elle se transformera en revue, ''Rabotchii'', puis ''Troudovskaïa Pravda,'' et sera réprimée définitivement le 8 juillet 1914.
 
Interdite au bout de 40 jours, elle reparaît sous le titre de ''Rabotchaïa Pravda'' pour 17 numéros; à nouveau interdite, elle sera successivement la ''Severnaïa Pravda'' pour 31 numéros, la ''Pravda Trouda'' pour 20, ''Za Pravkou'' pour 51, ''Proletarskaïa Pravda'' pour 16 numéros, ''Pout Pravdy'' pour 91 : à cette date elle se transformera en revue, ''Rabotchii'', puis ''Troudovskaïa Pravda,'' et sera réprimée définitivement le 8 juillet 1914.
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=== Succès populaire ===
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Le journal parvint à se faire publier entre 1912 et 1914 malgré les actions en justice, les démantèlements, les détentions de militants, les amendes et les procès.
Il coûtait deux kopecks (soit 4,8 centimes) et se présentait sous la forme d’un quatre pages où se mélangeaient des articles économiques, des sujets sur le [[Mouvement_ouvrier|mouvement ouvrier]] et les grèves et deux poèmes prolétariens.
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===Succès populaire===
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Le premier numéro tira à 25 000 exemplaires. Il coûtait deux kopecks (soit 4,8 centimes) et se présentait sous la forme d’un quatre pages où se mélangeaient des articles économiques, des sujets sur le [[Mouvement_ouvrier|mouvement ouvrier]] et les grèves et deux poèmes prolétariens.
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Les semaines suivantes le tirage dépassa les 60 000.
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Entre la patience et l’audace, Lénine parvint à contribuer énormément à l’organisation de la classe ouvrière et pas seulement du parti. La ''Pravda'' dénonçait le véritable caractère d’exploitation du système capitaliste, l’autoritarisme du Tsar et, en même temps, éduquait la [[Conscience_de_classe|conscience de classe]] de milliers d’ouvriers. À la différence de ''l’[[Iskra]]'', qui parvenait à quelques centaines de lecteurs, la ''Pravda'' de 1912 touchait des dizaines de milliers d’ouvriers d’[[avant-garde]]. Des correspondants de toute la Russie envoyaient 40 dénonciations par jour des différentes usines&nbsp;: elles étaient compilées dans la  rubrique «&nbsp;rapports de correspondants&nbsp;»&nbsp;; 327 groupes se formèrent pour soutenir financièrement la parution de la ''Pravda'' par l’intermédiaire de collectes en groupe. Les correspondants avaient une importance fondamentale parce qu’ils agissaient comme des antennes transmetteuses de l’état d’âme du prolétariat et leurs rapports renforçaient la conscience commune. Les travailleurs russes firent leur le journal bolchevique et l’identifièrent comme «&nbsp;leur journal&nbsp;».
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Les numéros étaient réimprimés dans des imprimeries clandestines pour être diffusés dans d’autres villes plus lointaines.
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=== Des thèmes variés ===
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Lénine pousser à moduler les publications pour toucher différentes cibles.
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Entre la patience et l’audace, Lénine parvint à contribuer énormément à l’organisation de la classe ouvrière et pas seulement du parti. ''La Pravda'' dénonçait le véritable caractère d’exploitation du système capitaliste, l’autoritarisme du Tsar et, en même temps, éduquait la [[Conscience_de_classe|conscience de classe]] de milliers d’ouvriers. À la différence de ''l’Iskra'', qui parvenait à quelques centaines de lecteurs, la Pravda de 1912 touchait des dizaines de milliers d’ouvriers d’avant-garde. Des correspondants de toute la Russie envoyaient 40 dénonciations par jour des différentes usines&nbsp;: elles étaient compilées dans la fameuse rubrique «&nbsp;rapports de correspondants&nbsp;»&nbsp;; 327 groupes se formèrent pour soutenir financièrement la parution de la Pravda par l’intermédiaire de collectes en groupe. Les correspondants avaient une importance fondamentale parce qu’ils agissaient comme des antennes transmetteuses de l’état d’âme du prolétariat et leurs rapports renforçaient la conscience commune. Entre-temps, les numéros étaient réimprimés dans des imprimeries clandestines pour être diffusés dans d’autres villes plus lointaines.
