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'''La révolution kirghize''' survenue en 2010 est le renversement du régime autoritaire de Kurmanbek Bakiyev par une insurrection populaire. La relève [[Bourgeoisie|bourgeoise]] a été immédiate au [[Gouvernement|gouvernement]], mais le pays reste tendu.  
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[[Fichier:Bishkek capitol revolution 2010.JPG|vignette|388x388px|Les opposants entrant dans la cour du palais présidentiel kirghize.]]
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'''La révolution kirghize''' survenue en 2010 est le renversement du régime autoritaire de Kurmanbek Bakiyev par une insurrection populaire. La relève [[Bourgeoisie|bourgeoise]] a été immédiate au [[Gouvernement|gouvernement]], mais le pays reste tendu.{{AjoutDates|07/04/2010|
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==Contexte ==
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Malgré les "[[Révolutions de couleur|révolutions de couleur]]", qui peuvent se résumer en un remplacement des cliques [[Bureaucratie|bureaucratiques]] par des gouvernements pro-Washington, tout aussi corrompus, la situation sociale des ex-Républiques soviétiques est continuellement dégradée par les [[Privatisation|privatisations]] en série, sans même qu'il y ait de réels gains de libertés pour les [[Prolétariat|prolétaires]].<br>  
 
Malgré les "[[Révolutions de couleur|révolutions de couleur]]", qui peuvent se résumer en un remplacement des cliques [[Bureaucratie|bureaucratiques]] par des gouvernements pro-Washington, tout aussi corrompus, la situation sociale des ex-Républiques soviétiques est continuellement dégradée par les [[Privatisation|privatisations]] en série, sans même qu'il y ait de réels gains de libertés pour les [[Prolétariat|prolétaires]].<br>  
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==Les événements==
 
==Les événements==
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===Toujours rien ===
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===Toujours rien===
    
Bakiyev a rapidement suivi le chemin de son prédécesseur, écartant ceux qui l’avaient mis au premier plan, resserrant son régime sur une base clientéliste dans le sud du pays (région de Jalal-Abad et d’Och), pratiquant le népotisme et la corruption. Il s’est assuré le contrôle des médias et a commencé à intimider les opposants&nbsp;: après 2007, nombre d’entre eux ont été agressés par des inconnus alors que d’autres furent retrouvés assassinés dans des conditions mystérieuses. En juillet 2009, Bakiyev a confisqué l’élection présidentielle, se déclarant vainqueur avec 78&nbsp;% des suffrages, alors que les véritables résultats, retrouvés après sa chute dans le bureau de son frère, chef de la sécurité nationale, le plaçaient en troisième position et donnaient 52&nbsp;% des voix au social-démocrate Almazbek Atambaev&nbsp;<ref>Cf. David Gauzère, Qui sont les nouveaux maîtres du Kirghizistan ?, http://www.rue89.com/2010/04/11/au-kirghizstan-le-nouveau-pourvoir-sinstalle-et-cherche-des-soutiens-147012</ref>. Après cette élection il resserrera encore plus le régime autour de ses proches, nommant son fils, Maksim, a la tête de l’Agence centrale pour le développement, les investissements et l’innovation, qui contrôle les finances du pays<ref>Cf. David Gauzère, Révolution au Kirghizistan, 24 heures dans un pays qui bascule, http://www.rue89.com/2010/04/08/revolution-au-kirghizstan-24-heures-dans-un-pays-qui-bascule-146672 ; Selon Rayshan Jeenbekov, vice-président du parti Ata-Meken interviewé par Richard Solash, correspondant RFE/RL, Maksim Bakiyev contrôlait ainsi plus de 80 % de l’économie kirghize.</ref>. Son frère, Zhanybek, dirigeait déjà les services de sécurité. Le régime a privatisé tous les secteurs de l’économie. Les années de sécheresse, s’ajoutant au pillage par le clan présidentiel des ressources de ce pays, pauvre<ref>Selon le FMI, le revenu par tête au Kirghizistan était de 2 227 dollars (environs 1 640 euros) en 2009, ce qui le place en 138e position sur les 181 pays répertoriés.</ref> et rudement touché par la hausse des prix des matières premières, ont rendu les conditions de vie inacceptables&nbsp;: coupures d’électricité quotidiennes, manque de l’eau courante, hausse des prix alimentaires. En janvier, le régime a imposé une très forte augmentation des prix des services<ref>Le coût du chauffage a augmenté de 400 % (alors que la température hivernale est de 20°C en dessous de zéro), l’électricité de 170 %, l’eau chaude de plus de 100 %.</ref> et a annoncé un second train de hausses pour juillet. Bakiyev avait auparavant vendu les compagnies énergétiques à un très bas prix à des sociétés contrôlées par ses amis<ref>http://www.isn.ethz.ch/isn/Cur-rent-Affairs/Security-Watch/Detail/?ots591=4888caa0-b3db-1461-98b9-e20e7b9c13d4&amp;lng=en&amp;id=114855</ref>.  
 
