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=== L'insurrection et le congrès des soviets ===
 
=== L'insurrection et le congrès des soviets ===
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L'insurrection renversant le [[Gouvernement_provisoire_russe|gouvernement provisoire]] avait été programmée juste avant le 2<sup>e</sup> [[Congrès_des_soviets|Congrès des soviets]] (à [[Smolny|Smolny]]), afin que celui-ci puisse le valider. L'insurrection prend du retard, mais a finalement lieu dans la nuit du 24-25 octobre. Presque sans effusion de sang le [[Comité_militaire_révolutionnaire|Comité militaire révolutionnaire]] s'empare des points tratégiques de Petrograd. A l'ouverture du congrès le matin du 25, le Palais d'Hiver, siège du gouvernement, est assiégé mais pas encore pris.
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L'[[Insurrection_d'Octobre_1917|insurrection]] renversant le [[Gouvernement_provisoire_russe|gouvernement provisoire]] avait été programmée juste avant le [[Deuxième_congrès_des_soviets|2<sup>e</sup> Congrès des soviets]] (à [[Smolny|Smolny]]), afin que celui-ci puisse le valider. L'insurrection prend du retard, mais a finalement lieu dans la nuit du 24-25 octobre. Presque sans effusion de sang le [[Comité_militaire_révolutionnaire|Comité militaire révolutionnaire]] , organe du [[Soviet_de_Petrograd|soviet de Petrograd]], s'empare des points tratégiques de la ville. A l'ouverture du congrès le matin du 25, le [[Palais_d'Hiver|Palais d'Hiver]], siège du gouvernement, est assiégé mais pas encore pris.
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[[Martov|Martov]], [[Menchévik|menchévik]] de gauche, soumet une motion qui appelle à la discussion pacifique pour former un pouvoir reconnu par tous les partis du congrès. Les socialistes conciliateurs soutiennent cette motion, espérant isoler les bolchéviks. Mais [[Lounatcharski|Lounatcharski]] déclare pour les [[Bolchéviks|bolchéviks]] qu'il n'a aucun désaccord avec la motion de Martov, et celle-ci est votée par la quasi-totalité des délégués. Il s'agissait pour certains bolchéviks de faire la démonstration que ce sont les conciliateurs qui ne veulent pas d'un pouvoir soviétique, mais aussi pour beaucoup d'autres d'un espoir réel que ceux-ci acceptent. [[Victor_Serge|Victor Serge]] écrit&nbsp;:
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[[Martov|Martov]], [[Menchévik|menchévik]] de gauche, soumet une motion qui appelle à la discussion pacifique pour former un pouvoir reconnu par tous les partis du congrès. Les socialistes modérés soutiennent cette motion, espérant isoler les bolchéviks. Mais [[Lounatcharski|Lounatcharski]] déclare pour les [[Bolchéviks|bolchéviks]] qu'il n'a aucun désaccord avec la motion de Martov, et celle-ci est votée par la quasi-totalité des délégués. Il s'agissait pour certains bolchéviks de faire la démonstration que ce sont les conciliateurs qui ne veulent pas d'un pouvoir soviétique, mais aussi pour beaucoup d'autres d'un espoir réel que ceux-ci acceptent. [[Victor_Serge|Victor Serge]] écrit&nbsp;:
 
<blockquote>«&nbsp;On affirme que les bolcheviks voulurent tout de suite le monopole du pouvoir. Autre légende&nbsp;! Ils redoutaient l'isolement du pouvoir. Nombre d'entre eux furent, au début, partisans d'un gouvernement de coalition socialiste&nbsp;».<ref>Victor Serge, « Postface inédite : trente ans après », L'An I de la révolution russe, La Découverte, Paris, 1997, p. 455-456.</ref></blockquote>  
 
