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Le racisme actuel, qui traverse les sociétés européennes blanches, envers les peuples d’Afrique par exemple, et plus largement envers les non-blanc·hes, n’est pas qu’un reste du temps colonial. Il s'entretient aussi de par l’[[impérialisme]] économique  : les mécanismes de marché qui maintiennent le transfert de richesse Sud-Nord ne sont pas visibilisés, et permettent des discours méprisants et infantilisants sur la misère, qui permettent aussi de justifier du maintien de bases militaires dans le monde. Par ailleurs l’[[islamophobie]] est très présente dans la justification des interventions militaires depuis les années 2000, pour « apporter la démocratie » (en fait essentiellement maintenir l'ordre pour protéger des intérêts stratégiques).
 
Le racisme actuel, qui traverse les sociétés européennes blanches, envers les peuples d’Afrique par exemple, et plus largement envers les non-blanc·hes, n’est pas qu’un reste du temps colonial. Il s'entretient aussi de par l’[[impérialisme]] économique  : les mécanismes de marché qui maintiennent le transfert de richesse Sud-Nord ne sont pas visibilisés, et permettent des discours méprisants et infantilisants sur la misère, qui permettent aussi de justifier du maintien de bases militaires dans le monde. Par ailleurs l’[[islamophobie]] est très présente dans la justification des interventions militaires depuis les années 2000, pour « apporter la démocratie » (en fait essentiellement maintenir l'ordre pour protéger des intérêts stratégiques).
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L'[[immigration]] est fortement liée au système [[impérialiste]] : chaque puissance  a puisé des ressources et de la main d’œuvre dans ses anciennes colonies, et continue de le faire depuis les [[Décolonisation|décolonisations]]. L'immigration a une conséquence directe en terme de classe : l'immigré·e venant d'un [[pays dominé]] est presque automatiquement déclassé·e, se retrouvant presque toujours tout en bas de la hiérarchie sociale du pays d'arrivée. Même dans les cas où il ou elle a des [[Qualification|qualifications]], elles sont rarement reconnues, et la méconnaissance des codes du pays d'accueil (barrière de la [[langue]]...) contribue à un [[déclassement]]. Inévitablement, dans des conditions d'exploitation de la force de travail et de concurrence entre salarié·es, cette situation tend à générer du racisme envers les immigré·es (même lorsqu'ils sont blanc·hes, comme les Irlandais·ses en Angleterre au 19<sup>e</sup> s.).
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L'[[immigration]] est fortement liée au système [[impérialiste]] : chaque puissance  a puisé des ressources et de la main d’œuvre dans ses anciennes [[colonies]], et continue de le faire depuis les décolonisations. L'immigration a une conséquence directe en terme de classe : l'immigré·e venant d'un [[pays dominé]] est presque automatiquement déclassé·e, se retrouvant presque toujours tout en bas de la hiérarchie sociale du pays d'arrivée. Même dans les cas où il ou elle a des [[Qualification|qualifications]], elles sont rarement reconnues, et la méconnaissance des codes du pays d'accueil (barrière de la [[langue]]...) contribue à un [[déclassement]]. Inévitablement, dans des conditions d'exploitation de la force de travail et de concurrence entre salarié·es, cette situation tend à générer du racisme envers les immigré·es (même lorsqu'ils sont blanc·hes, comme les Irlandais·ses en Angleterre au 19<sup>e</sup> s.).
    
Les politiques des [[État bourgeois|États]] sur l'immigration varient en fonction des [[Cycle économique|cycles économiques]]. Dans l'[[après-guerre]], l'immigration était autorisée en masse (forte [[croissance]]), elle est devenue toujours plus criminalisée depuis le [[tournant néolibéral]] des années 1980. Cette criminalisation a l'effet de créer une couche de [[sans-papiers]] avec très peu de droits, qui est [[Surexploitation|sur-exploitée]] par les [[patrons]] dans certains secteurs. Les mêmes politiciens hypocrites qui attisent le racisme à demi-mots (il suffit de déclamer contre « les immigrés clandestins » pour que le message subliminal soit compris), savent très bien que leurs amis capitalistes ont en fait besoin de ces sans-papiers.  
 