Bakiyev a rapidement suivi le chemin de son prédécesseur, écartant ceux qui l’avaient mis au premier plan, resserrant son régime sur une base clientéliste dans le sud du pays (région de Jalal-Abad et d’Och), pratiquant le népotisme et la corruption. Il s’est assuré le contrôle des médias et a commencé à intimider les opposants&nbsp;: après 2007, nombre d’entre eux ont été agressés par des inconnus alors que d’autres furent retrouvés assassinés dans des conditions mystérieuses. En juillet 2009, Bakiyev a confisqué l’élection présidentielle, se déclarant vainqueur avec 78&nbsp;% des suffrages, alors que les véritables résultats, retrouvés après sa chute dans le bureau de son frère, chef de la sécurité nationale, le plaçaient en troisième position et donnaient 52&nbsp;% des voix au social-démocrate Almazbek Atambaev&nbsp;<ref>Cf. David Gauzère, Qui sont les nouveaux maîtres du Kirghizistan ?, http://www.rue89.com/2010/04/11/au-kirghizstan-le-nouveau-pourvoir-sinstalle-et-cherche-des-soutiens-147012</ref>. Après cette élection il resserrera encore plus le régime autour de ses proches, nommant son fils, Maksim, a la tête de l’Agence centrale pour le développement, les investissements et l’innovation, qui contrôle les finances du pays<ref>Cf. David Gauzère, Révolution au Kirghizistan, 24 heures dans un pays qui bascule, http://www.rue89.com/2010/04/08/revolution-au-kirghizstan-24-heures-dans-un-pays-qui-bascule-146672 ; Selon Rayshan Jeenbekov, vice-président du parti Ata-Meken interviewé par Richard Solash, correspondant RFE/RL, Maksim Bakiyev contrôlait ainsi plus de 80 % de l’économie kirghize.</ref>. Son frère, Zhanybek, dirigeait déjà les services de sécurité. Le régime a privatisé tous les secteurs de l’économie. Les années de sécheresse, s’ajoutant au pillage par le clan présidentiel des ressources de ce pays, pauvre<ref>Selon le FMI, le revenu par tête au Kirghizistan était de 2 227 dollars (environs 1 640 euros) en 2009, ce qui le place en 138e position sur les 181 pays répertoriés.</ref> et rudement touché par la hausse des prix des matières premières, ont rendu les conditions de vie inacceptables&nbsp;: coupures d’électricité quotidiennes, manque de l’eau courante, hausse des prix alimentaires. En janvier, le régime a imposé une très forte augmentation des prix des services<ref>Le coût du chauffage a augmenté de 400 % (alors que la température hivernale est de 20°C en dessous de zéro), l’électricité de 170 %, l’eau chaude de plus de 100 %.</ref> et a annoncé un second train de hausses pour juillet. Bakiyev avait auparavant vendu les compagnies énergétiques à un très bas prix à des sociétés contrôlées par ses amis<ref>http://www.isn.ethz.ch/isn/Cur-rent-Affairs/Security-Watch/Detail/?ots591=4888caa0-b3db-1461-98b9-e20e7b9c13d4&amp;lng=en&amp;id=114855</ref>.  
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===Vers l'insurrection ===
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===Vers l'insurrection===
    
La montée des tensions sociales était perceptible dès l’arrivée des factures de janvier&nbsp;: ''«&nbsp;Alors qu’ils dépensaient 20&nbsp;% à 30&nbsp;% de leur salaire pour les régler, maintenant ils dépenseront autour de 80&nbsp;% pour payer les services&nbsp;»'' expliquait début février un analyste de Bichkek<ref>Mars Sarlev, cité par Liat Asman, Kyrgyzstan : Utility price hike squeezes citizens, http://www.eurasianet. org/departments/insightb/articles/eav020810.shtml</ref>. Le 24 février plusieurs centaines de personnes ont manifesté contre la hausse des prix de l’énergie à Naryn, au centre du pays. Les autorités régionales leur ont promis de transmettre leurs demandes. Le 10 mars, plusieurs milliers ont de nouveau manifesté à Naryn, exigeant cette fois-ci le limogeage du fils du président. Le 17 mars, les opposants protestaient massivement à Bichkek… Le 31 mars, le régime faisait interdire par le tribunal de Bichkek un journal trop indépendant, ''Forum'', à la suite de la publication des vers d’un poète kirghize&nbsp;dont le vers ''«&nbsp;En période de crise chaque fils de sa Patrie doit se transformer en foudre&nbsp;»'' a été considéré comme une ''«&nbsp;incitation à l’organisation d’un coup d’État&nbsp;»''&nbsp;<ref>Tribune de Genève du 2 avril 2010, http://www. tdg.ch/depeches/monde/kirghizstan-journal-interdit-saisie-equipements-portail-video</ref>.  
 
