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Vers une Organisation révolutionnaire de la Jeunesse (Discussion avec Gould)
Auteur·e(s) | Léon Trotski |
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Écriture | 18 novembre 1938 |
Trotsky. — Je crois que personne ne peut proposer de programme achevé ni de méthode pour conquérir la jeunesse dans la situation critique actuelle dans le monde comme aux États-Unis Il n’y a aucun précédent. Nous n’avons aucune expérience de ce genre, et il nous faut en faire. Le fait qu’au cours de l’année écoulée notre organisation de jeunesse ait perdu un tiers de ses adhérents n’est pas une épouvantable catastrophemais démontre que nous n’avons pas encore trouvé les méthodes justes et que nous devrons à l’avenir être très inventifs et ne pas chaque fois incriminer le centre parce qu’il ne donne pas de directives. Je crois que cet état d’esprit est dangereux. On peut en dire autant du parti ou de l’organisation de jeunesse. Le C.N. s’est contenté de résumer l’expérience des groupes locaux. Je crois qu’il est très important que les comités locaux du parti, au moins au début, fassent plus pour l’organisation de jeunesse locale que le centre à New York, parce que les conditions locales sont les mêmes, que les adultes peuvent observer les jeunes, et, sans prétendre à les commander, peuvent leur donner de bons conseils. Je le répète, nous n’avons ni programme ni méthodes définis. Nous ne devons pas fermer les portes aux diverses propositions et, à cet égard, il nous faut les ouvrir.
Mais on peut néanmoins tracer quelques lignes d’un point de vue général. Nous avons proposé — et maintenant adopté lors de la conférence internationale — un Programme de Transition qui remplace l’ancien programme minimum de la social-démocratie et l’empirisme de nos sections nationales, lesquelles, de temps en temps, inventaient un mot d’ordre sans avoir de perspective générale ni de combinaison de mots d’ordre conduisant à la révolution socialiste. La différence entre le programme minimum et le Programme de Transition est que ce dernier est une introduction à la révolution socialiste. Une telle introduction est nécessaire partout, particulièrement aux États-Unis, parce que les ouvriers y sont empreints de traditions conservatrices très néfastes, et qu’il nous faut commencer là où elles finissent, et montrer la voie de la révolution socialiste.
Mais les choses sont différentes avec les jeunes, car, d’une part, ils ne subissent pas autant le poids de ces traditions, et de l’autre leur situation est plus terrible et plus aiguë. Je parle de la jeunesse prolétarienne, mais la jeunesse bourgeoise est elle aussi dans une situation terrible. Ce caractère critique de la situation de la jeune génération, avec l’absence de traditions, d’éducation syndicale, d’élections démocratiques, d’adhésion à un ou l’autre parti — tous ces facteurs font de la jeunesse, comme on l’a vu dans l’expérience européenne, de la chair à canon pour les fascistes. Qu’est-ce que cela montre ? Que la jeunesse aspire à une solution radicale. Je crois que c’est un fait très important — le plus important — que, socialement, les jeunes sont devenus des parias, qui ne peuvent avoir pour le régime aucun attachement social ou politique, qui ont plus d’audace du fait même de leur jeunesse, et qui n’ont aucune tradition conservatrice. Cette jeunesse attend une direction révolutionnaire. Qui la lui apportera ? Nous, ou les fascistes ? Hier, nous avons fait la proposition, mi-sérieusement, mi à titre d’hypothèse, d’appeler notre organisation « Légion de la révolution socialiste ». Je ne crois pas avoir trouvé le soutien nécessaire. Je le répète aujourd’hui avec plus d’insistance : « Légion de la révolution socialiste ». C’est un programme. Nous disons aux jeunes : « Nous voulons renverser la société existante. Nous voulons créer une société nouvelle. C’est notre but. » Cela ne veut pas dire que nous excluons un programme de transition. Les jeunes appartiennent à des couches différentes, se trouvent dans des conditions différentes. L’état d’esprit du même jeune travailleur change. A un moment, il est très révolutionnaire et, à un autre, un peu opportuniste. Il faut trouver le moyen d’entrer en contact avec lui, même en organisant un bal. Mais je crois que les staliniens et les fascistes danseront mieux que nous. Ils sont plus riches que nous, jouissent de bien des avantages. Nos avantages à nous ne se situent pas dans le domaine de la danse, mais dans celui de la révolution mondiale. Mieux, nous sommes la « Légion de la révolution socialiste ». Personne ne peut nous imiter. Aucun autre parti ne peut y prétendre.