<blockquote>«&nbsp;On affirme que les bolcheviks voulurent tout de suite le monopole du pouvoir. Autre légende&nbsp;! Ils redoutaient l'isolement du pouvoir. Nombre d'entre eux furent, au début, partisans d'un gouvernement de coalition socialiste&nbsp;».<ref>Victor Serge, « Postface inédite : trente ans après », L'An I de la révolution russe, La Découverte, Paris, 1997, p. 455-456.</ref></blockquote>  
Mais les ''«&nbsp;[[Conciliateurs|conciliateurs]]&nbsp;»'' ([[Parti_socialiste_révolutionnaire_(Russie)|socialistes-révolutionnaires]] de droite et [[Menchevik|mencheviks]]) haussent le ton, font une série d'interventions hostiles, et quittent finalement la salle, laissant les forces majoritaires dans les soviets décider ([[Bolchéviks|bolchéviks]] et socialistes-révolutionnaires de gauche). L'annonce de la prise du Palais d'Hiver tombe finalement dans la nuit du 25 au 26, vers 2 heures.
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Mais les ''«&nbsp;[[Conciliateurs|conciliateurs]]&nbsp;»'' ([[Parti_socialiste_révolutionnaire_(Russie)|socialistes-révolutionnaires]] de droite et [[Menchevik|mencheviks]]) haussent le ton, font une série d'interventions hostiles, et quittent finalement la salle, laissant les forces majoritaires dans les soviets décider ([[Bolchéviks|bolchéviks]] et socialistes-révolutionnaires de gauche). Les SR de gauche déclarent qu'ils soutiennent le pouvoir des soviets et les bolchéviks, mais qu'ils n'entreront pas au gouvernement, pour mieux tenter de convaincre les autres socialistes de former une coalition. L'annonce de la prise du Palais d'Hiver tombe finalement dans la nuit du 25 au 26, vers 2 heures.
    
=== Composition du gouvernement ===
 
=== Composition du gouvernement ===
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Dans la journée du 26, à Smolny, le Comité central bolchévik travaille à la proposition de nouveau gouvernement. Etant donné les refus des autres forces socialistes, il adopte la position de Lénine d'un gouvernement composé uniquement de bolchéviks. On décide de l'appeller le ''Soviet des commissaires du peuple'' (Sovnarkom). Selon [[Adolf_Joffé|Adolf Joffé]], c'est Trotsky qui a eu l'idée du nom ''«&nbsp;commissaires du peuple&nbsp;»''.<ref>Adolf Joffé, ''[https://www.marxists.org/francais/joffe/works/1919/10/premier.htm Le premier gouvernement prolétarien]'', 1919</ref>
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Dans la journée du 26, à Smolny, le Comité central bolchévik travaille à la proposition de nouveau gouvernement. Lénine était hostile aux autres socialistes en qui il n'avait aucune confiance. Etant donné les refus des autres forces socialistes, le Comité central définit une proposition de gouvernement composé uniquement de bolchéviks, au moins pour l'instant. On décide de l'appeller le ''Soviet des commissaires du peuple'' (Sovnarkom). Selon [[Adolf_Joffé|Adolf Joffé]], c'est [[Trotsky|Trotsky]] qui a eu l'idée du nom ''«&nbsp;commissaires du peuple&nbsp;»''.<ref>Adolf Joffé, ''[https://www.marxists.org/francais/joffe/works/1919/10/premier.htm Le premier gouvernement prolétarien]'', 1919</ref>
 
<blockquote>''«&nbsp;Des ministres&nbsp;? Voilà un mot bien compromis&nbsp;! Cela sent la haute carrière bureaucratique ou bien le couronnement d'une ambition parlementaire. Il est décidé qu'on appellera le gouvernement&nbsp;: " Conseil des Commissaires du Peuple "; cela a tout de même l'air un peu plus neuf.&nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrr48.htm Histoire de la révolution russe - 48. Le congrès de la dictature soviétique]'', 1930</ref>''</blockquote>  
 
<blockquote>''«&nbsp;Des ministres&nbsp;? Voilà un mot bien compromis&nbsp;! Cela sent la haute carrière bureaucratique ou bien le couronnement d'une ambition parlementaire. Il est décidé qu'on appellera le gouvernement&nbsp;: " Conseil des Commissaires du Peuple "; cela a tout de même l'air un peu plus neuf.&nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrr48.htm Histoire de la révolution russe - 48. Le congrès de la dictature soviétique]'', 1930</ref>''</blockquote>  
 
La composition finalement convenue et actée par décret du [[Deuxième_congrès_des_soviets|Second congrès des soviets]] fut&nbsp;:<ref>Deuxième congrès des Soviets, ''[https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/10/2-co-so/vil19171025-05.htm Décret sur la formation du gouvernement ouvrier et paysan ]'', 1917</ref>
 
