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La '''dématérialisation de l'économie '''est le fait de réduire la consommation d'[[Énergie|énergie]] et de ressources naturelles dans la [[Production|production]] et l'[[Échange|échange]]. Cela a un intérêt évident dans une perspective [[Écologiste|écologiste]].<br>
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[[Image:ConsoMatièresPIB.png|right|lien=https://wikirouge.net/Fichier:ConsoMati%C3%A8resPIB.png|469x469px]]La '''dématérialisation de l'économie '''est le fait de réduire la consommation d'[[énergie]] et de ressources naturelles dans la [[production]] et l'[[Échange marchand|échange]]. Cela a un intérêt évident dans une perspective [[écologiste]].
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Mais actuellement, la dématérialisation est un discours souvent mis en avant par les politiciens et idéologues du capitalisme pour promettre un « '''découplage''' » entre [[Croissance économique|croissance]] et consommation de matières / énergie.  
    
== Dématérialisation&nbsp;?  ==
 
== Dématérialisation&nbsp;?  ==
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== Le mythe de la Nouvelle Économie  ==
 
== Le mythe de la Nouvelle Économie  ==
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Avec le développement de l'informatique (et autres NTIC<ref>Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication : l'information, la micro-électronique, les logiciels, le commerce en ligne...</ref>), on a depuis la fin des années 1990 beaucoup parlé de [[Nouvelle Économie|Nouvelle Économie]]. La [[Plus-value|plus-value]] serait réalisée non plus principalement dans l'[[Industrie|industrie]] par les [[Marchandises|marchandises]], mais dans le [[Secteur tertiaire|secteur tertiaire]] par les [[Services|services]].<br>
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Avec le développement de l'informatique (et autres NTIC<ref>Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication : l'information, la micro-électronique, les logiciels, le commerce en ligne...</ref>), on a depuis la fin des années 1990 beaucoup parlé de [[Nouvelle Économie|Nouvelle Économie]]. La [[Plus-value|plus-value]] serait réalisée non plus principalement dans l'[[Industrie|industrie]] par les [[Marchandises|marchandises]], mais dans le [[Secteur tertiaire|secteur tertiaire]] par les [[Services|services]].  
    
=== Poids et consommation du tertiaire  ===
 
=== Poids et consommation du tertiaire  ===
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{{Voir|Tertiarisation}}  
 
{{Voir|Tertiarisation}}  
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C'est un fait que dans un pays comme la France, le secteur tertiaire est devenu le principal employeur avec plus de 70% des [[Travailleurs|travailleurs]], loin devant l'[[Agriculture|agriculture]] et l'[[Industrie|industrie]].&nbsp;Mais l'image d'Épinal du travail de bureau n'impactant pas l'[[Environnement|environnement]] ne correspond pas à la réalité. Certes les NTIC en elles-mêmes ne représenteraientque 2% des émissions européennes de gaz à [[Effet de serre|effet de serre]]<ref>Etude BioIS pour la Commission Européenne, [ftp://ftp.cordis.europa.eu/pub/fp7/ict/docs/sustainable-growth/ict4ee-final-report_en.pdf Impacts of Information and Communication Technologies on Energy Efficiency], 2008</ref>. Mais le secteur tertiaire inclut entre autres les transports et les centres commerciaux, qui sont hautement énergivores. Or les [[Transports|transports]] et le [[Bâtiment|bâtiment]] (chauffage, climatisation, ventilation, éclairage...) représentent en France autour de 70% de la consommation énergétique.<br>
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C'est un fait que dans un pays comme la France, le secteur tertiaire est devenu le principal employeur avec plus de 70% des [[Travailleurs|travailleurs]], loin devant l'[[Agriculture|agriculture]] et l'[[Industrie|industrie]].&nbsp;Mais l'image d'Épinal du travail de bureau n'impactant pas l'[[Environnement|environnement]] ne correspond pas à la réalité. Certes les NTIC en elles-mêmes ne représenteraient que 2% des émissions européennes de gaz à [[Effet de serre|effet de serre]]<ref>Etude BioIS pour la Commission Européenne, [ftp://ftp.cordis.europa.eu/pub/fp7/ict/docs/sustainable-growth/ict4ee-final-report_en.pdf Impacts of Information and Communication Technologies on Energy Efficiency], 2008</ref>. Mais le secteur tertiaire inclut entre autres les transports et les centres commerciaux, qui sont hautement énergivores. Or les [[Transports|transports]] et le [[Bâtiment|bâtiment]] (chauffage, climatisation, ventilation, éclairage...) représentent en France autour de 70% de la consommation énergétique.  
<blockquote>«&nbsp;il n’est pas sûr que le tertiaire d’aujourd’hui soit moins consommateur que l’industrie d’hier. L’INSEE met en effet dans les services nombre d’activités parfaitement énergivores ou dévoreuses d’espace, à commencer par les transports (routier, maritime ou aérien), les zones commerciales en périphérie de ville (et les accès routiers associés) [...]&nbsp;»<ref name="Jancovici">Jean-Marc Jancovici, [http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-grenelle/jancovici-complts.pdf La dématérialisation de l’économie : mythe ou réalité ?], 2007</ref> </blockquote>  
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«&nbsp;il n’est pas sûr que le tertiaire d’aujourd’hui soit moins consommateur que l’industrie d’hier. L’INSEE met en effet dans les services nombre d’activités parfaitement énergivores ou dévoreuses d’espace, à commencer par les transports (routier, maritime ou aérien), les zones commerciales en périphérie de ville (et les accès routiers associés) [...]&nbsp;»<ref name="Jancovici">Jean-Marc Jancovici, [http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-grenelle/jancovici-complts.pdf La dématérialisation de l’économie : mythe ou réalité ?], 2007</ref>  
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De plus, dans bon nombre de cas, la distinction industrie / tertiaire paraît totalement arbitraire&nbsp;: un emploi de manutentionnaire sera "tertiaire" dans l'entrepôt d'un hypermarché, mais "secondaire" dans l'entrepôt d'une scierie, un technicien réparateur sera dans l'industrie s'il travaille à Renault, et dans les services s'il travaille à Véolia Eau...  
 