La question de la légalité se pose. Beaucoup vont nous dire bien sûr qu'un tel parti peut tomber tout de suite sous les coups de la loi qui réprime les activités non-américaines. Oui, il faut prendre cet argument en considération et combiner en ce domaine travail légal et travail illégal, fournir à la perspective révolutionnaire et même au parti révolutionnaire une explication très adroite en ce sens : c’est très bien, mais il y a Hague, le nazisme allemand, le fascisme italien... Il faut nous défendre. On a bien vu en Europe que, dès que les ouvriers approchaient du but, le grand capital armait aussitôt les fascistes. Il nous faut être prêts à déclencher la lutte contre la réaction. Il faut nous préparer à la révolution. Sur le plan juridique, il faut nous y préparer, non comme à une révolution directement contre la démocratie, mais comme à un combat contre les méchantes gens qui nous empêchent d’utiliser la démocratie pour notre émancipation. Mais, je le répète, ce n’est qu’un aspect secondaire. L’important, c’est que nous sommes la « Légion de la révolution socialiste ».
Ce n’est pas une proposition ferme, mais il me semble que nous pourrions aussi l’appeler la « Légion de Lénine, Liebknecht, Luxemburg », les « trois L. ». Ce ne serait pas mal pour notre emblème. Il pourrait former trois L. Peut-être est-ce trop personnel, et il faudrait l’expliquer à tout le monde. « Légion de la révolution socialiste », c’est mieux. Je suis certain également que Luxemburg, Lénine et Liebknecht le préféreraient aussi. Bien sûr, une telle organisation devrait avoir des organisations annexes de types divers.
Maintenant, la résolution parle de l’idéalisme et d’enthousiasme, qu’elle oppose au cynisme. Je ne suis pas du tout sûr qu’il s’agisse d’un authentique cynisme. C’est souvent le faux cynisme du jeune qui combat pour son indépendance, contre la tutelle de l’appareil, etc. Peut-être y a-t-il d’authentiques cyniques, mais si l'on veut provoquer ces tendances idéalistes, il faudrait commencer par le nom de l’organisation elle-même. A un jeune travailleur, au chômeur, au Nègre, au Juif persécuté, donnez-lui le sentiment que, comme tous les persécutés, il est membre de la « Légion pour la révolution socialiste ». Je crois que c’est un sentiment très positif. Il vous faut l’exprimer. Pourquoi pas? La première chose, c’est une opinion claire, une expression très nette de l’objectif révolutionnaire.
La seconde, c’est la démocratie. Je crois que la démocratie est en train de périr partout aux États-Unis, dans les syndicats, dans les vieux partis. Il nous suffit de permettre une authentique honnête démocratie, telle qu’un jeune travailleur, un étudiant, puisse se sentir libre d’exprimer son opinion sans être aussitôt persécuté. L’ironie, de la part de quelqu’un qui est dans une position d’autorité, c’est aussi de la persécution. Nous ne pouvons attirer de nouveaux membres à la jeunesse comme au parti que par une démocratie intelligente, authentique. Tout le monde est las du manque de démocratie. Cette question est liée aux rapports entre parti et jeunesse. Il est clair que la jeunesse ne peut ni remplacer, ni doubler le parti. Mais cela ne signifie pas que nous ayons la possibilité technique d’empêcher la jeunesse d’essayer de remplacer le parti chaque fois qu’elle pense qu’il suit une ligne erronée. Il n’est pas possible d’établir d’un coup ou dans une unique résolution l’autorité du parti. On ne peut pas créer l’autorité du parti par une résolution. Si les jeunes camarades ont fait deux, trois, cinq ou dix expériences qui leur ont prouvé que le parti est plus avisé, plus expérimenté, alors ils deviendront plus prudents dans leur opposition au parti, plus modérés dans les formes de leur opposition. Quiconque parlera alors avec mépris du parti sentira tout de suite autour de lui vide et ironie et cela éduquera les gens. Mais si nous abordons les jeunes camarades avec une conception d’ensemble du genre « Garçons et filles, vous vous êtes très bien conduits contre le parti socialiste parce que c’était un mauvais parti, mais nous sommes un bon parti, ne l’oubliez pas : il ne faut pas vous dresser contre nous », comment pouvez-vous les convaincre avec une telle conception ? C’est très dangereux : « Vous croyez que c’est un bon parti, mais nous, nous ne le croyons pas. »
— « Oui, nous sommes contre l’avant-gardisme dans la mesure où il est dirigé contre nous ! »
Ils répondront alors : « Vous n’êtes que des bureaucrates, ni plus, ni moins ! » C’est très dangereux. Théoriquement, c’est correct comme la question de la discipline. La discipline de fer, d’acier, est absolument nécessaire, mais si l’appareil du jeune parti commence le premier jour par l'exiger, cela peut perdre notre parti. Il faut éduquer la confiance dans les dirigeants du parti et dans le parti en général, parce que la direction n’est qu’une expression du parti.
