Révolution finlandaise

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Gardes rouges finlandais

En 1918, la Finlande fut touchée par l'onde de choc révolutionnaire partie de la Russie en 1917. La Finlande était un des pays les plus avancés du monde. Ses mœurs, son éducation politique analogue à celles des démocraties les plus progressistes de l’Occident, les victoires de son mouvement ouvrier et jusqu’à sa structure industrielle, tout concourait, semblait-il, à y rendre aisée la victoire du socialisme.

1 Chronologie

1.1 La Finlande de 1809 à 1917 : un grand-duché intégré à la Russie

Le peuple finlandais ne connut ni servage ni despotisme. Rattachée à la Suède depuis le 12e siècle, la Finlande, pays de petits propriétaires auxquels la féodalité ne réussit jamais à s’imposer, passa en 1809 à la Russie, grâce à l’alliance de Napoléon et d’Alexandre 1er. Constituée en Grand-duché, elle conserva dans l’empire une large autonomie, d’autant plus effective qu’elle sut mieux la défendre contre ses grands-ducs, les tsars de Russie. La Finlande garda sa diète (parlement), ses monnaies, ses postes, son instruction publique, sa milice, son administration intérieure. Elle évolua comme les pays scandinaves, avec l’Occident.

Les brutales tentatives de russification de Nicolas II ne firent que lui aliéner la société finlandaise tout entière. Deux ans après la révolution russe de 1905, qui obligea le tsar à accorder une constitution à la Finlande, celui-ci instituait chez elle le suffrage universel. Dès les premières élections, en 1907, les social-démocrates obtenaient au parlement 80 sièges sur 200.

En ce moment-là le sentiment national ne joue pas contre l'essor de la conscience de classe. Trotsky raconte qu'en 1907, on appelait les nationalistes finnois révolutionnaires les « activistes », et que c'était des alliés des social-démocrates russes.[1]

1.2 La Première guerre mondiale et Février 1917

Lorsqu'éclate la guerre en 1914, la bourgeoisie finlandaise espère en profiter pour conquérir son indépendance nationale. Trois mille jeunes Finlandais de la moyenne ou grande bourgeoisie formaient le 27e bataillon de chasseurs de l’armée allemande et se battaient contre le Russe, ennemi héréditaire. Des écoles militaires clandestines existaient en divers endroits du pays. A la chute de l’autocratie russe, un corps de fusiliers volontaires se constitue dans le Nord afin d’assurer le maintien de l’ordre. C’est le « Schutzekorps » du général Herrich, première garde blanche formée au grand jour. Son quartier général est à Vasa, sur le golfe de Botnie ; il reçoit des armes de Suède et d’Allemagne. La bourgeoisie exigeait cependant avec insistance le retrait des troupes russes, chargées depuis le début de la guerre de protéger le pays contre une descente allemande.

Les élections de 1916 leur donnèrent la majorité absolue : 103 sièges sur 200, ce qui était une première mondiale. Ils votèrent la journée de huit heures et une intelligente législation communale. Et le parlementarisme socialiste se trouva au point mort. Pouvait-on s’acheminer paisiblement vers le socialisme, le bulletin de vote à la main ?

Néanmoins, la social-démocratie de Finlande suscitait beaucoup d'espoirs côté russe. Le 11 mars 1917, Lénine écrivait : « N’oublions pas que nous avons, à côté de Pétrograd, l’un des pays les plus avancés, pays républicain en réalité, la Finlande qui a, sous le couvert des batailles révolutionnaires de la Russie, développé, dans une paix relative, de 1905 à 1917, sa démocratie et conquis la majorité du peuple au socialisme… Meilleurs organisateurs que nous, les ouvriers finlandais, nous aideront en cette matière ; ils pousseront de l’avant, à leur façon, l’établissement d’une république socialiste. » (Troisième « lettre de loin » de Lénine, avant son retour en Russie).