De plus, dans bon nombre de cas, la distinction industrie / tertiaire paraît totalement arbitraire&nbsp;: un emploi de manutentionnaire sera "tertiaire" dans l'entrepôt d'un hypermarché, mais "secondaire" dans l'entrepôt d'une scierie, un technicien réparateur sera dans l'industrie s'il travaille à Renault, et dans les services s'il travaille à Véolia Eau...  
    
=== Tertiarisation et industrialisation  ===
 
=== Tertiarisation et industrialisation  ===
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Il est important de dissiper les mythes sur la [[Désindustrialisation|désindustrialisation]]. La progression du secteur tertiaire ne s'est pas faire "au détriment" de l'industrie, mais elle en est le prolongement. Il suffit d'ailleurs de remarquer qu'elle ne s'est produite que là où existe déjà une industrie performante, et en premier lieu dans les [[Pays impérialistes|pays impérialistes]]. Sans la profusion de biens permise par l'industrie, il ne pourrait y avoir autant de services dédiés à la [[Formation|formation]] (enseignement, consulting...), à la conception (architecture, ingénierie...), au négoce (grandes surfaces, vente en ligne...), ou encore au nettoyage des locaux de ces entreprises.&nbsp;Cela se vérifie lorsqu'une entreprise comme Téléperformance s'occupe du service-après-vente de Toshiba, lorsqu'une SSII<ref>Société de Services en Ingénierie Informatisée</ref> comme Altran travaille pour EADS, ou encore lorsque Microsoft réalise l'essentiel de son chiffre d'affaire avec des entreprises, qui elles mêmes ont besoin d'une industrie. Il faut d'ailleurs remarquer qu'il s'agit bien souvent d'[[Externalisation|externalisation]]&nbsp;: là où avant les [[Techniciens|techniciens]], agents d'entretien ou ingénieurs étaient intégrés aux usines, la course à la rentabilité a poussé à la [[Sous-traitance|sous-traitance]].<br>
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Il est important de dissiper les mythes sur la [[Désindustrialisation|désindustrialisation]]. La progression du secteur tertiaire ne s'est pas faire "au détriment" de l'industrie, mais elle en est le prolongement. Il suffit d'ailleurs de remarquer qu'elle ne s'est produite que là où existe déjà une industrie performante, et en premier lieu dans les [[Pays impérialistes|pays impérialistes]]. Sans la profusion de biens permise par l'industrie, il ne pourrait y avoir autant de services dédiés à la [[Formation|formation]] (enseignement, consulting...), à la conception (architecture, ingénierie...), au négoce (grandes surfaces, vente en ligne...), ou encore au nettoyage des locaux de ces entreprises.&nbsp;Cela se vérifie lorsqu'une entreprise comme Téléperformance s'occupe du service-après-vente de Toshiba, lorsqu'une SSII<ref>Société de Services en Ingénierie Informatisée</ref> comme Altran travaille pour EADS, ou encore lorsque Microsoft réalise l'essentiel de son chiffre d'affaire avec des entreprises, qui elles mêmes ont besoin d'une industrie. Il faut d'ailleurs remarquer qu'il s'agit bien souvent d'[[Externalisation|externalisation]]&nbsp;: là où avant les [[Techniciens|techniciens]], agents d'entretien ou ingénieurs étaient intégrés aux usines, la course à la rentabilité a poussé à la [[Sous-traitance|sous-traitance]].  
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Si la proportions -voire dans certains pays le nombre- de [[Ouvrier|travailleurs de l'industrie]] a diminué, c'est essentiellement en raison des prodigieux gains de [[Productivité du travail|productivité]] qui ont pu être réalisés dans ce domaine. En revanche dans les services les gains de productivité sont beaucoup plus difficiles à obtenir. En conséquence, la tertiarisation doit plutôt être vue comme un indicateur de l'industrialisation.<br>
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Si la proportions -voire dans certains pays le nombre- de [[Ouvrier|travailleurs de l'industrie]] a diminué, c'est essentiellement en raison des prodigieux gains de [[Productivité du travail|productivité]] qui ont pu être réalisés dans ce domaine. En revanche dans les services les gains de productivité sont beaucoup plus difficiles à obtenir. En conséquence, la tertiarisation doit plutôt être vue comme un indicateur de l'industrialisation.  
<blockquote>«&nbsp;il est beaucoup plus facile d’augmenter d’un facteur 10 la cadence d’une machine d’embouteillage à emploi quasi-constant - ou le nombre de containers chargés sur un bateau à emploi quasi-constant - que de multiplier par 3 le nombre d’enfants confiés à une assistante maternelle (600 000 emplois en France en 1998) ou à un enseignant du primaire et du secondaire (900 000 emplois). Il sera tout aussi ardu de multiplier par 3 - sans recourir à des machines - le nombre de m<sup>2</sup> nettoyés en une journée par un agent d’entretien (1 000 000 d’emplois&nbsp;; première profession en France) ou encore le nombre de clients qu’un vendeur peut servir par jour (1 000 000 d’emplois)… L’industrialisation massive doit donc assez logiquement déboucher sur une augmentation des flux matériels… et de l’emploi dans le tertiaire.&nbsp;».<ref name="Jancovici" /><br> </blockquote>  
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[[Image:PartsEmploiSecteursFrance.png|center|678x406px|PartsEmploiSecteursFrance.png]]<br>
