Trotsky : L’alternative économique

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À mesure que l’URSS bureaucratique s’enfonce dans le chaos, la plate-forme économique de Trotsky et de l’Opposition de gauche apparaissent comme la boussole indispensable pour y refonder un projet socialiste. Ce qui explique que, pour les libéraux, les « néo-bolchéviks » soient À aujourd’hui l’ennemi à abattre…

Les infâmes calomnies lancées jadis, par Staline et les néo-staliniens, contre Léon Trotsky, sont aujourd’hui unanimement rejetées en URSS. À la veille du cinquantième anniversaire de son assassinat, les « Izwestia », le quotidien du gouvernement, a reconnu solennellement que Lev Davidovitch a été un grand et honnête révolutionnaire, l’un des principaux fondateurs et dirigeants de l’État soviétique.

D’autres journaux ont révélé, qu’à deux reprises durant l’année 1922, Lénine l’avait proposé comme vice-président du Conseil des commissaires du peuple et comme son remplaçant automatique, en cas de maladie ou de décès.

Mais cela ne veut pas dire qu’à cette réhabilitation de fait du fondateur de notre mouvement, correspond une approbation de sa plateforme politique, opposée à celle de Staline. Bien au contraire. Les médias et les milieux des sciences sociales en URSS sont dominés aujourd’hui par des tendances néo-social-démocrates et néo-libérales, hostiles au léninisme, au marxisme et à la révolution d’Octobre. Pour ces courants-là, Trotsky reste un adversaire idéologique, le trotskysme un ennemi politique.

Il s’agit pourtant d’une figure et d’une tradition incontournables en Union soviétique. On peut difficilement nier que Staline les ait considérés comme ses ennemis numéro un. Comme Staline est haï par l’immense majorité du peuple soviétique, il faut bien que les idéologues à la mode cherchent à éviter que cette haine se traduise automatiquement en une certaine sympathie à l’égard de Trotsky. La solution pour laquelle ils ont généralement opté, est celle d’un nouveau train de calomnies, moins infamantes certes que celles des staliniens et néo-staliniens, mais tout autant que ces dernières basées sur des falsifications historiques manifestes.

Ironie de l’histoire, on reproche aujourd’hui à Trotsky non d’avoir été contre-révolutionnaire mais d’avoir été ultra-révolutionnaire, un « fanatique de la révolution ». On ne lui reproche pas d’avoir été un adversaire de Lénine, mais d’avoir été, en 1917 et plus tard, l’âme damnée et « l’inspirateur » de Lénine. Trotsky, incarnation « sanguinaire » de la révolution d’Octobre (juif de surcroît et « cosmopolite » imbu de « culture européenne »), est la première cible des néo-fascistes et des néoCent Noirs, quelques fois ouvertement alliés aux néo-staliniens. Trotsky, « utopiste dogmatique » de la « mission historique de la classe ouvrière » et de la « révolution mondiale », serait le grand responsable de la « déviation » de l’histoire à partir de 1918n d’après tous les adversaires démocrates de la révolution d’Octobre.

L’adversaire de la NEP ?[modifier le wikicode]

Dans cette cacophonie, le débat sur les alternatives de politique économique occupe une place de choix. Trotsky aurait été l’adversaire de la NEP, le partisan de la « super-industrialisation », un ennemi farouche du paysan privé, le père de « l’économie de commandement ». Staline n’aurait fait qu’appliquer le programme économique de Trotsky. La lutte entre Staline et Trotsky aurait été une simple lutte pour le pouvoir entre deux candidats despotes, disent les anti-trotskystes d’aujourd’hui en URSS.

Cette interprétation du débat qui faisait rage en URSS, à partir de 1923 et jusqu’en 1928, voire jusqu’en 1934, implique une confusion entre deux démarches distinctes de Trotsky et de l’Opposition de gauche (à part les « capitulards » à partir de 1929) : la démarche analytique à long terme d’une part, la démarche politique, opératoire immédiatement et à moyen terme d’autre part. Cette confusion est le fruit d’un mensonge délibéré, de l’ignorance ou du manque de compréhension de ce dont on discutait alors.

