Lettre à Grigory Ordjonikidze, décembre 1930

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Lettre 6 (WH 2290)

[au plus tard décembre 1930]

1. En un mot, il faut caractériser cette note[1] comme de la prose bureaucratique (pour employer un langage trivial), car elle ne contient que des raisonnements très généraux, sans aucune analyse de la situation concrète, sans analyse des particularités du moment économique, sans examen des difficultés particulièrement importantes et des problèmes correspondants.

2. Cette note ne donne rien pour ce qui est de relier les divers aspects du plan économique. Pourtant, c’est bien cela que l’on attendait du Gosplan. Le problème du lien entre la production et la consommation, l’industrie, les transports, l’agr [iculture,] la circulation monétaire, l’import-export, les liens entre les différents secteurs, etc., sont autant de questions qui n'ont pas été posées. Il n’est même pas question de l'argent. Et pas davantage de l’autonomie comptable. Etc.

3. Les problèmes les plus importants ont été éludés. Deux lignes sont consacrées au problème de l’élevage. Le problème de la main-d’œuvre qual [ifiée] est évoqué sans aucune analyse et sans aucun entendement de sa signification. Pas un mot sur la consommation et l’industrie légère.

4. Il n’y a pas un mot sur les points de départ de la conception du deuxième quinquennat : pas d’allusion aux résultats approximatifs de la production du premier quinquennat, pas de caractéristique de la situation économique en général (sauf des phrases générales sur l’« achèvement des fondations» et autres façons d’éluder: pas un mot, par exemple, sur le caractère du marché d'aujourd'hui, sur ses particularités ; c’est pourquoi il n’y a rien sur l’autonomie comptable, rien non plus sur les problèmes de l'organisation des kolkhozes, sous l’angle de vue de l’autonomie comptable).

5. Pas un mot pour caractériser la situation écon [omique] internationale, en liaison avec la crise[2]. Il est tout à fait frappant que toute la problématique qui surgit de ce fait reste entièrement hors du champ de vue des auteurs. Pourtant, la chute des prix sur le marché mondial, du fait de la crise, contraint à poser ces problèmes que l’on ne peut ignorer.

6. Il n’y a rien sur la mobilisation de la science, même sur l’étude des richesses naturelles] et les prospections géol [ogiques]. En aucune façon (pas le moindre mot) n’est posé le problème des ouvriers et des ingénieurs étrangers.

7. Les chiffres qui sont fournis ne sont motivés par rien : aucune argumentation ne vient à l’appui. On donne pour la fonte le chiffre de 45 millions de tonnes (baisse par rapport à 60 millions de tonnes). Ce chiffre paraît exagéré, si l’on prend en compte : a) un manque à gagner vraisemblable de 17 millions de tonnes vers la fin du 1er quinquennat, b) la nécessité de transférer une partie des ressources à d’autres fronts et vers les goulets d’étranglement (les transports, la houille, l’industrie légère, les constructions mécaniques agr[icoles], etc.).

  1. Il s’agit vraisemblablement d’une note explicative qui accompagnait des indices chiffrés du développement économique du pays en 1931, présentée par le Gosplan de l’URSS.
  2. Il s’agit du second congrès international d’histoire des sciences et des techniques, qui s’est tenu à Londres du 29 juin au 3 juillet 1931.