Modifications

Aller à la navigation Aller à la recherche
3 779 octets ajoutés ,  26 mars 2023 à 20:53
aucun résumé des modifications
Ligne 16 : Ligne 16 :     
===La guerre franco-allemande (1870)===
 
===La guerre franco-allemande (1870)===
En 1870, les tensions montent rapidement entre la Prusse de Bismarck et la France de Napoléon III. L'[[AIT|AIT]] et sa section parisienne font de l'agitation contre la guerre&nbsp;: ''«&nbsp;Travailleurs de France, d'Allemagne et d’Espagne, unissons nos voix en un même cri de réprobation!... La guerre pour une question de prépondérance ou de dynastie ne peut être, aux yeux des travailleurs, qu'une criminelle folie.&nbsp;»''<ref>Première internationale (Karl Marx), [[:fr:Première adresse du Conseil Général sur la guerre franco-prussienne|Première adresse du Conseil Général sur la guerre franco-prussienne]], 23 juillet 1870</ref>
+
En 1870, les tensions montent rapidement entre la Prusse de Bismarck et la France de Napoléon III. L'[[Association internationale des travailleurs]] (« Première internationale ») et sa section parisienne font de l'agitation contre la guerre&nbsp;: ''«&nbsp;Travailleurs de France, d'Allemagne et d’Espagne, unissons nos voix en un même cri de réprobation!... La guerre pour une question de prépondérance ou de dynastie ne peut être, aux yeux des travailleurs, qu'une criminelle folie.&nbsp;»''<ref>Première internationale (Karl Marx), [[:fr:Première adresse du Conseil Général sur la guerre franco-prussienne|Première adresse du Conseil Général sur la guerre franco-prussienne]], 23 juillet 1870</ref>
    
Mais le [[militarisme]] l'emporte, non sans susciter du [[nationalisme]] dans les classes populaires. Lorsque [[w:Guerre franco-prussienne de 1870|la guerre éclate en juillet 1870]], [[Marx|Marx]] préconisait aux socialistes allemands la défense nationale, au nom de l'[[Unification_allemande|unification allemande]]. L'armée française est vaincue en 2 mois.
 
Mais le [[militarisme]] l'emporte, non sans susciter du [[nationalisme]] dans les classes populaires. Lorsque [[w:Guerre franco-prussienne de 1870|la guerre éclate en juillet 1870]], [[Marx|Marx]] préconisait aux socialistes allemands la défense nationale, au nom de l'[[Unification_allemande|unification allemande]]. L'armée française est vaincue en 2 mois.
Ligne 26 : Ligne 26 :  
L'armée française capitule à Sedan le 2 septembre 1870, et Napoléon III est fait prisonnier. Cette nouvelle déclenche une journée d'émeutes à Paris, qui fait chuter l'Empire. Les bourgeois républicains forment un [[w:Gouvernement de la Défense nationale|Gouvernement de la Défense nationale]] à l’Hôtel de Ville, et proclament la [[Troisième République]]. Très modérés lorsqu'ils étaient dans l'opposition à l'Empire, ils essaient à présent de prendre la tête de l'[[État]] pour canaliser l'agitation populaire qui souhaite "chasser l'envahisseur prussien".  
 