Nous pouvons aujourd’hui connaître l’échec dans deux directions. Dans celle de la centralisation, et dans celle de la démocratie. Je pense qu’aujourd’hui il nous faut exagérer la démocratie et être très, très patients avec le centralisme dans cette époque de transition. Il nous faut éduquer ces jeunes pour qu’ils comprennent la nécessité du centralisme. Je ne suis pas sûr que les pertes n’aient pas été dans une certaine mesure dues à l’impatience centraliste ou au manque d’indulgence vis-à-vis de ces éléments qui n’ont eu que la fâcheuse expérience du parti socialiste, qui voudraient respirer librement, et qui ne savent pas eux-mêmes ce qu’ils veulent. Ils répondent : « Et maintenant, vous dites que vous allez nous étrangler par des méthodes bolcheviques authentiquement révolutionnaires? » Ils prennent peur et disent : « Non. Je quitte le parti. » Non, je suis pour la démocratie qui peut constituer la base du centralisme, mais le centralisme dans le vide ne peut créer aucune démocratie, il peut seulement détruire ce qui existe.
Je crois qu’il faut absolument faire un recensement du parti et de la jeunesse afin de savoir ce dont nous disposons, car le terme d’« ouvrier » est très élastique : il nous faut connaître leur répartition par métier, par syndicats, par localités, par districts, etc., et quand nous aurons des diagrammes sous les yeux, le C.N. pourra agir dans une plus grande clarté et avec plus de sens de l’opportunité.
S’il existe une tendance du genre de celle d’étudiants qui se croient plus aptes à la révolution, je suis pour proposer à chacun de devenir candidat. Il est également tout à fait possible qu’il soit bon d’introduire la « candidature » sous la forme d’une période de probation, ou de la rétrogradation de la qualité de membre à part entière à celle de candidat, surtout pour un manque de courage ou de dévouement. S’il est clair pour tous qu’un membre du parti n’a pas rempli ses obligations, surtout si ce n’est pas la première, mais la deuxième ou troisième fois, alors dites-lui « Tu dois choisir, mon ami, entre devenir candidat ou quitter l’organisation! ». Je pense qu’un tel stage de candidat pourrait durer six mois, mais il serait possible de regagner la qualité de membre en recrutant pour l’organisation au moins deux jeunes travailleurs pendant cette période.
Je crois qu’il faut fixer à tous les étudiants comme une tâche obligatoire d’avoir à gagner en six mois leur place dans le mouvement ouvrier : sinon, ils seront l’un après l’autre ramenés au statut de candidats, de façon à leur faire comprendre que nous sommes un parti prolétarien de lutte de classes, et non de débats d’intellectuels. A cet égard, on peut être moins indulgents.
En ce qui concerne les rapports entre le parti et la jeunesse. Je ne connais pas vos projets pour le nouveau C.N., ni vos discussions à son sujet, mais je propose que, si vous devez choisir un C.N. de 19 membres, vous n’y mettiez pas plus de sept membres du parti. S’ils militent dans la jeunesse, nous ne pouvons pas leur donner le droit d’y voter contre les décisions du C.N. Bien entendu, le C.N. ne devrait pas commettre l’erreur de prendre de façon prématurée des décisions obligatoires, surtout touchant la jeunesse, mais si on votait une telle résolution en pleine connaissance de cause, les membres du parti devraient évidemment voter dans le sens conforme aux décisions du parti. Il est tout à fait évident qu’il est du devoir des sept de convaincre les douze autres, et de les gagner à cette décision. S’ils sont battus, la décision demeure ; le parti ne peut pas simplement changer une décision.
