Différences entre les versions de « Terreur rouge »

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Selon Trotsky dans son ouvrage ''Terrorisme et communisme'' :
 
Selon Trotsky dans son ouvrage ''Terrorisme et communisme'' :
 
<blockquote>''«&nbsp;Poussée par la logique de la lutte, celle-ci entra en matière de principe dans la voie de l'intimidation. La création du Comité de Salut public était dictée pour beaucoup de ses partisans par l'idée de la terreur rouge. Ce comité avait pour objet de "faire tomber les têtes des traîtres" et de "réprimer les trahisons" (séances du 30 avril et du 1er mai). Parmi les décrets d'"intimidation", il convient de signaler l'ordonnance (du 3 avril) sur la séquestration des biens de Thiers et de ses ministres, la démolition de sa maison, le renversement de la colonne Vendôme, et en particulier le décret sur les otages. Pour chaque prisonnier ou partisan de la Commune fusillé par les Versaillais, on devait fusiller trois otages. Les mesures prises par la Préfecture de police, dirigée par Raoul Rigault, étaient d'un caractère purement terroriste, quoiqu'elles ne fussent pas toujours adaptées au but poursuivi. L'efficacité de toutes ces mesures d'intimidation fut paralysée par l'inconsistance et l'état d'esprit conciliateur des éléments dirigeants de la Commune, par leurs efforts pour faire accepter le fait accompli à la bourgeoisie au moyen de phrases pitoyables, par leurs oscillations entre la fiction de la démocratie et la réalité de la dictature [...]&nbsp;Si la Commune de Paris n'était pas tombée, si elle avait pu se maintenir dans une lutte ininterrompue, il ne peut y avoir de doute qu'elle aurait été obligée de recourir à des mesures de plus en plus rigoureuses pour écraser la contre-révolution. Il est vrai que Kautsky n'aurait pas eu alors la possibilité d'opposer les communards humanitaires aux bolcheviks inhumains. En revanche, Thiers n'aurait pu commettre sa monstrueuse saignée du prolétariat de Paris. L'histoire y aurait peut-être trouvé son compte.&nbsp;»''</blockquote>  
 
