Modifications

Aller à la navigation Aller à la recherche
1 033 octets ajoutés ,  22 juillet 2022 à 00:22
aucun résumé des modifications
Ligne 33 : Ligne 33 :  
Le racisme actuel, qui traverse les sociétés européennes blanches, envers les peuples d’Afrique par exemple, et plus largement envers les non-blanc·hes, n’est pas qu’un reste du temps colonial. Il s'entretient aussi de par l’[[impérialisme]] économique  : les mécanismes de marché qui maintiennent le transfert de richesse Sud-Nord ne sont pas visibilisés, et permettent des discours méprisants et infantilisants sur la misère, qui permettent aussi de justifier du maintien de bases militaires dans le monde. Par ailleurs l’[[islamophobie]] est très présente dans la justification des interventions militaires depuis les années 2000, pour « apporter la démocratie » (en fait essentiellement maintenir l'ordre pour protéger des intérêts stratégiques).
 
Le racisme actuel, qui traverse les sociétés européennes blanches, envers les peuples d’Afrique par exemple, et plus largement envers les non-blanc·hes, n’est pas qu’un reste du temps colonial. Il s'entretient aussi de par l’[[impérialisme]] économique  : les mécanismes de marché qui maintiennent le transfert de richesse Sud-Nord ne sont pas visibilisés, et permettent des discours méprisants et infantilisants sur la misère, qui permettent aussi de justifier du maintien de bases militaires dans le monde. Par ailleurs l’[[islamophobie]] est très présente dans la justification des interventions militaires depuis les années 2000, pour « apporter la démocratie » (en fait essentiellement maintenir l'ordre pour protéger des intérêts stratégiques).
   −
L'[[immigration]] est fortement liée au système [[impérialiste]] : chaque puissance  a puisé des ressources et de la main d’œuvre dans ses anciennes colonies, et continue de le faire depuis les [[Décolonisation|décolonisations]]. L'immigration a une conséquence directe en terme de classe : l'immigré·e venant d'un [[pays dominé]] est presque automatiquement déclassé·e, se retrouvant presque toujours tout en bas de la hiérarchie sociale du pays d'arrivée. Même dans les cas où il ou elle a des [[Qualification|qualifications]], elles sont rarement reconnues. Inévitablement, dans des conditions d'exploitation de la force de travail et de concurrence entre salarié·es, cette situation tend à générer du racisme envers les immigré·es (même lorsqu'ils sont blanc·hes, comme les Irlandais·ses en Angleterre au 19<sup>e</sup> s.).
+
L'[[immigration]] est fortement liée au système [[impérialiste]] : chaque puissance  a puisé des ressources et de la main d’œuvre dans ses anciennes colonies, et continue de le faire depuis les [[Décolonisation|décolonisations]]. L'immigration a une conséquence directe en terme de classe : l'immigré·e venant d'un [[pays dominé]] est presque automatiquement déclassé·e, se retrouvant presque toujours tout en bas de la hiérarchie sociale du pays d'arrivée. Même dans les cas où il ou elle a des [[Qualification|qualifications]], elles sont rarement reconnues, et la méconnaissance des codes du pays d'accueil (barrière de la [[langue]]...) contribue à un [[déclassement]]. Inévitablement, dans des conditions d'exploitation de la force de travail et de concurrence entre salarié·es, cette situation tend à générer du racisme envers les immigré·es (même lorsqu'ils sont blanc·hes, comme les Irlandais·ses en Angleterre au 19<sup>e</sup> s.).
    
Les politiques des [[État bourgeois|États]] sur l'immigration varient en fonction des [[Cycle économique|cycles économiques]]. Dans l'[[après-guerre]], l'immigration était autorisée en masse (forte [[croissance]]), elle est devenue toujours plus criminalisée depuis le [[tournant néolibéral]] des années 1980. Cette criminalisation a l'effet de créer une couche de [[sans-papiers]] avec très peu de droits, qui est [[Surexploitation|sur-exploitée]] par les [[patrons]] dans certains secteurs. Les mêmes politiciens hypocrites qui attisent le racisme à demi-mots (il suffit de déclamer contre « les immigrés clandestins » pour que le message subliminal soit compris), savent très bien que leurs amis capitalistes ont en fait besoin de ces sans-papiers.  
 
