Modifications

Aller à la navigation Aller à la recherche
3 944 octets ajoutés ,  11 avril 2017 à 15:54
m
aucun résumé des modifications
Ligne 1 : Ligne 1 : −
[[File:Trotsky et l'Armée Rouge.jpg|right|363x231px|Trotsky et l'Armée Rouge]]La '''guerre civile russe''', successive à la [[Révolution_d’Octobre|Révolution d’Octobre]] a duré exactement cinq ans, du 29 octobre 1917 au 25 octobre 1922. Causant entre 8 et 20 millions, elle s'est conclue par la victoire de l'[[Armée_rouge|Armée rouge]], sur les [[Armées_blanches|armées blanches]] et les [[Armées_vertes|armées vertes]], mais au prix d'une [[Bureaucratisation|bureaucratisation]] très forte du régime.{{#set:Date=29-10-1917|Date fin=25-10-1922}}
+
[[File:Trotsky et l'Armée Rouge.jpg|right|363x231px|Trotsky et l'Armée Rouge]]La '''guerre civile russe''', successive à la [[Révolution_d’Octobre|Révolution d’Octobre]] a duré exactement cinq ans, du 29 octobre 1917 au 25 octobre 1922. Causant entre 8 et 20 millions, elle s'est conclue par la victoire de l'[[Armée_rouge|Armée rouge]], sur les [[Armées_blanches|armées blanches]] (soutenues par des forces impérialistes) et les [[Armées_vertes|armées vertes]], mais au prix d'une [[Bureaucratisation_soviétique|bureaucratisation]] très forte du régime.{{#set:Date=29-10-1917|Date fin=25-10-1922}}
   −
Après 1920, l'Armée rouge contrôle une grande partie du territoire et les Blancs sont cantonnés à la Sibérie. Sur le plan économique, la guerre civile a engendré la politique du ''« [[Communisme_de_guerre|communisme de guerre]] »''.
+
Le plus fort des combats a eu lieu de l'été 1918 à 1920. Après 1920, l'Armée rouge contrôle une grande partie du territoire et les Blancs sont cantonnés à la Sibérie. Sur le plan économique, la guerre civile a engendré la politique du ''« [[Communisme_de_guerre|communisme de guerre]] »''.
    