Le 5 juin 1917 le Séim se proclame souverain, exception faite des questions concernant l’armée et la politique extérieure, et la social-démocratie finlandaise s’adressa « aux partis frères de Russie » pour avoir leur appui. Mais les menchéviks et les SR de Petrograd soutiennent le gouvernement provisoire de Kerenski lorsqu'il dissout le Séim le 18 juillet. Le chef d’État-major du Grand Quartier Général, le monarchiste Loukomsky, avertissait les finlandais qu'en cas d'insoumission, « leurs villes et, en première ligne, Helsingfors, seraient dévastées ». Des sentinelles russes gardèrent les portes closes du parlement de Helsingfors (Helsinki). La bourgeoisie finlandaise, elle, félicitait la Russie pour la dissolution de cette « diète rouge ».

Aux élections qui suivirent, les social-démocrates gagnèrent des voix (passant de 375 000 suffrages l’année précédente à 444 000) mais perdirent des sièges (tombant de 103 à 92), du fait de fraudes habiles et cyniques des partis bourgeois.

Mais pas plus que le prolétariat finlandais ne pouvait se résigner à cette défaite électorale, la bourgeoisie ne pouvait se contenter d’une « victoire » aussi précaire. Un dénouement extra-parlementaire devait s’imposer. La bourgeoisie l’envisageait depuis longtemps et était prête à la guerre civile.

Les ouvriers finlandais (14% de la population), entraînant les paysans pauvres (torpari), sont très influencés par le bolchévisme, et donc paradoxalement très liés aux soldats russes gagnés au bolchévisme stationnés chez eux. Les SR de Helsingfors, presque tous SR de gauche, exigeaient dès juillet « tout le pouvoir aux soviets ».

A tel point qu'en septembre, Kérenski tente de rappeler les troupes de Finlande afin de renforcer les possédants finlandais. Le congrès régional des soviets qui se tint à Helsingfors dans la première quinzaine de septembre déclara : « Si la démocratie finlandaise juge nécessaire de reprendre les séances du Séim, toutes tentatives pour s’opposer à cette mesure seront considérées par le congrès comme un acte contre-révolutionnaire. » C’était une offre directe d’assistance militaire. Mais la social-démocratie finlandaise, dans laquelle prédominaient les tendances conciliatrices, n’était pas prête à s’engager dans la voie de l’insurrection. Formée depuis vingt ans à l’école de la « puissante » social-démocratie allemande et en proie aux illusions réformistes, elle s'en effrayait.

En réaction à l'essor de la lutte de classe venant de Russie, les classes possédantes de Finlande se mettent à porter un discours anti-russe, et, alors qu'elles cherchaient jusqu'à présent la conciliation avec le gouvernement bourgeois de Pétrograd, elles mettent soudain en avant le droit à l'autodétermination, puis la revendication de l'indépendance.

1.3 Poussée ouvrière et populaire révolutionnaire

La révolution d’Octobre eut pour écho, en Finlande, la grande grève générale de la mi-novembre (14 novembre vieux style, 27 novembre nouveau style), suscitée par une disette grave qui n’atteignait que les classes pauvres et par la politique réactionnaire du sénat, enclin à placer à la tête d’un Directoire dictatorial le réactionnaire Swinhufwud. Le travail cessa partout. Les chemins de fer s’immobilisèrent. Les gardes rouges ouvrières, soutenues ça et là par des soldats russes, occupèrent les édifices publics. Des collisions sanglantes se produisirent un peu partout entre blancs et rouges.