<blockquote>''«&nbsp;Poussée par la logique de la lutte, celle-ci entra en matière de principe dans la voie de l'intimidation. La création du Comité de Salut public était dictée pour beaucoup de ses partisans par l'idée de la terreur rouge. Ce comité avait pour objet de "faire tomber les têtes des traîtres" et de "réprimer les trahisons" (séances du 30 avril et du 1er mai). Parmi les décrets d'"intimidation", il convient de signaler l'ordonnance (du 3 avril) sur la séquestration des biens de Thiers et de ses ministres, la démolition de sa maison, le renversement de la colonne Vendôme, et en particulier le décret sur les otages. Pour chaque prisonnier ou partisan de la Commune fusillé par les Versaillais, on devait fusiller trois otages. Les mesures prises par la Préfecture de police, dirigée par Raoul Rigault, étaient d'un caractère purement terroriste, quoiqu'elles ne fussent pas toujours adaptées au but poursuivi. L'efficacité de toutes ces mesures d'intimidation fut paralysée par l'inconsistance et l'état d'esprit conciliateur des éléments dirigeants de la Commune, par leurs efforts pour faire accepter le fait accompli à la bourgeoisie au moyen de phrases pitoyables, par leurs oscillations entre la fiction de la démocratie et la réalité de la dictature [...]&nbsp;Si la Commune de Paris n'était pas tombée, si elle avait pu se maintenir dans une lutte ininterrompue, il ne peut y avoir de doute qu'elle aurait été obligée de recourir à des mesures de plus en plus rigoureuses pour écraser la contre-révolution. Il est vrai que Kautsky n'aurait pas eu alors la possibilité d'opposer les communards humanitaires aux bolcheviks inhumains. En revanche, Thiers n'aurait pu commettre sa monstrueuse saignée du prolétariat de Paris. L'histoire y aurait peut-être trouvé son compte.&nbsp;»''</blockquote>  
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== Révolution russe ==
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La «&nbsp;Commission extraordinaire panrusse près le Conseil des commissaires du peuple pour combattre la contre-révolution et le sabotage&nbsp;» (Vetcheka) est instaurée le 7 décembre 1917 mais ne dispose que de pouvoir très limités&nbsp;: elle mène des enquêtes et ne peut punir que par la confiscation des biens et des cartes de rationnement. Mais dans l'atmosphère de la [[Guerre_civile_russe|guerre civile]], Le [[Comité_exécutif_central_pan-russe|comité exécutif central]] décide de répliquer à la «&nbsp;[[Terreur_blanche|terreur blanche]]&nbsp;» par la «&nbsp;terreur rouge&nbsp;». Le décret du 5 septembre appelle à ''«&nbsp;isoler les ennemis de classe de la République soviétique dans des camps de concentration, et de fusiller sur-le-champ tout individu impliqué dans des organisations de Gardes-Blancs, des insurrections ou des émeutes.&nbsp;»''
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<blockquote>''«&nbsp;La Tchéka, ''déclare le tchékiste Latsis'', ne juge pas, elle frappe ... Nous ne faisons plus la guerre à des individus isolés, nous exterminons la bourgeoisie entant que classe. Ne cherchez pas dans le dossier des accusés des preuves pour savoir s'ils sont ou non opposés au gouvernement soviétique en paroles ou en actes. La question à l'ordre du jour est de savoir à quelle classe sociale ils appartiennent, leur extraction, leur instruction, leur profession. C'est cela qui décide de leur sort&nbsp;»''</blockquote>
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Selon Pierre Broué, dans son livre ''Le Parti Bolchévique''&nbsp;: ''«&nbsp;Il est impossible de donner des chiffres précis quant à l'ampleur de la répression. Les chiffres officiels sont certainement bien inférieurs à la réalité, mais reflètent l'importance du tournant de juillet&nbsp;: Peters indique 22 exécutions pour les six premiers mois de 1918 et 6000 pour les six derniers mois. L'historien Chamberlin tient pour vraisemblable un total de 50 000 victimes. Il est incontestablement inférieur à celui des victimes des Blancs. Surtout, comme le souligne Victor Serge, l'ensemble de la Terreur rouge fera moins de victimes que certaines des plus terribles journées de la bataille de Verdun.&nbsp;»''
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Il ajoute&nbsp;:
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<blockquote>''«&nbsp;En tout cas, les bolcheviks ont conscience que ce prix doit être payé si l'on veut éviter dans l'avenir des notes plus lourdes encore en vies humaines. Fidèles à leurs principes, leurs dirigeants ne dissimulent ni ne renient leur politique terroriste. Au soviet de Kazan, Trotsky déclare&nbsp;: «&nbsp;Maintenant qu’on accuse les ouvriers de faire preuve de cruauté dans la guerre civile, nous disons, instruits par l'expérience&nbsp;: l'indulgence envers les classes ennemies serait la seule faute impardonnable que puisse commettre en ce moment la classe ouvrière russe. Nous nous battons, au nom du plus grand bien de l'humanité, au nom de la régénérescence de l'humanité, pour la tirer des ténèbres et de l'esclavage&nbsp;». Et s'adressant aux ouvriers américains, instruits de toutes les atrocités de la Terreur rouge, Lénine dit&nbsp;: «&nbsp;Nos fautes ne nous font pas peur. Les hommes ne sont pas devenus des saints du fait que la révolution a commencé. Les classes laborieuses opprimées, abêties, maintenues de force dans l'étau de la misère, de l'ignorance, de la barbarie, pendant des siècles, ne peuvent accomplir la révolution sans commettre d'erreurs. [ ... ] On ne peut enfermer dans un cercueil le cadavre de la société bourgeoise et l'enterrer. Le capitalisme abattu pourrit, se décompose parmi nous, infestant l'air de ses miasmes, empoisonnant notre vie&nbsp;: ce qui est ancien, pourri, mort s'accroche par des milliers de fils et de liens à tout ce qui est nouveau, frais, vivant&nbsp;»''</blockquote>
 
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Version du 18 août 2017 à 10:00

La terreur rouge est le nom donné à l'ensemble des actions de répression politique exercée par le prolétariat contre les anciennes classes dominantes.

La question de l'utilisation de la Terreur lors de la révolution continue à faire l'objet de profonds débats dans l'extrême gauche. Rosa Luxemburg écrivait par exemple : « La révolution prolétarienne n'a nul besoin de la terreur pour réaliser ses objectifs. Elle hait et abhorre l'assassinat. Elle n'a pas besoin de recourir à ces moyens de lutte parce qu'elle ne combat pas des individus, mais des institutions, parce qu'elle n'entre pas dans l'arène avec des illusions naïves qui, déçues, entraîneraient une vengeance sanglante. Ce n'est pas la tentative désespérée d'une minorité pour modeler par la force le monde selon son idéal, c'est l'action de la grande masse des millions d'hommes qui composent le peuple, appelés à remplir leur mission historique et à faire de la nécessité historique une réalité. » alors que Trotsky écrivait : « La révolution exige de la classe révolutionnaire qu'elle mette tous les moyens en œuvre pour atteindre ses fins; par l'insurrection armée, s'il le faut; par le terrorisme, si c'est nécessaire. »

1 Commune de Paris

Selon Trotsky dans son ouvrage Terrorisme et communisme :