En s’opposant à la théorie stalinienne de la possibilité de parachever la construction du socialisme dans un seul pays, Trotsky affirma sa conviction que, vu la nature de l’impérialisme, la question de savoir si, en URSS, le socialisme ou le capitalisme finirait par triompher, cette question ne pourrait être tranchée qu’à l’échelle internationale. Il était impossible d’établir, en Russie, une véritable société sans classes, des « producteurs librement associés », ce qui présuppose un niveau de productivité moyenne du travail supérieur à celui des pays capitalistes les plus avancés, en conflit permanent avec le marché mondial capitaliste. Le poids de cet antagonisme finirait par casser la chance du socialisme en URSS, que ce soit de manière militaire ou par la pression économique si la révolution ne s’étendait pas aux « nations industriellement dirigeantes ».

Cette analyse des tendances à long terme avait, certes, aussi des implications à plus court terme. Elle soulignait les dangers d’un développement trop lent de l’industrie, qui risquerait de favoriser une jonction entre l’agriculture privée russe et le marché mondial capitaliste, une rupture de l’alliance ouvrière et paysanne. Pour combattre les risques de restauration capitaliste, elle soulignait la nécessité d’une limitation de l’accumulation privée du capital, d’une élévation de la production de l’industrie étatique qui lui permettrait de vendre des produits industriels à plus bas prix. Ceci nécessitait de nouveau un développement plus rapide de l’industrie.

Donc, contrairement à une légende d’origine stalino-boukharinienne, relancée au cours des années soixante notamment pas Georg Lukacs, Trotsky ne tira point de conclusions aventuristes-défaitistes de ce diagnostic, dont l’histoire vient d’ailleurs de confirmer le bien-fondé de manière éclatante, justement sur le terrain économique. Il n’enferma point le destin à moyen terme de l’URSS dans le dilemme fuite en avant par la guerre révolutionnaire et l’expansionnisme territorial ou bien recul inévitable vers le capitalisme. Au contraire, il proposa un cours de consolidation progressive des acquis de la révolution socialiste, en attendant que mûrissent les conditions objectives et subjectives de victoires révolutionnaires dans les pays avancés. En d’autres termes, il proposa que l’URSS s’engage dans la voie d’un début de construction du socialisme, sans rodomontades ni illusions, de manière réaliste et prudente.

Cette alternative « trotskyste » était fondée sur une dialectique de logique économique et de dynamique de forces sociales, dont Trotsky reste le représentant hors pair parmi tous les marxistes du XXe siècle. L’accélération du rythme de l’industrialisation devait s’opérer par un transfert progressif du surproduit social vers le secteur socialisé productif de l’économie, c’est-à-dire essentiellement aux dépens de la bourgeoisie moyenne (koulaks et « nepmens ») et aux dépens de la bureaucratie, par une réduction radicale des dépenses improductives.

Un renforcement du poids social du prolétariat et des paysans pauvres (ainsi que de la fraction des paysans moyens prêts à participer à ce projet) dans la société devait être réalisé grâce à l’élévation de leur niveau de vie et de l’amélioration de leurs conditions de travail : élimination du chômage, poids décisif des travailleurs dans la gestion des entreprises, adhésion de la paysannerie laborieuse à des coopératives de production fondées, dès le départ, sur la mécanisation du travail, afin de garantir des revenus supérieurs à ses membres par rapport à ce qu’ils avaient connus en tant que producteurs individuels.

Ces propositions étaient marquées par une cohérence interne qui impressionne encore aujourd’hui. La construction, dès 1923, d’une première grande usine de tracteurs aurait permis de réaliser le volet « adhésion volontaire des paysans pauvres aux kolkhozes ». Elle aurait émancipé la ville du chantage à la réduction des livraisons par les paysans riches, en évitant la concentration du surplus agricole dans leurs mains. Elle aurait permis la poursuite d’une augmentation des salaires réels, en cours jusqu’en 1926-1927. Elle aurait permis de répartir, sur dix ans au lieu de cinq, l’effort d’accumulation pour doter l’URSS d’une puissante industrie d’armement, en vue de faire face àtoute éventualitéd’agression militaire.