Les politiques des [[État bourgeois|États]] sur l'immigration varient en fonction des [[Cycle économique|cycles économiques]]. Dans l'[[après-guerre]], l'immigration était autorisée en masse (forte [[croissance]]), elle est devenue toujours plus criminalisée depuis le [[tournant néolibéral]] des années 1980. Cette criminalisation a l'effet de créer une couche de [[sans-papiers]] avec très peu de droits, qui est [[Surexploitation|sur-exploitée]] par les [[patrons]] dans certains secteurs. Les mêmes politiciens hypocrites qui attisent le racisme à demi-mots (il suffit de déclamer contre « les immigrés clandestins » pour que le message subliminal soit compris), savent très bien que leurs amis capitalistes ont en fait besoin de ces sans-papiers.  
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D’autres facteurs matériels peuvent jouer, comme les circonstances historiques qui ont créé des [[w:Diaspora|diasporas]].  
 
D’autres facteurs matériels peuvent jouer, comme les circonstances historiques qui ont créé des [[w:Diaspora|diasporas]].  
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En Europe la présence des Juif·ves dans plusieurs pays européens a favorisé le discours [[complotiste]] contre les « riches-cosmopolites-dirigeant-le-monde ». Une prose qui prend son essor en particulier au 19<sup>e</sup> siècle, alors que des idéologies (qui tendent à être de plus en plus étroites) sur les [[États-nations]] émergent, mais que les Juif·ves ne rentrent pas dans les cases.  Ces discours antisémites ont à la fois été élaborés par des nationalistes et des socialistes, créant des passerelles confusionnistes entre la réaction et une vision faussée de l'anticapitalisme (qui serait une dénonciation d'une finance insaisissable, plutôt que de la bourgeoisie)…<ref>''[https://revuesocialisme.pagesperso-orange.fr/s13dreyfus.html L’affaire Dreyfus et l’antisémitisme en France à la fin du 19e siècle]'', Socialisme International n° 13, été 2005</ref> C'est pourquoi l'antisémitisme a été appelé « le socialisme des imbéciles ».
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En Europe la présence des Juif·ves dans plusieurs pays européens a favorisé le discours [[complotiste]] contre les « riches-cosmopolites-dirigeant-le-monde ». Une prose qui prend son essor en particulier au 19<sup>e</sup> siècle, alors que des idéologies (qui tendent à être de plus en plus étroites) sur les [[États-nations]] émergent, mais que les Juif·ves ne rentrent pas dans les cases.  Ces discours [[Antisémitisme|antisémites]] ont à la fois été élaborés par des [[nationalistes]] et des [[socialistes]], créant des passerelles [[confusionnistes]] entre la réaction et une vision faussée de l'anticapitalisme (qui serait une dénonciation d'une [[finance]] insaisissable, plutôt que de la [[bourgeoisie]])…<ref>''[https://revuesocialisme.pagesperso-orange.fr/s13dreyfus.html L’affaire Dreyfus et l’antisémitisme en France à la fin du 19e siècle]'', Socialisme International n° 13, été 2005</ref> C'est pourquoi l'antisémitisme a été appelé « le socialisme des imbéciles ».
    
La communauté arménienne a elle aussi subi des formes de rejets racistes extrêmes proches de ceux visant la communauté juive.
 
La communauté arménienne a elle aussi subi des formes de rejets racistes extrêmes proches de ceux visant la communauté juive.
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Dans ce sens il est juste de dire que le racisme est exploité par les dominants pour diviser. Mais il est faux de le réduire à cela dans une vision purement fonctionnaliste (« le racisme est juste un discours créé pour diviser »). Les divisions « raciales » (au sens sociologique) sont structurelles et matérielles, avec de nombreux effets sur les conditions de vie. Ce sont ces divisions matérielles qui sont le terreau des discours racistes. Elles ne peuvent pas cesser avec de simples changements de discours, et nécessitent d'aller vers des luttes de classes unifiantes.
 