Les politiques des [[État bourgeois|États]] sur l'immigration varient en fonction des [[Cycle économique|cycles économiques]]. Dans l'[[après-guerre]], l'immigration était autorisée en masse (forte [[croissance]]), elle est devenue toujours plus criminalisée depuis le [[tournant néolibéral]] des années 1980. Cette criminalisation a l'effet de créer une couche de [[sans-papiers]] avec très peu de droits, qui est [[Surexploitation|sur-exploitée]] par les [[patrons]] dans certains secteurs. Les mêmes politiciens hypocrites qui attisent le racisme à demi-mots (il suffit de déclamer contre « les immigrés clandestins » pour que le message subliminal soit compris), savent très bien que leurs amis capitalistes ont en fait besoin de ces sans-papiers.  
Ligne 162 : Ligne 162 :  
''«&nbsp;La théorie de la race, qu'on dirait créée spécialement pour un autodidacte prétentieux et qui se présente comme la clé universelle de tous les secrets de la vie, apparaît sous un jour particulièrement lamentable à la lumière de l'histoire des idées. Pour fonder la religion du sang véritablement allemand, Hitler dut emprunter de seconde main les idées du racisme à un Français, diplomate et écrivain dilettante, le comte Gobineau. Hitler trouva une méthodologie politique toute prête chez les Italiens. Mussolini a largement utilisé la théorie de Marx de la lutte des classes. Le marxisme lui-même est le fruit de la combinaison de la philosophie allemande, de l'histoire française et de l'économie anglaise. Si l'on examine rétrospectivement la généalogie des idées, même les plus réactionnaires et les plus stupides, on ne trouve pas trace du racisme.&nbsp;»''<ref name=":1">Léon Trotski, [[:fr:Qu'est-ce que le national-socialisme ?|''Qu'est-ce que le national-socialisme ?'']], 10 juin 1933</ref>
 
''«&nbsp;La théorie de la race, qu'on dirait créée spécialement pour un autodidacte prétentieux et qui se présente comme la clé universelle de tous les secrets de la vie, apparaît sous un jour particulièrement lamentable à la lumière de l'histoire des idées. Pour fonder la religion du sang véritablement allemand, Hitler dut emprunter de seconde main les idées du racisme à un Français, diplomate et écrivain dilettante, le comte Gobineau. Hitler trouva une méthodologie politique toute prête chez les Italiens. Mussolini a largement utilisé la théorie de Marx de la lutte des classes. Le marxisme lui-même est le fruit de la combinaison de la philosophie allemande, de l'histoire française et de l'économie anglaise. Si l'on examine rétrospectivement la généalogie des idées, même les plus réactionnaires et les plus stupides, on ne trouve pas trace du racisme.&nbsp;»''<ref name=":1">Léon Trotski, [[:fr:Qu'est-ce que le national-socialisme ?|''Qu'est-ce que le national-socialisme ?'']], 10 juin 1933</ref>
 
</blockquote>
 
</blockquote>
 +
Plus généralement, l'usage des statistiques de façon peu rigoureuse peut servir à légitimer des thèses racistes. On peut trouver des corrélations entre plusieurs variables... mais corrélation n'est pas explication&nbsp;! Par exemple, la criminalité est plus fréquente chez les "gens" de plus de 1m75... tout simplement parce que la criminalité est plus fréquente chez les hommes, et que les "gens" de plus de 1m75 sont très majoritairement des hommes. De même, la criminalité est plus fréquente chez les jeunes et les pauvres... Or les immigrés sont plus souvent des hommes, jeunes, et pauvres...<ref>André Kuhn, [http://www.asile.ch/vivre-ensemble/2012/10/06/andre-kuhn-comment-sexplique-la-surrepresentation-des-etrangers-dans-la-criminalite/ Comment s’explique la surreprésentation des étrangers dans la criminalité ?], 2012</ref>
    
=== Nazisme ===
 
=== Nazisme ===
Ligne 174 : Ligne 175 :  
Par ailleurs, les progrès des sciences rendent plus difficile pour les intellectuels réactionnaires de continuer à spéculer sur une  « inégalité biologique des races ». Des intellectuels comme [[w:Claude Lévi-Strauss|Lévi-Strauss]] ou [[w:Jean-Paul Sartre|Sartre]] joueront un rôle important.  
 