== Contexte ==
 
== Contexte ==
   −
Sur une population d'environ 160 millions, la [[Première_Guerre_mondiale|guerre mondiale]] avait tué plus de 3 millions de Russes. Les souffrances des soldats et les horeurs vécues ont engendré une brutalisation de la société qui a élevé le niveau de violence.
+
=== Révolutions de Février et d'Octobre ===
   −
La guerre avait aussi ruiné ce pays déjà peu développé économiquement, et qui avait dû s'endetter fortement pour l'effort de guerre.
+
Sur une population d'environ 160 millions, la [[Première_Guerre_mondiale|guerre mondiale]] avait tué plus de 3 millions de Russes. Les souffrances des soldats et les horeurs vécues ont engendré une brutalisation de la société qui a élevé le niveau de violence. La guerre avait aussi ruiné ce pays déjà peu développé économiquement, et qui avait dû s'endetter fortement pour l'effort de guerre.
   −
La haine du régime tyrannique des tsars dans les classes populaires russes était également très forte. Elle avait déjà conduit à la révolution de février 1917. Mais le gouvernement provisoire bourgeois ne prenait aucune mesure radicale, ne répondait pas aux besoins sociaux, et surtout, prolongeait la guerre. Dans cette situation d'entre-deux, le camp des révolutionnaires ([[Bolchéviks|bolchéviks]]) se renforçait, en parallèle du renforcement de la contre-révolution.
+
La haine du régime tyrannique des tsars dans les classes populaires russes était également très forte. Elle avait déjà conduit à la [[révolution_de_février_1917|révolution de février 1917]]. Mais le [[Gouvernement_provisoire_russe|gouvernement provisoire bourgeois]] ne prenait aucune mesure radicale, ne répondait pas aux besoins sociaux, et surtout, prolongeait la guerre. Dans cette situation d'entre-deux, le camp des révolutionnaires ([[Bolchéviks|bolchéviks]]) se renforçait, en parallèle du renforcement de la contre-révolution.
   −
L'insurrection d'Octobre basée sur la majorité obtenue par les bolchéviks dans les soviets a été la prise d'initiative révolutionnaire qui a lancé toutes les forces [[Réactionnaires|réactionnaires]] dans un assaut enragé contre le nouveau pouvoir, et qui a également contribué à un [[Révolutions_de_1917_à_1923|élan révolutionnaire mondial entre 1917 et 1923]].
+
L'[[Révolution_d'Octobre_1917|insurrection d'Octobre]] basée sur la majorité obtenue par les bolchéviks dans les [[soviets|soviets]] a été la prise d'initiative révolutionnaire qui a lancé toutes les forces [[Réactionnaires|réactionnaires]] dans un assaut enragé contre le nouveau pouvoir, et qui a également contribué à un [[Révolutions_de_1917_à_1923|élan révolutionnaire mondial entre 1917 et 1923]].
   −
En janvier 1918, [[Lénine|Lénine]] se laisse aller à danser sur la neige lorsque le gouvernement issu d'Octobre dépasse d'un jour la durée de la [[Commune_de_Paris_(1871)|Commune de Paris de 1871]]. Mais c'est surtout dans les mois qui suivent  et notamment à l'été 1918 que la guerre civile démarre vraiment.
+
De décembre 1917 à novembre 1918, les banques sont [[Nationalisation|nationalisées]] ainsi que les [[Chemins_de_fer|chemins de fer]], les [[Moyens_de_transport|moyens de transport]] et les [[Industries|industries]] de plus de 500 000 roubles de capital ; la [[Propriété_foncière|propriété foncière]] est abolie, sans indemnités. Ces mesures expliquent à elles seules la mobilisation des grandes sociétés industrielles et bancaires (russes et occidentales) pour combattre le nouveau régime. Elles avaient investi avant-guerre des capitaux considérables en Russie et comptent bien en tirer un retour sur investissement. D’ailleurs, dans un premier temps, elles prennent la révolution comme une aubaine qui va leur permettre de démanteler le pays à leur profit.
   −
== Les débuts de la guerre civile ==
+
=== Traité de Brest-Litovsk ===
 +
 
 +
{{Voir|traité de Brest-Litovsk}}
 +
 
 +
En prenant le pouvoir en Russie, les [[bolcheviks|bolcheviks]] avaient l'espoir d'un soulèvement révolutionnaire en Europe, plus que d'une paix signée entre la Russie révolutionnaire et les Etats impérialistes. Mais l'échec de la [[Vague_révolutionnaire_de_1917-1923|contagion révolutionnaire]] les obligea à se rabattre sur cette option.
 +
 
 +
Un armistice est signé le 15 décembre et des pourparlers de paix commencent le 22 décembre, la délégation russe étant conduite par [[Trotski|Trotski]], qui a fait publier dans l'intervalle tous les traités secrets et les plans de partage conclus entre puissances. Les exigences allemandes sont énormes&nbsp;: la Pologne, la Lituanie, et la Biélorussie doivent rester sous occupation allemande. Un débat fait rage au sein du parti&nbsp;bolchevik où trois positions s'affrontent. Certains, comme [[Boukharine|Boukharine]] défendent la nécessité d'une guerre révolutionnaire, [[Lénine|<span class="mw-redirect">Lénine</span>]] pense qu'il faut céder le couteau sous la gorge, et Trotsky, qui l'emporte par 9 voix contre 7, propose de déclarer la fin de la guerre tout en refusant de signer une paix d'annexion.
 +
 