Les députés discutaient. La bourgeoisie apeurée consentit à l’application de la loi des huit heures et de la nouvelle législation communale, ainsi qu’à la démocratisation du pouvoir exécutif qui passa du sénat au parlement. Et la grève générale, la victoire ouvrière se termina par la constitution d’un cabinet bourgeois, présidé par le réactionnaire Swinhufwud ! C’était l’avortement d’une révolution. De l’avis des révolutionnaires finlandais, la prise du pouvoir était à ce moment possible ; elle était même très facile ; l’appui des bolcheviks eût été décisif. Mais, comme l'écrivit plus tard Kuusinen, alors l’un des dirigeants de la social-démocratie finlandaise :

« Ne désirant pas risquer nos conquêtes démocratiques et espérant d’ailleurs franchir, grâce à d’habiles manœuvres parlementaires, ce tournant de l’Histoire, nous décidâmes d’éluder la révolution (…). Nous ne croyions pas à la révolution, nous ne fondions sur elle aucune espérance, nous n’y aspirions point. »

Or, la grève générale avait révélé aux prolétaires leur force, et à la bourgeoisie le péril. La bourgeoisie finlandaise comprit que, livrée à elle-même, elle était perdue. Swinhufwud sollicita l’intervention de la Suède. L’armement des blancs se poursuivit avec énergie dans le Nord, où ils constituèrent des stocks de vivres. Le gouvernement entretint habilement la disette dans les centres ouvriers auxquels il importait de ne pas donner des réserves de vivres. La proclamation de l’indépendance de la Finlande ne changea rien. La possibilité d’une intervention suédoise ou allemande alarmait de plus en plus les prolétaires. Le parlement vota, pour comble, par 97 voix contre 87, une motion contenant des allusions claires à la nécessité d’une dictature bourgeoise. Le problème du pouvoir se posa de nouveau, en termes plus graves qu’à la veille de la grève générale de novembre. Il apparut, cette fois, aux social-démocrates, que toutes les chances de le résoudre par les voies parlementaires étaient épuisées. Il fallait se battre.

Le drapeau rouge fut hissé sur la Maison ouvrière de Helsingfors dans la nuit du 14 janvier 1918 (ou 27 janvier). La ville tout de suite prise, le sénat et le gouvernement se réfugièrent à Vasa. Les rouges se rendirent maîtres en quelques jours, presque sans combat, des plus grandes villes, Abo, Vyborg, Tammerfors et de tout le sud du pays. Cette victoire trop pacifique était inquiétante. Les dirigeants social-démocrates (Manner, Sirola, Kuusinen, etc.) formèrent un gouvernement ouvrier, le Conseil des mandataires du peuple, placé sous le contrôle d’un grand Conseil ouvrier formé de 35 délégués (10 des syndicats, 10 du Parti social-démocrate, 10 des gardes rouges, 5 des organisations ouvrières d’Helsingfors).

Qu’allait-on faire ? « Marcher jour après jour vers la révolution socialiste », déclaraient les mandataires du peuple. Ils instituaient le contrôle ouvrier de la production, facilité par la forte centralisation des industries du bois, du papier, du textile ; ils réussissaient à enrayer le sabotage des banques. La vie publique et la production reprirent très vite un cours à peu près normal.

La dictature du prolétariat était-elle possible ? S’imposait-elle ? Les dirigeants du mouvement ne le pensaient pas, bien que l’industrie occupât 500 000 personnes environ sur une population de 3 millions. Prolétaires et journaliers agricoles formaient une masse d’un demi-million d’hommes. Les agriculteurs petits et moyens, en majorité dans les campagnes, pouvaient être conquis à la révolution ou neutralisés par elle. Par malheur, « jusqu’à la défaite, la plupart des dirigeants ne se rendirent pas nettement compte des buts de la révolution » (Kuusinen). Ils entendaient établir, sans expropriation des possédants ni Etat ouvrier, une démocratie parlementaire au sein de laquelle le prolétariat eût été la classe politiquement dirigeante.

Les principales mesures appliquées par le Conseil des mandataires du peuple furent la journée de huit heures, le paiement obligatoire des salaires des journées de grève révolutionnaire, l’émancipation des domestiques et valets de ferme (loués à l’année par les agriculteurs et soumis à un statut d’une extrême sévérité), l’abolition de la peine de mort (très rarement appliquée auparavant), l’exonération fiscale des pauvres (le minimum de revenu taxé fut désormais de 2400 marks dans les villes et de 1400 marks dans les campagnes au lieu de 800 et 400 marks, un impôt spécial frappa les revenus de plus de 20 000 marks), l’impôt sur les logements de plus d’une pièce ; la libération de la presse encore soumise à d’anciennes réglementations, le contrôle des usines par les ouvriers.