La composition finalement convenue et actée par décret du [[Deuxième_congrès_des_soviets|Second congrès des soviets]] fut&nbsp;:<ref>Deuxième congrès des Soviets, ''[https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/10/2-co-so/vil19171025-05.htm Décret sur la formation du gouvernement ouvrier et paysan ]'', 1917</ref>
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Le congrès s'ouvre à nouveau le 26 à 21 heures. Il prend alors lui même les [[Premières_mesures_du_gouvernement_bolchevik|premiers décrets révolutionnaires]], et discute de la proposition de nouveau pouvoir soviétique. [[Kamenev|Kamenev]], qui préside, lit le projet élaboré par le Comité Central bolchevik. L'administration des divers domaines de la vie étatique est confiée à des commissions qui doivent travailler à réaliser le programme annoncé par le congrès - ''«&nbsp;en étroite union avec les organisations de masse des ouvriers, des ouvrières, des matelots, des soldats, des paysans et des employés&nbsp;»''. Le pouvoir gouvernemental est concentré entre les mains d'un collège formé des présidents de ces commissions, sous le nom de ''«&nbsp;Soviet des Commissaires du Peuple&nbsp;»''. Le contrôle sur l'activité du gouvernement appartient au congrès des soviets et à son comité exécutif central.
 
Le congrès s'ouvre à nouveau le 26 à 21 heures. Il prend alors lui même les [[Premières_mesures_du_gouvernement_bolchevik|premiers décrets révolutionnaires]], et discute de la proposition de nouveau pouvoir soviétique. [[Kamenev|Kamenev]], qui préside, lit le projet élaboré par le Comité Central bolchevik. L'administration des divers domaines de la vie étatique est confiée à des commissions qui doivent travailler à réaliser le programme annoncé par le congrès - ''«&nbsp;en étroite union avec les organisations de masse des ouvriers, des ouvrières, des matelots, des soldats, des paysans et des employés&nbsp;»''. Le pouvoir gouvernemental est concentré entre les mains d'un collège formé des présidents de ces commissions, sous le nom de ''«&nbsp;Soviet des Commissaires du Peuple&nbsp;»''. Le contrôle sur l'activité du gouvernement appartient au congrès des soviets et à son comité exécutif central.
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[[John_Reed|Reed]] témoigne : ''«&nbsp;Lorsque Kamenev [qui préside] lut la liste des Commissaires du Peuple des applaudissements éclatèrent coup sur coup, après chaque nom, et particulièrement après ceux de Lenine et de Trotsky&nbsp;»''. [[Soukhanov|Soukhanov]] ajoute à ces noms celui de [[Lounatcharsky|Lounatcharsky]]. [[Kamenev|Kamenev]] et [[Zinoviev|Zinoviev]] n'entrèrent pas dans le Conseil : le premier était désigné comme président du nouveau [[Comité_exécutif_central_pan-russe|Comité exécutif central]], le second comme rédacteur des [[Izvestia|''Izvestia'']].
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[[John_Reed|Reed]] témoigne&nbsp;: ''«&nbsp;Lorsque Kamenev [qui préside] lut la liste des Commissaires du Peuple des applaudissements éclatèrent coup sur coup, après chaque nom, et particulièrement après ceux de Lenine et de Trotsky&nbsp;»''. [[Soukhanov|Soukhanov]] ajoute à ces noms celui de [[Lounatcharsky|Lounatcharsky]]. [[Kamenev|Kamenev]] et [[Zinoviev|Zinoviev]] n'entrèrent pas dans le Conseil&nbsp;: le premier était désigné comme président du nouveau [[Comité_exécutif_central_pan-russe|Comité exécutif central]], le second comme rédacteur des [[Izvestia|''Izvestia'']].
    
Le représentant des [[Internationalistes_unifiés|internationalistes unifiés]], [[Nikolai_Glebov-Avilov|Avilov]], fait un long discours pour expliquer les difficultés de la situation et la nécessité d'un gouvernement de coalition de tous les démocrates, donc avec ceux qui constituaient en ce moment même un Comité de Salut Public à la Douma municipale. Il soutenait notamment que vu la pénurie de pain, il fallait un gouvernement qui ait la confiance non seulement des paysans pauvres, mais aussi des paysans riches.
 
Le représentant des [[Internationalistes_unifiés|internationalistes unifiés]], [[Nikolai_Glebov-Avilov|Avilov]], fait un long discours pour expliquer les difficultés de la situation et la nécessité d'un gouvernement de coalition de tous les démocrates, donc avec ceux qui constituaient en ce moment même un Comité de Salut Public à la Douma municipale. Il soutenait notamment que vu la pénurie de pain, il fallait un gouvernement qui ait la confiance non seulement des paysans pauvres, mais aussi des paysans riches.
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Le Soviet des Commissaires du Peuple est validé à une écrasante majorité. Environ 150 voix (essentiellement des SR de gauche) se portent sur la résolution d'Avilov.
 