 +
En réaction l'armée allemande lance une offensive le 17 janvier, qui avance rapidement en Ukraine. La position de <span class="mw-redirect">Lénine</span> pour la signature immédiate de la paix l'emporte alors le 18 janvier dans le parti, mais les conditions exigées par les Allemands se sont encore aggravées. Le 3 mars 1918, les bolcheviks signent le traité de Brest-Litovsk qui ampute la Russie de 26&nbsp;% de sa population, 27&nbsp;% de sa surface cultivée, 75&nbsp;% de sa production d'acier et de fer. La situation économique de la jeune république soviétique, déjà ravagée par une guerre meurtrière de quatre ans, semble désespérée.
   −
=== Une guerre de classe ===
+
La signature de ce traité très défavorable va soulever beaucoup de colère [[nationaliste|nationaliste]], y compris dans la gauche révolutionnaire : cela va être le principal motif du retournement de la majorité des [[SR_de_gauche|SR de gauche]] contre les bolchéviks.
   −
En novembre 1917, l’aspiration des ouvriers, paysans et soldats à la paix, au pain et à la liberté emporte les autocratiques institutions russes. Cependant des régions entières restent indépendantes vis à vis de Moscou. C’est particulièrement le cas dans le Sud où le général Kalédine, ataman des cosaques du Don se fait proclamer «&nbsp;commandant en chef des cosaques&nbsp;». Il recrute une armée blanche contre-révolutionnaire parmi les cosaques de la Russie méridionale, proclame «&nbsp;l’indépendance du Don&nbsp;» et se prépare à marcher sur Moscou avec environ 200 000 hommes pour renverser le Gouvernement des So­viets. Il dispose de relais nombreux parmi les anciens officiers tsaristes, y compris sur Moscou et Saint Petersbourg.
+
Du côté des Alliés, on considère non seulement que la Russie a trahi son camp, mais aussi qu'elle est dans un tel chaos que le moment est propice pour la dépecer. Ainsi le 23 décembre 1917, lendemain du début de la Conférence de Brest Litovsk, des représentants de la France et de la Grande-Bretagne se réunissent à Paris et con­cluent un accord secret pour le démembrement de la Russie&nbsp;:
   −
Après quelques combats sporadiques dès l'automne 1917, le printemps 1918 est marqué par la constitution d'une première armée blanche dans la région du Don, par des milliers d’officiers et de ''junkers'', ainsi que par le général Kornilov, arrêté à la suite de sa tentative de putsch en septembre et qui a pu quitter le monastère où il était interné. L'armée des volontaires est formée par le général tsariste <span class="mw-redirect">Alexéïev</span>. Cette armée réprime les soulèvements bolchéviques à Rostov-sur-le-Don et Taganrog, les 26 novembre et 2 janvier. Les gardes rouges ouvrières de Moscou et Petrograd, sous le commandement d’Antonov-Ovseïenko convergent vers le sud et mènent une guerre de partisans, qui finissent par chasser Kornilov. C'est au point qu'apprenant la déroute des Blancs, Lénine croit pouvoir s'exclamer, le <abbr title="Premier" class="abbr">1<sup>er</sup></abbr> avril 1918, que la guerre civile est terminée.
+
*l’Angleterre se réserve les provinces baltes et le Caucase (surtout son pétrole)
 +
*la France choisit l’Ukraine de la Biélorussie à la Bessarabie et au Donetz (fer, charbon, bassin sidérurgique...) ainsi que les rives de la Mer Noire dont Odessa et la Crimée.  
   −
D’autres combats sont menés dans le Kouban, où le pouvoir des soviets s’installe provisoirement à <span class="mw-redirect">Ekaterinodar</span>. Quant au soulèvement des cosaques de l’Oural, il se conclut par un échec. Sur le front roumain, l’armée se décompose en détachements blancs, qui rejoindront l’armée blanche de Dénikine, et en régiments rouges.
+
== Chronologie de la guerre civile ==
   −