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«&nbsp;il est beaucoup plus facile d’augmenter d’un facteur 10 la cadence d’une machine d’embouteillage à emploi quasi-constant - ou le nombre de containers chargés sur un bateau à emploi quasi-constant - que de multiplier par 3 le nombre d’enfants confiés à une assistante maternelle (600 000 emplois en France en 1998) ou à un enseignant du primaire et du secondaire (900 000 emplois). Il sera tout aussi ardu de multiplier par 3 - sans recourir à des machines - le nombre de m<sup>2</sup> nettoyés en une journée par un agent d’entretien (1 000 000 d’emplois&nbsp;; première profession en France) ou encore le nombre de clients qu’un vendeur peut servir par jour (1 000 000 d’emplois)… L’industrialisation massive doit donc assez logiquement déboucher sur une augmentation des flux matériels… et de l’emploi dans le tertiaire.&nbsp;».<ref name="Jancovici" />  
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[[Image:PartsEmploiSecteursFrance.png|center|609x609px|PartsEmploiSecteursFrance.png]]
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=== Intensité énergétique / matérielle<br>  ===
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=== Intensité énergétique / matérielle ===
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Certains discours d'économistes bourgeois un peu plus sérieux mettent l'accent sur l'amélioration technique, affirmant qu'elle permettra d'alléger le coût écologique de la croissance. On peut notamment étudier certains indicateurs&nbsp;:
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Certains discours d'économistes bourgeois un peu plus sérieux mettent l'accent sur l'amélioration technique, affirmant qu'elle permettra d'alléger le coût écologique de la croissance. On peut notamment étudier certains indicateurs&nbsp;:  
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*'''l'intensité matérielle du PIB&nbsp;:''' masse de matières premières (acier, béton, bois...) consommées par une [[production]] donnée. Elle peut baisser, par exemple,
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**si l'[[obsolescence des produits]] diminue et si le réemploi / recyclage / réutilisation augmente (la quantité de [[déchets]] produits par unité de PIB diminue),
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**si l'efficacité des usines augmente de manière à gaspiller moins (moins de chutes de bois dans une usine de meubles...),
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**si le [[gaspillage de l'eau]] diminue...
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*'''l'intensité énergétique du PIB&nbsp;:''' quantité d'énergie consommée par une [[production]] donnée. Elle baisse quand l'[[efficacité énergétique]] augmente<ref>Voir les pages Wikipédia « [[w:Intensité énergétique (économie)|Intensité énergétique]] » et « [[w:Efficacité énergétique (économie)|Efficacité énergétique]] »</ref>. Par exemple,
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**si l'efficacité des process de production augmente (permettant de produire autant avec moins d'énergie),
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**si l'efficacité des appareils électriques (frigo, four...) augmente (permettant le même résultat avec moins d'énergie),
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**si l'isolation des bâtiments est améliorée et si les réseaux de chaleur remplacent des chaudières individuelles (ce qui permet une baisse de l'énergie dépensée en chauffage pour une même température),
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**si les transports en commun sont favorisés par rapport aux transports individuels...
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*'''l'intensité carbone de l'énergie&nbsp;:''' quantité de CO<sub>2</sub> émise par une [[production d'énergie]] donnée (elle baisse quand le recours aux [[énergies fossiles]] diminue)<ref>Voir la page Wikipédia « [[w:Facteur d'émission|Facteur d'émission]] ».</ref>.
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[[Image:PIBMondialConsommationIntensitéEnergétique.png|center|759x374px|PIBMondialConsommationIntensitéEnergétique.png]]Ces ratios sont effectivement en légère baisse au niveau mondial, suite aux [[investissements]] dans l'efficacité énergétique et les quelques législations étatiques allant dans ce sens :
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* Dans les pays du G8, l’intensité matérielle a diminué de 47&nbsp;% entre 1980 et 2008. 
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* Les taux de recyclage ont progressé pour un large éventail de matières importantes, dont le verre, l’acier, l’aluminium, le papier et les matières plastiques, atteignant 80&nbsp;% pour certains d’entre eux.
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*La production de résidus urbains solides par habitant a diminué de près de 4&nbsp;% depuis dix ans dans la zone OCDE, bien que le PIB ait continué de croître.
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Il est d’ailleurs notable que ces indicateurs sont très liés au niveau d'investissements productifs&nbsp;: en Chine, l'intensité énergétique a été divisée par 4 entre 1971 et 2006<ref>Source : Alternatives économiques</ref>, tandis qu'elle augmentait de 25% en Afrique. 