Dans ce sens il est juste de dire que le racisme est exploité par les dominants pour diviser. Mais il est faux de le réduire à cela dans une vision purement fonctionnaliste (« le racisme est juste un discours créé pour diviser »). Les divisions « raciales » (au sens sociologique) sont structurelles et matérielles, avec de nombreux effets sur les conditions de vie. Ce sont ces divisions matérielles qui sont le terreau des discours racistes. Elles ne peuvent pas cesser avec de simples changements de discours, et nécessitent d'aller vers des luttes de classes unifiantes.
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==Race et classe ==
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La racialisation se fait sur des critères apparents, mais qui vont bien au-delà de la couleur de peau (croyances, habits, langue, traits culturels…).
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Mais il faut souligner que les idéologies ont une importance réelle. Aucun discours raciste concret n’est donc le produit d’un seul facteur matériel. Quelles que soient les bases matérielles des « races sociales », une fois l'idéologie autonomisée, ses manifestations touchent plus largement que les rapports de classe. Par exemple :
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* Une vague d’antisémitisme touche les nombreux Juif·ves pauvres qui viennent d’Europe de l’Est vers la fin du 19e siècle. Les Juif·ves intégrés à la bourgeoisie française prennent eux-mêmes part à cette vague en les traitant de « barbares » … mais ils se retrouveront visés aussi par l’antisémitisme.
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* Une Noir ou une Arabe a plus de chance de subir une discrimination qu’une Blanche de même classe sociale. Un rappeur noir même riche subira aussi le racisme omniprésent, par exemple en étant victime de contrôle au faciès. Même si le racisme particulièrement fort qu’ils subissent provient en dernière analyse des rapports coloniaux et de classe, le racisme agit d’abord comme racisme, avec des nuances suivant les classes.
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* Bien que différemment, l’islamophobie peut toucher tou·te·s les musulman·es quelle que soit leur classe ou pays d’origine.
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Les mécanismes du racisme structurel peuvent être :
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* Discrimination à l’embauche et ségrégation sociale (par exemple sur les chantiers, en général les gros travaux sont faits par les Noirs, les travaux plus techniques par les Arabes, et les contremaîtres sont blancs).
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* Discrimination au logement, ségrégation géographique
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* Contrôle au faciès et violences policières
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* Jugements pénaux réguliers, incarcération massive…
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Il y a bien un rapport de domination qui apporte certains bénéfices au groupe dominant en tant que tel : quand une personne du groupe dominé est discriminée au logement ou à l’emploi, c'est à l’inverse une personne du groupe dominant qui a plus de chances d’être prise. Cependant on ne peut pas parler véritablement de rapports d’exploitation entre les « races ». La relation, médiée, fait intervenir la classe dominante qui a de fait une responsabilité particulière : le propriétaire ou le patron qui discrimine, l’institution policière…
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Les races sociales sont des catégories comme les classes sociales, qui n'ont pas une origine biologique mais qui ont quand même une réalité sociale : il y a des groupes dominants et des groupes dominés, avec des conséquences très concrètes.
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Dans cette vision, le fait d'appartenir à la catégorie des Blancs ("blanchité") apporte des privilèges (en moyenne), au delà de la classe sociale. L'origine de la construction des races sociales serait essentiellement le [[colonialisme]] et l'[[impérialisme]] (le champ théorique associé à cette vision est ainsi appelé ''études post-coloniales'').
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Comme les classes sociales, les études post-coloniales ont un objet d'étude qui est évolutif en fonction des lieux et des époques. Par exemple, étant donné la variété d'ethnies et de cultures différentes des juif·ves, il serait peu pertinent d'étudier l'histoire à l'aide de la notion de «peuple juif». Cependant, les idéologies antisémites du 20<sup>e</sup> siècle d'une part, et le sionisme d'autre part, ont créé une sorte de catégorie "juif", péjorative ou méliorative selon qui l'utilise, qui prend de fait le dessus sur des identités plus anciennes. Il y a un processus similaire en ce qui concerne la «négritude». Il est évident qu'historiquement, sur des milliers d'années, les différentes cultures (parfois antagoniques) se sont développées en Afrique, comme en Europe. Mais le racisme négrophobe développé par les puissances européennes a créé une image commune «des Noirs», «des Africains», et à la faveur des luttes d'émancipation contre l'esclavage, la décolonisation, etc, de nombreux Africains (dont des théoriciens comme Césaire) sont partis de cette identité noire (la négritude), de cette communauté de destin, pour définir leur lutte.
    