D’autres mesures s’imposèrent un peu plus tard au cours de la guerre civile, telles que les réquisitions du blé et des pommes de terre, la fermeture des journaux bourgeois, l'interdiction de l’exportation des valeurs, l’obligation générale du travail pour tous les adultes valides de 18 à 55 ans. Cette révolution ouvrière se poursuivit au nom d’une démocratie idéale dont la conception fut précisée dès la fin de février par un projet de constitution appelé à faire au printemps l’objet d’un référendum.

Une assemblée des représentants du peuple, élue tous les trois ans au suffrage universel direct et secret (vote des femmes, majorité électorale à vingt ans) au système de représentation proportionnelle, serait l’autorité suprême dans la « République populaire de Finlande ». Outre les libertés démocratiques usuelles, la constitution consacrerait l’inviolabilité des personnes, le droit de grève et de surveillance des entreprises par les grévistes (contre l’emploi des jaunes), la neutralité de la force armée dans les conflits du travail. Toute modification de la constitution devrait être soumise au référendum. Les minorités de l’Assemblée pourraient, à la condition de réunir le tiers des mandats, exercer jusqu’à la session ultérieure le droit de veto sur toute loi, excepté les lois fiscales. Toute loi instituant des impôts indirects ou des taxes douanières (ces lois frappent surtout les pauvres) devrait être votée à la majorité des deux tiers. L’importation des articles de première nécessité serait exemptée de droits. Le gouvernement serait autorisé à prendre en cas de guerre des mesures exceptionnelles contre « les ennemis de la constitution ». Le droit à l’insurrection serait reconnu au peuple au cas où la majorité de ses représentants attenterait à la constitution. Le peuple jouirait du droit d’initiative en matière législative : tout projet de loi présenté par 10 000 citoyens serait discuté d’urgence. Les fonctionnaires et les magistrats seraient élus pour cinq ans et rééligibles. Le cinquième des électeurs pourrait exiger en tout temps la réélection d’un élu. Le Conseil des mandataires du peuple, exerçant le pouvoir exécutif, serait élu pour trois ans par l’Assemblée qui lui désignerait en outre un président et un vice-président non rééligibles deux fois de suite et ne jouissant pas de droits particuliers. Le gouvernement serait surveillé par une « Commission du contrôle de l’administration et de l’application des lois ». Il suffirait du veto de deux membres de cette Commission pour suspendre l’application d’une nouvelle disposition légale. L’éligibilité des juges, soumis au contrôle du gouvernement, l’autonomie locale et la représentation des ouvriers dans toutes les administrations complétaient ces dispositions.

Contrairement à l’usage des démocraties bourgeoises, cette constitution eût réuni entre les mains de l’Assemblée des représentants du peuple les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire (dans une certaine mesure). Le gouvernement était à peu près réduit à des fonctions purement exécutives.

Un révolutionnaire finlandais a formulé sur ce projet le jugement suivant :

« Le plus haut degré de développement de la démocratie bourgeoise (degré irréalisable en pratique au sein de la société capitaliste) était atteint en théorie ; la démocratie bourgeoise ne peut, au-delà, que se transformer en dictature du prolétariat, si le prolétariat est vainqueur, de la bourgeoisie si le prolétariat est vaincu. »[2]

C’était un bien beau projet, passablement utopique, comme le reconnut plus tard Kuusinen :

« La faiblesse de la bourgeoisie nous laissait sous le charme de la démocratie et nous décidâmes de marcher vers le socialisme par l’action parlementaire et la démocratisation de la représentation nationale »