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=== « Découplage » beaucoup trop relatif ===
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En se basant sur ce type d'indicateurs qui montrent des progrès dans les process de production, certains idéologues du capitalisme promettent un futur "[[w:Découplage (écologie)|découplage]]" entre la croissance économique et la consommation des ressources naturelles, notamment énergétiques.
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Cette promesse vient du fait que les principaux dirigeants bourgeois ne peuvent maintenant plus nier que des changements dans la production sont impératifs du point de vue [[Écologie|écologique]]. Déjà en 1972, le fameux [[w:Les Limites à la croissance|rapport du Club de Rome]] s'alarmait de la consommation toujours plus grande du "capital naturel" (au lieu d'un cantonnement aux "intérêts", renouvelables) et prévoyait une catastrophe à long terme. La question des ressources épuisables et surtout la question du [[réchauffement climatique]] ont concrétisé cette crainte.
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[[Fichier:UN SDG Logo.png|vignette|Le « développement durable » dont parlent sans cesse les puissants est essentiellement un discours hypocrite qui sert à masquer leur inaction.]]
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C'est pourquoi la [[bourgeoisie]] "éclairée" tente de concilier "la [[croissance]]" (et, implicitement, le cadre de la production capitaliste) et les ressources, en prônant un ''découplage énergétique''&nbsp;: parvenir à faire reposer les gains de points de PIB sur autre autre chose que la consommation d'énergie. Par exemple, un document officiel de l'OCDE dit «&nbsp;L’amélioration de la productivité des ressources est aussi l’un des grands axes de la transition vers une croissance verte&nbsp;»<ref>[http://www.oecd.org/fr/env/dechets/48671413.pdf ''Productivité des ressources dans les pays du G8 et de l’OCDE''], 2011</ref>. La Déclaration de Carnoules appelait à multiplier par 10 l'[[efficacité énergétique]]<ref>Club international du Facteur 10, ''[http://oputaing.free.fr/carnoules-fr.html Déclaration de Carnoules adressée aux chefs de gouvernements et d'entreprises]'', 1997</ref>. On aboutirait ainsi à un « développement durable », terme qui sert souvent de synonyme de croissance verte.
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On parle de ''découplage relatif'' si l'intensité matérielle baisse mais que la consommation de ressources augmente quand même, et de ''découplage absolu'' si l'intensité baisse suffisamment pour compenser la croissance et donc que la consommation de ressources baisse. Dans les faits, à l'échelle mondiale, il n'y a qu'un découplage relatif.
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*l'[[Intensité matérielle|intensité matérielle du PIB]]&nbsp;: masse de matières premières consommées par une production donnée (elle baisse par exemple si le recyclage augmente)
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En terme de découplage absolue, il n'y a que des cas particuliers :  
*l'[[Intensité énergétique|intensité énergétique du PIB]]&nbsp;: quantité d'énergie consommée par une production donnée (elle baisse par exemple si l'efficacité énergétique augmente)
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*l'[[Intensité carbone de l'énergie|intensité carbone de l'énergie]]&nbsp;: quantité de CO<sub>2</sub> émise par une production d'énergie donnée (elle baisse par exemple si le recours aux énergies fossiles diminue)
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Ces ratios sont effectivement en légère baisse au niveau mondial, suite aux [[Investissements|investissements]] dans l'efficacité énergétique et les quelques législations étatiques allant dans ce sens. Il est d'aileurs notable que ces indicateurs sont très liés au niveau d'investissements productifs&nbsp;: en Chine, l'intensité énergétique a été divisée par 4 entre 1971 et 2006<ref>Source : Alternatives économiques</ref>, tandis qu'elle augmentait de 25% en Afrique. Mais le fait est que cette efficacité ne suffit à dessiner une issue dans le cadre du capitalisme.  
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* L’Allemagne, le Canada, l’Italie et le Japon sont parvenus à un découplage absolu entre consommation de matières et croissance économique.  
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* Un découplage absolu est par ailleurs à signaler dans l’ensemble des pays du G8 en ce qui concerne certains groupes de matières, dont le bois, les minéraux de construction, les minéraux industriels et, surtout, les métaux.