L'armée française capitule à Sedan le 2 septembre 1870, et Napoléon III est fait prisonnier. Cette nouvelle déclenche une journée d'émeutes à Paris, qui fait chuter l'Empire. Les bourgeois républicains forment un [[w:Gouvernement de la Défense nationale|Gouvernement de la Défense nationale]] à l’Hôtel de Ville, et proclament la [[Troisième République]]. Très modérés lorsqu'ils étaient dans l'opposition à l'Empire, ils essaient à présent de prendre la tête de l'[[État]] pour canaliser l'agitation populaire qui souhaite "chasser l'envahisseur prussien".  
   −
Malgré la capitulation de Napoléon III, les troupes allemandes continuent à avancer sur le sol français. L'AIT et les socialistes allemands dénoncent alors cette contre-offensive qui prend une nature clairement [[impérialiste]]. Les militants parisiens de l'AIT diffusent une adresse au peuple allemand, l'appelant au retrait des troupes, pour éviter de « verser à flots ton sang et le nôtre ». Le conseil de Londres de l'AIT prend une position anti-guerre.<ref>Première internationale (Karl Marx), [[:fr:Seconde adresse du Conseil Général sur la guerre franco-prussienne|Seconde adresse du Conseil Général sur la guerre franco-prussienne]], 9 septembre 1870</ref>[[File:Affiche rouge, 1871.png|alt=|250x250px|link=|vignette|[[Affiche Rouge (1871)|Affiche rouge]] placardée dans la nuit du 5 au 6 janvier 1871]]Les membres de l’[[Association_Internationale_des_Travailleurs|AIT]] (qu'on appelle les ''Internationalistes''), qui reviennent de prison ou d’exil, sont la force d'impulsion de « comités de vigilance » dans les arrondissements, qui forment un [[Comité central républicain des Vingt arrondissements]] dès le 13 septembre 1870. Celui-ci est méfiant vis-à-vis du  [[w:Gouvernement de la Défense nationale|Gouvernement de la Défense nationale]], et publie une [[Affiche Rouge (1871)|affiche rouge]] appelant à une république sociale et à des mesures énergiques pour la défense de Paris.<ref>Les Amies et Amis de la Commune de Paris, ''[https://www.commune1871.org/la-commune-de-paris/histoire-de-la-commune/chronologie-au-jour-le-jour/466-la-commune-et-la-premiere-internationale La Commune et la Première internationale]'', juillet 2022</ref> Ce Comité est animé conjointement par des révolutionnaires républicains plus ou moins socialistes&nbsp;: [[jacobins]], [[blanquistes]]… La majorité du peuple est cependant encore dans l'expectative.
+
Malgré la capitulation de Napoléon III, les troupes allemandes continuent à avancer sur le sol français. L'[[Association internationale des travailleurs]] (AIT) et les socialistes allemands dénoncent alors cette contre-offensive qui prend une nature clairement [[impérialiste]]. Les militants parisiens de l'AIT diffusent une adresse au peuple allemand, l'appelant au retrait des troupes, pour éviter de « verser à flots ton sang et le nôtre ». Le conseil de Londres de l'AIT prend une position anti-guerre.<ref>Première internationale (Karl Marx), [[:fr:Seconde adresse du Conseil Général sur la guerre franco-prussienne|Seconde adresse du Conseil Général sur la guerre franco-prussienne]], 9 septembre 1870</ref>[[File:Affiche rouge, 1871.png|alt=|250x250px|link=|vignette|[[Affiche Rouge (1871)|Affiche rouge]] placardée dans la nuit du 5 au 6 janvier 1871]]Les membres de l’[[Association_Internationale_des_Travailleurs|AIT]] (qu'on appelle les ''Internationalistes''), qui reviennent de prison ou d’exil, sont la force d'impulsion de « comités de vigilance » dans les arrondissements, qui forment un [[Comité central républicain des Vingt arrondissements]] dès le 13 septembre 1870. Celui-ci est méfiant vis-à-vis du  [[w:Gouvernement de la Défense nationale|Gouvernement de la Défense nationale]], et publie une [[Affiche Rouge (1871)|affiche rouge]] appelant à une république sociale et à des mesures énergiques pour la défense de Paris.<ref>Les Amies et Amis de la Commune de Paris, ''[https://www.commune1871.org/la-commune-de-paris/histoire-de-la-commune/chronologie-au-jour-le-jour/466-la-commune-et-la-premiere-internationale La Commune et la Première internationale]'', juillet 2022</ref> Ce Comité est animé conjointement par des révolutionnaires républicains plus ou moins socialistes&nbsp;: [[jacobins]], [[blanquistes]]… La majorité du peuple est cependant encore dans l'expectative.
    
Le 18 janvier 1871, l'Empire allemand est proclamé à Versailles (achevant l'[[unification de l'Allemagne]] en une [[Impérialisme_allemand|puissance européenne majeure]]), et le 28 janvier un armistice est signé avec le chancelier allemand Bismarck, dans l'attente d'élections devant décider de la guerre ou de la paix. La nouvelle commence à échauder le petit-peuple parisien, qui se sent trahi par sa soit-disant représentation.
 
Le 18 janvier 1871, l'Empire allemand est proclamé à Versailles (achevant l'[[unification de l'Allemagne]] en une [[Impérialisme_allemand|puissance européenne majeure]]), et le 28 janvier un armistice est signé avec le chancelier allemand Bismarck, dans l'attente d'élections devant décider de la guerre ou de la paix. La nouvelle commence à échauder le petit-peuple parisien, qui se sent trahi par sa soit-disant représentation.
Ligne 41 : Ligne 41 :  
Paris dispose aussi de la [[Garde_nationale|Garde nationale]], qui regroupe tous les hommes valides (200 bataillons et 180 000 hommes). Ils sont bien armés, disposent de 227 canons, 500 000 fusils et ont des chefs élus. Au cours des élections de février, les bataillons de la Garde nationale se fédèrent et élisent un comité central pour assurer l’organisation. Une situation de [[Double_pouvoir|double pouvoir]] émerge.
 