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Les ouvrières russes dénonçaient  les conditions d’exploitation et d’[[Patriarcat|oppression]] auxquelles elles étaient soumises quotidiennement. La rubrique spéciale intitulée «&nbsp;Travail et vie des ouvrières&nbsp;» informait sur les manifestations et les préparatifs de la commémoration de la''&nbsp;[[Journée_internationale_des_femmes|Journée internationale des femmes]]&nbsp;'' et encourageait la création d’organisations syndicales et politiques de femmes.  
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Les travailleurs russes firent leur le journal bolchevique et l’identifièrent comme «&nbsp;leur journal&nbsp;», ce qui permit d’augmenter sa diffusion&nbsp;: si le premier numéro tira à 25 000 exemplaires, les semaines suivantes il dépassa les 60 000. Les ouvrières russes dénonçaient aussi les conditions d’exploitation et d’oppression auxquelles elles étaient soumises quotidiennement. La rubrique spéciale intitulée «&nbsp;Travail et vie des ouvrières&nbsp;» informait sur les manifestations et les préparatifs de la commémoration de la ''«&nbsp;[[Journée_internationale_des_femmes|Journée internationale des femmes]]&nbsp;»'' et encourageait la création d’organisations syndicales et politiques de femmes. Le journal parvint à se faire publier entre 1912 et 1914 malgré les actions en justice, les démantèlements, les détentions de militants, les amendes et les procès. Les poursuites policières et la forte campagne anti-guerre en gestation dans les pages de la ''Pravda'' conduisirent finalement le Tsar à démanteler la publication en juillet 1914. Suite au démantèlement, l’organisation ouvrière et du parti connut un reflux puisque la majorité des militants furent arrêtés, envoyés en exil ou enrôlés pour aller à la [[Grande_Guerre|guerre]].
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En avril 1914, Lénine propose de créer un supplément intersyndical, créer des suppléments régionaux, développer la section étrangère du ''Pout Pravdy'' («&nbsp;La voie de la vérité&nbsp;»), mettre en œuvre une ''Pravda du soir'' à un kopeck, afin de cibler au mieux, à la fois les «&nbsp;ouvriers conscients&nbsp;», les «&nbsp;ouvriers du rang&nbsp;» et «&nbsp;l’homme de masse&nbsp;». Lénine estimera que la période permet également d’envisager que les lecteurs du ''Pout Pravdy'' participent plus activement «&nbsp;à la correspondance, à la direction du journal, à sa diffusion. Il faut obtenir que les ouvriers participent systématiquement au travail de la rédaction&nbsp;».<ref>Lénine, ''Du passé de la presse ouvrière en Russie'', avril 1914</ref>
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Lénine cherchait à moduler les publications pour toucher différentes cibles. En avril 1914, il propose de créer un supplément intersyndical, créer des suppléments régionaux, développer la section étrangère du ''Pout Pravdy'' («&nbsp;La voie de la vérité&nbsp;»), mettre en œuvre une ''Pravda du soir'' à un kopeck, afin de cibler au mieux, à la fois les «&nbsp;ouvriers conscients&nbsp;», les «&nbsp;ouvriers du rang&nbsp;» et «&nbsp;l’homme de masse&nbsp;». Lénine estimera que la période permet également d’envisager que les lecteurs du ''Pout Pravdy'' participent plus activement «&nbsp;à la correspondance, à la direction du journal, à sa diffusion. Il faut obtenir que les ouvriers participent systématiquement au travail de la rédaction&nbsp;».<ref>Lénine, ''Du passé de la presse ouvrière en Russie'', avril 1914</ref>
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=== Le coup dur de la guerre de 1914 ===
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La [[Grande_Guerre|guerre mondiale]] change brutalement le climat politique. Les autorités ne pouvaient tolérer la campagne anti-guerre en gestation dans les pages de la ''Pravda''. La rédaction est démantelée en juillet 1914 lors de la marche à la guerre. Ce n'était pas seulement la presse qui était touchée, la majorité des militants furent arrêtés, envoyés en exil ou enrôlés. Toutes les organisations révolutionnaires connurent ue débandade.
    