==Théories racialistes==
 
==Théories racialistes==
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=== Nazisme ===
 
=== Nazisme ===
[[Fichier:Selection on the ramp at Auschwitz-Birkenau, 1944 (Auschwitz Album) 1a.jpg|vignette|Le [[w:Auschwitz#Auschwitz%20II%20(Birkenau)|camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau]].]]
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[[Fichier:Selection on the ramp at Auschwitz-Birkenau, 1944 (Auschwitz Album) 1a.jpg|vignette|Le [[w:Auschwitz#Auschwitz%20II%20(Birkenau)|camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau]].|307x307px]]
 
C'est de cette matrice racialiste que sont sortis les fanatismes du 20<sup>e</sup> siècle comme l'idéologie [[nazisme|nazi]]. Comme le phénomène [[fasciste]] de l'époque en général, le nazisme est né des [[contradictions du capitalisme]] en [[Grande dépression (1929-1939)|crise des années 1930]]. Mais le nazisme se distingue comme la pire horreur qu'ait produite l'humanité, avec une exaltation à une échelle sans précédant de discours [[Nationalisme|nationalistes]], [[Racisme|racistes]] et [[antisémites]], qui ont conduit à la mise en place d'un système d'extermination en masse de populations considérées comme des « [[w:Untermensch|sous-hommes]] », en particulier [[w:Shoah|environ 6 millions de Juif·ves]], [[w:Porajmos|près d'un million de Tsiganes]], et des millions de slaves.
 
C'est de cette matrice racialiste que sont sortis les fanatismes du 20<sup>e</sup> siècle comme l'idéologie [[nazisme|nazi]]. Comme le phénomène [[fasciste]] de l'époque en général, le nazisme est né des [[contradictions du capitalisme]] en [[Grande dépression (1929-1939)|crise des années 1930]]. Mais le nazisme se distingue comme la pire horreur qu'ait produite l'humanité, avec une exaltation à une échelle sans précédant de discours [[Nationalisme|nationalistes]], [[Racisme|racistes]] et [[antisémites]], qui ont conduit à la mise en place d'un système d'extermination en masse de populations considérées comme des « [[w:Untermensch|sous-hommes]] », en particulier [[w:Shoah|environ 6 millions de Juif·ves]], [[w:Porajmos|près d'un million de Tsiganes]], et des millions de slaves.
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En parallèle, les [[mouvements de libération nationale]] et de [[décolonisation]] font relever la tête à bon nombre de celles et ceux qui avaient intériorisé les discours des impérialistes sur l'infériorité, comme le relèvera [[Frantz Fanon]].  
 
En parallèle, les [[mouvements de libération nationale]] et de [[décolonisation]] font relever la tête à bon nombre de celles et ceux qui avaient intériorisé les discours des impérialistes sur l'infériorité, comme le relèvera [[Frantz Fanon]].  
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Par ailleurs, les progrès des sciences rendent plus difficile pour les intellectuels réactionnaires de continuer à spéculer sur une  « inégalité biologique des races ». Des intellectuels comme [[w:Claude Lévi-Strauss|Lévi-Strauss]] ou [[w:Jean-Paul Sartre|Sartre]] joueront un rôle important.  
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Par ailleurs, les progrès des sciences rendent plus difficile pour les intellectuels réactionnaires de continuer à spéculer sur une  « inégalité biologique des races ». Des intellectuels comme [[w:Claude Lévi-Strauss|Lévi-Strauss]], [[w:Jean-Paul Sartre|Sartre]] ou [[w:Colette Guillaumin|Guillaumin]] joueront un rôle important.  
 