De décembre 1917 à novembre 1918, les banques sont [[Nationalisation|nationalisées]] ainsi que les [[Chemins_de_fer|chemins de fer]], les [[Moyens_de_transport|moyens de transport]] et les [[Industries|industries]] de plus de 500 000 roubles de capital&nbsp;; la [[Propriété_foncière|propriété foncière]] est abolie, sans indemnités. Ces mesures expliquent à elles seules la mobilisation des grandes sociétés industrielles et bancaires pour combattre l’URSS. Elles avaient investi avant-guerre des capitaux considérables en Russie et comptent bien en tirer un retour sur investissement. D’ailleurs, dans un premier temps, elles prennent la révolution comme une aubaine qui va leur permettre de démanteler le pays à leur profit.
+
=== Fin 1917 : Premiers combats sporadiques ===
   −
La guerre est aussi idéologique. <span class="reference-text">3700 affiches sont ainsi créées pendant la guerre civile.</span>
+
Quelques combats sporadiques ont eu lieu dès les jours qui suivent la nuit de l'insurrection du 6-7 novembre 1917 (n.s). Ainsi dès le 12 novembre, [[Kerensky|Kerensky]] tente une contre-attaque à l'aide des [[Cosaques|Cosaques]] du général <span class="mw-disambig">Krasnov</span>. Ces derniers sont appuyés à Petrograd même par une mutinerie des [[Junkers|junkers]], avec des [[Parti_SR|SR]] à leur tête. Les junkers sont rapidement défaits par les [[Gardes_rouges|gardes rouges]]. Arrivés à <span class="nowrap">20 km</span> de la capitale, les cosaques se heurtent à leur tour aux gardes rouges et subissent de lourdes pertes. Le 13 novembre, le grand Quartier général (''stavka'') de l’armée russe annonce marcher sur Petrograd «&nbsp;afin d’y rétablir l’ordre&nbsp;». Rejoint par les chefs du parti SR, [[Tchernov|Tchernov]] et [[Mikhail_Gots|Gots]], il propose la création d’un «&nbsp;gouvernement de l’ordre&nbsp;». Cependant, la masse des soldats passe peu à peu aux bolcheviks, arrêtant les officiers. Le 18 novembre, l’état-major doit fuir dans le sud, le généralissime Doukhonine étant massacré par ses propres soldats.
   −
=== Traité de Brest-Litovsk ===
+
Dans les villes et régions où les bolcheviks peuvent compter sur de fortes concentrations ouvrières (Ivanovo, Kostroma, centre miniers de l'Oural), ils ont généralement déjà le contrôle ; dans d'autres régions, ils doivent composer avec diverses forces de gauche et triomphent parfois au terme d'une confrontation armée assez brève (Kazan, Samara, Saratov, Nijni Novgorod, etc.)&nbsp;; dans les bourgs et les régions agricoles, où les bolcheviks sont très minoritaires (Koursk, Voronej, Orel, dans les villes de Sibérie, etc.), la prise de pouvoir entraîne souvent des conflits sanglants. Cependant dans un premier temps les bolchéviks, ayant pris l'initiative, semblent facilement victorieux. Ils dirigent le coeur urbain et industrialisé de la Russie.
   −
{{Voir|traité de Brest-Litovsk}}
+
En janvier 1918, [[Lénine|Lénine]] se laisse aller à danser sur la neige lorsque le gouvernement issu d'Octobre dépasse d'un jour la durée de la [[Commune_de_Paris_(1871)|Commune de Paris de 1871]]. Mais c'est surtout dans les mois qui suivent et notamment à l'été 1918 que la guerre civile démarre vraiment.
   −
Pendant la guerre, l'Allemagne avait envahi l'Ukraine qui faisait alors partie de l'Empire tsariste.
+
=== Printemps 1918 : Premières armées blanches ===
   −
En prenant le pouvoir en Russie, les bolcheviks avaient l'espoir d'un soulèvement révolutionnaire en Europe. Celui-ci ne se produisant pas, la paix promise en octobre devient une nécessité absolue pour satisfaire l'armée et la paysannerie. Il s'agit à la fois de signer la paix, de se servir des négociations pour montrer la politique d'expansions territoriales des gouvernements bourgeois, mais sans paraître prendre parti pour les Empires centraux.
+