Lorsque le mouvement ouvrier commença à reprendre de la vigueur en 1916, le parti comptait à peine 5000 militants dans ses rangs, tous très jeunes (entre 18 et 30 ans). Ces hommes et ces femmes étaient l’[[Avant-garde|avant-garde]] ouvrière révolutionnaire que [[Lénine|Lénine]] aspirait à construire et qui, tout au long de 1917, organisèrent des centaines de milliers d’ouvriers dans les usines et les soviets, en préparation de l’insurrection.
 
Lorsque le mouvement ouvrier commença à reprendre de la vigueur en 1916, le parti comptait à peine 5000 militants dans ses rangs, tous très jeunes (entre 18 et 30 ans). Ces hommes et ces femmes étaient l’[[Avant-garde|avant-garde]] ouvrière révolutionnaire que [[Lénine|Lénine]] aspirait à construire et qui, tout au long de 1917, organisèrent des centaines de milliers d’ouvriers dans les usines et les soviets, en préparation de l’insurrection.
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===De février à octobre 1917===
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===De Février à Octobre 1917===
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La ''Pravda a reparu le 5 mars. Elle réclame «&nbsp;des négociations avec les prolétaires des pays étrangers […] pour mettre fin au massacre&nbsp;», position incontestablement internationaliste, sensiblement différente cependant de la ligne [[Défaitiste|défaitiste]] développée par Lénine depuis 1914, et adoptée par le comité central en émigration.''
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La ''Pravda'' a reparu le 5 mars. Elle réclame ''«&nbsp;des négociations avec les prolétaires des pays étrangers […] pour mettre fin au massacre&nbsp;»'', position internationaliste, mais sensiblement différente de la ligne [[Défaitiste|défaitiste]] développée par Lénine depuis 1914, et adoptée par le comité central en émigration.
    
Le 13 mars, les dirigeants déportés, libérés par la révolution, arrivent à Pétrograd&nbsp;: [[Mouranov|Mouranov]], [[Kamenev|Kamenev]], [[Staline|Staline]] reprennent la direction de l'organisation bolchevique. Un tournant se produit dans la ligne politique de la ''Pravda, ''dont Staline prend désormais la direction. Les bolcheviks se rallient à la thèse des [[Mencheviks|mencheviks]] suivant laquelle il faut désormais que les révolutionnaires russes poursuivent la guerre afin de défendre leurs récentes conquêtes démocratiques contre l'agression de l'[[Impérialisme_allemand|impérialisme allemand]]. Kamenev rédige plusieurs articles ouvertement défensistes, écrivant notamment qu'«&nbsp;un peuple libre répond aux balles par des balles&nbsp;». A la fin du mois, une conférence bolchevique adopte cette ligne, malgré quelques résistances&nbsp;: elle décide, sur proposition de Staline, que le rôle des soviets est de «&nbsp;soutenir le gouvernement provisoire dans son action aussi longtemps qu'il marche dans la vole de satisfaire la classe ouvrière&nbsp;». En fait, de simples nuances séparent ces positions de celles des mencheviks qui sont aussi partisans d'un «&nbsp;soutien conditionnel&nbsp;». Rien d'étonnant, dans ces conditions, à ce que la même conférence, le I° avril, sur la proposition de Kamenev et Staline, accepte d'envisager la réunification de tous les social-démocrates que leur propose, au nom du comité d'organisation, le menchevik Tséretelli. La vieille conception conciliatrice semble l'emporter.
 
Le 13 mars, les dirigeants déportés, libérés par la révolution, arrivent à Pétrograd&nbsp;: [[Mouranov|Mouranov]], [[Kamenev|Kamenev]], [[Staline|Staline]] reprennent la direction de l'organisation bolchevique. Un tournant se produit dans la ligne politique de la ''Pravda, ''dont Staline prend désormais la direction. Les bolcheviks se rallient à la thèse des [[Mencheviks|mencheviks]] suivant laquelle il faut désormais que les révolutionnaires russes poursuivent la guerre afin de défendre leurs récentes conquêtes démocratiques contre l'agression de l'[[Impérialisme_allemand|impérialisme allemand]]. Kamenev rédige plusieurs articles ouvertement défensistes, écrivant notamment qu'«&nbsp;un peuple libre répond aux balles par des balles&nbsp;». A la fin du mois, une conférence bolchevique adopte cette ligne, malgré quelques résistances&nbsp;: elle décide, sur proposition de Staline, que le rôle des soviets est de «&nbsp;soutenir le gouvernement provisoire dans son action aussi longtemps qu'il marche dans la vole de satisfaire la classe ouvrière&nbsp;». En fait, de simples nuances séparent ces positions de celles des mencheviks qui sont aussi partisans d'un «&nbsp;soutien conditionnel&nbsp;». Rien d'étonnant, dans ces conditions, à ce que la même conférence, le I° avril, sur la proposition de Kamenev et Staline, accepte d'envisager la réunification de tous les social-démocrates que leur propose, au nom du comité d'organisation, le menchevik Tséretelli. La vieille conception conciliatrice semble l'emporter.
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La Pravda se transforma en «&nbsp;tribun du peuple&nbsp;» et en organisateur collectif durant tout le processus révolutionnaire.
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La ''Pravda'' se transforma en «&nbsp;tribun du peuple&nbsp;» et en organisateur collectif durant tout le processus révolutionnaire.
    
===Rabotchi pout===
 
===Rabotchi pout===

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