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[[File:Minorités-nationales-URSS.jpg|right|461x291px|Carte des minorités nationales en URSS]]  
 
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La '''[[Question_nationale|question nationale]] en Russie''' est un enjeu politique important du fait de la présence de nombreuses minorités ethniques au sein de la Russie et au sein de l'ancien [[Tsarisme|Empire tsariste]] et de l'[[URSS|URSS]]. Les [[POSDR|social-démocrates russes]] ont essayé d'y apporter chacun leurs réponses, et les luttes des minorités nationales en 1917 ont joué un rôle dans la [[Révolution_d'Octobre|révolution d'Octobre]].
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La '''[[Question_nationale|question nationale]] en Russie''' est un enjeu politique important du fait de la présence de nombreuses minorités ethniques au sein de la Russie et au sein de l'ancien [[Tsarisme|Empire tsariste]] et de l'[[URSS|URSS]] (l'expression « prison des peuples » était souvent employée pour désigner la Russie au début du 20e siècle). Les [[POSDR|social-démocrates russes]] ont essayé d'y apporter chacun leurs réponses, et les luttes des minorités nationales en 1917 ont joué un rôle dans la [[Révolution_d'Octobre|révolution d'Octobre]].
    
==Premiers débats dans la social-démocratie==
 
==Premiers débats dans la social-démocratie==
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La [[Social-démocratie|social-démocratie]] du début du 20<sup>e</sup> siècle affirmait lutter contre l'oppression des [[Minorités_nationales|minorités nationales]], dans la continuité des mouvements démocrates du 19<sup>e</sup> siècle. Trotsky témoigne par exemple du rôle de la question nationale dans sa politisation&nbsp;: ''«&nbsp;Les hypocrites canailleries du professeur d'histoire à l'égard des Polonais, la méchanceté chicanière de Burnand [professeur français] à l'égard des Allemands, et les hochements de tête du petit pope parlant des "petits juifs" m'étaient également sensibles. L'inégalité des droits nationaux fut, probablement, une des causes cachées qui m'amenèrent à détester le régime.&nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/mavie/mv07.htm Ma vie, 5. La campagne et la ville]'', 1930</ref>''
 