Le Soviet des Commissaires du Peuple est validé à une écrasante majorité. Environ 150 voix (essentiellement des SR de gauche) se portent sur la résolution d'Avilov.
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=== Remaniements ===
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Par la suite les réorganisations suivantes ont lieu&nbsp;:
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*[[Vladimir_Antonov-Ovseïenko|Vladimir Antonov-Ovseïenko]] et [[Nikolai_Krylenko|Nikolai Krylenko]], commissaires du peuple aux affaires militaires&nbsp;;
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*[[Pavel_Dybenko|Pavel Dybenko]]&nbsp;: commissaire du peuple aux Affaires navales&nbsp;;
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*[[Alexandra_Kollontaï|Alexandra Kollontaï]]&nbsp;: commissaire du peuple à l'Assistance publique (novembre 1917-mars 1918&nbsp;; première femme membre d'un gouvernement).
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*Staline devient commissaire du peuple aux Nationalités.
    
=== La pression pour une coalition large ===
 
=== La pression pour une coalition large ===
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Mais [[Lénine|Lénine]], soutenu par [[Trotsky|Trotsky]], est hostile aux autres socialistes en qui il n'a aucune confiance. Cette question divise énormément et mène le parti bolchevique au bord de la scission, de nombreux dirigeants protestent ([[Zinoviev|Zinoviev]], [[Kamenev|Kamenev]], [[Rykov|Rykov]], [[Noguine|Noguine]], [[Chliapnikov|Chliapnikov]], [[Riazanov|Riazanov]]...). Finalement une délégation, conduite par Kamenev, rencontre les représentants [[Mencheviks|mencheviks]] et [[Socialistes-révolutionnaires|SR]], qui exigent le désarmement des [[Gardes_rouges|gardes rouges]] et un gouvernement sans [[Lénine|Lénine]] ni [[Trotsky|Trotsky]], mais incluant des [[SR_de_droite|SR de droite]] et des [[Troudoviks|troudoviks]] (le parti de Kerensky...). Le Comité exécutif du syndicat des cheminots (''Vikhjel''), dirigé par les mencheviks, menace de bloquer le ravitaillement de la capitale si le gouvernement soviétique ne cède pas.
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Aussitôt après le congrès, la question de la coalition rebondit. Le [[Comité_central_bolchévik|Comité central bolchévik]] du 29 octobre (où ne siègent ni [[Lénine|Lénine]], ni [[Trotsky|Trotsky]]) et après lui, le [[Comité_exécutif_central_panrusse|Comité exécutif du congrès des soviets]], acceptent de négocier. Une délégation dirigée par [[Kamenev|Kamenev]] se rend à l'invitation du [[Vikhjel|Vikhjel]] de rencontrer les représentants [[Mencheviks|mencheviks]] et [[Socialistes-révolutionnaires|SR]].
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Des pourparlers sont engagés entre les représentants des différents partis et le Vikhjel. En parallèle, des [[Junkers|junkers]] de Moscou tentent une contre-révolution, et le Sovnarkom demande alors au Vikhjel d’envoyer des troupes en renfort, ce à quoi le Vikhjel répond qu'il est ''«&nbsp;neutre&nbsp;»''... Lénine veut alors cesser toute négociation et considèrent qu'ils ont choisi leur camp. Mais, mis en difficulté au cours d’un comité central du parti bolchevik, Lénine doit accepter que des négociations se poursuivent avec les [[SR_de_gauche|SR de gauche]]. Cela conduira cependant [[Rykov|Rykov]], [[Ivan_Teodorovitch|Teodorovitch]], [[Vladimir_Milioutine|Milioutine]] et [[Victor_Noguine|Noguine]] à démissionner du Sovnarkom<ref>Michel Heller et Aleksandr Nekrich, ''L'Utopie au pouvoir'', ''op. cit.'', p. 36.</ref>. Lénine se justifiera le lendemain aux représentants de la garnison de Petrograd en affirmant ''«&nbsp;Ce n’est pas notre faute si les S-R et les mencheviks sont partis. Nous leur avons proposé de partager le pouvoir [...]. Nous avons invité tout le monde à participer au gouvernement.&nbsp;»''<ref>Lénine, Œuvres complètes, tome 35, p. 36</ref>
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Mais ceux-ci exigent (appuyés par les Alliés) le désarmement des [[Gardes_rouges|gardes rouges]] et un gouvernement sans [[Lénine|Lénine]] ni [[Trotsky|Trotsky]], incluant des [[SR_de_droite|SR de droite]] et des [[Troudoviks|troudoviks]], et qui serait responsable, non devant les soviets, mais devant «&nbsp;les larges masses de la démocratie révolutionnaire&nbsp;»... La délégation soviétique accepte de négocier sur ces bases, et signe avec leurs interlocuteurs un appel au cessez-le-feu, à l'heure même où s'affrontent les cosaques du général Krasnov qui marchent sur Pétrograd et les [[Garde_rouge_(Russie)|gardes rouges]] (dirigés par Trotsky).