La montée des tensions sociales était perceptible dès l’arrivée des factures de janvier&nbsp;: ''«&nbsp;Alors qu’ils dépensaient 20&nbsp;% à 30&nbsp;% de leur salaire pour les régler, maintenant ils dépenseront autour de 80&nbsp;% pour payer les services&nbsp;»'' expliquait début février un analyste de Bichkek<ref>Mars Sarlev, cité par Liat Asman, Kyrgyzstan : Utility price hike squeezes citizens, http://www.eurasianet. org/departments/insightb/articles/eav020810.shtml</ref>. Le 24 février plusieurs centaines de personnes ont manifesté contre la hausse des prix de l’énergie à Naryn, au centre du pays. Les autorités régionales leur ont promis de transmettre leurs demandes. Le 10 mars, plusieurs milliers ont de nouveau manifesté à Naryn, exigeant cette fois-ci le limogeage du fils du président. Le 17 mars, les opposants protestaient massivement à Bichkek… Le 31 mars, le régime faisait interdire par le tribunal de Bichkek un journal trop indépendant, ''Forum'', à la suite de la publication des vers d’un poète kirghize&nbsp;dont le vers ''«&nbsp;En période de crise chaque fils de sa Patrie doit se transformer en foudre&nbsp;»'' a été considéré comme une ''«&nbsp;incitation à l’organisation d’un coup d’État&nbsp;»''&nbsp;<ref>Tribune de Genève du 2 avril 2010, http://www. tdg.ch/depeches/monde/kirghizstan-journal-interdit-saisie-equipements-portail-video</ref>.  
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Retourné vers le sud du pays, Bakiyev a organisé des rassemblements en sa faveur dans son village natal et à Jalal-Abad, mais avec peu de succès — selon les journalistes présents seulement un tiers des personnes rassemblées (entre quelques centaines et quelques milliers) l’ont applaudi, d’autres préférant rester prudents. À Jalal-Abad, la majorité de la population a déserté les rues lors de son arrivée, par peur d’affrontements ou par hostilité. À Och, des tirs ont perturbé un meeting de plusieurs milliers de personnes organisé par Bakiyev, le forçant à fuir. Ses clients le lâchent&nbsp;: des députés de son parti Ak-Zhol, qui disposait de 75 sur 90 sièges au sein du Parlement, dissous le 8 avril par les vainqueurs, ont demandé sa destitution. Le président déchu a tenté aussi d’obtenir une intervention militaire des «&nbsp;casques bleus&nbsp;» (officiellement) ou des armées kazakhes et ouzbeks, sans succès pour l’instant. Il a tenté de négocier les conditions de sa démission et finalement, le 16 avril, il a quitté le pays avec l'aide des autorités du Kazakhstan.
 
Retourné vers le sud du pays, Bakiyev a organisé des rassemblements en sa faveur dans son village natal et à Jalal-Abad, mais avec peu de succès — selon les journalistes présents seulement un tiers des personnes rassemblées (entre quelques centaines et quelques milliers) l’ont applaudi, d’autres préférant rester prudents. À Jalal-Abad, la majorité de la population a déserté les rues lors de son arrivée, par peur d’affrontements ou par hostilité. À Och, des tirs ont perturbé un meeting de plusieurs milliers de personnes organisé par Bakiyev, le forçant à fuir. Ses clients le lâchent&nbsp;: des députés de son parti Ak-Zhol, qui disposait de 75 sur 90 sièges au sein du Parlement, dissous le 8 avril par les vainqueurs, ont demandé sa destitution. Le président déchu a tenté aussi d’obtenir une intervention militaire des «&nbsp;casques bleus&nbsp;» (officiellement) ou des armées kazakhes et ouzbeks, sans succès pour l’instant. Il a tenté de négocier les conditions de sa démission et finalement, le 16 avril, il a quitté le pays avec l'aide des autorités du Kazakhstan.
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===Gouvernement provisoire ===
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===Gouvernement provisoire===
    