En même temps, ce cours de politique économique embrayait sur un cours proposé au Komintern et aux partis communistes, leur permettant d’utiliser à fond les occasions réelles de réaliser des percées en direction de la révolution socialiste, occasions qui se succédèrent au cours de la période 1923-1937 (Allemagne, Grande-Bretagne, Espagne, France).

Loin d’être du « trotskysme sans Trotsky », la politique économique stalinienne fut, à partir de 1928 aux antipodes de celle de l’Opposition. L’industrialisation à outrance s’accompagna d’un abaissement et non d’une élévation des salaires réels, d’une détérioration catastrophique des conditions de travail. Les dépenses administratives ne furent pas réduites mais amplifiées de manière colossale, absorbant la majeure partie de ce qu’on avait « gagné » sur la consommation ouvrière. De là l’hypertrophie monstrueuse de la bureaucratie et son pouvoir absolu sur la société.

Si l’essor de la production ne peut s’appuyer sur l’intérêt et la conscience des producteurs, on doit chercher à le réaliser par la contrainte et le contrôle généralisé. À la place des « soviets partout », la réalitéfut alors celle des gendarmes-contrôleurs partout et de la paperasserie partout.

La collectivisation forcée de l’agriculture fut aux antipodes de l’adhésion volontaire prônée par l’Opposition, dans la lignée du « plan coopératif » de Lénine. Elle entraîna des réactions désespérées des paysans – notamment l’abattage massif du bétail –, associées à un sous-développement systématique des investissements, tant dans l’agriculture que dans le secteur des services (stockage, transports, distribution) et à une politique aberrante des prix. Elle fut ainsi source de misère à la campagne et de pénurie à la ville, pendant des décennies.

Contre l’économie de commandement[modifier le wikicode]

Trotsky, Rakovski, l’Opposition de gauche dénoncèrent la collectivisation forcée de l’agriculture, la suppression totale de la NEP, la « sur-industrialisation », les atteintes aux salaires réels et aux revenus des paysans, l’aggravation de l’inégalité sociale, dès que ce cours stalinien se trouva entamé. Les identifier avec ce cours, les représenter comme l’ayant inspiré, représente donc un mensonge pur et simple. Identifier la thèse de Preobrajensky-Trotsky, selon laquelle, à long terme, une extension de l’appropriation privée du surproduit social et des mécanismes marchands rendrait la restauration capitaliste inévitable avec l’élimination, à court ou à moyen terme, de ces mécanismes est une falsification de l’orientation économique de Trotsky et de l’Opposition de gauche. Quelques citations suffiront pour le démontrer.

L’opposition par elle-même[modifier le wikicode]

Christian Rakovski, V. Kossior, N. Mouralov, V. Kasparova écrivent, dans la déclaration d’avril 1930 : « Le décret qui abolit la NEP et les koulaks en tant que classe est (…) une absurdité économique (…). Aucune charte ni aucun décret ne peuvent abolir des contradictions qui opèrent encore dans l’économie et dans la vie de tous les jours (…). Des tentatives d’ignorer cette vérité économique (…) ont conduit à l’emploi de la violence (…). La collectivisation étendue (de l’agriculture) a été lancée en rupture avec le programme du parti, avec les principes fondamentaux du marxisme et au mépris des avertissements les plus élémentaires de Lénine concernant la collectivisation, la paysannerie moyenne et la NEP ».

Le 22 octobre 1932, Trotsky poursuit, dans « l’Economie soviétique en danger » : « S’il existait un cerveau universel, décrit par la fantaisie intellectuelle de Laplace, un cerveau enregistrant en même temps tous les processus de la nature et de la société, mesurant la dynamique de leurs mouvements, prévoyant le résultat de leur action, un tel cerveau pourrait évidemment construire, a priori, un plan économique définitif et sans aucune faute, en commençant par calculer les hectares de fourrage et en finissant par les boutons de gilets.

