Modifications

Aller à la navigation Aller à la recherche
aucun résumé des modifications
Ligne 14 : Ligne 14 :  
Pourtant pas plus en Allemagne que dans les autres pays, l’idée que le prolétariat formait une classe avec des intérêts politiques distincts n’allait de soi. Les facteurs de divisions ne manquaient pas au sein du jeune prolétariat. Les particularismes de toutes sortes, le nationalisme, les divisions religieuses étaient répandus. Pour combattre ces préjugés et forger une [[conscience de classe]], les militants sociaux-démocrates firent une propagande inlassable, gagnant les ouvriers les plus conscients à leurs idées, éveillant des couches de plus en plus larges du prolétariat à la vie politique, à la compréhension de leur situation et du rôle que pouvait jouer le prolétariat pour transformer la société.
 
Pourtant pas plus en Allemagne que dans les autres pays, l’idée que le prolétariat formait une classe avec des intérêts politiques distincts n’allait de soi. Les facteurs de divisions ne manquaient pas au sein du jeune prolétariat. Les particularismes de toutes sortes, le nationalisme, les divisions religieuses étaient répandus. Pour combattre ces préjugés et forger une [[conscience de classe]], les militants sociaux-démocrates firent une propagande inlassable, gagnant les ouvriers les plus conscients à leurs idées, éveillant des couches de plus en plus larges du prolétariat à la vie politique, à la compréhension de leur situation et du rôle que pouvait jouer le prolétariat pour transformer la société.
   −
=== Les lois antisocialistes de Bismarck ===
+
===Les lois antisocialistes de Bismarck===
 
Devant cette croissance numérique mais surtout sociale et politique du prolétariat, [[Bismarck]], qui considérait les socialistes comme « des bandes de brigands qui campent sur nos places », tenta d’arrêter leur progression en interdisant leur parti. Pendant douze ans, de 1878 à 1890, [[Lois antisocialistes|les lois dites antisocialistes]] tentèrent de juguler le mouvement ouvrier en train de se développer. Bien sûr, le pouvoir n’avait pas attendu ces lois pour réprimer les grèves, poursuivre les militants devant les tribunaux, condamner les députés à la forteresse.
 
Devant cette croissance numérique mais surtout sociale et politique du prolétariat, [[Bismarck]], qui considérait les socialistes comme « des bandes de brigands qui campent sur nos places », tenta d’arrêter leur progression en interdisant leur parti. Pendant douze ans, de 1878 à 1890, [[Lois antisocialistes|les lois dites antisocialistes]] tentèrent de juguler le mouvement ouvrier en train de se développer. Bien sûr, le pouvoir n’avait pas attendu ces lois pour réprimer les grèves, poursuivre les militants devant les tribunaux, condamner les députés à la forteresse.
   Ligne 29 : Ligne 29 :  
La participation aux [[élections]] permit aussi de mesurer la croissance de l’influence social-démocrate [[Vote ouvrier|dans la classe ouvrière]].
 
La participation aux [[élections]] permit aussi de mesurer la croissance de l’influence social-démocrate [[Vote ouvrier|dans la classe ouvrière]].
   −
=== Le plus grand parti d'Allemagne ===
+
===Le plus grand parti d'Allemagne===
 
Le résultat, ce fut qu’elle progressait inexorablement à chaque [[Élections|élection]]. Et lorsque les [[lois antisocialistes]] furent abandonnées en 1890, le parti avait multiplié par trois le nombre de voix, représentant 20 % de l’électorat et obtenant 36 députés, même si pendant des années encore certains d’entre eux continuèrent les allers-retours entre le [[Parlementarisme|parlement]] et la prison. C’est en utilisant toutes les possibilités, légales comme illégales, pour continuer leur [[agitation]] politique, que les socialistes devinrent la première force politique du pays.
 
Le résultat, ce fut qu’elle progressait inexorablement à chaque [[Élections|élection]]. Et lorsque les [[lois antisocialistes]] furent abandonnées en 1890, le parti avait multiplié par trois le nombre de voix, représentant 20 % de l’électorat et obtenant 36 députés, même si pendant des années encore certains d’entre eux continuèrent les allers-retours entre le [[Parlementarisme|parlement]] et la prison. C’est en utilisant toutes les possibilités, légales comme illégales, pour continuer leur [[agitation]] politique, que les socialistes devinrent la première force politique du pays.
    
Ainsi, le parti ouvrier allemand réussit à regrouper et à unifier les travailleurs derrière leurs objectifs de classe. La multiplication de [[Grève|grèves]] de plus en plus puissantes, les succès électoraux, la participation croissante d’ouvriers et de jeunes à l’activité du parti, tout cela lui conférait un poids important dans la vie politique du pays.
 