« Poussée par la logique de la lutte, celle-ci entra en matière de principe dans la voie de l'intimidation. La création du Comité de Salut public était dictée pour beaucoup de ses partisans par l'idée de la terreur rouge. Ce comité avait pour objet de "faire tomber les têtes des traîtres" et de "réprimer les trahisons" (séances du 30 avril et du 1er mai). Parmi les décrets d'"intimidation", il convient de signaler l'ordonnance (du 3 avril) sur la séquestration des biens de Thiers et de ses ministres, la démolition de sa maison, le renversement de la colonne Vendôme, et en particulier le décret sur les otages. Pour chaque prisonnier ou partisan de la Commune fusillé par les Versaillais, on devait fusiller trois otages. Les mesures prises par la Préfecture de police, dirigée par Raoul Rigault, étaient d'un caractère purement terroriste, quoiqu'elles ne fussent pas toujours adaptées au but poursuivi. L'efficacité de toutes ces mesures d'intimidation fut paralysée par l'inconsistance et l'état d'esprit conciliateur des éléments dirigeants de la Commune, par leurs efforts pour faire accepter le fait accompli à la bourgeoisie au moyen de phrases pitoyables, par leurs oscillations entre la fiction de la démocratie et la réalité de la dictature [...] Si la Commune de Paris n'était pas tombée, si elle avait pu se maintenir dans une lutte ininterrompue, il ne peut y avoir de doute qu'elle aurait été obligée de recourir à des mesures de plus en plus rigoureuses pour écraser la contre-révolution. Il est vrai que Kautsky n'aurait pas eu alors la possibilité d'opposer les communards humanitaires aux bolcheviks inhumains. En revanche, Thiers n'aurait pu commettre sa monstrueuse saignée du prolétariat de Paris. L'histoire y aurait peut-être trouvé son compte. »

2 Révolution russe

La « Commission extraordinaire panrusse près le Conseil des commissaires du peuple pour combattre la contre-révolution et le sabotage » (Vetcheka) est instaurée le 7 décembre 1917 mais ne dispose que de pouvoir très limités : elle mène des enquêtes et ne peut punir que par la confiscation des biens et des cartes de rationnement. Mais dans l'atmosphère de la guerre civile, Le comité exécutif central décide de répliquer à la « terreur blanche » par la « terreur rouge ». Le décret du 5 septembre appelle à « isoler les ennemis de classe de la République soviétique dans des camps de concentration, et de fusiller sur-le-champ tout individu impliqué dans des organisations de Gardes-Blancs, des insurrections ou des émeutes. »

« La Tchéka, déclare le tchékiste Latsis, ne juge pas, elle frappe ... Nous ne faisons plus la guerre à des individus isolés, nous exterminons la bourgeoisie entant que classe. Ne cherchez pas dans le dossier des accusés des preuves pour savoir s'ils sont ou non opposés au gouvernement soviétique en paroles ou en actes. La question à l'ordre du jour est de savoir à quelle classe sociale ils appartiennent, leur extraction, leur instruction, leur profession. C'est cela qui décide de leur sort »

Selon Pierre Broué, dans son livre Le Parti Bolchévique : « Il est impossible de donner des chiffres précis quant à l'ampleur de la répression. Les chiffres officiels sont certainement bien inférieurs à la réalité, mais reflètent l'importance du tournant de juillet : Peters indique 22 exécutions pour les six premiers mois de 1918 et 6000 pour les six derniers mois. L'historien Chamberlin tient pour vraisemblable un total de 50 000 victimes. Il est incontestablement inférieur à celui des victimes des Blancs. Surtout, comme le souligne Victor Serge, l'ensemble de la Terreur rouge fera moins de victimes que certaines des plus terribles journées de la bataille de Verdun. »

Il ajoute :

« En tout cas, les bolcheviks ont conscience que ce prix doit être payé si l'on veut éviter dans l'avenir des notes plus lourdes encore en vies humaines. Fidèles à leurs principes, leurs dirigeants ne dissimulent ni ne renient leur politique terroriste. Au soviet de Kazan, Trotsky déclare : « Maintenant qu’on accuse les ouvriers de faire preuve de cruauté dans la guerre civile, nous disons, instruits par l'expérience : l'indulgence envers les classes ennemies serait la seule faute impardonnable que puisse commettre en ce moment la classe ouvrière russe. Nous nous battons, au nom du plus grand bien de l'humanité, au nom de la régénérescence de l'humanité, pour la tirer des ténèbres et de l'esclavage ». Et s'adressant aux ouvriers américains, instruits de toutes les atrocités de la Terreur rouge, Lénine dit : « Nos fautes ne nous font pas peur. Les hommes ne sont pas devenus des saints du fait que la révolution a commencé. Les classes laborieuses opprimées, abêties, maintenues de force dans l'étau de la misère, de l'ignorance, de la barbarie, pendant des siècles, ne peuvent accomplir la révolution sans commettre d'erreurs. [ ... ] On ne peut enfermer dans un cercueil le cadavre de la société bourgeoise et l'enterrer. Le capitalisme abattu pourrit, se décompose parmi nous, infestant l'air de ses miasmes, empoisonnant notre vie : ce qui est ancien, pourri, mort s'accroche par des milliers de fils et de liens à tout ce qui est nouveau, frais, vivant »