Paris dispose aussi de la [[Garde_nationale|Garde nationale]], qui regroupe tous les hommes valides (200 bataillons et 180 000 hommes). Ils sont bien armés, disposent de 227 canons, 500 000 fusils et ont des chefs élus. Au cours des élections de février, les bataillons de la Garde nationale se fédèrent et élisent un comité central pour assurer l’organisation. Une situation de [[Double_pouvoir|double pouvoir]] émerge.
   −
Les Internationalistes s’engagent  nombreux dans la [[Garde nationale]] et beaucoup de leurs responsables sont élus officiers de leur bataillon. Les jeunes ouvriers étaient nombreux dans ses rangs, mais les petit-bourgeois très présentes dans la hiérarchie. Sur la question de participer ou non au commandement de cette institution, [[Léo Frankel|Frankel]] s’oppose à d’autres au sein de l’AIT, dont  [[Eugène Varlin|Varlin]].
+
Les Internationalistes s’engagent  nombreux dans la [[Garde nationale]] et beaucoup de leurs responsables sont élus officiers de leur bataillon. Les jeunes ouvriers étaient nombreux dans ses rangs, mais les petit-bourgeois très présentes dans la hiérarchie. Sur la question de participer ou non au commandement de cette institution à d’autres au sein de l’AIT, dont  [[Eugène Varlin|Varlin]] entre au comité central de la Garde, tandis que [[Léo Frankel|Frankel]] s’y oppose.
    
Le gouvernement durcit rapidement le ton, en nommant trois bonapartistes à des postes haut-placés à Paris&nbsp;:
 
Le gouvernement durcit rapidement le ton, en nommant trois bonapartistes à des postes haut-placés à Paris&nbsp;:
Ligne 63 : Ligne 63 :  
===18 mars, le feu aux poudres===
 
===18 mars, le feu aux poudres===
   −
{{Voir|Soulèvement du 18 mars 1871}}
+
[[File:Barricade18March1871.jpg|right|372x372px]]{{Voir|Soulèvement du 18 mars 1871}}Thiers va mettre le feu aux poudres en ordonnant dans la nuit du 17-18 mars à l'armée d'aller confisquer les canons de la Garde nationale et d'arrêter les meneurs révolutionnaires. Ce même jour, il fait arrêter [[Auguste_Blanqui|Blanqui]] qui se reposait chez un ami médecin dans le Lot, privant le camp révolutionnaire d'un de ses plus importants meneurs.
 
  −
[[File:Barricade18March1871.jpg|right|350x199px]]Thiers va mettre le feu aux poudres en ordonnant dans la nuit du 17-18 mars à l'armée d'aller confisquer les canons de la Garde nationale et d'arrêter les meneurs révolutionnaires. Ce même jour, il fait arrêter [[Auguste_Blanqui|Blanqui]] qui se reposait chez un ami médecin dans le Lot, privant le camp révolutionnaire d'un de ses plus importants meneurs.
      
Les canons, regroupés à Montmartre et à Belleville, cristallisaient la crainte du gouvernement. Non seulement les parisiens ne veulent pas capituler, mais ils considèrent que les canons sont à eux, puisqu'ils les ont payés eux-mêmes lors de la souscription contre la Prusse. Mais surtout, ils n'ont aucune confiance dans ce gouvernement, et ne veulent pas que se reproduise la tuerie de [[Juin_1848|juin 1848]].Mais Thiers avait sous-estimé les révolutionnaires parisiens, les croyant plus affaiblis par le siège. Le peuple et la plupart des gardes nationaux se soulèvent, et les soldats refusent de faire feu sur eux. C'est le début de la révolte populaire&nbsp;: peuple et soldats fraternisent. Claude Lecomte et Clément Thomas, deux généraux, sont fusillés par l’armée mutinée.
 
