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Special pages :
Lettre à Anna Feix, 30 juin 1932
Auteur·e(s) | Léon Trotski |
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Écriture | 30 juin 1932 |
Chère Camarade Feix,
C'est l'effet conjugué du surmenage et d'un malentendu qui m'a empêché de vous écrire plus tôt. Je vous prie de ne pas y voir un manque d'intérêt pour notre correspondance. J'ai consacré le mois passé, dans sa totalité, à rédiger un chapitre complémentaire de l'Histoire de la Révolution d'Octobre (sur le socialisme dans un seul pays). Je viens seulement de l'envoyer aujourd'hui ce qui me permet de respirer un peu et de répondre à vos deux dernières lettres. Ces lettres sont pour moi d'un grand intérêt et je trouve qu'entre-temps vous avez fait quelques progrès dans la bonne direction.
Ce que vous dites à propos de l'écho rencontré par l'édification en Russie parmi les travailleurs autrichiens est fort instructif. En plus des raisons que vous donnez au caractère décousu de vos rapports, il faut ajouter que le processus social, là-bas, est à tous égards transitoire, c'est-à-dire qu'il fourmille de contradictions. Les impressions que rapporte un étranger dépendent au plus haut point des ambitions et des espoirs que cet étranger portait en lui et de l'influence qu'exercent sur ses jugements ses problèmes politiques ou familiaux. Appeler "socialisme" la situation qui règne là-bas, c'est du charlatanisme bureaucratique. Mais il n'est pas besoin de ces rodomontades pour comprendre que se joue là-bas une partie du destin de l'humanité.
Quoi qu'il en soit, c'est en Allemagne que se joue le second acte de la décision. Quelle que soit l'issue finale elle brisera les reins à la social-démocratie en Allemagne et par conséquent aussi en Autriche. Si les fascistes arrivent à Vienne, c'en sera fini de la grandeur de Seitz . Mais pour que les fascistes ne parviennent pas au pouvoir, il faudrait que, dès maintenant et dans la prochaine période, la classe ouvrière puise en elle-même une énergie et un dynamisme si puissants que la social-démocratie en serait déjà rejetée en arrière, ce qui permettrait que soit sélectionnée, composée et éprouvée au combat une nouvelle direction vraiment révolutionnaire. Où peut mener une politique attentiste, démocrate, passive, les social-démocrates allemands l'ont montré à l'envi. Hitler est l'héritier direct de l'art de gouverner d'Ebert . Lorsque votre ami Sch( ) dit qu'il faut gagner la majorité de la classe ouvrière, il a évidemment raison. Mais la gagner à quoi, par quels moyens, telles sont les questions. Si on se contente d'attendre la majorité, elle ne viendra jamais. Il faut la conquérir au combat. La social-démocratie autrichienne est la négation de toute politique d'initiative révolutionnaire. Si elle obtenait la majorité parlementaire, cela ne serait pas sa victoire, mais sa mort, car elle serait bien forcée alors d'expliquer aux travailleurs quel dans un "petit pays", même avec une majorité. socialiste, on ne peut rien entreprendre de sérieux.
Dans une semaine paraîtra, avec beaucoup de retard, le prochain numéro du Biulleten russe et ce n'est qu'au début de l'automne que sera publiée l'Histoire de la Révolution d'Octobre. Je vous en ferai envoyer un exemplaire. Je vous prie de continuer à m'écrire de temps en temps à propos de tout ce que vous observez et des questions que soulèvent les travailleurs. Ne vous laissez pas gagner par la déception en raison de nos progrès lents et laborieux. Un courant vraiment révolutionnaire doit viser le long terme, en particulier dans cette période où l'avant-garde politique internationale doit subir les conséquences des trahisons conscientes de la social-démocratie et des crimes inconscients de la direction communiste. Car, en dépit de tout, nos idées finiront tout de même par l'emporter.