Par ailleurs, les progrès des sciences rendent plus difficile pour les intellectuels réactionnaires de continuer à spéculer sur une  « inégalité biologique des races ». Des intellectuels comme [[w:Claude Lévi-Strauss|Lévi-Strauss]] ou [[w:Jean-Paul Sartre|Sartre]] joueront un rôle important.  
   −
Dans ce contexte, les théories racistes semblent reculer. Il reste néanmoins de forts relents de racisme, moins assumé chez les [[politiciens]] [[libéraux]] (de gauche et de droite), plus assumé dans l'[[extrême droite]], et globalement diffus dans la population. Pour la première fois cependant, des mouvements [[anti-racistes]] de masse apparaissent en occident.
+
Il reste néanmoins de forts relents de racisme, moins assumé chez les [[politiciens]] [[libéraux]] (de gauche et de droite), plus assumé dans l'[[extrême droite]], et globalement diffus dans la population. Pour la première fois cependant, des mouvements [[anti-racistes]] de masse apparaissent en occident, et la tendance semble à la fin du 20<sup>e</sup> siècle au recul des théories racistes.
    
Le [[Ralentissement économique des années 1970|ralentissement économique à partir des années 1970]], suivi du [[tournant néolibéral]], est cependant en train de refermer ces conditions relativement favorables aux idées égalitaires.
 
Le [[Ralentissement économique des années 1970|ralentissement économique à partir des années 1970]], suivi du [[tournant néolibéral]], est cependant en train de refermer ces conditions relativement favorables aux idées égalitaires.
 +
 +
=== Culturalisme ===
 +
Certains intellectuels, pour expliquer des faits sociaux, ont avancé des explications basées sur la culture des différents groupes ethniques. Ces explications sont souvent appelées « [[w:culturalisme|culturalistes]] ».
 +
 +
Ces explications ne sont pas forcément portées par des réactionnaires. Par exemple le sociologue [[w:Hugues Lagrange|Hugues Lagrange]] défend dans ''Le Déni des cultures'' (2010) que les jeunes d’origine [[w:Sahel|sahélienne]] auraient de moins bons résultats scolaires  en France par rapport à ceux d’autres jeunes d’origine étrangère, et attribue cela à une différence de culture qui créerait des difficultés d'adaptation. Ce type d'explication n'est bien sûr pas équivalent à des théories des races biologiques. Mais les explications culturalistes sont de fait en contradiction (au moins partielle) avec les explications basées avant tout sur les facteurs sociaux (l'impact de la [[classe sociale]] en premier lieu).
 +
 +
La [[reproduction sociale]] est le principal facteur qui fait que les enfants de pauvres restent pauvres, et dans un contexte de stagnation économique, les immigré·es qui se retrouvent tout en bas de l'échelle sociale, ont très peu de chance de voir leurs enfants prendre un [[ascenseur social]].
 +
 +
Surtout, il existe tout une gamme de discours culturalistes tout à fait réactionnaires, pointant une soi disant impossibilité d'intégrer certaines cultures. Dans ces discours, le mot « culture » enrobe tout autant les préjugés subjectifs que lorsque d'autres parlent de « race ».
    
==="Choc des civilisations" et 11 septembre ===
 
==="Choc des civilisations" et 11 septembre ===
Ligne 192 : Ligne 202 :  
Sur le plan intérieur, le rôle de justification du racisme contre une des franges [[sur-exploitées]] du prolétariat s'ajoute dans certains cas. Dans un pays comme la France, où un grand nombre de travailleur·ses issus du Maghreb sont musulmans, l’islamophobie permet de prendre le relais du racisme traditionnel plutôt discrédité.
 
Sur le plan intérieur, le rôle de justification du racisme contre une des franges [[sur-exploitées]] du prolétariat s'ajoute dans certains cas. Dans un pays comme la France, où un grand nombre de travailleur·ses issus du Maghreb sont musulmans, l’islamophobie permet de prendre le relais du racisme traditionnel plutôt discrédité.
   −
==="Race" et classe sociale===
+
===Race et classe ===
En général, la diffusion de pensées racialistes se fait de façon beaucoup plus sournoise&nbsp;: en prétendant expliquer certains constats par la "race" ou la culture alors qu'ils sont avant tout déterminés par la classe sociale. En particulier, dans les [[pays impérialistes]], les travailleurs immigrés sont souvent de fait au bas de l'échelle de la classe laborieuse. Les hommes politiques réactionnaires se plaisent alors à expliquer que c'est leur culture qui leur pose des difficultés pour s'intégrer. Certains font même mine de les plaindre, se mettant ainsi à l'abri de l'accusation de racisme. Mais en réalité c'est déjà une victoire pour eux que de faire admettre que c'est la culture qui est le principal obstacle à "l'intégration". Certes, la barrière de la langue, par exemple, est souvent un problème pour les immigrants, mais une bonne partie redoublent d'efforts et compensent cette difficulté. Par contre, ce qu'ils n'ont que peu de chances de surmonter, c'est la [[reproduction sociale]] qui fait que les enfants de pauvres restent pauvres.
  −
 