Les canons, regroupés à Montmartre et à Belleville, cristallisaient la crainte du gouvernement. Non seulement les parisiens ne veulent pas capituler, mais ils considèrent que les canons sont à eux, puisqu'ils les ont payés eux-mêmes lors de la souscription contre la Prusse. Mais surtout, ils n'ont aucune confiance dans ce gouvernement, et ne veulent pas que se reproduise la tuerie de [[Juin_1848|juin 1848]].Mais Thiers avait sous-estimé les révolutionnaires parisiens, les croyant plus affaiblis par le siège. Le peuple et la plupart des gardes nationaux se soulèvent, et les soldats refusent de faire feu sur eux. C'est le début de la révolte populaire&nbsp;: peuple et soldats fraternisent. Claude Lecomte et Clément Thomas, deux généraux, sont fusillés par l’armée mutinée.
Ligne 77 : Ligne 75 :  
«''&nbsp;Les prolétaires de la capitale au milieu des défaillances et des trahisons des classes gouvernantes, ont compris que l’heure était arrivée pour eux de sauver la situation en prenant en main la direction des affaires publiques [...] Le prolétariat [...] a compris qu’il était de son devoir impérieux et de son droit absolu de prendre en main ses destinées, et d’en assurer le triomphe en s’emparant du pouvoir.&nbsp;''»
 
«''&nbsp;Les prolétaires de la capitale au milieu des défaillances et des trahisons des classes gouvernantes, ont compris que l’heure était arrivée pour eux de sauver la situation en prenant en main la direction des affaires publiques [...] Le prolétariat [...] a compris qu’il était de son devoir impérieux et de son droit absolu de prendre en main ses destinées, et d’en assurer le triomphe en s’emparant du pouvoir.&nbsp;''»
 
</blockquote>
 
</blockquote>
+
[[Fichier:Commune de Paris, Comité Central, Élections à la Commune, 25 mars 1871.jpg|lien=https://wikirouge.net/Fichier:Commune%20de%20Paris,%20Comit%C3%A9%20Central,%20%C3%89lections%20%C3%A0%20la%20Commune,%2025%20mars%201871.jpg|alt=|vignette|371x371px|[[w:Appel du comité central de la Garde nationale le 25 mars 1871|Appel du comité central de la Garde nationale du 25 mars]]]]
 
Les premières mesures de la Commune sont prises aussitôt par le Comité central. Ce ne sont pas des mesures immédiatement "socialistes", mais elles jettent les bases d'un Etat ouvrier&nbsp;:
 
Les premières mesures de la Commune sont prises aussitôt par le Comité central. Ce ne sont pas des mesures immédiatement "socialistes", mais elles jettent les bases d'un Etat ouvrier&nbsp;:
   Ligne 95 : Ligne 93 :  
{{Voir|Conseil général de la Commune}}
 
{{Voir|Conseil général de la Commune}}
   −
Les élections du 26 mars instituent le conseil de la Commune. Sur 92 élus, la majorité sont des révolutionnaires (parmi eux 25 ouvriers), mais ils vont se partager en 3 groupes principaux&nbsp;:
+
Les élections du 26 mars instituent le conseil de la Commune. Sur 92 élus, la majorité sont des révolutionnaires (parmi eux 25 ouvriers, et 38 membres de l'[[Association Internationale des Travailleurs|AIT]]), mais ils sont d'une grande diversité politique&nbsp;:
   −
*une minorité de partisans de l'[[Association_internationale_des_travailleurs|Association internationale des travailleurs]], où les idées de [[Proudhon|Proudhon]] sont majoritaires sur celles de [[Marx|Marx]] ([[Léo_Fränkel|<span class="mw-redirect">Léo Fränkel</span>]], [[Benoît_Malon|Benoît Malon]] et [[Eugène_Varlin|Eugène Varlin]])
+
*les membres de l'AIT (<span class="mw-redirect">[[Léo Frankel]]</span>, [[Benoît_Malon|Benoît Malon]], [[Eugène_Varlin|Eugène Varlin]]...) : celle-ci est assez diverse politiquement, peu centralisée, et encore marquée par le [[proudhonisme]], même si le [[collectivisme]] y était devenu majoritaire ;
*le parti [[Auguste_Blanqui|blanquiste]], alors très influent dans la classe ouvrière ([[Eugène_Protot|Eugène Protot]], [[Édouard_Moreau_de_Beauvière|Édouard Moreau de Beauvière]], [[Jean-Baptiste_Chardon|Jean-Baptiste Chardon]], [[Émile_Eudes|Émile Eudes]], [[Théophile_Ferré|Théophile Ferré]], [[Raoul_Rigault|Raoul Rigault]] ou [[Gabriel_Ranvier|Gabriel Ranvier]])
+
*les [[Auguste_Blanqui|blanquistes]], très influents dans la classe ouvrière ([[Eugène Protot]], [[Édouard Moreau de Beauvière]], [[Jean-Baptiste Chardon]], [[Émile Eudes]], [[Théophile Ferré]], [[Raoul Rigault]] ou [[Gabriel Ranvier]]) ; certains blanquistes étaient adhérents à l'AIT (comme [[Émile-Victor Duval|Duval]] ou le maçon François David<ref name=":0">Blog de [[w:Michèle Audin|Michèle Audin]] sur la Commune de Paris, ''[https://macommunedeparis.com/2016/06/11/le-proletaire-un-club-un-journal/ Le Prolétaire — un club, un journal]'', juin 2016</ref>) ;
*la majorité allant aux "[[Jacobins|jacobins]]", petits-bourgeois rêvant confusément de refaire [[Montagne (Révolution française)|1793]] ([[w:Charles Delescluze|Delescluze]], [[w:Charles Ferdinand Gambon|Gambon]], [[w:Félix Pyat|Pyat]])
+
*de nombreux « [[Jacobins|jacobins]] », républicains petits-bourgeois rêvant confusément de refaire [[Montagne (Révolution française)|1793]] ([[w:Charles Delescluze|Delescluze]]...), certains étant adhérents à l'AIT ([[Charles Ferdinand Gambon|Gambon]], [[Félix Pyat|Pyat]]...)
 