Au nom du «&nbsp;Kurtulai populaire&nbsp;», Rosa Otounbayeva a pris la tête d’un gouvernement provisoire, annonçant une nouvelle Constitution, le retour au parlementarisme, un nouveau code électoral et des élections dans un délai de six mois. Constatant que Bakiyev a vidé les caisses de l’État en transférant les fonds vers des banques privés, le gouvernement provisoire a pris le contrôle des six banques privées et a fermé les bureaux de change pour tenter d’éviter la fuite des capitaux. Il est aussi question de renationaliser les biens privatisés par Bakiyev et les entreprises des branches stratégiques. Rosa Otounbayeva a admis que le nouveau pouvoir n’a trouvé que 22 millions de dollars dans les caisses de l’État, mais a promis de baisser les tarifs des services communaux.
 
Au nom du «&nbsp;Kurtulai populaire&nbsp;», Rosa Otounbayeva a pris la tête d’un gouvernement provisoire, annonçant une nouvelle Constitution, le retour au parlementarisme, un nouveau code électoral et des élections dans un délai de six mois. Constatant que Bakiyev a vidé les caisses de l’État en transférant les fonds vers des banques privés, le gouvernement provisoire a pris le contrôle des six banques privées et a fermé les bureaux de change pour tenter d’éviter la fuite des capitaux. Il est aussi question de renationaliser les biens privatisés par Bakiyev et les entreprises des branches stratégiques. Rosa Otounbayeva a admis que le nouveau pouvoir n’a trouvé que 22 millions de dollars dans les caisses de l’État, mais a promis de baisser les tarifs des services communaux.
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*Enfin Abdygany Erkebaev, fondateur et premier président du SDPK, a été président du Parlement, puis leader du cabinet fantôme formé par l’opposition en 2008.
 
*Enfin Abdygany Erkebaev, fondateur et premier président du SDPK, a été président du Parlement, puis leader du cabinet fantôme formé par l’opposition en 2008.
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==Un gouvernement en sursis ==
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==Un gouvernement en sursis==
    
Dans le nord du pays au moins, le gouvernement provisoire dispose aujourd’hui (juin 2010) du soutien populaire. Mais pas d’un chèque en blanc. Ainsi un reportage d’''Al Jazeera'' montrait récemment les sans-abri de Bichkek en train de délimiter des terrains pour pouvoir se construire des maisons. ''«&nbsp;Nous nous sommes insurgés pour pouvoir disposer d’un logement&nbsp;»'', expliquaient-ils en plaçant des pierres qui formaient leurs initiales pour indiquer que ce terrain était occupé. ''«&nbsp;Le terrain ne leur appartient pas, cela n’a aucune validité&nbsp;» '' commentait un des «&nbsp;miliciens&nbsp;» du gouvernement provisoire, qui sont arrivés sur place. Mais il n’a pas voulu ou osé enlever les délimitations…  
 
Dans le nord du pays au moins, le gouvernement provisoire dispose aujourd’hui (juin 2010) du soutien populaire. Mais pas d’un chèque en blanc. Ainsi un reportage d’''Al Jazeera'' montrait récemment les sans-abri de Bichkek en train de délimiter des terrains pour pouvoir se construire des maisons. ''«&nbsp;Nous nous sommes insurgés pour pouvoir disposer d’un logement&nbsp;»'', expliquaient-ils en plaçant des pierres qui formaient leurs initiales pour indiquer que ce terrain était occupé. ''«&nbsp;Le terrain ne leur appartient pas, cela n’a aucune validité&nbsp;» '' commentait un des «&nbsp;miliciens&nbsp;» du gouvernement provisoire, qui sont arrivés sur place. Mais il n’a pas voulu ou osé enlever les délimitations…  
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Finalement, le Kirghizistan représente une base stratégique en Asie centrale. L’existence sur son territoire de bases militaires russes et américaines en témoigne, comme le conflit larvé entre les deux puissances. Ces bases n’ont pas été au centre des préoccupations des insurgés. Les gouvernements russe et états-unien, surpris par l’explosion populaire, aspirent surtout à rétablir la paix sociale au Kirghizistan. Pour ce faire, ils sont prêts à aider financièrement le gouvernement provisoire. Mais cette aide ne vise pas seulement la sécurisation de leurs bases, elle sera conditionnée par la capacité du nouveau régime à contrôler la population et à préserver le modèle social dont la faillite depuis 1991 n’est plus à démontrer.
 