  −
Claude Guéant&nbsp;: «&nbsp;le quart des étrangers qui ne sont pas d'origine européenne sont au chômage, les deux tiers des échecs scolaires, c'est l'échec d'enfants d'immigrés.&nbsp;» (ces chiffres n'étant d'ailleurs retrouvables nulle part...)<ref>http://www.slate.fr/story/38703/gueant-integration-education-chiffres-polemiques</ref>
  −
 
  −
Plus généralement, l'usage des statistiques de façon peu rigoureuse peut servir à légitimer des thèses racistes. On peut trouver des corrélations entre plusieurs variables... mais corrélation n'est pas explication&nbsp;! Par exemple, la criminalité est plus fréquente chez les "gens" de plus de 1m75... tout simplement parce que la criminalité est plus fréquente chez les hommes, et que les "gens" de plus de 1m75 sont très majoritairement des hommes. De même, la criminalité est plus fréquente chez les jeunes et les pauvres... Or les immigrés sont plus souvent des hommes, jeunes, et pauvres...<ref>André Kuhn, [http://www.asile.ch/vivre-ensemble/2012/10/06/andre-kuhn-comment-sexplique-la-surrepresentation-des-etrangers-dans-la-criminalite/ Comment s’explique la surreprésentation des étrangers dans la criminalité ?], 2012</ref>
  −
 
   
La racialisation se fait sur des critères apparents, mais qui vont bien au-delà de la couleur de peau (croyances, habits, langue, traits culturels…).
 
La racialisation se fait sur des critères apparents, mais qui vont bien au-delà de la couleur de peau (croyances, habits, langue, traits culturels…).
   Ligne 215 : Ligne 219 :     
Il y a bien un rapport de domination qui apporte certains bénéfices au groupe dominant en tant que tel : quand une personne du groupe dominé est discriminée au logement ou à l’emploi, c'est à l’inverse une personne du groupe dominant qui a plus de chances d’être prise. Cependant on ne peut pas parler véritablement de rapports d’exploitation entre les « races ». La relation, médiée, fait intervenir la classe dominante qui a de fait une responsabilité particulière : le propriétaire ou le patron qui discrimine, l’institution policière…
 
Il y a bien un rapport de domination qui apporte certains bénéfices au groupe dominant en tant que tel : quand une personne du groupe dominé est discriminée au logement ou à l’emploi, c'est à l’inverse une personne du groupe dominant qui a plus de chances d’être prise. Cependant on ne peut pas parler véritablement de rapports d’exploitation entre les « races ». La relation, médiée, fait intervenir la classe dominante qui a de fait une responsabilité particulière : le propriétaire ou le patron qui discrimine, l’institution policière…
 +
 +
Les races sociales sont des catégories comme les classes sociales, qui n'ont pas une origine biologique mais qui ont quand même une réalité sociale : il y a des groupes dominants et des groupes dominés, avec des conséquences très concrètes.
 +
 +
Dans cette vision, le fait d'appartenir à la catégorie des Blancs ("blanchité") apporte des privilèges (en moyenne), au delà de la classe sociale. L'origine de la construction des races sociales serait essentiellement le [[colonialisme]] et l'[[impérialisme]] (le champ théorique associé à cette vision est ainsi appelé ''études post-coloniales'').
 +
 +
Comme les classes sociales, les études post-coloniales ont un objet d'étude qui est évolutif en fonction des lieux et des époques. Par exemple, étant donné la variété d'ethnies et de cultures différentes des juif·ves, il serait peu pertinent d'étudier l'histoire à l'aide de la notion de «peuple juif». Cependant, les idéologies antisémites du 20<sup>e</sup> siècle d'une part, et le sionisme d'autre part, ont créé une sorte de catégorie "juif", péjorative ou méliorative selon qui l'utilise, qui prend de fait le dessus sur des identités plus anciennes. Il y a un processus similaire en ce qui concerne la «négritude». Il est évident qu'historiquement, sur des milliers d'années, les différentes cultures (parfois antagoniques) se sont développées en Afrique, comme en Europe. Mais le racisme négrophobe développé par les puissances européennes a créé une image commune «des Noirs», «des Africains», et à la faveur des luttes d'émancipation contre l'esclavage, la décolonisation, etc, de nombreux Africains (dont des théoriciens comme Césaire) sont partis de cette identité noire (la négritude), de cette communauté de destin, pour définir leur lutte.
    