Cependant des régions entières restent indépendantes vis à vis de Moscou. C’est particulièrement le cas dans le Sud où une première armée blanche est constituée dans la région du Don par des milliers d’officiers et de ''junkers''. Le général Kalédine, ataman des cosaques du Don se fait proclamer «&nbsp;commandant en chef des cosaques&nbsp;». Il recrute une armée blanche contre-révolutionnaire parmi les cosaques de la Russie méridionale, proclame «&nbsp;l’indépendance du Don&nbsp;» et se prépare à marcher sur Moscou avec environ 200 000 hommes pour renverser le Gouvernement des So­viets. Il dispose de relais nombreux parmi les anciens officiers tsaristes, y compris sur Moscou et Saint Petersbourg.
   −
Un armistice est signé le 15 décembre et des pourparlers de paix commencent le 22 décembre, la délégation russe étant conduite par [[Trotski|Trotski]], qui a fait publier dans l'intervalle tous les traités secrets et les plans de partage conclus entre puissances. Les exigences allemandes sont énormes&nbsp;: la Pologne, la Lituanie, et la Biélorussie doivent rester sous occupation allemande. Un débat fait rage entre les bolcheviks au sein du parti où trois positions s'affrontent. Certains, comme [[Boukharine|Boukharine]] défendent la nécessité d'une guerre révolutionnaire, [[Lénine|<span class="mw-redirect">Lénine</span>]] pense qu'il faut céder le couteau sous la gorge, et Trotsky, qui l'emporte par 9 voix contre 7, propose de refuser de signer une paix d'annexion mais de déclarer la fin de la guerre.
+
L'armée des volontaires est formée par le général tsariste <span class="mw-redirect">Alexéïev</span>. Cette armée réprime les soulèvements bolchéviques à Rostov-sur-le-Don et Taganrog, les 26 novembre et 2 janvier. Le général Kornilov, arrêté à la suite de sa [[Putsch_de_Kornilov|tentative de putsch]] en septembre et qui a pu quitter le monastère où il était interné, se joint à eux. Ils lancent alors la première campagne du Kouban (février - mai 1918).
   −
En réaction l'armée allemande lance une offensive le 17 janvier, qui avance rapidement en Ukraine. La position de <span class="mw-redirect">Lénine</span> pour la signature immédiate de la paix l'emporte alors le 18 janvier dans le parti, mais les conditions exigées par les Allemands se sont encore aggravées. Le 3 mars 1918, les bolcheviks signent le traité de Brest-Litovsk qui ampute la Russie de 26&nbsp;% de sa population, 27&nbsp;% de sa surface cultivée, 75&nbsp;% de sa production d'acier et de fer. La situation économique de la jeune république soviétique, déjà ravagée par une guerre meurtrière de quatre ans, semble désespérée.
+
Les gardes rouges ouvrières de Moscou et Petrograd, sous le commandement d’[[Antonov-Ovseïenko|Antonov-Ovseïenko]] convergent vers le sud et mènent une guerre de partisans, qui finissent par chasser Kornilov en février.
   −
=== Interventions impérialistes ===
+
C'est au point qu'apprenant la déroute des Blancs, Lénine croit pouvoir s'exclamer, le <abbr title="Premier" class="abbr">1<sup>er</sup></abbr> avril 1918, que la guerre civile est terminée.
   −
Etant donné qu'une grande partie du capital investi en Russie était aux mains de capitalistes étrangers, ces derniers ont fait bloc sans hésitation avec la réaction russe. Cette guerre de classe s'est donc combinée à des interventions [[Impérialisme|impérialistes]].
+
Quant au soulèvement des cosaques de l’Oural, il se conclut par un échec. Sur le front roumain, l’armée se décompose en détachements blancs, qui rejoindront l’armée blanche de Dénikine, et en régiments rouges.
   −
Plusieurs gouvernements (anglais, français, américain, canadien, japonais, roumain, polonais, grec, tchécoslovaque, italien...) engagent des moyens considérables pour renverser le régime issu de la Révolution d’Octobre, démanteler l’[[URSS|URSS]] et profiter de ses richesses. De janvier 1919 à janvier 1920, un blocus total décidé par les puissances étrangères frappe la Russie tout entière.
+