Finalement, le Kirghizistan représente une base stratégique en Asie centrale. L’existence sur son territoire de bases militaires russes et américaines en témoigne, comme le conflit larvé entre les deux puissances. Ces bases n’ont pas été au centre des préoccupations des insurgés. Les gouvernements russe et états-unien, surpris par l’explosion populaire, aspirent surtout à rétablir la paix sociale au Kirghizistan. Pour ce faire, ils sont prêts à aider financièrement le gouvernement provisoire. Mais cette aide ne vise pas seulement la sécurisation de leurs bases, elle sera conditionnée par la capacité du nouveau régime à contrôler la population et à préserver le modèle social dont la faillite depuis 1991 n’est plus à démontrer.
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==Perspective révolutionnaire ==
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==Perspective révolutionnaire==
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===Révolte insuffisante... ===
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===Révolte insuffisante...===
    
L’insurrection populaire kirghize constitue un magnifique exemple de ce dont les opprimés sont capables pour renverser une autocratie. Elle a défoncé une des portes bloquant la transformation sociale. Elle a fragilisé la propriété privée des moyens de production en mettant sur la sellette les accapareurs les plus importants du moment — la famille Bakiyev. C’est à la fois énorme et insuffisant. Pour que la révolution politique puisse transcroître en révolution de transformation sociale, en révolution populaire émancipatrice, il faut que la population puisse construire ses formes propres d’auto-organisation, trouver un programme et se doter d’une stratégie…  
 
L’insurrection populaire kirghize constitue un magnifique exemple de ce dont les opprimés sont capables pour renverser une autocratie. Elle a défoncé une des portes bloquant la transformation sociale. Elle a fragilisé la propriété privée des moyens de production en mettant sur la sellette les accapareurs les plus importants du moment — la famille Bakiyev. C’est à la fois énorme et insuffisant. Pour que la révolution politique puisse transcroître en révolution de transformation sociale, en révolution populaire émancipatrice, il faut que la population puisse construire ses formes propres d’auto-organisation, trouver un programme et se doter d’une stratégie…  
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Les prolétaires et la petite-bourgeoisie de la capitale avaient commencé à le faire avec les ''kurtulai'', mais ils ont étés canalisés par les directions bourgeoises. Ils ont été rapidement tournées vers le combat insurrectionnel, leurs membres les plus actifs ont pris les armes, les discussions sur le projet de société ne se sont pas développées. Pour se nourrir, se vêtir, s’abriter, les gens sont livrés à eux-mêmes, les formes d’action collective sur ce terrain ont du mal à apparaître. La faiblesse de l’[[industrialisation|industrialisation]] du pays ne pousse pas naturellement à l’auto-organisation sur les lieux du travail. <br>
 
Les prolétaires et la petite-bourgeoisie de la capitale avaient commencé à le faire avec les ''kurtulai'', mais ils ont étés canalisés par les directions bourgeoises. Ils ont été rapidement tournées vers le combat insurrectionnel, leurs membres les plus actifs ont pris les armes, les discussions sur le projet de société ne se sont pas développées. Pour se nourrir, se vêtir, s’abriter, les gens sont livrés à eux-mêmes, les formes d’action collective sur ce terrain ont du mal à apparaître. La faiblesse de l’[[industrialisation|industrialisation]] du pays ne pousse pas naturellement à l’auto-organisation sur les lieux du travail. <br>
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===...faute de parti révolutionnaire ===
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===...faute de parti révolutionnaire===
    
Les partis qui ont pris la tête de l’insurrection et formé le gouvernement provisoire avaient certes un projet [[démocratie|démocratique]] — le [[parlementarisme|parlementarisme]], le refus de l’[[autocratie|autocratie]]… — mais sont incapables de porter un projet de transformation sociale. C'est donc en définitive l'absence de parti communiste révolutionnaire pour exprimer le dépassement du capitalisme qui a été le plus criante dans cette révolte énergique. La faillite de l’URSS rend difficile cet imaginaire, mais l'infamie de ces nouveaux [[Etat|Etats]] [[capitalisme|capitalistes]] risque fort de faire renaître des vocations...<br>
 
Les partis qui ont pris la tête de l’insurrection et formé le gouvernement provisoire avaient certes un projet [[démocratie|démocratique]] — le [[parlementarisme|parlementarisme]], le refus de l’[[autocratie|autocratie]]… — mais sont incapables de porter un projet de transformation sociale. C'est donc en définitive l'absence de parti communiste révolutionnaire pour exprimer le dépassement du capitalisme qui a été le plus criante dans cette révolte énergique. La faillite de l’URSS rend difficile cet imaginaire, mais l'infamie de ces nouveaux [[Etat|Etats]] [[capitalisme|capitalistes]] risque fort de faire renaître des vocations...<br>

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