Bibliographie : Lénine, L’Etat et la révolution

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V. Ilyine (N. Lenine), L’État et la révolution (L’enseignement du marxisme sur l’État et les tâches du prolétariat dans la révolution). — Petrograd, Jizn ’ i Znaniye. Prix 2 roubles et 50 kopeks.

IL N’EST PAS NECESSAIRE de recommander les œuvres du camarade Lénine, cependant nous tenons à attirer l’attention tout spécialement sur cet ouvrage. Du point de vue du fond, il n’a rien de nouveau. Mais en même temps presque tout y est neuf. La social-démocratie a tellement réussi à défigurer et à dénaturer l’enseignement communiste révolutionnaire de Marx que, selon une juste expression du camarade Lénine, on est obligé de s’engager dans des études complètes pour retrouver la véritable pensée des fondateurs du communisme scientifique.

Ce livre n’est pas seulement intéressant du point de vue de la simple restauration de leurs idées. Il est d’une brûlante actualité car la question du rapport entre le prolétariat et l’État est la question cruciale qui est posée à l’action révolutionnaire de la classe. Cette question a une importance énorme aujourd’hui parce que la guerre mondiale l’a posée directement au prolétariat. En réalité, la question même de la défense de la patrie est le corollaire de la défense de l’État bourgeois ; la question nationale passe par le soutien à cet État ou, au moins, par une neutralité bienveillante envers lui, etc. Toutes ces questions partielles, quelle que soit leur importance, sont résolues en fonction de la réponse donnée au problème premier des rapports du prolétariat avec l’État de la bourgeoisie qui se donne l’extraordinaire appellation de patrie. L’importance pratique de cette question prend encore plus d’ampleur du fait de ce qui suit : d’abord parce que le pouvoir étatique de la bourgeoisie de tous les pays capitalistes avancés s’est particulièrement renforcé en absorbant les organisations économiques (les syndicats, les trusts, etc.) ; ensuite parce que le prolétariat doit résoudre, dans la pratique, la question de la prise du pouvoir, c’est-à-dire, de sa dictature.

Les problèmes centraux regroupés dans le livre du camarade Lénine, posés et résolus par Marx et Engels, sont ceux qui suivent : 1) qu’est- ce que l’État , 2) quel est le rôle de l’État dans la société communiste future ; 3) quel est le rôle de l’État dans la phase transitoire de la dictature prolétarienne ; 4) quelle est la différence entre la dictature prolétarienne et un type ordinaire d’État (dans la forme et dans le contenu) ; 5) comment le prolétariat prend-il le pouvoir ; et, enfin, 6) quelle doit être l’attitude du prolétariat envers l’appareil d’État bourgeois.

À ces questions Marx et Engels donnent des réponses absolument catégoriques qui sont en totale contradiction avec la pratique de la social-démocratie. (C’est pour cette raison que Lénine, dans son livre, fait une différence nette entre les communistes et les sociaux-démocrates.) L’État est, selon Marx, l’instrument de l’oppression de classe, l’organisation de la classe dominante. L’Etat est plus ou moins le représentant de tout le peuple, disent les sociaux-démocrates. Aucun Etat n’existera dans la société communiste puisque toutes les différences entre les classes disparaîtront, disent les fondateurs du communisme scientifique. « L’Etat de l’avenir », est « l’idéal » des sociaux- démocrates.

Pendant la période transitoire entre le capitalisme et le socialisme, la dictature de classe du prolétariat, l’État prolétarien est nécessaire pour briser définitivement la bourgeoisie, il existe en tant qu’instrument servant à assujettir la bourgeoisie. Les sociaux-démocrates tempêtent quand on commence à mettre en pratique la pensée de Marx.

La dictature du prolétariat n’est pas la république parlementaire avec tous ses ornements, c’est un Etat -Commune sans police, sans armée permanente, sans fonctionnaires, etc., disent les maîtres du socialisme révolutionnaire. « Rien au-delà de la république bourgeoise ! », proclament les sociaux-démocrates.

Pour construire la dictature, pour conquérir le pouvoir politique, il faut briser, casser, faire exploser l’appareil d’Etat de la bourgeoisie, enseignent Marx et Engels. Pour conquérir le pouvoir, il faut récupérer l’appareil quasiment tel quel car c’est un crime de « désorganiser l’armée, les instruments de domination, etc. », disent les sociaux-démocrates.

La lutte contre l’État de la bourgeoisie jusqu’à sa destruction, la haine envers lui comme mécanisme principal de l’oppression - c’est le mot d’ordre de nos grands « anciens ». Le soutien à cet État, le juste patriotisme et « la sagesse d’État », voilà l’enseignement de soumission que prodiguent les sociaux-démocrates asservis.

En gros, c’est cela la différence entre l’enseignement des marxistes révolutionnaires, c’est-à-dire des communistes, et celui des traîtres sociaux-opportunistes qui ont tourné le dos à l’enseignement du marxisme et qui ne jurent que par le nom de Marx mais en même temps trahissent son enseignement de la manière la plus cynique.

Le petit livre de Lénine montre parfaitement cette différence. Et le lecteur ne pourra pas reprocher à l’auteur de citer abondamment les œuvres de Marx et d’Engels. Ces œuvres font taire ces vils esclaves du capital qui se disent sociaux-démocrates, comme elles font taire tous les menchéviks, les SR, les bundistes, les partisans de Scheidemann et de « Novaya Jizn » (la nouvelle vie) qui osent parler au nom des grands maîtres.

Aujourd’hui tout camarade doit lire le livre de Lénine.

N. Boukharine