Modifications

Aller à la navigation Aller à la recherche
56 octets ajoutés ,  12 décembre 2021 à 10:11
aucun résumé des modifications
Ligne 114 : Ligne 114 :  
Nous étions en fait dans le contexte des votes abolitionnistes du congrès de Coppenhague. Mais l'accusation de massacre des Romanov en juillet 1918 dans la maison d'Ipatiev d'Ekaterinbourg est à mettre en rapport avec la [[question juive en Russie]]. Elle est indissociable de l'antisémitisme qui traverse l'Europe en 1919-1920 et vise les Bolcheviks, vainqueurs en Sibérie des Blancs et de leurs alliés occidentaux, tout autant pour leurs choix politiques que pour leur origine juive : le commandant du détachement assassin, Jacob Iourovsky, et son commanditaire Jacob [[ Sverdlov]], président du conseil régional de l'Oural. Or Sverdlov avait annoncé à l'été 1918 que suite à un complot visant à libérer les Romanov, le tsar avait été fusillé mais sa famille transférée. Mais parut en 1920 à grand succès un faux antisémite, ''Le Protocole des Sages de Sion'', créé par la police tsariste quinze ans plus tôt et auquel s'adjoignit cette thèse calomnieuse du massacre collectif des Saint Romanov par les Judéo-bolcheviks.   
 
Nous étions en fait dans le contexte des votes abolitionnistes du congrès de Coppenhague. Mais l'accusation de massacre des Romanov en juillet 1918 dans la maison d'Ipatiev d'Ekaterinbourg est à mettre en rapport avec la [[question juive en Russie]]. Elle est indissociable de l'antisémitisme qui traverse l'Europe en 1919-1920 et vise les Bolcheviks, vainqueurs en Sibérie des Blancs et de leurs alliés occidentaux, tout autant pour leurs choix politiques que pour leur origine juive : le commandant du détachement assassin, Jacob Iourovsky, et son commanditaire Jacob [[ Sverdlov]], président du conseil régional de l'Oural. Or Sverdlov avait annoncé à l'été 1918 que suite à un complot visant à libérer les Romanov, le tsar avait été fusillé mais sa famille transférée. Mais parut en 1920 à grand succès un faux antisémite, ''Le Protocole des Sages de Sion'', créé par la police tsariste quinze ans plus tôt et auquel s'adjoignit cette thèse calomnieuse du massacre collectif des Saint Romanov par les Judéo-bolcheviks.   
   −
De fait le massacre des Romanov en juillet 1918 a de plus en plus été contesté par des historiens tels que Marina Grey et Marc Ferro, comme par des experts de la gendarmerie française assez sceptiques quant à la fiabilité de Tests ADN sur des corps retrouvés des décennies plus tard <ref> "Romanov, la contre-enquête", 26 décembre 2018 documentaire télévisé sur la chaine ''Histoire''</ref>. Seule à l'époque jusqu'en 1922 l'exécution du tsar fut reconnue par les dirigeants bolcheviks : en plus de Sverdlov, on relève Tchitcherine en septembre 1918, Litvinov peu après en décembre, Zinoviev en juillet 1920 et à nouveau Tchitchérine en avril et mai 1922. En mars 1918 le traité de Brest - Litovsk obligeait les Bolcheviks à protéger la tsarine et ses quatre filles, tout en leur laissant le soin de décider du sort de Nicolas II. Dans les mois qui suivirent, les défaites successives de l'Allemagne de Guillaume II, amenèrent Lénine à demander la livraison de la famille du tsar en échange de la libération des spartakistes allemands, Karl Liebnecht et Léo Jogiches. De juillet à octobre 1918 des négociations entre les deux gouvernements sont entreprises en ce sens. A l'époque alors que les nouveaux occupants tchèques ne retrouvèrent pas les corps une multitude de témoignages en provenance de Perm affluèrent, en mars 1919 auprès du juge Sokolov pour dire que la tsarine et ses quatre filles y avaient été vues, prisonnières de la Tcheka, d'août à octobre 1918. Les témoignages furent enterrés par le juge lors de la publication de son rapport en 1924.  
+
De fait le massacre des Romanov en juillet 1918 a de plus en plus été contesté par des historiens tels que Marina Grey et Marc Ferro, comme par des experts de la gendarmerie française assez sceptiques quant à la fiabilité de Tests ADN sur des corps retrouvés des décennies plus tard <ref> "Romanov, la contre-enquête", 26 décembre 2018 documentaire télévisé sur la chaine ''Histoire''</ref>. Seule à l'époque jusqu'en 1922 l'exécution du tsar fut reconnue par les dirigeants bolcheviks : en plus de Sverdlov, on relève Tchitcherine en septembre 1918, Litvinov peu après en décembre, Zinoviev en juillet 1920 et à nouveau Tchitchérine en avril et mai 1922. En mars 1918 le traité de Brest - Litovsk obligeait les Bolcheviks à protéger la tsarine et ses quatre filles, tout en leur laissant le soin de décider du sort de Nicolas II. Dans les mois qui suivirent, les défaites successives de l'Allemagne de Guillaume II, amenèrent Lénine à demander la livraison de la famille du tsar en échange de la libération des spartakistes allemands, Karl Liebnecht et Léo Jogiches. De juillet à octobre 1918 des négociations entre les deux gouvernements sont entreprises en ce sens. A l'époque alors que les nouveaux occupants tchèques ne retrouvèrent pas les corps une multitude de témoignages en provenance de Perm affluèrent, en mars 1919 auprès du juge Sokolov pour dire que la tsarine et ses quatre filles y avaient été vues, prisonnières de la Tcheka, d'août à octobre 1918. Les témoignages furent enterrés par le juge Sokholov lors de la publication de son rapport en mars 1924.  
   −
Le 8 novembre 1918 Lénine évoqua rapidement, sans référence à la famille impériale, l'exécution du tsar: la première - de ses deux allusions à la nuit ouralienne du 16 au 17 juillet 1918. C'était pour comparer l'exécution à celles de Louis XVI et de Charles Ier. Encore se montra-t-il réticent quant à son utilité, dans une optique marxiste, du fait des restaurations française et britannique des Bourbons et des Stuart qui suivirent les deux régicides républicains, :  
+
Lénine évoqua rapidement, deux fois sans référence à la famille impériale, l'exécution du tsar :  
 +
-la première de ses deux allusions à la nuit ouralienne du 16 au 17 juillet 1918 est du 8 nopvembre 1918. C'était pour comparer l'exécution à celles de Louis XVI et de Charles Ier. Encore se montra-t-il réticent quant à son utilité, dans une optique marxiste, du fait des restaurations française et britannique des Bourbons et des Stuart qui suivirent les deux régicides républicains, :  
    