==La lutte contre le racisme==
 
==La lutte contre le racisme==
    
=== Humanisme bourgeois  ===
 
=== Humanisme bourgeois  ===
{{...}}Une des premières formes d'[[antiracisme]] peut être vue dans la frange du mouvement [[Libéralisme|libéral]] et [[Démocratisme|démocrate bourgeois]] qui a commencé à [[Lutte contre l'esclavage|lutter contre l'esclavage]] à la fin du 18<sup>e</sup> siècle. Bien évidemment, les révoltes d'esclaves eux et elles-mêmes ont aussi contribué à l'abolitionnisme, en marquant de plus en plus les esprits.
+
Une des premières formes d'[[antiracisme]] peut être vue dans la frange du mouvement [[Libéralisme|libéral]] et [[Démocratisme|démocrate bourgeois]] qui a commencé à [[Lutte contre l'esclavage|lutter contre l'esclavage]] à la fin du 18<sup>e</sup> siècle. La plupart d'entre eux voulaient une abolition [[Gradualisme|graduelle]], pour ne pas heurter les intérêts économiques, mais aussi au nom du temps nécessaire pour « éduquer » les Noirs à la liberté. C'était par exemple le discours que tenait la ''[[w:Société des amis des Noirs|Société des amis des Noirs]]''.  Bien évidemment, les révoltes d'esclaves eux et elles-mêmes ont aussi contribué à l'abolitionnisme, en marquant de plus en plus les esprits.
    
Mais l'abolition de l'esclavage était loin de mettre fin à toutes les violences et discriminations. En 1865, l'année même où le Sud esclavagiste des États-Unis [[Guerre de Sécession|est contraint d'accepter]] l'abolition, le [[w:Ku Klux Klan|Ku Klux Klan]] est formé. Par ailleurs de [[w:Ségrégation raciale aux États-Unis|nombreuses lois ségrégationnistes]] sont alors mises en place dans le Sud, qui dureront jusqu'en 1964. Pendant un siècle, l'[[humanisme]] bourgeois bon teint cohabitera sans trop de peine avec la ségrégation et les lynchages.
 
Mais l'abolition de l'esclavage était loin de mettre fin à toutes les violences et discriminations. En 1865, l'année même où le Sud esclavagiste des États-Unis [[Guerre de Sécession|est contraint d'accepter]] l'abolition, le [[w:Ku Klux Klan|Ku Klux Klan]] est formé. Par ailleurs de [[w:Ségrégation raciale aux États-Unis|nombreuses lois ségrégationnistes]] sont alors mises en place dans le Sud, qui dureront jusqu'en 1964. Pendant un siècle, l'[[humanisme]] bourgeois bon teint cohabitera sans trop de peine avec la ségrégation et les lynchages.
Ligne 226 : Ligne 236 :     
=== Antiracisme de masse ===
 
=== Antiracisme de masse ===
 +
[[Fichier:IhaveadreamMarines.jpg|vignette|[[w:Marche sur Washington pour l'emploi et la liberté|Marche sur Washington]] du 28 août 1963 où [[w:Martin Luther King|Martin Luther King]] fait son discours historique ''[[w:I have a dream|I have a dream]].'']]
 
Il aura fallu un mouvement de masse, avant tout pris en charge par les Noir·es, pour mettre fin à la ségrégation officielle aux États-Unis ([[Mouvement afro-américain des droits civiques|mouvement pour les droits civiques]]). De même en ce qui concerne le mouvement pour l'abolition de l'[[Apartheid]] en Afrique du Sud.
 
