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Les doumas avaient selon les démocrates bourgeois une représentation plus complète (tous les citoyens et non seulement les plus actifs), et donc auraient dû jouir d'une plus grande autorité. De plus, les doumas avaient l'énorme avantage d'être officiellement soutenues par l'État. La milice, le ravitaillement, les transports urbains, l'instruction publique ressortissaient officiellement aux doumas. Les soviets, en tant qu'institutions "privées", n'avaient ni budget, ni droits. Et néanmoins, le pouvoir restait de fait entre les mains des soviets. Les doumas étaient dans les faits des sortes de commissions municipales auprès des soviets.
 
Les doumas avaient selon les démocrates bourgeois une représentation plus complète (tous les citoyens et non seulement les plus actifs), et donc auraient dû jouir d'une plus grande autorité. De plus, les doumas avaient l'énorme avantage d'être officiellement soutenues par l'État. La milice, le ravitaillement, les transports urbains, l'instruction publique ressortissaient officiellement aux doumas. Les soviets, en tant qu'institutions "privées", n'avaient ni budget, ni droits. Et néanmoins, le pouvoir restait de fait entre les mains des soviets. Les doumas étaient dans les faits des sortes de commissions municipales auprès des soviets.
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La compétition entre système soviétique et démocratie de pure forme (frappante notamment lors de la [[Conférence_démocratique_(Russie)|Conférence démocratique]]) était d’autant plus frappante qu’elle se manifestait sous la direction des mêmes partis dominants ([[Socialiste-révolutionnaire|socialiste-révolutionnaire]] et [[Mencheviks|mencheviks]]), lesquels étaient profondément persuadés que les soviets devaient céder la place aux doumas. Les [[Parti_KD|KD]] était une minorité de droite dans les doumas, mais absents des soviets. Les [[bolchéviks|bolchéviks]] étaient une minorité de gauche dans les [[douma_municipale|doumas]] et [[zemstvos|zemstvos]], plus forte dans les soviets (surtout ouvriers), et plus forte encore dans les [[Comités_d'usine|comités d'usine]]. Vers septembre les bolchéviks commençaient néanmoins à gagner des majorités même dans les [[douma_municipale|doumas]] et [[zemstvos|zemstvos]].
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La compétition entre système soviétique et démocratie de pure forme (frappante notamment lors de la [[Conférence_démocratique_(Russie)|Conférence démocratique]]) était d’autant plus frappante qu’elle se manifestait sous la direction des mêmes partis dominants ([[Socialiste-révolutionnaire|socialiste-révolutionnaire]] et [[Mencheviks|mencheviks]]), lesquels étaient profondément persuadés que les soviets devaient céder la place aux doumas. Les [[Parti_KD|KD]] était une minorité de droite dans les doumas, mais absents des soviets. Les [[Bolchéviks|bolchéviks]] étaient une minorité de gauche dans les [[Douma_municipale|doumas]] et [[Zemstvos|zemstvos]], plus forte dans les soviets (surtout ouvriers), et plus forte encore dans les [[Comités_d'usine|comités d'usine]]. Vers septembre les bolchéviks commençaient néanmoins à gagner des majorités même dans les [[Douma_municipale|doumas]] et [[Zemstvos|zemstvos]].
    
Les soviets étaient renouvelés fréquemment, et les délégués étaient révocables. A l'inverse, les doumas et zemstvos avaient été élues il y a longtemps, certaines du temps du tsar avec un suffrage censitaire. Même si des réélections ont lieu après [[Insurrection_de_Février_1917|Février]], ces vieilles institutions restent moins organiquement liées au peuple.
 
Les soviets étaient renouvelés fréquemment, et les délégués étaient révocables. A l'inverse, les doumas et zemstvos avaient été élues il y a longtemps, certaines du temps du tsar avec un suffrage censitaire. Même si des réélections ont lieu après [[Insurrection_de_Février_1917|Février]], ces vieilles institutions restent moins organiquement liées au peuple.
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Par ailleurs, ces institutions bourgeoises classiques, ramenant tout individu sous la dénomination abstraite de [[citoyens|citoyens]], visent par définition à nier la [[lutte_des_classes|lutte des classes]]. Dans une période révolutionnaire, elles ressemblaient de plus en plus à une conférence diplomatique qui s'explique en un langage conventionnel et hypocrite, au moment même où les camps hostiles qu'elle représente se préparent fiévreusement à la bataille.
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Par ailleurs, ces institutions bourgeoises classiques, ramenant tout individu sous la dénomination abstraite de [[Citoyens|citoyens]], visent par définition à nier la [[Lutte_des_classes|lutte des classes]]. Dans une période révolutionnaire, elles ressemblaient de plus en plus à une conférence diplomatique qui s'explique en un langage conventionnel et hypocrite, au moment même où les camps hostiles qu'elle représente se préparent fiévreusement à la bataille.
    