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La question n'est d'ailleurs pas nouvelle, puisqu'elle rejoint directement celle du "[[Découplage énergétique|découplage]]" entre la croissance économique et la consommation des ressources naturelles, notamment énergétiques. Déjà en 1972, le fameux [[Rapport du Club de Rome|rapport du Club de Rome]] s'alarmait de la consommation toujours plus grande du "capital naturel" (au lieu d'un cantonnement aux "intérêts", renouvelables) et prévoyait une catastrophe à long terme. Avec le temps, cette approche s'avère de plus en plus crédible. C'est pourquoi la [[Bourgeoisie|bourgeoisie]] "éclairée" tente de concilier "la [[Croissance|croissance]]" (et, implicitement, le cadre de la production capitaliste) et les ressources, en prônant un découplage énergétique&nbsp;: parvenir à faire reposer les gains de points de PIB sur autre autre chose que la consommation d'énergie. Par exemple avec la Déclaration de Carnoules pour multiplier par 10 l'efficacité énergétique<ref>http://oputaing.free.fr/carnoules-fr.html</ref>. Mais pour faire un tel saut qualitatif, il faudrait de très grands investissements, qui ne sont pas rentables pour les capitalistes.<br>
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Ces exemples sont par ailleurs largement artificiels, car une large partie de la consommation de matières de ces pays se fait indirectement dans d'autres pays, via les chaînes de production [[Mondialisation|mondialisées]].
   −
Le fait incontournable, c'est que la consommation d'énergie est sans cesse en augmentation, que ce soit au niveau mondial ou au même dans les pays avec les plus faibles "intensités énergétiques". Car les capitalistes, s'ils se félicitent de parvenir à réduire les dégâts occasionnés par 1 $ de profit, n'en cherchent pas moins à gagner toujours plus de dollars de profits. En plus de cet effet volume, la concurrence engendre une quantité inestimable d'absurdités dans la sphère de la production et des échanges. On peut notamment citer les problèmes de l'[[Obsolescence programmée|obsolescence plus ou moins programmée]], les profondes lacunes dans l'interopérabilité, la superposition de nouveux marchés (publicité, achats en ligne...) plutôt que le remplacement des marchés antérieurs, ou encore le fait que le système mondial (avec notamment les [[Brevets|brevets]]) pousse les pays périphériques à une consommation élevée d'[[Énergie fossile|énergie fossile]] pour s'[[Industrialisation|industrialiser]]...  
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=== « Croissance verte » nulle part ===
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Le fait incontournable, c'est que la consommation d'énergie est sans cesse en augmentation, que ce soit au niveau mondial ou même dans les pays avec les plus faibles "intensités énergétiques".  
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Une des raisons est que les efforts en terme d'efficacité des process industriels coûtent de lourds [[Investissement|investissements]], qui n'intéressent pas forcément les capitalistes. Pire, la logique de la [[concurrence]] pour le profit n'aboutit pas forcément à favoriser l'[[efficacité énergétique]] et la sobriété matérielle. On peut notamment citer les problèmes de l'[[Obsolescence programmée|obsolescence plus ou moins programmée]], les problèmes d'interopérabilité, ou le fait  que le système [[Impérialisme|impérialiste]] mondial (avec notamment les [[brevets]]) pousse les [[pays périphériques]] à une consommation élevée d'[[énergie fossile]] pour s'[[Industrialisation|industrialiser]], au lieu de bénéficier des dernières technologies plus efficaces.
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[[Image:PIBMondialConsommationIntensitéEnergétique.png|center|759x374px|PIBMondialConsommationIntensitéEnergétique.png]]  
+
Mais surtout, le capitalisme encourage sans cesse l'augmentation de la production, la création de nouveaux « besoins » ([[publicité]]...) et marchés, si bien que l'augmentation du volume produit compense largement les gains d'[[Efficacité énergétique|efficacité]]. Les marchés nouveaux (achats en ligne...) se rajoutent aux existants bien plus qu'ils ne les remplacent. Les capitalistes se félicitent de parvenir à réduire les dégâts occasionnés par 1$ de profit, mais cherchent à gagner toujours plus de dollars de profits.
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Au sein de cet effet volume, il faut noter l'[[effet rebond]]. Dans certains cas, le fait d'utiliser moins de matières pour produire une [[marchandise]] en réduit le [[prix]], ce qui augmente la demande de cette marchandise. Cela réduit donc les bénéfices de la baisse de l'intensité matérielle. Cet effet rebond serait situé entre 0 et 40%.<ref>PNUE, Decoupling and Sustainable Resource Management: Scoping the Challenges, A Report of the Working Group on Decoupling to the International Resource Panel. M. Swilling et M. Fischer-Kowalski.</ref>
   −
== Enjeu écologique réel<br>  ==
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== Enjeu écologique réel ==
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Ce constat ne signifie pas qu'il n'y a rien à tirer des technologies actuelles. Au contraire, la "dématérialisation" recèle un potentiel énorme, à la fois écologique et social, qui pourrait probalement s'épanouir pleinement dans le [[Socialisme|socialisme]].  
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Ce constat ne signifie pas qu'il n'y a rien à tirer des technologies actuelles. Au contraire, la "dématérialisation" recèle un potentiel énorme, à la fois écologique et social, qui pourrait probablement s'épanouir pleinement dans le [[socialisme]].  
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=== Sophistication et effet de seuil<br>  ===
+
=== Sophistication et effet de seuil ===
    