J’ai aussi autre chose à dire, sur l’organisation paramilitaire. Sur le papier, c’est bien, mais pas facile à organiser. C’est lié à la question de la discipline, du dévouement, etc. Le principe est juste, mais peut-être faudrait-il avancer pas à pas en créant un véritable groupe militaire au moyen d’une milice de jeunes, personne n’étant obligé immédiatement d’entrer dans la milice avec uniforme, discipline. Je suis sûr que c’est très clair : ils deviendront les meilleurs pour apprendre parce qu’ils ont l’esprit de combattants. Ils deviendront les membres modèles de l’organisation, et c’est par leur intermédiaire que vous éduquerez les autres.
L’uniforme. C’est aussi une question d’argent. Les étudiants auront des réticences, mais ils acceptent plus volontiers l’uniforme que les ouvriers. Je ne connais pas bien les mœurs américaines, mais je pense qu’un jeune chômeur peut se dire « Ce n’est pas pour moi ». En voyant un jeune magnifique, bien habillé, qui chante, etc. il peut se sentir très pauvre type en face d’un élève-officier. C’est une question très importante. Si on pouvait donner des uniformes identiques à tous ceux qui veulent adhérer, ce ne serait pas pareil, mais il se peut très bien que des ouvriers disent : « Si j’entre là-dedans, je me trouverai en position d’infériorité. » Il faut voir cette question sous tous les angles. Un insigne, c’est très bien, une cravate, un brassard, etc. Ce n’est pas cher. Mais un uniforme... Je ne vois rien sur la question matérielle (dans le projet de résolution) : c’est une question à laquelle j’aimerais avoir une réponse.
Je voudrais rectifier ce que j’ai dit hier sur les méthodes conspiratives. Ce n’est pas vrai pour les jeunes. Hier, on me disait qu’on pouvait comprendre mon opposition aux méthodes conspiratives par rapport à la correspondance, au danger du G.P.U., etc. Pour ma part, je soulignais un seul domaine, à savoir, notre activité à l’intérieur du P.C., à l’intérieur des J.C., avec les fascistes. C’est très important, mais ce n’est pas tout. Nous ne pouvons pas inviter notre petite jeunesse à entamer tout de suite le combat contre les forces unies de l’État, des fascistes, du G.P.U., etc. Personne ne le propose. Mais ce qui est tout à fait nécessaire pour les luttes à venir, c’est une connaissance parfaite de nos ennemis. Et une connaissance pas seulement théorique — je crois qu’elle est nécessaire — mais aussi concrète. Cette étude n’est mentionnée qu’en passant dans votre résolution. L’uniforme y tient trop de place. Il nous faut souligner la nécessité — pour combattre des forces aussi puissantes, il faut les connaître du point de vue du socialisme scientifique. Il nous faut les connaître de façon pratique, l’endroit où ils sont, où sont les quartiers généraux des staliniens, des nazis, etc. Quand on arrive dans une nouvelle ville, il faut demander : « Montrez-moi votre carte, s’il vous plaît, votre carte d’état-major avec des cercles et des points pour la ville, la cité, le comté, l’état, vos amis et vos forces. » Pour l’éducation militaire, c’est très important. Il vous faudrait pénétrer dans toutes les organisations ennemies, obtenir autant que possible leurs effectifs exacts, des coupures de leurs journaux permettant de comprendre les caractères essentiels de leurs forces et de leurs objectifs, etc. C’est là le travail de l’état-major de l’armée. Il faut qu’il soit fait par chaque comité local de l’organisation de jeunesse.
Je voudrais aussi qu’on change Challenge, il n’est pas mauvais, mais Révolution est sans doute le meilleur. Mais c’est une question secondaire. Toutes les sections européennes, belge, française, etc. utilisent Révolution.
Une question : à propos du mot « révolution » dans le titre de l’organisation, ne pensez-vous pas que cela pourrait servir de prétexte à l’expulsion de militants d’origine étrangère ?
Gould. — Je ne connais pas l’aspect juridique, mais toute organisation ayant des liens avec l’étranger doit remettre au gouvernement les noms, les dossiers, et subir une enquête serrée.