Il aura fallu un mouvement de masse, avant tout pris en charge par les Noir·es, pour mettre fin à la ségrégation officielle aux États-Unis ([[Mouvement afro-américain des droits civiques|mouvement pour les droits civiques]]). De même en ce qui concerne le mouvement pour l'abolition de l'[[Apartheid]] en Afrique du Sud.
   Ligne 237 : Ligne 248 :     
===Antiracisme moral et antiracisme politique ===
 
===Antiracisme moral et antiracisme politique ===
===Notion de race sociale ===
+
Un clivage existe dans le mouvement antiraciste entre deux courants, même si leurs contours sont flous :
Certains courants, souvent regroupés sous le nom d'[[antiracisme politique]], utilisent le concept de ''race sociale'' dans leur militantisme. Il ne s'agit pas de races biologiques (comme l'immense majorité des antiracistes ils considèrent que parler de races humaines au sens biologique n'est pas pertinent scientifiquement). Les races sociales sont des catégories comme les classes sociales, qui n'ont pas une origine biologique mais qui ont quand même une réalité sociale : il y a des groupes dominants et des groupes dominés, avec des conséquences très concrètes.
  −
 
  −
Ainsi l'antiracisme politique considère qu'il ne faut pas se contenter de dénoncer des discours racistes explicites, mais qu'il faut analyser et comprendre l'ensemble de la division de la société en races sociales pour la dénoncer en tant que système. Il s'agit donc d'une dénonciation qui se veut bien plus radicale, et qui dénonce souvent des milieux politiques (y compris des organisations de gauche, antiracistes, etc.) comme participant à reproduire le racisme systémique. L'explication (se voulant matérialiste) étant le plus souvent que ces organisations (accusées de faire de «l'antiracisme moral») sont majoritairement composées de militant·e·s blanc·he·s). Dans cette vision, le fait d'appartenir à la catégorie des Blancs ("blanchité") apporte des privilèges (en moyenne), au delà de la classe sociale. L'origine de la construction des races sociales serait essentiellement le [[colonialisme]] et l'[[impérialisme]] (le champ théorique associé à cette vision est ainsi appelé ''études post-coloniales'').
  −
 
  −
Comme les classes sociales, les études post-coloniales ont un objet d'étude qui est évolutif en fonction des lieux et des époques. Par exemple, étant donné la variété d'ethnies et de cultures différentes des juif·ves, il serait peu pertinent d'étudier l'histoire à l'aide de la notion de «peuple juif». Cependant, les idéologies antisémites du 20<sup>e</sup> siècle d'une part, et le sionisme d'autre part, ont créé une sorte de catégorie "juif", péjorative ou méliorative selon qui l'utilise, qui prend de fait le dessus sur des identités plus anciennes. Il y a un processus similaire en ce qui concerne la «négritude». Il est évident qu'historiquement, sur des milliers d'années, les différentes cultures (parfois antagoniques) se sont développées en Afrique, comme en Europe. Mais le racisme négrophobe développé par les puissances européennes a créé une image commune «des Noirs», «des Africains», et à la faveur des luttes d'émancipation contre l'esclavage, la décolonisation, etc, de nombreux Africains (dont des théoriciens comme Césaire) sont partis de cette identité noire (la négritude), de cette communauté de destin, pour définir leur lutte.
     −
En France on retrouve dans ce courant le MWASI, la Brigade anti-négrophobie, le Collectif Stop le contrôle au faciès, le Parti des Indigènes de la République (PIR)...<ref>Indigènes TV, [https://www.youtube.com/watch?v=CkEzbn93dQI L'invention de la « race blanche »], 2014</ref>  
+
* L'antiracisme moral est celui d'associations comme [[w:SOS Racisme|SOS Racisme]], qui se contente essentiellement de condamner le racisme ordinaire de la population, en tant que comportements individuels immoraux. En un sens il s'agit du prolongement de l'humanisme bourgeois, mais dans un contexte où cette idéologie a pu toucher plus largement pour parvenir par moments à se massifier.
 +
* L'antiracisme politique cherche à analyser le racisme comme structurel, voire selon les cas directement véhiculé par l'État (Racisme d'État). Ce courant met en avant le fait que les rapports sociaux de race existent dans la société (« race sociale »), même s'ils n'ont pas d'origine biologique (tout comme la [[classe sociale]]). Cela conduit souvent à une critique bien plus radicale du racisme qui traverse la société, et qui dépasse largement le cas des discours consciemment racistes et haineux. Ainsi le racisme peut se retrouver y compris dans les autres mouvements d'opprimés : mouvement ouvrier, féminisme, mais également dans d'autres communautés elles-mêmes victimes du racisme. En France on retrouve dans ce courant le MWASI, la Brigade anti-négrophobie, le Collectif Stop le contrôle au faciès, le Parti des Indigènes de la République (PIR)...<ref>Indigènes TV, [https://www.youtube.com/watch?v=CkEzbn93dQI L'invention de la « race blanche »], 2014</ref>  
    
===Mouvement ouvrier / socialiste===
 
===Mouvement ouvrier / socialiste===

Menu de navigation