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[[Fichier:Marche pour l'égalité contre le racisme.png|lien=https://wikirouge.net/Fichier:Marche%20pour%20l'%C3%A9galit%C3%A9%20contre%20le%20racisme.png|vignette|349x349px|La [[w:Marche pour l'égalité et contre le racisme|Marche pour l'égalité et contre le racisme]] de 1983]]
Il reste néanmoins de forts relents de racisme, moins assumé chez les [[politiciens]] [[libéraux]] (de gauche et de droite), plus assumé dans l'[[extrême droite]], et globalement diffus dans la population. Pour la première fois cependant, des mouvements [[anti-racistes]] de masse apparaissent en occident, et la tendance semble à la fin du 20<sup>e</sup> siècle au recul des théories racistes.
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Il reste néanmoins de forts relents de racisme, moins assumé chez les [[politiciens]] [[libéraux]] (de gauche et de droite), plus assumé dans l'[[extrême droite]] (qui a commis de très nombreux meurtres racistes), et globalement diffus dans la population. Pour la première fois cependant, des mouvements [[anti-racistes]] de masse apparaissent en occident, et la tendance semble à la fin du 20<sup>e</sup> siècle au recul des théories racistes.
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Le [[Ralentissement économique des années 1970|ralentissement économique à partir des années 1970]], suivi du [[tournant néolibéral]], est cependant en train de refermer ces conditions relativement favorables aux idées égalitaires.
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Le [[Ralentissement économique des années 1970|ralentissement économique à partir des années 1970]], suivi du [[tournant néolibéral]], a cependant refermé ces conditions relativement favorables aux idées égalitaires.
    
=== Culturalisme ===
 
=== Culturalisme ===
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Sur le plan intérieur, le rôle de justification du racisme contre une des franges [[sur-exploitées]] du prolétariat s'ajoute dans certains cas. Dans un pays comme la France, où un grand nombre de travailleur·ses issus du Maghreb sont musulmans, l’islamophobie permet de prendre le relais du racisme traditionnel plutôt discrédité.
 
Sur le plan intérieur, le rôle de justification du racisme contre une des franges [[sur-exploitées]] du prolétariat s'ajoute dans certains cas. Dans un pays comme la France, où un grand nombre de travailleur·ses issus du Maghreb sont musulmans, l’islamophobie permet de prendre le relais du racisme traditionnel plutôt discrédité.
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===Race et classe ===
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La racialisation se fait sur des critères apparents, mais qui vont bien au-delà de la couleur de peau (croyances, habits, langue, traits culturels…).
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Mais il faut souligner que les idéologies ont une importance réelle. Aucun discours raciste concret n’est donc le produit d’un seul facteur matériel. Quelles que soient les bases matérielles des « races sociales », une fois l'idéologie autonomisée, ses manifestations touchent plus largement que les rapports de classe. Par exemple :
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* Une vague d’antisémitisme touche les nombreux Juif·ves pauvres qui viennent d’Europe de l’Est vers la fin du 19e siècle. Les Juif·ves intégrés à la bourgeoisie française prennent eux-mêmes part à cette vague en les traitant de « barbares » … mais ils se retrouveront visés aussi par l’antisémitisme.
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* Une Noir ou une Arabe a plus de chance de subir une discrimination qu’une Blanche de même classe sociale. Un rappeur noir même riche subira aussi le racisme omniprésent, par exemple en étant victime de contrôle au faciès. Même si le racisme particulièrement fort qu’ils subissent provient en dernière analyse des rapports coloniaux et de classe, le racisme agit d’abord comme racisme, avec des nuances suivant les classes.
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* Bien que différemment, l’islamophobie peut toucher tou·te·s les musulman·es quelle que soit leur classe ou pays d’origine.
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Les mécanismes du racisme structurel peuvent être :
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* Discrimination à l’embauche et ségrégation sociale (par exemple sur les chantiers, en général les gros travaux sont faits par les Noirs, les travaux plus techniques par les Arabes, et les contremaîtres sont blancs).
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* Discrimination au logement, ségrégation géographique
  −
* Contrôle au faciès et violences policières
  −
* Jugements pénaux réguliers, incarcération massive…
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  −
Il y a bien un rapport de domination qui apporte certains bénéfices au groupe dominant en tant que tel : quand une personne du groupe dominé est discriminée au logement ou à l’emploi, c'est à l’inverse une personne du groupe dominant qui a plus de chances d’être prise. Cependant on ne peut pas parler véritablement de rapports d’exploitation entre les « races ». La relation, médiée, fait intervenir la classe dominante qui a de fait une responsabilité particulière : le propriétaire ou le patron qui discrimine, l’institution policière…
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Les races sociales sont des catégories comme les classes sociales, qui n'ont pas une origine biologique mais qui ont quand même une réalité sociale : il y a des groupes dominants et des groupes dominés, avec des conséquences très concrètes.
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Dans cette vision, le fait d'appartenir à la catégorie des Blancs ("blanchité") apporte des privilèges (en moyenne), au delà de la classe sociale. L'origine de la construction des races sociales serait essentiellement le [[colonialisme]] et l'[[impérialisme]] (le champ théorique associé à cette vision est ainsi appelé ''études post-coloniales'').
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Comme les classes sociales, les études post-coloniales ont un objet d'étude qui est évolutif en fonction des lieux et des époques. Par exemple, étant donné la variété d'ethnies et de cultures différentes des juif·ves, il serait peu pertinent d'étudier l'histoire à l'aide de la notion de «peuple juif». Cependant, les idéologies antisémites du 20<sup>e</sup> siècle d'une part, et le sionisme d'autre part, ont créé une sorte de catégorie "juif", péjorative ou méliorative selon qui l'utilise, qui prend de fait le dessus sur des identités plus anciennes. Il y a un processus similaire en ce qui concerne la «négritude». Il est évident qu'historiquement, sur des milliers d'années, les différentes cultures (parfois antagoniques) se sont développées en Afrique, comme en Europe. Mais le racisme négrophobe développé par les puissances européennes a créé une image commune «des Noirs», «des Africains», et à la faveur des luttes d'émancipation contre l'esclavage, la décolonisation, etc, de nombreux Africains (dont des théoriciens comme Césaire) sont partis de cette identité noire (la négritude), de cette communauté de destin, pour définir leur lutte.
      