*des «&nbsp;indépendants&nbsp;» comme [[Jules_Vallès|Jules Vallès]] et [[Gustave_Courbet|Gustave Courbet]].
 
*des «&nbsp;indépendants&nbsp;» comme [[Jules_Vallès|Jules Vallès]] et [[Gustave_Courbet|Gustave Courbet]].
    
Prévues d'abord le 5 avril, les élections complémentaires, destinées à pourvoir les sièges vacants ou désertés, sont organisées le <time datetime="1871-04-16" class="nowrap date-lien">16 avril 1871</time>.
 
Prévues d'abord le 5 avril, les élections complémentaires, destinées à pourvoir les sièges vacants ou désertés, sont organisées le <time datetime="1871-04-16" class="nowrap date-lien">16 avril 1871</time>.
   −
Rapidement, le Conseil de la Commune se divise en «&nbsp;majorité&nbsp;» et «&nbsp;minorité&nbsp;»&nbsp;:
+
===Intenses débats et autogestion===
   −
*les majoritaires sont les jacobins, les blanquistes et les indépendants&nbsp;; pour eux, le politique l'emporte sur le social&nbsp;; se voulant les continuateurs de l'action des «&nbsp;[[Montagne_(Révolution_française)|montagnards]]&nbsp;» de 1793, ils ne sont pas hostiles aux mesures centralisatrices, voire autoritaires&nbsp;; ils voteront cependant toutes les mesures sociales de la Commune&nbsp;;
+
Dès lors, le petit peuple travailleur de Paris (et les [[intellectuels]] engagés à leurs côtés) s'investit pleinement dans la vie politique et cherche à tâtons une façon d'organiser la cité dans son intérêt. Les lieux d'auto-organisation à l'échelle locale sont divers : les organes de la [[Garde nationale]], des Comités de vigilance, de nombreux [[clubs populaires]] (se réunissant dans des églises ou des théâtres...) comme le [[Club des prolétaires]]<ref name=":0" /><ref>Blog de [[w:Michèle Audin|Michèle Audin]] sur la Commune de Paris, ''[https://www.commune1871.org/la-commune-de-paris/histoire-de-la-commune/chronologie-au-jour-le-jour/448-les-clubs-sous-la-commune Les clubs sous la Commune]'', juillet 2022</ref>, les clubs animés par l'[[Union des femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés]]... Les citoyen·nes exercent une pression forte sur les élus et leur font directement connaître leurs revendications.
*les minoritaires sont les radicaux et les «&nbsp;internationalistes&nbsp;», collectivistes ou proudhoniens&nbsp;; ils s'attachent à promouvoir des mesures sociales et anti-autoritaires&nbsp;; ils sont les partisans de la République sociale.
+
 
