Différences entre les versions de « Stalinisme »

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*[http://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/revtrahie/frodcp.htm La révolution trahie], [[Trotsky|Trotsky]], 1936<br> ;
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*[http://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/revtrahie/frodcp.htm La révolution trahie], [[Trotsky|Trotsky]], 1936 ;  
*[http://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/bcs/bcs00.htm Bolchévisme contre stalinisme], [[Trotsky|Trotsky]], 1929-1939 ;
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*[http://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/bcs/bcs00.htm Bolchévisme contre stalinisme], [[Trotsky|Trotsky]], 1929-1939 &nbsp;;  
 
*François Dietrich, "Octobre 1917. Identification d'un échec", Critique communiste, n° 150, 1997, [http://www.lcr-lagauche.be/cm/index.php?view=article&id=863:octobre-1917-identification-dun-echec&option=com_content&Itemid=53].
 
*François Dietrich, "Octobre 1917. Identification d'un échec", Critique communiste, n° 150, 1997, [http://www.lcr-lagauche.be/cm/index.php?view=article&id=863:octobre-1917-identification-dun-echec&option=com_content&Itemid=53].
  
 
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Version du 9 juillet 2011 à 14:45

Stalinisme.png

Le stalinisme est la politique menée par la bureaucratie de l'URSS et l'Internationale Communiste pendant et après le thermidor soviétique. Cela désigne aussi "l'idéologie" de cette bureaucratie, personnifiée par Staline, bien qu'il n'y ait derrière aucune cohérence idéologique.

Le stalinisme a été une réaction victorieuse en URSS, notamment contre le trotskisme, mais a aussi été le fossoyeur de nombreuses révolutions socialistes, et probablement un des responsables principaux du recul du mouvement ouvrier pendant la seconde moitié du XXème siècle.

1 Stalinisme et Opposition de gauche en URSS

Le stalinisme s'est construit en même temps que la jeune révolution bolchévique dégénérait. C'est la bureaucratie réactionnaire qui constituait la base sociale de cette régression, car elle confisquait le pouvoir des mains des soviets et donc des ouvriers. C'est elle qui s'est reconnue dans Staline et a donné du poids à son "argumentation" et à sa propagande.

C'est ce poids croissant qui a permis au stalinisme de se présenter de grès ou de force comme la continuateur de Lénine, en calomniant tout opposant comme Trotsky et l'Opposition de gauche.

Le stalinisme a cherché à théoriser ses politiques d'abandon de la révolution internationale, voire contre-révolutionnaires. L'exemple le plus frappant en est la théorie du "socialisme dans un seul pays".

2 Stalinisme et Internationale Communiste

Née dans l'élan de la Révolution russe, l'Internationale Communiste s'est développée très rapidement, et face à la discréditée Deuxième internationale, elle avait vocation à donner un nouveau souffle révolutionnaire au mouvement ouvrier et au socialisme scientifique.

Mais sa rapide stalinisation a rapidement eu l'effet inverse : l'IC a conduit à l'échec ou a directement étouffé des révolutions ouvrières prometteuses : Révolution chinoise, Révolution espagnole...

3 Bolchévisme et stalinisme

Naturellement, la politique intérieure et extérieure de l’URSS sous Staline n’a rien à voir avec l’élan émancipateur et internationaliste de la révolution d’Octobre. Comment est-on passé d’un mouvement révolutionnaire inédit, créateur et libérateur à une dictature totalitaire ?

La thèse de la continuité entre bolchévisme et stalinisme est défendue, pour des raisons opposées, à la fois par les staliniens, qui se présentent comme les héritiers d’Octobre, et par les réactionnaires qui veulent couvrir d’un même opprobre le stalinisme et le communisme en général. Face à ce raccourci révisionniste, Trotsky et les trotskystes voient dans l’isolement international de la Russie et dans l’affaiblissement numérique de la classe ouvrière la source de la bureaucratisation du régime, bureaucratisation dont Staline deviendra le nom.

Cependant, sans remettre en cause cette analyse générale, certains auteurs trotskystes se sont attachés à montrer comment certains défauts contenus dans la première phase de la révolution russe ont pu, par la suite, contribuer à donner naissance au monstre stalinien. Dans son article « Octobre 1917. Identification d’un échec[1] », François Dietrich propose ainsi six « faiblesses » de la Révolution russe, six « brèches dans lesquelles le stalinisme s’est engouffré ». Les paragraphes suivants se fondent sur les analyses de F. Dietrich.

3.1 Conception du sens de l’histoire

Lénine, imprégné d’une conception de l’histoire héritée de la pensée de Kautsky, a une conception de l’histoire fondée sur la linéarité et l’irréversibilité. Le mouvement révolutionnaire, selon Lénine, va inexorablement de l’avant ; c’est cela qui justifie qu’on ne puisse pas attendre les « retardataires » et qu’on dissolve la Douma, en 1918 ; c’est aussi cela qui fait que la révolte de Cronstadt ne puisse être vue que comme une contre-révolution, et réprimée comme telle. Est-il valide de poursuivre une révolution dans l’isolement et l’encerclement ? Cette réflexion est étouffée dans l’œuf. Cet arrière-fond idéologique nourrira, sous le stalinisme, la politique de collectivisation forcée : tout compromis avec le petit capitalisme renaissant est rendu impossible ; ne reste plus que la fuite en avant.

