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« Il nous faut une petite guerre victorieuse » afin de renforcer le régime tsariste et d’arrêter la montée de l’agitation, confie le ministre russe de l’Intérieur au ministre la Guerre, faisant référence à la guerre contre le Japon dans laquelle s’engage la Russie en 1904. Mais cette guerre ne tarde pas à devenir la plus impopulaire de l’histoire russe jusqu’alors. Plusieurs meetings, manifestations, grèves se font l’écho de revendications démocratiques et d’achèvement de cette « guerre ruineuse et criminelle » dans laquelle la Russie, qui vantait alors sa supériorité militaire, s’enlise. Le 17 décembre 1904, quatre ouvriers sont renvoyés des usines Poutilov, industrie de la défense nationale. Devant le refus de la direction de les réintégrer, les salariés se mettent en grève le 3 janvier. Plus gros complexe industriel de St-Pétersbourg, ce sont alors 13 000 ouvriers qui tiennent tête à la direction. Le mouvement s’étend aux entreprises voisines : le vendredi 7 janvier,100 000 grévistes paralysent la région. Le lendemain, ils sont le double. La capitale est privée de transports, d’électricité, de journaux.  
 
« Il nous faut une petite guerre victorieuse » afin de renforcer le régime tsariste et d’arrêter la montée de l’agitation, confie le ministre russe de l’Intérieur au ministre la Guerre, faisant référence à la guerre contre le Japon dans laquelle s’engage la Russie en 1904. Mais cette guerre ne tarde pas à devenir la plus impopulaire de l’histoire russe jusqu’alors. Plusieurs meetings, manifestations, grèves se font l’écho de revendications démocratiques et d’achèvement de cette « guerre ruineuse et criminelle » dans laquelle la Russie, qui vantait alors sa supériorité militaire, s’enlise. Le 17 décembre 1904, quatre ouvriers sont renvoyés des usines Poutilov, industrie de la défense nationale. Devant le refus de la direction de les réintégrer, les salariés se mettent en grève le 3 janvier. Plus gros complexe industriel de St-Pétersbourg, ce sont alors 13 000 ouvriers qui tiennent tête à la direction. Le mouvement s’étend aux entreprises voisines : le vendredi 7 janvier,100 000 grévistes paralysent la région. Le lendemain, ils sont le double. La capitale est privée de transports, d’électricité, de journaux.  
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== La révolution est en route ==
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== La révolution est en route ==
    
Gapone, pope (religieux orthodoxe) et président de l’Union des ouvriers d’usine de Saint-Pétersbourg (mutuelle ouvrière sous autorité du Tsar) rédige une pétition à Nicolas II qui recueille plus de 150 000 signatures. « Nous, ouvriers de la ville de Saint-Pétersbourg, nos femmes et nos enfants, et nos vieux parents invalides sommes venus à toi, Sire, chercher justice et protection. Opprimés et réduits et à la misère, (...) nous en sommes arrivés à ce moment terrible où mieux vaut mourir qu’endurer plus longtemps d’insupportables souffrances. » Elle énumère les revendications suivantes : amnistie, libertés civiques, salaire normal, remise progressive de la terre au peuple, convocation d’une assemblée constituante élue au suffrage universel, ensemble de mesures politiques, économiques et sociales destinées à lutter « contre l’oppression du travail par le capital » et s’achève par : « Sire ! Ne refuse pas d’aider Ton peuple ! Abats la muraille qui Te sépare de Ton peuple ! Ordonne que satisfaction soit ordonnée à nos requêtes, fais-en le serment et Tu rendras la Russie heureuse ; sinon, nous sommes prêts à mourir ici-même » Cette pétition à elle seule révèle toutes les confusions dans les esprits d’un peuple qui se soulève. Comme la décision prise d’aller la remettre au Tsar, ce sont des milliers d’ouvriers, conduits par Gapone, qui convergent alors vers la place du Palais d’Hiver, portant des icônes et chantant des cantiques. 40 000 hommes de la troupe tsariste chargent la foule, faisant plus de 1 000 morts et 2 000 blessés. Cette date est restée connue sous le nom de ‘dimanche rouge’.  
 