Il n'est pas évident en soi qu'un colis de plusieurs DVD va consommer plus d'énergie pour son transport qu'un réseau d'ordinateurs branchés en permanence sur Internet. Il faut non seulement prendre en compte l'énergie consommée directement par les terminaux de l'information (les ordinateurs, les téléviseurs, les smartphones...), mais aussi l'ensemble des intermédiaires du réseau (les serveurs...), et enfin la part d'énergie consommée et l'impact environnemental de la production et du transport de tous les moyens nécessaires (ordinateurs, câbles électriques...). En revanche, il est clair qu'au delà de certains effets de seuils, il devient tout à fait rationnel de fonctionner en réseau, avec une concentration des coûts matériels/énergétiques dans l'infrastructure, et un allègement des terminaux de l'[[Information|information]].  
 
Il n'est pas évident en soi qu'un colis de plusieurs DVD va consommer plus d'énergie pour son transport qu'un réseau d'ordinateurs branchés en permanence sur Internet. Il faut non seulement prendre en compte l'énergie consommée directement par les terminaux de l'information (les ordinateurs, les téléviseurs, les smartphones...), mais aussi l'ensemble des intermédiaires du réseau (les serveurs...), et enfin la part d'énergie consommée et l'impact environnemental de la production et du transport de tous les moyens nécessaires (ordinateurs, câbles électriques...). En revanche, il est clair qu'au delà de certains effets de seuils, il devient tout à fait rationnel de fonctionner en réseau, avec une concentration des coûts matériels/énergétiques dans l'infrastructure, et un allègement des terminaux de l'[[Information|information]].  
   −
C'est au fond la même logique que pour les transports collectifs. Même si leur rentabilité financière est en général faible, le seuil au delà duquel ils deviennent écologiquement préférables à des automobiles / motos est très vite atteint.  
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Une étude de l'Ademe<ref name="ademe">Ademe, [http://www2.ademe.fr/servlet/getDoc?cid=96&amp;amp;amp;amp;amp;amp;m=3&amp;amp;amp;amp;amp;amp;id=78008&amp;amp;amp;amp;amp;amp;ref=24691&amp;amp;amp;amp;amp;amp;p1=B Analyses de Cycles de Vies des Technologies - Courriers électroniques, requête Web, clé USB : quels impacts environnementaux ?], 2011</ref> montre que le coût énergétique des courriels et autres utilisations courantes d'Internet est beaucoup plus élevé que d'intuition. Mais elle montre aussi une chose simple&nbsp;: envoyer un mail à 10 personnes au lieu d'une seule multiplierait par 4 l'impact environnemental, et non par 10 (contrairement au courrier classique). C'est une illustration de "l'effet de seuil".
 