3.2 « Conscience extérieure » et substitutisme

Kautsky a forgé la théorie de la « conscience extérieure » à propos du prolétariat d’Europe occidentale : il s’agit de dire que l’apport intellectuel de la petite bourgeoisie est indispensable au mûrissement de la classe ouvrière. Mais l’application par le Parti bolchévik de cette théorie à la situation russe n’a pu mener qu’à une forme de substitutisme. En effet, la classe ouvrière russe n’a pas de tradition et n’a pas forgé ses armes dans le syndicalisme, contrairement aux prolétaires d’Europe occidentale. Quant à l’élite intellectuelle et artistique de Russie, elle est issue d’une aristocratie décadente et d’une petite et moyenne bourgeoisie qui regarde vers l’Europe et non vers la glèbe populaire et paysanne. Le Parti bolchévik a donc été à la fois chargé de remplacer une élite intellectuelle défaillante et l’absence de cadres naturels dans le mouvement ouvrier. Cette réalité a nourri les conceptions d’aristocratie politique du parti, et légitimé les pratiques bureaucratiques.

3.3 Limites de la démocratie

Tous ces traits négatifs conduisent à une conception messianique de la politique. Celle-ci, combinée avec l’entrée en masse d’adhérents sans expérience à partir de 1917, favorise l’apparition de clans et de coteries, qui sont autant de lieux officieux et non démocratiques de prises de décision. L’ivresse de la victoire relègue ces tares au rang de travers passagers. Mais quand la vague révolutionnaire s’arrêtera en Europe, le phénomène de bureaucratisation ne pourra plus être enrayé.

3.4 Terreur

Dans les premiers mois de la Révolution, le pouvoir fait preuve d’une grande mansuétude envers ses adversaires. Mais à partir de l’automne 1918, c’est le tournant de la Terreur, qui répond aux attentats perpétrés contre les cadres bolchéviks et aux exactions des Blancs. Mais pour Lénine, il doit aussi s’agir d’une terreur de classe. En l’absence d’un prolétariat puissant et organisé capable de fonder sa domination sur un mélange de consentement et de coercition, pour citer Gramsci, la logique d’une « dictature démocratique » du prolétariat fait place à une logique d’expiation et de haine des riches. La terreur léniniste pose, de ce point de vue, les prémisses de la terreur stalinienne.

3.5 Théories sur le dépérissement de l’Etat

Dans L’Etat et la révolution, Lénine affirme que le dépérissement de l’Etat commence avec la destruction même de l’Etat bourgeois. Mais en même temps, en s’appuyant sur l’expérience de la révolution de 1905, il fait des comités populaires nés de la révolution le socle du nouvel Etat socialiste. La contradiction est éclatante : comment le socialisme peut-il à la fois vouloir le dépérissement de l’Etat et l’accroissement de son implantation dans la société ? Lénine envisage en fait une extinction de l’Etat sous la forme de son extension à l’ensemble de la classe ouvrière, organisée en conseils. Mais dans un premier temps, cette extension implique une emprise croissante de l’Etat sur la société. Quand le système se bureaucratisera, il n’y aura plus de contrepoids, ni dans le parti (devenu unique), ni dans les comités d’usine saignés à blanc par les ravages de la guerre civile. Et la révolution a aussi supprimé les mécanismes représentatifs parlementaires bourgeois, qui auraient pu constituer ce contrepoids. La dissolution de la Douma correspond au refus d’un pouvoir organisé de façon polycentrique, qui combinerait par exemple représentation sociale et représentation politique, comme le proposera bien plus tard le syndicat polonais Solidarnosc avec son idée de « double chambre ». La pratique léniniste a donc donné naissance à un Etat massif plutôt qu’à un Etat dépérissant. Staline s’est coulé dans le moule avec sa théorie de l’ « Etat du peuple tout entier ».

3.6 Economie dirigée

La politique bolchévique a consisté à mettre en place une économie « rationalisée », c’est-à-dire étatisée. Toute la production doit être soumise à un Etat socialiste qu’on imagine démocratique. Cette conception ne fait aucune place à l’autogestion locale, et n’inclut aucune forme d’économie marchande. Ce saut brutal du féodalisme rural au communisme paraît rétrospectivement surréaliste, dans le contexte de délabrement général où se trouve la Russie au sortir de la guerre civile. La mise en place de la NEP, rendue nécessaire par la situation économique du pays, est analysée comme un pas en arrière, une « retraite », ce qui confirme a contrario la nature de la stratégie d’ensemble. Mais Trotsky, dans La Révolution trahie, estimera qu’il est nécessaire que le jeu de l’offre et de la demande serve de correctif à la planification, et ce pendant une longue période après la révolution. Dans sa critique du stalinisme, il souligne le lien entre la conduite bureaucratique et étatisée de l’économie à l’époque du communisme de guerre et la politique économique stalinienne.

4 Notes et sources


  1. François Dietrich, "Octobre 1917. Identification d'un échec", Critique communiste, n° 150, 1997.