[[Fichier:Carte Paris 1871.jpg|droite|sans_cadre]]
+
De façon empirique et par souci d'efficacité, les parisiens réalisent peu à peu une auto-centralisation (fédération des clubs...).
Ces tendances se cristallisent le 28 avril à propos de la création d'un [[Comité_de_salut_public_(1871)|Comité de Salut public]], organisme que les minoritaires refusent comme contraire à l'aspiration démocratique et autonomiste de la Commune. Les majoritaires en imposent la création le <abbr class="abbr" title="Premier">1<sup>er</sup></abbr> mai par 45 voix contre 23. La minorité au conseil de la Commune publie un Manifeste le 15 mai qui proteste contre la dictature du Comité de Salut public et annonce que ses membres se retirent dans leurs arrondissements respectifs. Mais ce manifeste qui réjouit le gouvernement d'[https://fr.wikipedia.org/wiki/Adolphe_Thiers Adolphe Thiers], n'est pas compris par les communards parisiens. Les deux tendances feront combat commun dès l'entrée des troupes versaillaises dans Paris.
     −
===Intenses débats et autogestion===
+
Parmi les dirigeants de la Commune, les socialistes convaincus du [[collectivisme]] sont loin d'être hégémoniques. Les visions idylliques d'une société de petits producteurs indépendants (donc encore basée sur le [[marché]]) dominent encore ce milieu [[Radicalisme|républicain socialisant]]. Cependant, des mesures sociales radicales sont rapidement prises, sous l'initiative populaire bien plus que par idéologie&nbsp;: en pratique, c'est la [[Socialisation (économie)|socialisation]] sur un mode quasi-communiste qui se dessine, et non des schémas [[blanquistes]] ou [[Pierre-Joseph_Proudhon|proudhoniens]].
   −
Dès lors, les travailleurs parisiens s'investissent pleinement dans la vie politique et cherchent à tâtons une façon d'organiser la cité dans leur intérêt. Ils se réunissent dans de nombreux clubs populaires, des Comités de vigilance, ou via les organes de la Garde nationale, et font directement entendre leurs revendications à leurs élus. Des élections complémentaires ont lieu le 16 avril, et le 28, un Comité de Salut Public est mis sur pied. De façon empirique et par souci d'efficacité, les parisiens réalisent peu à peu une auto-centralisation (fédération des clubs...).
+
Mais toute cette spontanéité, si elle est remarquable par sa démonstration que le [[prolétariat]] est réellement porteur d'une société nouvelle, se fait sans clairvoyance, sans priorités, et laisse les mains libres à toute la [[réaction]] de France de se renforcer à Versailles. En dehors des mesures socialistes à Paris, les communards accordent trop de temps aux symboles ([[w:Colonne Vendôme|colonne Vendôme]] abattue par [[antimilitarisme]]) et pas assez aux vrais lieux de pouvoir (Banque de France laissée intacte alors qu'elle finance Versailles pendant ce temps).
   −
Des mesures sociales radicales sont prises, sous l'initiative populaire bien plus que par idéologie&nbsp;: en pratique, c'est la [[Socialisation (économie)|socialisation]] sur un mode quasi-communiste qui se dessine, et non des schémas [[Blanquistes|blanquistes]] ou [[Pierre-Joseph_Proudhon|proudhoniens]]. Mais toute cette spontanéité, si elle est remarquable par sa démonstration que le [[Prolétariat|prolétariat]] est réellement porteur d'une société nouvelle, se fait sans clairvoyance, sans priorités, et laisse les mains libres à toute la [[Réaction|réaction]] de France de se renforcer à Versailles. En dehors des mesures socialistes à Paris, les communards accordent trop de temps aux symboles (colonne Vendôme abattue par [[Antimilitarisme|antimilitarisme]]) et pas assez aux vrais lieux de pouvoir (Banque de France laissée intacte alors qu'elle finance Versailles pendant ce temps).
+
===Comité de salut public===
 +
Rapidement, le [[Conseil de la Commune]] se divise en «&nbsp;majorité&nbsp;» et «&nbsp;minorité&nbsp;»&nbsp;:
 +
*les majoritaires sont les jacobins, les blanquistes et les indépendants&nbsp;; pour eux, le politique l'emporte sur le social&nbsp;; se voulant les continuateurs de l'action des «&nbsp;[[Montagne_(Révolution_française)|montagnards]]&nbsp;» de 1793, ils ne sont pas hostiles aux mesures centralisatrices, voire autoritaires&nbsp;; ils voteront cependant toutes les mesures sociales de la Commune&nbsp;;
 +
*les minoritaires sont les radicaux et les [[Association Internationale des Travailleurs|Internationalistes]], [[collectivistes]] ou [[proudhoniens]]&nbsp;; ils s'attachent à promouvoir des mesures sociales et anti-autoritaires&nbsp;; ils sont les partisans de la [[République sociale]].
 +
Ces tendances se cristallisent le 28 avril à propos de la création d'un [[Comité_de_salut_public_(1871)|Comité de Salut public]], organisme que les minoritaires refusent comme contraire à l'aspiration démocratique et autonomiste de la Commune. Les majoritaires en imposent la création le <abbr class="abbr" title="Premier">1<sup>er</sup></abbr> mai par 45 voix contre 23. La minorité au conseil de la Commune publie un Manifeste le 15 mai qui proteste contre la dictature du Comité de Salut public et annonce que ses membres se retirent dans leurs arrondissements respectifs. Mais ce manifeste qui réjouit le gouvernement d'[[w:Adolphe_Thiers|Adolphe Thiers]], n'est pas compris par les communards parisiens. Les deux tendances feront combat commun dès l'entrée des troupes versaillaises dans Paris.
    