Gapone, pope (religieux orthodoxe) et président de l’Union des ouvriers d’usine de Saint-Pétersbourg (mutuelle ouvrière sous autorité du Tsar) rédige une pétition à Nicolas II qui recueille plus de 150 000 signatures. « Nous, ouvriers de la ville de Saint-Pétersbourg, nos femmes et nos enfants, et nos vieux parents invalides sommes venus à toi, Sire, chercher justice et protection. Opprimés et réduits et à la misère, (...) nous en sommes arrivés à ce moment terrible où mieux vaut mourir qu’endurer plus longtemps d’insupportables souffrances. » Elle énumère les revendications suivantes : amnistie, libertés civiques, salaire normal, remise progressive de la terre au peuple, convocation d’une assemblée constituante élue au suffrage universel, ensemble de mesures politiques, économiques et sociales destinées à lutter « contre l’oppression du travail par le capital » et s’achève par : « Sire ! Ne refuse pas d’aider Ton peuple ! Abats la muraille qui Te sépare de Ton peuple ! Ordonne que satisfaction soit ordonnée à nos requêtes, fais-en le serment et Tu rendras la Russie heureuse ; sinon, nous sommes prêts à mourir ici-même » Cette pétition à elle seule révèle toutes les confusions dans les esprits d’un peuple qui se soulève. Comme la décision prise d’aller la remettre au Tsar, ce sont des milliers d’ouvriers, conduits par Gapone, qui convergent alors vers la place du Palais d’Hiver, portant des icônes et chantant des cantiques. 40 000 hommes de la troupe tsariste chargent la foule, faisant plus de 1 000 morts et 2 000 blessés. Cette date est restée connue sous le nom de ‘dimanche rouge’.  
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Peu avant les événements de 1905, les libéraux prennent l’initiative d’une campagne pour la démocratisation du pays. Les mencheviks poussent la population à y participer. En janvier 1905, quand les événements populaires surgissent, ces mêmes libéraux estiment que le changement, la révolution est impossible car le peuple n’est pas suffisamment éduqué. De leur côté, les bolcheviks et les mencheviks sont, dans un premier temps, hostiles au soulèvement : comment soutenir une manifestation qui paraissait tenir autant de la procession religieuse que de la démonstration politique, pour remettre au Tsar de toutes les Russies une requête au style révérencieux ? Mais alors que, sous la pression populaire, les mencheviks se joignent au mouvement, les bolcheviks ne sont qu’une quinzaine à défiler à Saint-Pétersbourg le jour du dimanche rouge. Pendant des mois, Lénine se bat contre le sectarisme des militants à l’égard des événements et des formes confuses qu’ils prenaient. En fait, les révolutionnaires n’ont joué qu’un rôle négligeable dans les premiers mois de 1905. Il faut attendre l’automne pour qu’au travers des soviets se développe l’alliance entre les militants socialistes et le monde ouvrier en grève.  
 
Peu avant les événements de 1905, les libéraux prennent l’initiative d’une campagne pour la démocratisation du pays. Les mencheviks poussent la population à y participer. En janvier 1905, quand les événements populaires surgissent, ces mêmes libéraux estiment que le changement, la révolution est impossible car le peuple n’est pas suffisamment éduqué. De leur côté, les bolcheviks et les mencheviks sont, dans un premier temps, hostiles au soulèvement : comment soutenir une manifestation qui paraissait tenir autant de la procession religieuse que de la démonstration politique, pour remettre au Tsar de toutes les Russies une requête au style révérencieux ? Mais alors que, sous la pression populaire, les mencheviks se joignent au mouvement, les bolcheviks ne sont qu’une quinzaine à défiler à Saint-Pétersbourg le jour du dimanche rouge. Pendant des mois, Lénine se bat contre le sectarisme des militants à l’égard des événements et des formes confuses qu’ils prenaient. En fait, les révolutionnaires n’ont joué qu’un rôle négligeable dans les premiers mois de 1905. Il faut attendre l’automne pour qu’au travers des soviets se développe l’alliance entre les militants socialistes et le monde ouvrier en grève.  
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== Donner une direction ==
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== Donner une direction ==
    