Par ailleurs en Finlande (qui faisait partie de l'Empire russe), la [[Guerre_civile_finlandaise|guerre civile]] se termine au printemps 1918 par l'écrasement sanglant des rouges, qui montre aux bolchéviks ce qui les attends en cas de défaite.
   −
Ce sont des Américains qui prennent en Russie les premiers contacts avec les groupes opposés à la Révolution, en particulier par Maddin Summers, leur consul général à Moscou, qui a épousé la fille d’un grand seigneur. Leur activité consiste particulièrement à obtenir des subsides pour les armées blanches.
+
Les lignes de front étaient extrêmement mouvantes. Par exemple, Kiev change 14 fois de mains pendant la guerre.
   −
Le 23 décembre 1917, lendemain du début de la Conférence de Brest Litovsk, des représentants de la France et de la Grande-Bretagne se réunissent à Paris et con­cluent un accord secret pour le démembrement de la Russie&nbsp;:
+
=== Début des interventions impérialistes ===
   −
*l’Angleterre se réserve les provinces baltes et le Caucase (surtout son pétrole)
+
{{Article détaillé|Intervention alliée pendant la guerre civile russe}}
*la France choisit l’Ukraine de la Biélorussie à la Bessarabie et au Donetz (fer, charbon, bassin sidérurgique...) ainsi que les rives de la Mer Noire dont Odessa et la Crimée.
     −
Les troupes japonaises débarquaient à Vladivostock le 5 avril 1918. Elles étaient fortes de 30 000 hommes, puis bientôt de 70 000 hommes, épaulés par de petits contingents anglo-franco-américains. En mai 1918, tout le long de à ligne du Transsibérien, les légions tchécoslovaques, fortes de 20 000 hommes, s'emparaient de plusieurs villes. Pendant l'été 1918, des contingents français et anglais débarquaient à Mourmansk et Arkhangelsk, et plus tard, après la fin de la guerre en Europe occidentale, débarquaient respectivement à Odessa et Bakou. L'armée turque également intervint au Caucase en 1919.
+
Plusieurs gouvernements (anglais, français, américain, canadien, japonais, roumain, polonais, grec, tchécoslovaque, italien...) engagent des moyens considérables pour renverser le régime issu de la Révolution d’Octobre, démanteler l’[[URSS|URSS]] et profiter de ses richesses. De janvier 1919 à janvier 1920, un blocus total décidé par les puissances étrangères frappe la Russie tout entière.
   −
Le prolétariat dans les pays agresseurs n'est pas resté passif. Début 1919, la pression ouvrière obligeait également le Royaume-Uni à cesser l'agression de la Russie. Lloyd Georges, Premier Ministre anglais, annonçait non seulement que l’intervention britannique était finie, mais que les révoltes sur le Clyde et au sud de pays de Galle alarmaient l’Etat sur le front intérieur: ''«&nbsp;si une opération militaire était entreprise contre les bolcheviks, l’Angleterre deviendrait bolchevique et il se constituerait un soviet à Londres.&nbsp;»''
+
Ce sont des Américains qui prennent en Russie les premiers contacts avec les groupes opposés à la Révolution, en particulier par Maddin Summers, leur consul général à Moscou, qui a épousé la fille d’un grand seigneur. Leur activité consiste particulièrement à obtenir des subsides pour les armées blanches.
   −
Fin mai 1919, la [[CGT|CGT]] décide de coorganiser une grève générale avec les Belges, les Britanniques et les Italiens, pour la journée de huit heures, le relèvement des salaires, la démobilisation, l’amnistie des pacifistes poursuivis pendant la guerre et la non-intervention en Russie. Mais les négociations sur la date vont traîner pendant des semaines. Ce sera finalement le 21 juillet. Les [[Grèves_de_juin_1919|<span class="new">grèves de juin 1919</span>]], notamment celles des métallos de la région parisienne, auraient pu constituer le point de départ d'une révolution. Mais la direction de la CGT a préféré refroidir l'atmosphère. A tel point qu'après la démoralisation complète de la base syndicale, la CGT annule la grève générale internationale du 21 juillet.
      