"« Ces gens-là, les koulaks et les vampires sont des ennemis non moins terribles que les capitalistes et les propriétaires fonciers. Et si le koulak demeure indemne, si nous ne triomphons pas des vampires alors le tsar et le capitaliste reviendront immanquablement. L’expérience de toutes les révolutions qui ont éclaté jusqu’ici en Europe confirme que la révolution subira inévitablement une défaite, si la paysannerie ne triomphe pas de l’emprise des koulaks.  
 
"« Ces gens-là, les koulaks et les vampires sont des ennemis non moins terribles que les capitalistes et les propriétaires fonciers. Et si le koulak demeure indemne, si nous ne triomphons pas des vampires alors le tsar et le capitaliste reviendront immanquablement. L’expérience de toutes les révolutions qui ont éclaté jusqu’ici en Europe confirme que la révolution subira inévitablement une défaite, si la paysannerie ne triomphe pas de l’emprise des koulaks.  
 +
 
Les ouvriers des villes ont renversé les monarques (en Angleterre et en France on a exécuté les rois, il y a déjà quelques centaines d’années et nous étions en retard avec notre tsar), et pourtant après un certain temps l’ancien régime était restauré. C’est parce qu’alors il n’existait pas, même dans les villes la grande production qui groupe dans les fabriques et dans les usines des millions d’ouvriers, et les soude en une armée assez solide pour qu’ils puissent sans le soutien des paysans, résister à la fois à la pression des capitalistes et des koulaks "<ref>Marc Ferro, chapitre « La deuxième mort de Nicolas II », ''Les Tabous de l'histoire'', éd. Pocket, 2004, ; "Évènement ou fait divers ? Une mort énigmatique" dans ''Nicolas II '', Paris, Payot, 1990 ; Lénine, ''Œuvres'', tome 28, juillet 1918-mars 1919, Paris, Éditions sociales, 1961, p. 175-176 </ref>".
 