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Au comité central suivant, le 2 décembre, Trotsky accuse [[Kamenev|Kamenev]] et [[Riazanov|Riazanov]] d'avoir envisagé un désaveu de l'insurrection. [[Riazanov|Riazanov]] et [[Lounatcharski|Lounatcharski]] proposent d'accepter les conditions exigées par les socialistes. Lénine propose la rupture immédiate des pourparlers.&nbsp; Le comité central vote finalement une autre position, celle de Trotsky, qui propose de poursuivre les négociations sur la base d'une coalition où les bolchéviks auraient la prépondérance dans la coalition.
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Mais la minorité ne s'incline pas, car elle soutient que la résolution empêchera de fait toute coalition. [[Kamenev|Kamenev]], qui préside toujours l'[[Comité_exécutif_central_panrusse|exécutif des soviets]], y propose la démission du Conseil des commissaires du peuple et son remplacement par un gouvernement de coalition. [[Volodarski|Volodarski]] oppose à cette motion celle qui a été adoptée par le comité central. Au cours du vote, plusieurs commissaires du peuple, [[Rykov|Rykov]], [[Noguine|Noguine]], [[Lounatcharski|Lounatcharski]], [[Milioutine|Milioutine]], [[Teodorovitch|Teodorovitch]], et autre responsables du parti, [[Zinoviev|Zinoviev]], [[Lozovski|Lozovski]], [[Riazanov|Riazanov]], votent contre la résolution présentée par leur propre parti. D'autres dirigeants soutiennent la minorité ([[Chliapnikov|Chliapnikov]]...). En ce moment-là, le parti bolchevik est au bord de la scission.
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En parallèle, des [[Junkers|junkers]] de Moscou tentent une contre-révolution, et le Sovnarkom demande alors au Vikhjel d’envoyer des troupes en renfort, ce à quoi le Vikhjel répond qu'il est ''«&nbsp;neutre&nbsp;»''... Lénine veut alors cesser toute négociation et considèrent qu'ils ont choisi leur camp. Mais, mis en difficulté au cours d’un comité central du parti bolchevik, Lénine doit accepter que des négociations se poursuivent avec les [[SR_de_gauche|SR de gauche]].
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Sommés d'avoir à se soumettre à la discipline, une partie des opposants ([[Rykov|Rykov]], [[Ivan_Teodorovitch|Teodorovitch]], [[Vladimir_Milioutine|Milioutine]] et [[Victor_Noguine|Noguine]]) démissionnent du Sovnarkom<ref>Michel Heller et Aleksandr Nekrich, ''L'Utopie au pouvoir'', ''op. cit.'', p. 36.</ref> pour protester contre «&nbsp;la politique catastrophique du comité central&nbsp;» et «&nbsp;le maintien d'un gouvernement purement bolchevique par le moyen de la terreur politique&nbsp;». Lénine, dans une proclamation diffusée le 3 novembre dans tout le pays, les stigmatise comme des déserteurs. Pour lui&nbsp;: ''«&nbsp;La scission serait un fait extrêmement regrettable. Mais une scission honnête et franche est aujourd'hui de beaucoup au sabotage intérieur, à la non exécution de nos propres résolutions.&nbsp;»'' <ref>Lénine, ''[https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/11/vil19171103.htm Ultimatum de la majorité du comité central du P.O.S.D.(b)R. à la minorité ]'', 3 novembre 1917</ref>
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Cela conduira cependant Lénine se justifiera le lendemain aux représentants de la garnison de Petrograd en affirmant ''«&nbsp;Ce n’est pas notre faute si les S-R et les mencheviks sont partis. Nous leur avons proposé de partager le pouvoir [...]. Nous avons invité tout le monde à participer au gouvernement.&nbsp;»''<ref>Lénine, Œuvres complètes, tome 35, p. 36</ref>
    
Le congrès paysan réuni du 10 au 16 novembre, avec une large majorité SR, reprend et vote la revendication de l'élargissement du Sovnarkom à tous les ''«&nbsp;partis socialistes&nbsp;»'' (y compris le [[Troudoviks|parti troudovik]] de [[Kerensky|Kerensky]]...). Mais sur le fond, le congrès paysan approuve le décret sur la terre et demande à ce qu'il soit appliqué, ce qui est en contradiction avec la politique des [[Troudoviks|troudoviks]] et [[SR_de_droite|SR de droite]].
 