== Les forces en présence ==
 
== Les forces en présence ==
Ligne 71 : Ligne 78 :     
{{Article détaillé|Armée rouge}}
 
{{Article détaillé|Armée rouge}}
 +
 +
L'Armée rouge est la seule véritable armée unifiée durant la guerre civile. Cependant, elle n'a pas existé d'emblée, et a dû être constituée dans l'action. A l'origine, la prise de pouvoir par les partisans bolchéviks s'est faite par un haut niveau d'[[auto-organisation|auto-organisation]], avec des ''«&nbsp;[[gardes_rouges|gardes rouges]]&nbsp;»'' dans les principales villes, c'est-à-dire des milices ouvrières [[Autogestion|autogérées]]. Face aux dangers des forces contre-révolutionnaires, les bolchéviks ont estimé que la seule voie de salut était dans le renforcement de la coordination et donc de la centralisation du commandement, dans une spécialisation des soldats, et dans l'instauration d'une forte [[discipline|discipline]]. [[Trotsky|Trotsky]] fut celui qui dirigea ce processus de création de l'Armée rouge.
    
=== Les «&nbsp;armées vertes&nbsp;» ===
 
=== Les «&nbsp;armées vertes&nbsp;» ===
   −
Les [[Armées_vertes|Armées vertes]], essentiellement rurales, combattaient à la fois contre l’Armée rouge et contre les armées blanches, refusaient les réquisitions et la conscription. On dénombre&nbsp;113 révoltes durant la guerre civile.
+
{{Article détaillé|Armées vertes}}
 +
 
 +
Les [[Armées_vertes|Armées vertes]], essentiellement rurales, combattaient à la fois contre l’Armée rouge et contre les armées blanches, refusaient les [[Réquisitions_dans_les_campagnes|réquisitions]] et la conscription. On dénombre&nbsp;113 révoltes durant la guerre civile.
    
Ces armées vertes comptaient parfois seulement 500 à 1000 hommes mais elles atteignaient parfois aussi des effectifs bien plus importants&nbsp;: 100 000 pour "l’armée populaire de Sibérie", 40 000 pour celle de Tambov avec [[Alexandre_Antonov|Antonov]], jusqu’à 50 000 en Ukraine avec [[Makhno|Makhno]]... Pour réprimer la [[Révolte_de_Tambov|<span class="new">Révolte de Tambov</span>]],&nbsp;[[Toukhatchevski|Toukhatchevski]] utilisera des armes chimiques.
 
Ces armées vertes comptaient parfois seulement 500 à 1000 hommes mais elles atteignaient parfois aussi des effectifs bien plus importants&nbsp;: 100 000 pour "l’armée populaire de Sibérie", 40 000 pour celle de Tambov avec [[Alexandre_Antonov|Antonov]], jusqu’à 50 000 en Ukraine avec [[Makhno|Makhno]]... Pour réprimer la [[Révolte_de_Tambov|<span class="new">Révolte de Tambov</span>]],&nbsp;[[Toukhatchevski|Toukhatchevski]] utilisera des armes chimiques.
 +
 +
=== Les forces étrangères ===
 +
 +
Plusieurs gouvernements (anglais, français, américain, canadien, japonais, roumain, polonais, grec, tchécoslovaque, italien...) engagent des moyens considérables pour renverser le régime issu de la Révolution d’Octobre. Leur activité consiste particulièrement à obtenir des subsides pour les armées blanches.
 +
 +
Néanmoins des troupes au sol sont aussi envoyées par certains pays. Les troupes japonaises débarquaient à Vladivostock le 5 avril 1918. Elles étaient fortes de 30 000 hommes, puis bientôt de 70 000 hommes, épaulés par de petits contingents anglo-franco-américains. En mai 1918, tout le long de à ligne du Transsibérien, les légions tchécoslovaques, fortes de 20 000 hommes, s'emparaient de plusieurs villes. Pendant l'été 1918, des contingents français et anglais débarquaient à Mourmansk et Arkhangelsk, et plus tard, après la fin de la guerre en Europe occidentale, débarquaient respectivement à Odessa et Bakou. L'armée turque également intervint au Caucase en 1919.
    