Je suis heureux que la question de la nouvelle organisation de jeunesse ait été discutée à partir de l’idée selon laquelle nous n'avons pas une idée précise, à partir des traditions passées, mais au contraire que notre problème aujourd’hui est d’expérimenter, d’apprendre à partir de ces expériences relativement modestes que nous avons pu faire auparavant. Mais je ne pense pas pouvoir être d’accord sur le fait qu’il y aurait dans l’organisation de jeunesse une tendance excessive à la critique directe du centre. Cela, camarades, c’est précisément la critique de tous nos camarades à la base. C’est une faute dont nous portons tous la responsabilité, mais c’est un fait. Et l’expérience que nous avons faite avec cette résolution atteste de sa validité. Toute notre optique doit être d’encourager l’initiative locale, et la résolution y insiste : à long terme, plus d’initiative, plus d’autonomie pour les unités locales. Mais, en l’absence de toute initiative du centre, ces dernières n’ont pas pu effectuer le changement dont elles éprouvent toutes le besoin, et c’est seulement à partir des directives du centre qu’elles ont commencé à fonctionner. Quiconque a vu fonctionner le centre cette année ne peut pas hésiter à le critiquer sévèrement. Et, si on ne le critique pas, on va assister à la répétition de l’expérience passée.
Sur le nom de l’organisation, de nouveau, je ne pense pas pouvoir être d’accord. Je n’ai pas une opinion bien arrêtée, mais j’y accorderai plus d'attention. Pourtant, je ne crois pas que le nom de « Légion de la révolution socialiste » serait attirant pour la jeunesse américaine. Je ne pense pas que son contenu soit conforme à ce qu’ils attendent. Il comprend un programme, certes mais qui sera immédiatement teinté de colorations que les jeunes Américains tiennent pour étrangères. C’est mon impression, mon opinion. Je crois qu'il nous faut trouver un nom qui traduise le caractère révolutionnaire de notre mouvement, son courage, sa détermination, mais qui soit acceptable pour les jeunes. Je proposerai pourtant ce nom au congrès et nous laisserons trancher les délégués. Nous les laisserons discuter et décider, là-dessus, sur ce nom que je ne proposerai pas mais qui sera l’un de ceux que nous suggérons, sauf si, bien sûr, on m’a convaincu d’ici là. Je suis également d’accord avec le camarade Trotsky que staliniens et fascistes peuvent danser mieux que nous et nous surpasser en élégance parce qu’ils ont beaucoup plus de ressources, et la résolution le montre bien. Ce qu’ils ne peuvent pas donner à la jeunesse, ce que nous sommes seuls à pouvoir lui donner, c’est le programme révolutionnaire, c’est la lutte pour le programme révolutionnaire qui gagnera les jeunes. Quant aux expressions externes du caractère de combat de l’organisation, c’est autre chose.
Maintenant sur la question du C.N. avec sept camarades au plus membres du parti. Comme l’a dit lui-même le camarade Trotsky, c’est ainsi que cela devrait être théoriquement; mais introduisez cette méthode aujourd'hui, ce procédé demain, et vous n’aurez plus de direction parce que tous les cadres avancés sont des membres du parti. Demandez à tous les camarades de n'importe quelle section, qui sont les dirigeants jeunes : ce sont des membres du parti. C’est parce que l’organisation de jeunesse n’est pas idéale, mais les militants les plus avancés sont au parti. De la même manière, il y a dans la résolution une clause qui prescrit que tous les membres de l’organisation de jeunesse, quand ils ont dépassé vingt et un ans, passent des jeunesses au parti. Comme idée, c’est juste, et, au bout du compte, on le fera. Mais l’expliquer demain, je ne crois pas que ce serait juste pour l’organisation. Il faut y arriver petit à petit et c’est pareil pour le C.N.
La question de l'argent pour l'uniforme, c’est un point très important. Soit dit en passant, la résolution ne prévoit pas un uniforme complet, avec vareuse, bottes, etc., mais un uniforme très simple, chemise, cravate, casquette, etc., lequel est non seulement accessible, mais accepté avec enthousiasme par les jeunes et à la portée financière d'un jeune ordinaire, chemise bleue, cravate rouge — la cravate à 10 cents, la chemise entre 50 cents et un dollar, la casquette à 15 ou 20 cents. Mais nous avons toujours eu l'habitude, dans notre expérience à nous au moins, quand un camarade ne peut les acheter lui-même, de les lui acheter collectivement. D’un point de vue financier, c'est tout à fait réaliste.