=== Soviets, comités de régiment, comités d'usine ===
 
=== Soviets, comités de régiment, comités d'usine ===
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En 1917 il existait également des [[comités_d'usine|comités d'usine]], et des conférences des comités d'usine, en parallèle des soviets ouvriers. Les délégués ouvriers au soviet représentaient surtout "politiquement" les ouvriers : élus sur la base de partis politiques pour trancher des questions d'orientation générale. Les comités d'usine servaient à résoudre des tâches pratiques internes à l'usine (et potentiellement à gérer l'usine), et les conférences des comités d'usine étaient plus utiles que les soviets pour coordonner les usines, régler des questions de ravitaillement, de production...
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En 1917 il existait également des [[Comités_d'usine|comités d'usine]], et des conférences des comités d'usine, en parallèle des soviets ouvriers. Les délégués ouvriers au soviet représentaient surtout "politiquement" les ouvriers : élus sur la base de partis politiques pour trancher des questions d'orientation générale. Les comités d'usine servaient à résoudre des tâches pratiques internes à l'usine (et potentiellement à gérer l'usine), et les conférences des comités d'usine étaient plus utiles que les soviets pour coordonner les usines, régler des questions de ravitaillement, de production...
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De même, il existait des comités de régiment à côté des soviets de soldats. Peu avant l'[[insurrection_d'Octobre|insurrection d'Octobre]], le [[Soviet_de_Petrograd|Soviet de Petrograd]] créa une Conférence permanente de la garnison, composée des comités de régiments. C'était une représentation plus géographique, et pour des préparatifs pratiques elle était indispensable.
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De même, il existait des comités de régiment à côté des soviets de soldats. Peu avant l'[[Insurrection_d'Octobre|insurrection d'Octobre]], le [[Soviet_de_Petrograd|Soviet de Petrograd]] créa une Conférence permanente de la garnison, composée des comités de régiments. C'était une représentation plus géographique, et pour des préparatifs pratiques elle était indispensable.
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La question politique est cependant une pré-condition. Les comités d'usine ont pu travailler ensemble et gérer une part de plus en plus grande de la production parce qu'ils étaient d'accord pour le pouvoir ouvrier. Cela n'aurait pas été possible avec une moitié des comités d'usine dirigées par des menchéviks voulant laisser la gestion aux patrons. De même, la question des tâches pratiques de coordination des régiments pour l'insurrection ne pouvait pas se poser avant une majorité bolchévique dans la garnison, car les [[menchéviks|menchéviks]] laissaient le commendament à l'Etat-major des [[classes_possédantes|classes possédantes]].
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La question politique est cependant une pré-condition. Les comités d'usine ont pu travailler ensemble et gérer une part de plus en plus grande de la production parce qu'ils étaient d'accord pour le pouvoir ouvrier. Cela n'aurait pas été possible avec une moitié des comités d'usine dirigées par des menchéviks voulant laisser la gestion aux patrons. De même, la question des tâches pratiques de coordination des régiments pour l'insurrection ne pouvait pas se poser avant une majorité bolchévique dans la garnison, car les [[Menchéviks|menchéviks]] laissaient le commendament à l'Etat-major des [[Classes_possédantes|classes possédantes]].
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=== Soviets et partis ===
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Comme avec les syndicats, les soviets permettent aux idées défendues par les partis de toucher bien plus largement que les seuls membres ou sympathisans du/des partis.
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Par exemple, alors qu'en septembre le [[parti_bolchévik|parti bolchévik]] obtient une claire majorité parmi les ouvriers, soldats et paysans, il tente au maximum de réaliser l'[[insurrection_d'Octobre|insurrection d'Octobre]] à travers le [[Soviet_de_Petrograd|Soviet de Petrograd]]. [[Trotsky|Trotsky]] explique :
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''«&nbsp;Dans les millions d'hommes sur lesquels le parti comptait s'appuyer fort justement, il est nécessaire de distinguer trois couches : une qui marchait déjà avec les bolcheviks dans toutes les conditions; une autre, la plus nombreuse, qui soutenait les bolcheviks là où ceux-ci agissaient par les soviets; la troisième qui suivait les soviets, bien que, dans ceux-ci, les bolcheviks fussent en majorité.&nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrr47.htm Histoire de la révolution russe - 47. L'insurrection d'octobre]'', 1930</ref>''
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Les plus convaincus étaient les ouvriers de Petrograd. Les moins convaincus ou plus récemment entrés dans l'orbite des bolchéviks étaient des paysans, des [[cosaques|cosaques]]...
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D'après le récit du sous-lieutenant Berzine, à la Conférence militaire des bolcheviks, en octobre, à Moscou, des délégués déclaraient : ''«&nbsp;Il est difficile de dire si les troupes marcheront à l'appel du Comité moscovite des bolcheviks. A l'appel du Soviet, il est probable que tous marcheront. »'' Pour les plus indécis, l'autorité du [[Deuxième_congrès_des_soviets|Congrès des soviets]] était encore supérieure : Le chauffeur [[Anton_Mitrevitch|Mitrevitch]] raconte comment, dans une équipe d'auto-camions, où l'on ne réussissait pas à obtenir une résolution en faveur de l'insurrection, les bolcheviks firent adopter une proposition de compromis : ''«&nbsp;Nous ne marcherons ni pour les bolcheviks ni pour les mencheviks, mais sans aucun retard, nous exécuterons tous les ordres du II° Congrès des soviets&nbsp;»''.
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''«&nbsp;Le parti mettait en mouvement le Soviet. Le Soviet mettait en mouvement les ouvriers; les soldats, partiellement, les paysans. Ce que l'on gagnait dans la masse, on le perdait pour la vitesse. Si l'on se représente cet appareil de transmission comme un système de roues dentées (...) l'on peut dire qu'une tentative impatiente pour ajuster la roue du parti directement à la roue géante des masses, comportait le danger de briser les dents de la roue du parti et pourtant de ne pas mettre en mouvement des masses suffisantes. &nbsp;»''
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=== Soviets ruraux ===
 
=== Soviets ruraux ===
  

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