===Attaque des Versaillais===
 
===Attaque des Versaillais===
 
+
[[Fichier:Carte Paris 1871.jpg|droite|sans_cadre]]Surtout, la Commune se montre beaucoup trop légère sur le plan militaire, et clémente vis-à-vis de la menace réactionnaire. Si le Comité central annonce qu'il est sur la défensive et qu'il rendra ''«&nbsp;œil pour œil, dent pour dent&nbsp;»'', en pratique il le met rarement à exécution. Lorsque des agents versaillais sont découverts en train d'entrer dans Paris en dissimulant des armes, ils sont relâchés. Au fur et à mesure, les Versaillais reprennent confiance, ils se remettent à torturer leurs prisonniers ou à faire des exécutions sommaires, ceux qu'ils hésitent à faire dans un premier temps par peur de provoquer les communards.
Surtout, la Commune se montre beaucoup trop légère sur le plan militaire, et clémente vis-à-vis de la menace réactionnaire. Si le Comité central annonce qu'il est sur la défensive et qu'il rendra ''«&nbsp;œil pour œil, dent pour dent&nbsp;»'', en pratique il le met rarement à exécution. Lorsque des agents versaillais sont découverts en train d'entrer dans Paris en dissimulant des armes, ils sont relâchés. Au fur et à mesure, les Versaillais reprennent confiance, ils se remettent à torturer leurs prisonniers ou à faire des exécutions sommaires, ceux qu'ils hésitent à faire dans un premier temps par peur de provoquer les communards.
      
Les Versaillais s’en remettent à l'Empire allemand pour venir à bout par la force de la Commune de Paris. On envoya deux émissaires discuter avec Bismarck&nbsp;: la France paierait ses dettes plus rapidement, en échange de quoi Bismarck acceptait de libérer l’armée bonapartiste, c’est-à-dire de donner une armée aux Versaillais pour exterminer Paris. Le 18 mai, ce «&nbsp;traité de paix&nbsp;» avec la Prusse est ratifié par l’Assemblée nationale siégeant à Versailles. Comme le dira Marx&nbsp;: ''«&nbsp;La domination de classe ne peut plus se cacher sous un uniforme national, les gouvernements nationaux ne font qu’un contre le prolétariat&nbsp;!&nbsp;»''
 
Les Versaillais s’en remettent à l'Empire allemand pour venir à bout par la force de la Commune de Paris. On envoya deux émissaires discuter avec Bismarck&nbsp;: la France paierait ses dettes plus rapidement, en échange de quoi Bismarck acceptait de libérer l’armée bonapartiste, c’est-à-dire de donner une armée aux Versaillais pour exterminer Paris. Le 18 mai, ce «&nbsp;traité de paix&nbsp;» avec la Prusse est ratifié par l’Assemblée nationale siégeant à Versailles. Comme le dira Marx&nbsp;: ''«&nbsp;La domination de classe ne peut plus se cacher sous un uniforme national, les gouvernements nationaux ne font qu’un contre le prolétariat&nbsp;!&nbsp;»''
Ligne 156 : Ligne 156 :     
===Actes symboliques===
 