=== Les mercenaires ===
 
=== Les mercenaires ===
   −
À côté des différents camps, de nombreux chefs de guerre et aventuriers profitent de l'effondrement de l'autorité en Russie pour piller, massacrer et s'autoproclamer dirigeants de territoires plus ou moins vastes. D'autres s'engagent dans les armées régulières par opportunisme. L'ataman Grigoriev constitue ainsi une bande formée de soldats, de déclassés et de mercenaires qui se met successivement au service de Simon Petlioura, de l'Armée rouge et des Blancs, sans renoncer à aucun moment aux massacres et aux pillages. Grigoriev finira abattu par Makhno, auquel il s'était brièvement allié.
+
À côté des différents camps, de nombreux chefs de guerre et aventuriers profitent de l'effondrement de l'autorité en Russie pour piller, massacrer et s'autoproclamer dirigeants de territoires plus ou moins vastes. D'autres s'engagent dans les armées régulières par opportunisme. L'ataman Grigoriev constitue ainsi une bande formée de soldats, de déclassés et de mercenaires qui se met successivement au service de [[Simon_Petlioura|Simon Petlioura]], de l'[[Armée_rouge|Armée rouge]] et des [[Armées_blanches|Blancs]], sans renoncer à aucun moment aux massacres et aux pillages. Grigoriev finira abattu par [[Makhno|Makhno]], auquel il s'était brièvement allié.
 +
 
 +
== Une guerre de classe ==
   −
== L'enthousiasme révolutionnaire ==
+
=== L'enthousiasme révolutionnaire ===
    
En juillet 1919, [[Lénine|Lénine]] fait une déclaration pleine d'optimisme&nbsp;:
 
En juillet 1919, [[Lénine|Lénine]] fait une déclaration pleine d'optimisme&nbsp;:
Ligne 101 : Ligne 120 :     
Dans le prolongement de leur bataillon contre les Blancs, les troupes bolchéviques s'avancent vers la Pologne en 1920. La direction bolchévique est divisée sur la question&nbsp;: la majorité derrière [[Lénine|Lénine]] veut foncer, tandis que [[Trotsky|Trotsky]] et [[Radek|Radek]] prônent la prudence.
 
Dans le prolongement de leur bataillon contre les Blancs, les troupes bolchéviques s'avancent vers la Pologne en 1920. La direction bolchévique est divisée sur la question&nbsp;: la majorité derrière [[Lénine|Lénine]] veut foncer, tandis que [[Trotsky|Trotsky]] et [[Radek|Radek]] prônent la prudence.
 +
 +
La guerre est aussi idéologique. <span class="reference-text">3700 affiches sont ainsi créées pendant la guerre civile.</span>
 +
 +
=== Soutien international ===
 +
 +
Le prolétariat dans les pays agresseurs n'est pas resté passif. Début 1919, la pression ouvrière obligeait également le Royaume-Uni à cesser l'agression de la Russie. Lloyd Georges, Premier Ministre anglais, annonçait non seulement que l’intervention britannique était finie, mais que les révoltes sur le Clyde et au sud du Pays de Galle alarmaient l’Etat sur le front intérieur: ''«&nbsp;si une opération militaire était entreprise contre les bolcheviks, l’Angleterre deviendrait bolchevique et il se constituerait un soviet à Londres.&nbsp;»''
 +
 +
Fin mai 1919, la [[CGT|CGT]] décide de coorganiser une grève générale avec les Belges, les Britanniques et les Italiens, pour la journée de huit heures, le relèvement des salaires, la démobilisation, l’amnistie des pacifistes poursuivis pendant la guerre et la non-intervention en Russie. Mais les négociations sur la date vont traîner pendant des semaines. Ce sera finalement le 21 juillet. Les [[Grèves_de_juin_1919|<span class="new">grèves de juin 1919</span>]], notamment celles des métallos de la région parisienne, auraient pu constituer le point de départ d'une révolution. Mais la direction de la CGT a préféré refroidir l'atmosphère. A tel point qu'après la démoralisation complète de la base syndicale, la CGT annule la grève générale internationale du 21 juillet.
    
== Mesures de terreur ==
 
== Mesures de terreur ==

Menu de navigation