« En vérité, la bureaucratie se figure souvent que c’est elle, principalement qui a un tel cerveau, c’est pourquoi elle se libère si facilement du contrôle du marché et de la démocratie soviétique. En réalité, la bureaucratie se trompe foncièrement dans l’évaluation de ses ressources intellectuelle (…). Les innombrables participants de l’économie étatique, particuliers, collectifs et individuels, manifestent leurs exigences et le rapport de leurs forces non seulement par l’exposé statistique des commissions du plan, mais aussi par l’influence inévitable de l’offre et de la demande. Le plan se vérifiera et, dans une grande mesure, se réalisera par l’intermédiaire du marché. La régularisation du marché lui-même doit se baser sur les tendances qui s’y font jour. Les organismes précités doivent démontrer leur compréhension économique au moyen du calcul commercial. Le système de l’économie transitoire ne peut être envisagé sans le contrôle du rouble. Cela suppose, en conséquence, que le rouble soit égal à sa valeur. Sans la stabilité de l’unité monétaire, le calcul commercial ne peut qu’augmenter le chaos. »

Et de poursuivre dans La Révolution trahie : « Tandis que la croissance de l’industrie et de l’entrée de l’agriculture dans la sphère du plan compliquent extrêmement la tâche de la direction, en mettant au premier plan le problème de la qualité, la bureaucratie tue l’initiative créatrice et le sentiment de responsabilité sans lequel il ne peut y avoir de progrès qualitatif. Les plaies du système sont peut être moins visibles dans l’industrie lourde, mais elles rongent, en même temps que la coopération, l’industrie légère et alimentaire, les kolkhozes, les industries locales, c’est à dire toutes les branches de la production proches de l’habitant (…).

« On peut construire des usines géantes d’après les modèles importés de l’étranger, sous le commandement économique, en les payant, il est vrai, le triple de leurs prix. Mais, plus on ira, plus on se heurtera au problème de la qualité et il échappe à la bureaucratie comme une ombre. La production semble marquée du sceau gris de l’indifférence. Dans l’économie nationalisée, la qualité suppose la démocratie des producteurs et des consommateurs, la liberté de critique et d’initiative, toutes choses incompatibles avec le régime totalitaire de la peur, du mensonge et de la louange. »

Trois orientations[modifier le wikicode]

Il y avait bel et bien, trois orientations de politique économique en présence dans le PCUS entre 1928 et 1934, pour autant que les partisans de Boukharine maintinrent la leur après 1933, ce qui n’est guère démontré.

La ligne de Staline se fondait sur la collectivisation forcée de l’agriculture, l’hyper-industrialisation aux frais des ouvriers et des paysans, et la planification (mieux vaudrait dire la semi-planification) ultra-centralisée et ultra-disproportionnée.

La ligne de Boukharine était basée sur la « coexistence pacifique » de l’économie privée et de l’économie socialisée, la première étant censée alimenter la seconde, dont l’expansion resterait fort modérée.

La ligne de l’Opposition prévoyait une expansion du secteur socialisé plus rapide que la projet de Boukharine, mais beaucoup moins rapide et surtout mieux équilibré que la ligne de Staline, avec réduction des dépenses improductives comme du poids de la bureaucratie et amélioration du niveau de vie des ouvriers et des paysans laborieux.

Ces trois orientations reflétèrent manifestement la pression de forces sociales différentes. Mais il faut reconnaître que, du moins pendant la période de 1930-1933, la différence entre les propositions concrètes de l’Opposition et celles des boukhariniens s’avéra bien plus réduite qu’avec le cours stalinien. Ce qui caractérisa surtout l’orientation économique de l’Opposition, ce fut l’union et la cohérence entre les propositions économiques d’une part, les propositions politiques et sociales d’autre part : démocratie soviétique, satisfaction des exigences matérielles des producteurs, lutte contre l’inégalité et contre les privilèges bureaucratiques.

Dès 1932, nous lisons dans « L’Économie soviétique en danger » : « La lutte pour les intérêts vitaux, considérés comme les facteurs fondamentaux de la planification, nous introduit dans la sphère de la politique, qui est de l’économie concentrée. Les armes des groupes sociaux de la société soviétique sont (doivent être) ; les soviets, les unions syndicales, les coopératives, et, avant tout, le parti dirigeant. Seule la coordination de la planification étatique, du marché et de la démocratie soviétique peuvent assurer une direction juste de l’économie de l’époque de transition ». La dernière phrase mérite d’être soulignée.