La [[Social-démocratie|social-démocratie]] du début du 20<sup>e</sup> siècle affirmait lutter contre l'oppression des [[Minorités_nationales|minorités nationales]], dans la continuité des mouvements démocrates du 19<sup>e</sup> siècle. Trotsky témoigne par exemple du rôle de la question nationale dans sa politisation&nbsp;: ''«&nbsp;Les hypocrites canailleries du professeur d'histoire à l'égard des Polonais, la méchanceté chicanière de Burnand [professeur français] à l'égard des Allemands, et les hochements de tête du petit pope parlant des "petits juifs" m'étaient également sensibles. L'inégalité des droits nationaux fut, probablement, une des causes cachées qui m'amenèrent à détester le régime.&nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/mavie/mv07.htm Ma vie, 5. La campagne et la ville]'', 1930</ref>''
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La question nationale s'élargit aux débats sur l'[[Impérialisme|impérialisme capitaliste]]. Mais dans la pratique politique, d'importants désaccords pouvaient apparaître. Certains opportunistes allaient même jusqu'à cautionner la [[Colonisation|colonisation]].
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La question nationale s'élargit aux débats sur l'[[Impérialisme|impérialisme capitaliste]]. Mais dans la pratique politique, d'importants désaccords pouvaient apparaître. Certains opportunistes allaient même jusqu'à cautionner la [[Colonisation|colonisation]]. De nombreux [[Social-chauvins|social-chauvins]] méprisaient les luttes pour l'autonomie ou l'indépendance au nom du fait que la concentration politique et économique serait "[[Progressiste|progressiste]]". Lénine critiquait frontalement cette ''«&nbsp;conception absurde du point de vue théorique, et chauvine du point de vue de la politique pratique&nbsp;»<ref>Lénine, Une caricature du marxisme et à propos de l’ « économisme impérialiste », 1916</ref>''. Il appelait cela de ''«&nbsp;l'économisme impérialiste&nbsp;»''.  
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De nombreux [[Social-chauvins|social-chauvins]] méprisaient les luttes pour l'autonomie ou l'indépendance au nom du fait que la concentration politique et économique serait "[[Progressiste|progressiste]]". Lénine critiquait frontalement cette ''«&nbsp;conception absurde du point de vue théorique, et chauvine du point de vue de la politique pratique&nbsp;»<ref>Lénine, Une caricature du marxisme et à propos de l’ « économisme impérialiste », 1916</ref>''. Il appelait cela de ''«&nbsp;l'économisme impérialiste&nbsp;»''. Mais ce type désaccords existait aussi parmi les révolutionnaires. Ainsi [[Rosa_Luxemburg|Rosa Luxemburg]] (vers 1908-1909) a beaucoup débattu avec Lénine sur la question nationale. Alors que le programme du [[POSDR|POSDR]], engagé contre le chauvinisme grand-russe, garantissait ''«&nbsp;le droit à l’autodétermination à toutes les nationalités faisant partie de l’État&nbsp;»'', elle raillait le droit à l’autodétermination comme «&nbsp;un lieu commun&nbsp;» et une formule creuse. Elle insistait sur la tendance historique, progressiste, à l'unification de l'humanité, et discréditait donc la volonté de fragmentation en petits États "médiévaux". Elle [[Rosa_Luxemburg_et_les_bolchéviks|critiquera comme petite-bourgeoises les mesures prises par les bolchéviks]] pour l'autonomie des minorités.
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Mais ce type désaccords existait aussi parmi les révolutionnaires, avec ceux que l'on appelait les « internationalistes intransigeants ». Ainsi [[Rosa_Luxemburg|Rosa Luxemburg]] (vers 1908-1909) a beaucoup débattu avec Lénine sur la question nationale. Alors que le programme du [[POSDR|POSDR]], engagé contre le chauvinisme grand-russe, garantissait ''«&nbsp;le droit à l’autodétermination à toutes les nationalités faisant partie de l’État&nbsp;»'', elle raillait le droit à l’autodétermination comme «&nbsp;un lieu commun&nbsp;», une formule creuse, et une concession inacceptable envers le nationalisme bourgeois. Elle insistait sur la tendance historique, progressiste, à l'unification de l'humanité, et discréditait donc la volonté de fragmentation en petits États "médiévaux". Elle [[Rosa_Luxemburg_et_les_bolchéviks|critiquera comme petite-bourgeoises les mesures prises par les bolchéviks]] pour l'autonomie des minorités.
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Lors du 2<sup>e</sup> congrès du POSDR, en 1903, une majorité se dégagea pour affirmer à la fois le [[Droit à l'autodétermination des peuples|droit à l'autodétermination des peuples]] et le principe l'organisation internationale du prolétariat (un seul parti social-démocrate). Cette majorité s'opposait à des conceptions minoritaires :
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* Celle du Bund juif, qui défendait le principe de l'autonomie nationale-culturelle et l'organisation fédéraliste de la social-démocratie (le Bund aurait eu le « monopole » pour organiser les ouvriers juifs de l'Empire).
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* Celle du [[Social-démocratie du royaume de Pologne et de Lituanie|SDKPiL]], organisation polonaise qui est contre l'indépendance de la Pologne et qui s'oppose à la notion de droit à l'autodétermination des peuples.
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Le 4<sup>e</sup> congrès de 1906 unifie provisoirement le parti, ses fractions russes, menchevique et bolchevique, et ses organisations SD nationales, Bund, SDKPiL et SD lettone. Le « droit à l’autodétermination » est maintenu dans le programme. Le POSDR adopte un fonctionnement semi-fédéraliste : organisation de conférences nationales pour chaque nationalité, représentation des organisations nationales dans les instances du parti, notamment au comité central, création de groupes spéciaux de littérature, d’édition, d’agitation dans la langue de chaque nationalité, etc.
    
Lénine faisait clairement une dissymétrie entre le côté de l’oppresseur le côté de l’opprimé. Les socialistes d'un pays oppresseur (par exemple la Russie) doivent surtout défendre le droit au séparatisme des peuples opprimés. Mais il considérait aussi que les socialistes d'un pays opprimé (comme la Pologne) devaient développer la conscience de classe et l'internationalisme au sein de leur mouvement de libération nationale.
 
Lénine faisait clairement une dissymétrie entre le côté de l’oppresseur le côté de l’opprimé. Les socialistes d'un pays oppresseur (par exemple la Russie) doivent surtout défendre le droit au séparatisme des peuples opprimés. Mais il considérait aussi que les socialistes d'un pays opprimé (comme la Pologne) devaient développer la conscience de classe et l'internationalisme au sein de leur mouvement de libération nationale.
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La Pologne proclame son indépendance. La [[Guerre_russo-polonaise|guerre russo-polonaise]] (1919-1921) fut aussi une des conséquences de la guerre non résolues à [[Brest-Litovsk|Brest-Litovsk]].
 