===Actes symboliques===
 +
Un grand nombre d'actes symboliques contre la réaction furent réalisés par la Commune. Un des plus connus est la démolition de la [[w:Colonne Vendôme|colonne Vendôme]]<ref>[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2095533h/f1.item Décret du 12 avril 1871], JORF, no 103, 14 avril 1871, p. 275.</ref>, sur laquelle trônait le buste de Napoléon, symbole de l'[[impérialisme français]]. Pour l'anecdote, on peut relever que Marx avait écrit en 1852, « la statue de bronze de Napoléon tombera de la hauteur de la colonne Vendôme »<ref>Karl Marx, ''[[Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte]]'', 1852</ref>.
   −
*démolition de la "colonne impériale de la place Vendôme"&nbsp;;
+
Une [[guillotine]] a également été brûlée en place publique dans le 11<sup>e</sup> arrondissement, en tant que symbole de la [[peine de mort]]. Les sentiments étaient cependant partagés, puisque dans les réunions de [[Club politique|clubs]] de ce même arrondissement, un mois plus tard, on réclame « la guillotine comme en 93 ».<ref>{{Lien web|auteur=[[w:Michèle Audin|Michèle Audin]]|titre=Non, la Commune n'a pas… (19) …brûlé la guillotine|jour=21|mois=mai|année=2016|url=https://macommunedeparis.com/2016/05/21/non-la-commune-na-pas-19-brule-la-guillotine/|site=La Commune de Paris|consulté le=9 novembre 2020}}.</ref><ref>Journal illustré de la Commune, ''[https://raspou.team/1871/destruction-de-la-guillotine/ On a brûlé la guillotine]'', RaspouTeam</ref><ref>Les Amies et Amis de la Commune de Paris, ''[https://www.commune1871.org/la-commune-de-paris/histoire-de-la-commune/commune-1871-ephemeride/1194-commune-1871-ephemeride-6-avril-la-guillotine-brulee-place-voltaire-l-appel-de-courbet 6 avril – La guillotine brûlée place Voltaire]'', Août 2022</ref>
*incendie de la maison de [[Adolphe_Thiers|Thiers]]&nbsp;;
+
 
*crémation de la guillotine.
+
Il a également été décidé de confisquer les biens de [[w:Adolphe Thiers|Thiers]]&nbsp;et de brûler sa maison, et de démolir la chapelle expiatoire de Louis XVI (jamais mis en œuvre sans doute faute de temps).<gallery widths="300" heights="200">
 +
Fichier:Commune de Paris la guillotine est brûlée.jpg|Une guillotine brûlée
 +
Fichier:L’Année terrible (1874) Illustr. p.157.jpg|Destruction de la [[w:Colonne Vendôme|colonne Vendôme]]
 +
</gallery>
    
===La laïcité===
 
===La laïcité===
Ligne 170 : Ligne 174 :     
===Les femmes en action===
 
===Les femmes en action===
 
+
{{See also|w:Femmes dans la Commune de Paris{{!}}Action des femmes dans la Commune}}
Les femmes ont pris une part massive aux mobilisations et se sont organisées en comités de quartier. Si [[Louise_Michel|Louise Michel]] est bien connue, il ne faut pas oublier [[Elisabeth_Dimitrieff|Elisabeth Dimitrieff]] et [[Nathalie Lemel]], qui ont créé la première Union des femmes. Plus de mille d'entre elles passeront en conseil de guerre dont les "[[Pétroleuses|Pétroleuses]]", accusées d'avoir incendié les maisons bourgeoises.&nbsp;La [[Réaction|réaction]] se déchaînera sur elles''.'' Concernant les indemnités reçues par les proches des [[Garde_nationale|gardes nationaux]], la Commune a donné la consigne aux mairies de ne faire aucune distinction entre femmes dites "illégitimes", mères et veuves.
+
Les femmes ont pris une part massive aux mobilisations et se sont organisées en comités de quartier. Si [[Louise Michel]] est bien connue, il ne faut pas oublier [[Elisabeth Dimitrieff]] et [[Nathalie Lemel]], qui ont créé une [[Union des femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés|Union des femmes]]. Plus de mille d'entre elles passeront en conseil de guerre dont les "[[Pétroleuses]]", accusées d'avoir incendié les maisons bourgeoises.&nbsp;La [[réaction]] se déchaînera sur elles''.'' Concernant les indemnités reçues par les proches des [[Garde_nationale|gardes nationaux]], la Commune a donné la consigne aux mairies de ne faire aucune distinction entre femmes dites "illégitimes", mères et veuves.
    
Les femmes trouvaient des alliés dans certains militants de l'AIT comme [[Léo Frankel|Frankel]] ou [[Eugène Varlin|Varlin]], mais aussi beaucoup d'opposition.
 
Les femmes trouvaient des alliés dans certains militants de l'AIT comme [[Léo Frankel|Frankel]] ou [[Eugène Varlin|Varlin]], mais aussi beaucoup d'opposition.

Menu de navigation