Le congrès paysan réuni du 10 au 16 novembre, avec une large majorité SR, reprend et vote la revendication de l'élargissement du Sovnarkom à tous les ''«&nbsp;partis socialistes&nbsp;»'' (y compris le [[Troudoviks|parti troudovik]] de [[Kerensky|Kerensky]]...). Mais sur le fond, le congrès paysan approuve le décret sur la terre et demande à ce qu'il soit appliqué, ce qui est en contradiction avec la politique des [[Troudoviks|troudoviks]] et [[SR_de_droite|SR de droite]].
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Mais il n'y aura pas de scission. L'opposition est condamnée par l'écrasante majorité des militants bolchéviks, par les meetings d'ouvriers et de soldats qui ont approuvé l'[[Insurrection_d'Octobre_1917|insurrection]]. Ensuite, il apparaît assez vite clair que les [[Mencheviks|mencheviks]] et les dirigeants [[Parti_SR|SR]] n'ont jamais eu l'intention d'une collaboration honnête avec les bolchéviks sur la base du programme décidé par le [[Deuxième_congrès_des_soviets|Congrès des soviets]]. Des opposants, [[Zinoviev|Zinoviev]] est le premier à revenir et à reprendre sa démission. Le 21 novembre, il écrit&nbsp;&nbsp;:
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<blockquote>«&nbsp;C'est notre droit et notre devoir de mettre le parti en garde contre ses propres fautes. Mais nous restons avec le parti. Nous préférons commettre des fautes avec des millions d'ouvriers et de soldats et mourir avec eux plutôt que de nous en séparer à cette heure décisive de l'histoire. [...] Il n'y aura pas, il ne peut pas y avoir de scission dans le parti&nbsp;»&nbsp; ''[[Isvestia|Isvestia]] du ''21 novembre 1917</blockquote>
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[[Kamenev|Kamenev]], [[Milioutine|Milioutine]], [[Rykov|Rykov]] et [[Noguine|Noguine]] l'imitent le 12 décembre. Ils attendront un peu plus longtemps pour recouvrer leurs responsabilités. Kamenev, qui a été remplacé par [[Sverdlov|Sverdlov]] à la présidence de l'[[Comité_exécutif_central_panrusse|exécutif des soviets]], va être envoyé en mission en Europe occidentale. Seul [[Lozovski|Lozovski]] persévèrera dans son opposition, sera finalement exclu et fondera un éphémère «&nbsp;Parti socialiste ouvrier&nbsp;».
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=== La coalition avec les SR de gauche ===
 
=== La coalition avec les SR de gauche ===
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Par la suite les réorganisations suivantes ont lieu&nbsp;:
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Les SR de gauchent acceptent alors de partager le pouvoir avec les bolcheviks et délèguent plusieurs des leurs au Conseil des commissaires du peuple en décembre 1917.
 
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*[[Vladimir_Antonov-Ovseïenko|Vladimir Antonov-Ovseïenko]] et [[Nikolai_Krylenko|Nikolai Krylenko]], commissaires du peuple aux affaires militaires&nbsp;;
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*[[Pavel_Dybenko|Pavel Dybenko]]&nbsp;: commissaire du peuple aux Affaires navales&nbsp;;
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*[[Alexandra_Kollontaï|Alexandra Kollontaï]]&nbsp;: commissaire du peuple à l'Assistance publique (novembre 1917-mars 1918&nbsp;; première femme membre d'un gouvernement).
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*Staline devient commissaire du peuple aux Nationalités.  
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Certains SR de gauche entreront ainsi au gouvernement en décembre 1917. Après leurs attentats de juillet 1918, les SR de gauche seront interdits.
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Après leurs attentats de juillet 1918, les SR de gauche seront interdits.
    
=== Un gouvernement provisoire ===
 
=== Un gouvernement provisoire ===

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