La Pologne proclame son indépendance. La [[Guerre_russo-polonaise|guerre russo-polonaise]] (1919-1921) fut aussi une des conséquences de la guerre non résolues à [[Brest-Litovsk|Brest-Litovsk]].
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Violemment hostile aux Soviets, le régime polonais du Maréchal Pilsudski, manipulé et soutenu par l’impérialisme français, envahit l’Ukraine soviétique en avril 1920 et arrive jusqu’à Kiev. La contre-offensive de l’Armée Rouge l’oblige bientôt à battre en retraite, mais les forces soviétiques poursuivent l’envahisseur et violent la frontière polonaise, arrivant en août aux portes de Varsovie – avant d’être obligées, à leur tour, de se replier vers leur point de départ. La décision d’envahir la Pologne fut prise par la direction soviétique, sous l’impulsion de Lénine lui-même. Il ne s’agissait pas, bien entendu, d’un projet d’annexion de la Pologne, mais d’« aider » les communistes polonais à prendre le pouvoir, en établissant une république soviétique polonaise. Il n’empêche qu’il s’est agi bel et bien d’une violation évidente du principe d’autodétermination des peuples : comme l’avait répété moult fois Lénine lui-même, ce n’était pas à l’Armée Rouge d’imposer le communisme à d’autres peuples.
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Violemment hostile aux Soviets, le régime polonais du Maréchal Pilsudski, manipulé et soutenu par l’impérialisme français, envahit l’Ukraine soviétique en avril 1920 et arrive jusqu’à Kiev. La contre-offensive de l’Armée Rouge l’oblige bientôt à battre en retraite, mais les forces soviétiques poursuivent l’envahisseur et violent la frontière polonaise, arrivant en août aux portes de Varsovie – avant d’être obligées, à leur tour, de se replier vers leur point de départ. La décision d’envahir la Pologne fut prise par la direction soviétique, sous l’impulsion de Lénine lui-même – contre l’avis de Trotsky, Radek et Staline. Il ne s’agissait pas, bien entendu, d’un projet d’annexion de la Pologne, mais d’« aider » les communistes polonais à prendre le pouvoir, en établissant une république soviétique polonaise. Il n’empêche qu’il s’est agi bel et bien d’une violation évidente du principe d’autodétermination des peuples : comme l’avait répété moult fois Lénine lui-même, ce n’était pas à l’Armée Rouge d’imposer le communisme à d’autres peuples.
    
===Ukraine===
 
===Ukraine===
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Il existait d'importantes minorités allemandes dans certaines régions de l'Empire (Allemands de la Volga, notamment). Le déclenchement de la Guerre de 1914 contre l'Allemagne a déclenché une vague d'hostilité à leur encontre.
 
Il existait d'importantes minorités allemandes dans certaines régions de l'Empire (Allemands de la Volga, notamment). Le déclenchement de la Guerre de 1914 contre l'Allemagne a déclenché une vague d'hostilité à leur encontre.
<blockquote>''«&nbsp;Partout l'on cherchait à qui s'en prendre. On accusait d'espionnage, sans exception, tous les Juifs. On mettait à sac les gens dont le nom de famille était allemand. Le G. Q. G. du grand-duc Nicolas Nicolaïévitch ordonna de fusiller le colonel de gendarmerie Miassoïédov, comme espion allemand — qu'il n'était probablement pas. &nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrr02.htm Histoire de la révolution russe]'', 1930</ref>''</blockquote>  
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<blockquote>''«&nbsp;Partout l'on cherchait à qui s'en prendre. On accusait d'espionnage, sans exception, tous les Juifs. On mettait à sac les gens dont le nom de famille était allemand. Le GQG du grand-duc Nicolas Nicolaïévitch ordonna de fusiller le colonel de gendarmerie Miassoïédov, comme espion allemand — qu'il n'était probablement pas. &nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrr02.htm Histoire de la révolution russe]'', 1930</ref>''</blockquote>  
 
Par ailleurs, étant donnée l'histoire des influences allemandes, ''«&nbsp;les états-majors et la Douma accusaient de germanophilie la Cour impériale&nbsp;»''. C'est d'ailleurs par [[Nationalisme|nationalisme]] que [[Saint-Petersbourg|Saint-Petersbourg]], nom allemand, fut renommée en Petrograd dès le début de la guerre. En mai 1915, la foule saccage des maisons allemandes à Moscou.
 
Par ailleurs, étant donnée l'histoire des influences allemandes, ''«&nbsp;les états-majors et la Douma accusaient de germanophilie la Cour impériale&nbsp;»''. C'est d'ailleurs par [[Nationalisme|nationalisme]] que [[Saint-Petersbourg|Saint-Petersbourg]], nom allemand, fut renommée en Petrograd dès le début de la guerre. En mai 1915, la foule saccage des maisons allemandes à Moscou.
  

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