Et, dans La Révolution trahie, Trotsky affirme : « Le rétablissement du droit de critique et d’une liberté électorale authentique sont des conditions nécessaires du développement du pays. Le rétablissement de la liberté des partis soviétiques, à commencer par le Parti bolchévik, et la renaissance des syndicats y sont impliqués. La démocratie entraînera, dans l’économie, la révision radicale des plans dans l’intérêt des travailleurs. La libre discussion des questions économiques diminuera les frais généraux imposés par les erreurs et les zigzags de la bureaucratie. Les entreprises somptuaires, Palais des soviets, théâtres nouveaux, métros construits pour l’épate, feront place à des habitations ouvrières. Les normes bourgeoises de répartition seront remaniées aux proportions strictement commandées par la nécessité, pour reculer, au fur et à mesure de l’accroissement de la richesse sociale, devant l’égalité socialiste ».

Ces lignes, écrites voilà cinquante-cinq ans, conservent une actualité brûlante dans l’URSS d’aujourd’hui. De nouveau, on y retrouve, en effet, trois orientations de politique économique fondamentalement différentes :

— l’une pour maintenir le contrôle bureaucratique sur l’économie, fût-ce au prix d’importantes réformes économiques ; — l’autre, pour développer un important secteur privé, avec feu vert pour l’accumulation primitive du capital privétous azimuts ; — la troisième, néo-socialiste, de défense des intérêts immédiats des travailleurs (plein emploi, pouvoir d’achat, services sociaux) et de réduction des inégalités et injustices sociales.

La deuxième tendance, contrairement à celle de Boukharine et de ses camarades, qui furent d’honnêtes communistes, est essentiellement anticommuniste et anti-socialiste. La troisième n’est pas trotskyste. Mais elle devra de plus en plus emprunter ses idées à l’arsenal marxiste-révolutionnaire, quel que soit le vocabulaire qu’elle choisisse, pour autant qu’elle opère sa jonction avec le mouvement ouvrier indépendant réel, en voie de renaître en URSS.

De nouveau, la calomnie[modifier le wikicode]

Il est significatif qu’un adversaire du bolchévisme, libéral et pro-capitaliste, Leonid Radzikovski, écrivant dans « Les Nouvelles de Moscou » du 9 septembre 1990, accuse pêle-mêle les néo-staliniens à la Nina Andreeva et le camarade Bouzgaline, porte-parole de la « plate-forme marxiste » du PCUS, qu’il jette dans le même sac, – bel exemple d’amalgame stalinien ! – de s’inspirer des idées de Trotsky. Les « néo-bolchéviks » seraient ainsi tous des « néo-trotskystes ».

Pourtant, le même Radzikovski doit reconnaître : « Trotsky, grâce à son analyse marxiste, a trouvé le principal mal de la société soviétique : la lutte d’une nouvelle aristocratie, de la bureaucratie contre les masses populaires qui l’ont portée au pouvoir (…). Il cherchait les moyens de briser la dictature de la bureaucratie (…). Aussi, Trotsky a-t-il élaboré, dans les années 1930, un programme de réorganisation de l’Union soviétique impliquant la démocratisation, l’autogestion, la transparence et même le marché ».

En effet. Mais accuser la nouvelle gauche socialiste soviétique de vouloir « défendre le système bureaucratique contre le capitalisme » est un calomnie grossière. Les vrais « néo-bolchéviks » se battent, comme Trotsky, sur deux fronts ; et contre la bureaucratie, et contre la bourgeoisie moyenne montante. Cela correspond aux intérêts matériels des travailleurs.

Suprême contradiction de nos néo-libéraux : comment interdire à la majorité des citoyens et citoyennes de défendre leurs intérêts propres, alors que l’on proclame le droit sacré de tous les individus de le faire ? Au nom de quel principe ? Peut-être celui, dans la plus belle lignée stalinienne, qu’il faut faire le bonheur du peuple malgré lui et contre lui, au besoin par la contrainte ?