Ainsi, le parti ouvrier allemand réussit à regrouper et à unifier les travailleurs derrière leurs objectifs de classe. La multiplication de [[Grève|grèves]] de plus en plus puissantes, les succès électoraux, la participation croissante d’ouvriers et de jeunes à l’activité du parti, tout cela lui conférait un poids important dans la vie politique du pays.
   −
Au moment de la légalisation du SPD, certains militants refusent de faire un tournant dans la façon de militer et de se concentrer sur la bataille électorale, le groupe dit des Jeunes (Die Jungen). Formé au printemps et à l'été 1890, il était dirigé par d'anciens étudiants universitaires: jeunes lettrés et éditeurs de journaux du parti, ainsi que des dirigeants de syndicats et de partis d'organisations locales. Leurs dirigeants étaient Paul Ernst, Paul Kampffmeyer, Hans Müller, Bruno Wille, Wilhelm Werner, Carl Wildberger et d'autres. Ils se lancèrent dans une campagne de dénonciation du Conseil exécutif (Vorstand) du parti, qu'ils accusaient d'être corrompu, [[opportuniste]] et [[Démocratie interne|anti-démocratique]]. Ils se lancèrent dans une campagne de dénonciation du Conseil exécutif (Vorstand) du parti, qu'ils accusaient d'être corrompu, [[opportuniste]] et [[Démocratie interne|anti-démocratique]]. En octobre 1891, les dirigeants des Jeunes sont expulsés du Parti.
+
Au moment de la légalisation du SPD, certains militants refusent de faire un tournant dans la façon de militer et de se concentrer sur la bataille électorale, le groupe dit des Jeunes ([[Die Jungen]]). Formé au printemps et à l'été 1890, il était dirigé par d'anciens étudiants universitaires: jeunes lettrés et éditeurs de journaux du parti, ainsi que des dirigeants de syndicats et de partis d'organisations locales. Leurs dirigeants étaient [[Paul Ernst]], [[Paul Kampffmeyer]], [[Hans Müller]], [[Bruno Wille]], [[Wilhelm Werner]], [[Carl Wildberger]] et d'autres. Ils se lancèrent dans une campagne de dénonciation du Conseil exécutif (Vorstand) du parti, qu'ils accusaient d'être corrompu, [[opportuniste]] et [[Démocratie interne|anti-démocratique]]. En octobre 1891, les dirigeants des Jeunes sont expulsés du Parti.
    
Vers la fin de sa vie, [[Friedrich Engels|Engels]] voyait les progrès croissants du parti social-démocrate allemand, devenu un parti ouvrier de masse et prétendant au pouvoir. Il voyait aussi les risques de guerre en Europe (qui a finalement [[Guerre de 1914-1918|éclaté en 1914]]). Il considérait que le choc de la guerre précipiterait le pouvoir dans les mains des socialistes, mais qu'une telle situation était plus risquée, notamment parce que le parti n'étant pas suffisamment prêt, il devrait prendre des mesures de terreur :<blockquote>« Afin de prendre possession et de mettre en marche les moyens de production, nous avons besoin de personnes ayant une formation technique, et en masse. Nous ne les avons pas et jusqu'à présent, nous avons même été plutôt heureux d'avoir été largement épargnés par les personnes "instruites". Maintenant, les choses sont différentes. Maintenant, nous sommes assez forts pour supporter n'importe quelle quantité de racailles instruites et pour les digérer, et je prévois qu'au cours des huit ou dix prochaines années, nous recruterons suffisamment de jeunes techniciens, médecins, avocats et maîtres d'école pour nous permettre d'administrer les usines et les grands domaines  au nom de la nation par des camarades du Parti. Alors, notre arrivée au pouvoir sera tout à fait naturelle et s'installera rapidement - en comparaison, si en revanche, une guerre nous amène au pouvoir prématurément, les techniciens seront nos principaux ennemis; ils nous tromperont et nous trahiront partout où ils le pourront et nous devrons user de terreur contre eux, mais nous serons tout de même trompés. C'est ce qui arrivait ''toujours'', à petite échelle, aux révolutionnaires français; même dans l'administration ordinaire, ils devaient laisser les postes subalternes, où le vrai travail est fait, aux mains de vieux réactionnaires qui obstruaient et paralysaient tout. »<ref>[[:en:Letter to August Bebel, October 24, 1891|Letter to August Bebel, October 24, 1891]]</ref></blockquote><br />
 
Vers la fin de sa vie, [[Friedrich Engels|Engels]] voyait les progrès croissants du parti social-démocrate allemand, devenu un parti ouvrier de masse et prétendant au pouvoir. Il voyait aussi les risques de guerre en Europe (qui a finalement [[Guerre de 1914-1918|éclaté en 1914]]). Il considérait que le choc de la guerre précipiterait le pouvoir dans les mains des socialistes, mais qu'une telle situation était plus risquée, notamment parce que le parti n'étant pas suffisamment prêt, il devrait prendre des mesures de terreur :<blockquote>« Afin de prendre possession et de mettre en marche les moyens de production, nous avons besoin de personnes ayant une formation technique, et en masse. Nous ne les avons pas et jusqu'à présent, nous avons même été plutôt heureux d'avoir été largement épargnés par les personnes "instruites". Maintenant, les choses sont différentes. Maintenant, nous sommes assez forts pour supporter n'importe quelle quantité de racailles instruites et pour les digérer, et je prévois qu'au cours des huit ou dix prochaines années, nous recruterons suffisamment de jeunes techniciens, médecins, avocats et maîtres d'école pour nous permettre d'administrer les usines et les grands domaines  au nom de la nation par des camarades du Parti. Alors, notre arrivée au pouvoir sera tout à fait naturelle et s'installera rapidement - en comparaison, si en revanche, une guerre nous amène au pouvoir prématurément, les techniciens seront nos principaux ennemis; ils nous tromperont et nous trahiront partout où ils le pourront et nous devrons user de terreur contre eux, mais nous serons tout de même trompés. C'est ce qui arrivait ''toujours'', à petite échelle, aux révolutionnaires français; même dans l'administration ordinaire, ils devaient laisser les postes subalternes, où le vrai travail est fait, aux mains de vieux réactionnaires qui obstruaient et paralysaient tout. »<ref>[[:en:Letter to August Bebel, October 24, 1891|Letter to August Bebel, October 24, 1891]]</ref></blockquote><br />

Menu de navigation