Et enfin la question de l’éducation. C’est vrai que la résolution l'éclaire bien. Pas seulement là-dessus, sur toutes les questions. On a le programme d’action, qui entre dans le détail quant aux moyens d'appliquer cette résolution, en suggérant les voies et moyens de son application. Notre organisation de jeunesse a un immense besoin d'être éduquée. Et l'une des parties les plus importantes du programme d'action, c’est, comme je l'ai dit, celle qui traite de l'éducation. Et la future organisation se propose de la leur donner.
Trotsky. — « Nous ne sommes pas une organisation de jeunes, nous sommes une organisation du parti! » ... Alors je vous propose d’enlever du C.N. les bureaucrates du parti et d’y faire venir des éléments neufs... « Non, non, non ! C’est dangereux ! Que des jeunes puissent se diriger eux-mêmes, c’est dangereux ! » C’est du bureaucratisme. Le bureaucratisme, c’est le manque de confiance dans la capacité de compréhension limitée des masses. Je vous assure que le C.N. est l’université la plus élevée de l’organisation. C’est très important. S’il y a sept bons enseignants — et du parti — alors ils seront les meilleurs et les douze seront de bons éléments. Ils seront sensibles aux bons arguments et, au prochain congrès, vous en éliminerez la moitié. Il sera clair qu’ils ne sont pas aptes. Mais les six autres se développeront très bien et remplaceront les membres du parti éliminés. De façon générale, je crois que, sur la question de l’éducation et du développement de l’organisation à cet égard, nous devons tourner très brutalement au prochain congrès. Je me contenterai de proposer cinq membres du parti et quatorze militants de base de l’organisation de jeunes, et je vous garantis que ce sera excellent. Pourtant je peux vous faire une concession et répéter ma proposition de sept et douze.
Quel est actuellement le rapport entre ces membres du parti et les jeunes ? Aucune souplesse, aucune. Le C.N. décide ce que doivent faire les jeunes. Dans cette chaîne, le C.N. de la jeunesse est aussi un chaînon entre celui du parti et la base de la jeunesse. Et ainsi, on a le deuxième parti. Une édition jeune du parti, c’est une organisation de jeunesse indépendante. S’ils sont douze, la majorité, on peut être certain qu’ils représentent mieux l’état d’esprit des jeunes que les principes du marxisme : mais si vous n’êtes pas capables de les convaincre, pour votre décision, c’est qu’elle est mauvaise, ou bien prématurée pour cette organisation, et qu’il faut la reporter. Il vaut mieux reporter que de régenter par des décisions bureaucratiques. C’est là une proposition très, très importante, plus que les autres. Au cours d’une discussion avec d’autres camarades, j’ai été amené à mentionner ce fait que, dans notre combat dans l’illégalité contre le tsarisme, chaque fois que la direction était arrêtée, tous ceux de ses membres qui se retrouvaient en prison pensaient toujours que tout était perdu. Pourtant, chaque fois, l’organisation en ressortait plus solide qu’avant, parce que les jeunes étaient bien, capables, mais un peu opprimés par l’autorité du comité illégal, puisque personne ne pouvait le contrôler. Je suis certain que notre problème le plus important est de renouveler notre organisation à partir des sources de la jeunesse.
Oui, la proposition du nom. Si vous en avez un meilleur, un nom prolétarien, révolutionnaire, il peut provoquer l’enthousiasme, mais pas la révolution socialiste. Je crois que la révolution attire les jeunes. « Légion de la révolution socialiste », c’est un bon nom. Le camarade Gould propose de le proposer au congrès, mais pas en homme convaincu de proposer un bon nom. Mais ce que je demande, c’est de le proposer pas comme un mauvais nom, mais comme un bon.
Sur le travail conspiratif, je crois que même dans les syndicats, même à Minneapolis ", il peut se produire un tournant et que les réformistes s’emparent de la majorité et excluent nos camarades des syndicats. Nous devons avoir des camarades qui n’agissent pas ouvertement, mais en secret et qui pourront rester en cas d’exclusion. C’est une nécessité absolue.
Sur l’éducation, c’est une phase importante que d’habituer les camarades à être exacts en tout. Arriver à l’heure aux réunions, donner des chiffres exacts pour la composition, etc. et sans exagération, parce que, souvent, là où manquent enthousiasme et activité, on exprime l’enthousiasme en exagérant les nombres, les activités, etc. Cela fait partie aussi de l’éducation bolchevique.