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Il est difficile de savoir où nous en sommes vraiment aujourd'hui, mais il paraît probable que la plupart des effets positifs de "dématérialisation" sont largement compensés par l'énorme gaspillage de matière (et de travail humain&nbsp;!) des [[Rapports sociaux de production|rapports sociaux]] capitalistes. Des indicateurs existent pour tenter de penser "globalement" ces bilans entropiques/écologiques, comme l'[[Énergie grise|énergie grise]] ou le [[Bilan carbone|bilan carbone]], mais ils requièrent un tel travail de systématisation pour signifier quoi que ce soit de valable, qu'ils ne peuvent servir que de paravent idéologique à la destruction engendrée par le système.  
     −
Une étude de l'Ademe<ref name="ademe">Ademe, [http://www2.ademe.fr/servlet/getDoc?cid=96&amp;amp;amp;amp;amp;amp;m=3&amp;amp;amp;amp;amp;amp;id=78008&amp;amp;amp;amp;amp;amp;ref=24691&amp;amp;amp;amp;amp;amp;p1=B Analyses de Cycles de Vies des Technologies - Courriers électroniques, requête Web, clé USB : quels impacts environnementaux ?], 2011</ref> montre que le coût énergétique des courriels et autres utilisations courantes d'Internet est beaucoup plus élevé que d'intuition. Mais elle montre aussi une chose simple&nbsp;: envoyer un mail à 10 personnes au lieu d'une seule multiplierait par 4 l'impact environnemental, et non par 10 (contrairement au courrier classique). C'est une illustration de "l'effet de seuil". <br>
+
C'est au fond la même logique que pour les transports collectifs. Même si un bus ou un train nécessite plus de consommation de ressources qu'une voiture, le seuil au delà duquel ils deviennent écologiquement préférables à des transports individuels est très vite atteint.  
   −
=== Perspective socialiste<br>  ===
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Aujourd'hui la plupart des effets positifs de "dématérialisation" sont largement compensés par l'énorme gaspillage de matière (et de travail humain&nbsp;!) des [[Rapports sociaux de production|rapports sociaux]] capitalistes. 
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=== Perspective socialiste ===
    
Sans se hasarder à prédire ce que décideraient les travailleurs unis dans un processus révolutionnaire, il est possible de dessiner des perspectives que rendrait possible l'abolition du [[Capitalisme|capitalisme]].  
 