Les ouvriers des villes ont renversé les monarques (en Angleterre et en France on a exécuté les rois, il y a déjà quelques centaines d’années et nous étions en retard avec notre tsar), et pourtant après un certain temps l’ancien régime était restauré. C’est parce qu’alors il n’existait pas, même dans les villes la grande production qui groupe dans les fabriques et dans les usines des millions d’ouvriers, et les soude en une armée assez solide pour qu’ils puissent sans le soutien des paysans, résister à la fois à la pression des capitalistes et des koulaks "<ref>Marc Ferro, chapitre « La deuxième mort de Nicolas II », ''Les Tabous de l'histoire'', éd. Pocket, 2004, ; "Évènement ou fait divers ? Une mort énigmatique" dans ''Nicolas II '', Paris, Payot, 1990 ; Lénine, ''Œuvres'', tome 28, juillet 1918-mars 1919, Paris, Éditions sociales, 1961, p. 175-176 </ref>".
   −
Ce fut le dialecticien marxiste, et non le vengeur obsédé par le souvenir d'un frère mort trente ans plus tôt, qui s'exprima ici. Ce qui comptait à ses yeux c'était la destruction d'une classe paysanne après celle des capitalistes et non pas l'extermination physique d'une maison impériale, dont beaucoup de membres d'ailleurs survécurent : le Grand Duc Cyrille Wladimirovitch, cousin du tsar devenu en 1924 l'héritier présomptif du trône, son frère André toute leur descendance, l'impératrice douairière, Maria Fedorovna, veuve du tsar même Alexandre III qui fit pendre Alexandre Oulianov, ses deux filles et soeurs de Nicolas II, Xenia et Olga Alexandrovna.   
+
Ce fut le dialecticien marxiste, et non le vengeur obsédé par le souvenir d'un frère mort trente ans plus tôt, qui s'exprime ici. Ce qui compte à ses yeux c'était la destruction d'une classe paysanne après celle des capitalistes et non pas l'extermination physique d'une maison impériale, dont beaucoup de membres d'ailleurs survécurent à la révolution russe : le Grand Duc Cyrille Wladimirovitch, cousin du tsar devenu en 1924 l'héritier présomptif du trône, son frère André toute leur descendance, l'impératrice douairière, Maria Fedorovna, veuve du tsar même Alexandre III qui fit pendre Alexandre Oulianov, ses deux filles et soeurs de Nicolas II, Xenia et Olga Alexandrovna.   
   −
Une deuxième allusion à cette nuit de juillet 1918, formulée à l’approche du quatrième anniversaire de la Révolution (octobre 1921), fait à nouveau mentir ceux qui affirment (dont Hélène Carrère d'Encausse qui ne source pas son "information") qu'il aurait finalement reconnu et glorifié la tuerie impériale en 1919 :
+
- Une deuxième allusion à cette nuit de juillet 1918, formulée à l’approche du quatrième anniversaire de la Révolution (octobre 1921), fait à nouveau mentir ceux qui affirment (dont Hélène Carrère d'Encausse qui ne source pas son "information") qu'il aurait finalement reconnu et glorifié la tuerie impériale en 1919 :
    
« Maintenant il n’y a plus de grands propriétaires déclarés. Les Wrangel, les Koltchak et les Denikine sont, pour une part, partis rejoindre Nicolas Romanov, et pour une autre part se sont tapis en lieu sûr à l’étranger. Le peuple ne voit pas d’ennemi manifeste, comme auparavant le grand propriétaire foncier et le capitaliste. » ''Œuvres de Lénine'', tome 33-août 1921-mars 1923, 1963-17 octobre 1921 "la lutte sera encore plus cruelle", p. 60-61.
 
« Maintenant il n’y a plus de grands propriétaires déclarés. Les Wrangel, les Koltchak et les Denikine sont, pour une part, partis rejoindre Nicolas Romanov, et pour une autre part se sont tapis en lieu sûr à l’étranger. Le peuple ne voit pas d’ennemi manifeste, comme auparavant le grand propriétaire foncier et le capitaliste. » ''Œuvres de Lénine'', tome 33-août 1921-mars 1923, 1963-17 octobre 1921 "la lutte sera encore plus cruelle", p. 60-61.
Utilisateur anonyme

Menu de navigation