Milioukov, dirigeant du parti libéral, le parti Cadet, affirmera alors que « la classe ouvrière avait à tel point lié son sort à celui du parti social-démocrate [les révolutionnaires], que le parti cadet n’y avait plus le moindre accès ». Le danger que représente pour les libéraux cette situation les amène à accueillir favorablement les promesses de démocratisation que fait le Tsar en août, contre le sentiment général populaire. Et les mencheviks commencèrent à y voir un danger : il ne fallait pas effrayer les libéraux et les exclure de ce combat. Ainsi s’amorce entre les dirigeants des deux fractions un débat crucial : faut-il aller jusqu’à prendre les armes ? Selon Plekhanov et les mencheviks, la situation ne le permet pas ; face à la répression du gouvernement tsariste, il paraît tout aussi insensé de vouloir s’affronter. Il n’y a qu’un pas vers la conclusion qu’ils tirent peu de temps après : l’échec de la tentative révolutionnaire démontre la validité de la politique par étape (et donc, de la politique réformiste). Pour Lénine, et les bolcheviks, le développement de la révolution russe conduit inéluctablement à une lutte armée entre le gouvernement du Tsar et les ouvriers. Aussi soutiennent-ils le soulèvement de Moscou. Et de la défaite de la révolution ils concluront à un défaut de préparation, de coordination et d’organisation. Ce qui manquait à la révolution, « c’était d’une part, la fermeté, la résolution des masses trop sujettes à la maladie de la confiance et, d’autre part, une organisation des ouvriers social-démocrates à même d’assumer la direction du mouvement, de prendre la tête de l’armée révolutionnaire et de déclencher l’offensive contre les autorités gouvernementales» Ce fut la leçon de cette extraordinaire année pour les dirigeants révolutionnaires : pour Lénine, l’évolution générale du capitalisme allait conduire à l’élimination de ces deux défauts. Et 1917 allait lui donner raison.  
 
Milioukov, dirigeant du parti libéral, le parti Cadet, affirmera alors que « la classe ouvrière avait à tel point lié son sort à celui du parti social-démocrate [les révolutionnaires], que le parti cadet n’y avait plus le moindre accès ». Le danger que représente pour les libéraux cette situation les amène à accueillir favorablement les promesses de démocratisation que fait le Tsar en août, contre le sentiment général populaire. Et les mencheviks commencèrent à y voir un danger : il ne fallait pas effrayer les libéraux et les exclure de ce combat. Ainsi s’amorce entre les dirigeants des deux fractions un débat crucial : faut-il aller jusqu’à prendre les armes ? Selon Plekhanov et les mencheviks, la situation ne le permet pas ; face à la répression du gouvernement tsariste, il paraît tout aussi insensé de vouloir s’affronter. Il n’y a qu’un pas vers la conclusion qu’ils tirent peu de temps après : l’échec de la tentative révolutionnaire démontre la validité de la politique par étape (et donc, de la politique réformiste). Pour Lénine, et les bolcheviks, le développement de la révolution russe conduit inéluctablement à une lutte armée entre le gouvernement du Tsar et les ouvriers. Aussi soutiennent-ils le soulèvement de Moscou. Et de la défaite de la révolution ils concluront à un défaut de préparation, de coordination et d’organisation. Ce qui manquait à la révolution, « c’était d’une part, la fermeté, la résolution des masses trop sujettes à la maladie de la confiance et, d’autre part, une organisation des ouvriers social-démocrates à même d’assumer la direction du mouvement, de prendre la tête de l’armée révolutionnaire et de déclencher l’offensive contre les autorités gouvernementales» Ce fut la leçon de cette extraordinaire année pour les dirigeants révolutionnaires : pour Lénine, l’évolution générale du capitalisme allait conduire à l’élimination de ces deux défauts. Et 1917 allait lui donner raison.  
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Vanina Giudicelli <br>(L'Etincelle n°28)  
 
Vanina Giudicelli <br>(L'Etincelle n°28)  
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= Livres =
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= Livres =
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• Lénine, Lettres de loin, éditions sociales <br>• François-Xavier Coquin, La révolution russe manquée, éditions complexes <br>• Marcel Liebman, Le léninisme sous Lénine, éditions seuil <br>• Pierre Broué, Le parti bolchevik, éditions de minuit <br>• L. Trotsky, Bilan et perspectives
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• Lénine, Lettres de loin, éditions sociales <br>• François-Xavier Coquin, La révolution russe manquée, éditions complexes <br>• Marcel Liebman, Le léninisme sous Lénine, éditions seuil <br>• Pierre Broué, Le parti bolchevik, éditions de minuit <br>• L. Trotsky, Bilan et perspectives  
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