Sans se hasarder à prédire ce que décideraient les travailleurs unis dans un processus révolutionnaire, il est possible de dessiner des perspectives que rendrait possible l'abolition du [[Capitalisme|capitalisme]].  
   −
*La réduction de la production nécessaire  
+
*La réduction de la production nécessaire :
**[[Planification|Planification]] en fonction des besoins, assurant la fin de nombreux gaspillages  
+
**[[Planification|Planification]] en fonction des besoins, assurant la fin de nombreux gaspillages
**[[Investissements|Investissements]] massifs dans l'[[Efficacité énergétique|efficacité énergétique]] (isolation des bâtiments, remplacement des appareils à faible rendement...)  
+
**[[Investissements|Investissements]] massifs dans l'[[efficacité énergétique]] (isolation des bâtiments, remplacement des appareils à faible rendement...)
**Fin d'innombrables productions socialement inutiles ([[Armement|armement]], [[Publicité|publicité]], cartes de fidélité, titres de transport...)<br>
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**Fin d'innombrables productions socialement inutiles ([[Armement|armement]], [[Publicité|publicité]], SUV, jets privés......)
*La réduction bien plus franche de l'[[Intensité carbone de l'énergie|intensité carbone de l'énergie]]  
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*La réduction franche de l'intensité énergétique de la [[production]] et des [[Échange marchand|échanges]] :
**[[Relocalisation de la production|Relocalisation de la production]] aux échelles jugée pertinentes (économies d'échelle vs coûts des transports)  
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**[[Relocalisation de la production]] aux échelles jugées pertinentes (économies d'échelle vs coûts des transports) ;
**Investissement massif dans les [[Énergies renouvelables|énergies renouvelables]] (avec la fin des lobbies pétroliers et nucléaires...)<br>
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**Transfert massif des technologies les plus efficaces avec coopération internationale ;
**Investissement dans un réseau de [[Transports collectifs|transports collectifs]] efficace  
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**Investissement dans un réseau de [[transports collectifs]] efficace, de voitures électriques en autopartage pour certains usages, et dissuasion de la possession de voitures personnelles ;
*La réducation franche de l'[[Intensité énergétique|intensité énergétique]] de la production et des échanges<br>
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**Développement de systèmes socialisés sur internet (cloud computing, clients légers...) ouverts et interopérables ;
**Transfert massif des technologies les plus efficaces avec coopération internationale
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*La réduction à quasiment zéro de l'intensité carbone de l'énergie par la décarbonation massive de la [[production d'énergie]] restant nécessaire à produire.
**Mise à disposition libre et facile des oeuvres intellectuelles et artistiques numérisables par Internet
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**Regroupement facile de plusieurs cartes (à puce, magnétiques...) en une
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**Développement d'Internet, du cloud computing, clients légers...
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Il est intéressant de s'intéresser particulièrement à la question de l'[[Argent|argent]]. Son support, la [[Monnaie|monnaie]], est dores et déjà dans un stade très avancé de dématérialisation, car cela convient mieux à la fluidité des [[Capitaux|capitaux]]. C'est totalement le cas au niveau des plus importants flux financiers, beaucoup moins au niveau des paiements quotidiens (Cartes bleues et systèmes Monéo encore pas systématiques). Il est probable que dans les premiers temps, une [[Révolution socialiste|révolution socialiste]] accélèrerait fortement ce processus pour des raisons de praticité, d'échanges facilités entre pays... Et ce faisant, dans un contexte de prospérité, elle rendrait très vite la question de l'[[Abolition de l'argent|abolition de l'argent]] purement symbolique.  
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Il est intéressant de s'intéresser à la question de l'[[Argent|argent]]. Son support, la [[Monnaie|monnaie]], est dores et déjà dans un stade très avancé de dématérialisation, car cela convient mieux à la fluidité des [[Capitaux|capitaux]]. C'est totalement le cas au niveau des plus importants flux financiers, beaucoup moins au niveau des paiements quotidiens (Cartes bleues et systèmes Monéo encore pas systématiques). Il est probable que dans les premiers temps, une [[Révolution socialiste|révolution socialiste]] accélèrerait fortement ce processus pour des raisons de praticité, d'échanges facilités entre pays... Et ce faisant, dans un contexte de prospérité, elle rendrait très vite la question de l'[[Abolition de l'argent|abolition de l'argent]] purement symbolique.  
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== Notes et sources<br>  ==
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== Notes et sources ==
    
<references />  
 
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[[Catégorie:Science]] [[Catégorie:Écologie]]
 
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