==La lutte contre le racisme==
 
==La lutte contre le racisme==
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Lors de la création de la [[Société des Nations]] en 1919 (ancêtre de l'[[Organisation des nations unies|ONU]]), le Japon propose le « [[w:Principe de l'égalité des races|principe de l'égalité des races]] ». Il ne s'agissait que d'un voile [[Idéologie|idéologique]] :  le Japon n'avait aucune intention de défendre une position de principe sincère (il [[Impérialisme japonais|colonisait lui-même d'autres nations asiatiques]]), mais utilisait seulement ce thème pour justifier auprès des puissances occidentales un statut de « grande puissance non-blanche mais néanmoins égale ».<ref>Naoko Shimazu, ''Japan, Race and Equality'', Routledge, 1998, 255 <abbr>p.</abbr> <small>(<nowiki>ISBN 0-415-17207-1</nowiki>)</small></ref>
 
Lors de la création de la [[Société des Nations]] en 1919 (ancêtre de l'[[Organisation des nations unies|ONU]]), le Japon propose le « [[w:Principe de l'égalité des races|principe de l'égalité des races]] ». Il ne s'agissait que d'un voile [[Idéologie|idéologique]] :  le Japon n'avait aucune intention de défendre une position de principe sincère (il [[Impérialisme japonais|colonisait lui-même d'autres nations asiatiques]]), mais utilisait seulement ce thème pour justifier auprès des puissances occidentales un statut de « grande puissance non-blanche mais néanmoins égale ».<ref>Naoko Shimazu, ''Japan, Race and Equality'', Routledge, 1998, 255 <abbr>p.</abbr> <small>(<nowiki>ISBN 0-415-17207-1</nowiki>)</small></ref>
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L'instrumentalisation est aussi flagrante lorsque des politiciens de droite, qui n'ont jamais la moindre implication dans la lutte antiraciste, se saisissent de certaines agressions agressions racistes pour mieux stigmatiser une autre communauté victime de racisme.<ref>Quốc Anh, ''[https://blogs.mediapart.fr/qu-c-anh/blog/071120/contre-l-instrumentalisation-raciste-du-racisme-anti-asiatique-1 Contre l’instrumentalisation raciste du racisme anti-asiatique]'', Novembre 2020</ref><ref>[http://golema.net/qui-sommes-nous/golema-un-projet-dauto-defense/ Golema, un projet d’auto-défense], janvier 2021</ref>
    
===Antiracisme moral et antiracisme politique ===
 
===Antiracisme moral et antiracisme politique ===
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[[Fichier:Main sos.gif|droite|sans_cadre|205x205px]]
 
Un clivage existe dans le mouvement antiraciste entre deux courants, même si leurs contours sont flous :
 
Un clivage existe dans le mouvement antiraciste entre deux courants, même si leurs contours sont flous :
  

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