1.4 Contre-révolution et intervention impérialiste

La bourgeoisie faisait preuve d’un réalisme beaucoup plus grand. Elle mit promptement sur pied une petite armée blanche de 5000 hommes environ, dont le Schutzkorps, le 27e bataillon de chasseurs de l’armée allemande, une brigade de volontaires suédois et des volontaires recrutés dans la jeunesse bourgeoise et petite-bourgeoise. Un ancien général de l’armée russe, d’origine suédoise, Mannerheim, accepta le commandement de ces troupes et promit d’abord de « rétablir l’ordre en quinze jours ». Le butin de quelques agressions heureuses contre les garnisons russes du Nord, perpétrées avec la complicité du commandement de celles-ci, compléta l’armement des blancs.

Les gardes rouges ne comprenaient, au début des hostilités, que 1500 hommes environ, d’ailleurs mal armés. L’initiative appartint aux blancs qui, maîtres des cités du golfe de Botnie, Uleåborg, Vasa, Kuopio, et de la Finlande agraire (au Sud), formèrent un front continu du golfe de Botnie au lac Lagoda.

Il y avait des garnisons russes à Sveaborg, Vyborg, Tammerfors, ville située au cœur du pays. La majeure partie de la flotte de la Baltique se trouvait à Helsingfors. Des bolchéviks (Antonov-Ovseïenko, Dybenko, Smilga) avaient créé des cellules parmi ces troupes et ces équipages. La garnison russe de Tammerfors, commandée par un officier révolutionnaire, Svetchnikov, repoussa les premières attaques de Mannerheim. Protégées par les Russes, les gardes rouges finlandais purent s’armer et achever de s’organiser.

La paix de Brest-Litovsk (mars 1918) imposa sur ces entrefaites à la Russie des Soviets le retrait des troupes russes de Finlande ; il n’en resta qu’un millier de volontaires, incorporés aux gardes rouges et dont beaucoup ne demandaient au fond qu’à rentrer chez eux. Un socialiste finlandais, Ero Happolainen, et Svetchnikov dirigèrent les opérations. Une offensive générale des rouges, déclenchée au début de mars, échoua, mais les confirma dans la conviction de vaincre. Du 15 janvier au 1er avril, l’effort organisateur du gouvernement ouvrier aboutit à la formation d’une force de 60 000 hommes (dont 30 000 environ à l’arrière) et à de nombreux succès partiels au front.

Le chef du gouvernement blanc, Swinhufwud, obtint l’appui de Guillaume II. Une troupe de 20 000 Allemands commandée par von der Goltz débarqua à Hangoe, Helsingfors et Loviza, prenant les troupes rouges à revers. La prise de Helsingfors, après une âpre bataille de rues au cours de laquelle les Allemands et les blancs firent marcher devant eux des femmes et des enfants d’ouvriers (il en périt une centaine), fut suivie d’atroces représailles. L’artillerie bombarda la Maison ouvrière. Un journal suédois publia l’information suivante : « Quarante femmes rouges qui avaient, dit-on, des armes, ont été conduites sur la glace et fusillées sans jugement. »[3] On ramassa plus de trois cent morts dans les rues.

Au gouvernement ouvrier, la tendance modérée représentée par Väinö Tanner était si forte que l’on n’adopta des mesures de rigueur contre les blancs de l’intérieur que lorsqu’il fut trop tard. Les tribunaux condamnaient souvent les contre-révolutionnaires à l’amende ou à des peines bénignes d’emprisonnement. S’il y eut des exécutions sommaires, elles furent dues à l’initiative des gardes rouges.

L’irrésolution du gouvernement, les divergences de vues des chefs, leur refus de pousser la révolution plus avant, le caractère timoré des réformes agraires, l’impression du traité de Brest-Litovsk affaiblissaient les rouges. Le débarquement des Allemands produisit l’effet le plus démoralisant.

2 La terreur blanche

Mannerheim cerna Tammerfors où 10 000 rouges dirigés par quelques officiers russes résistèrent avec acharnement. La ville fut prise maison à maison après une bataille de rues de plusieurs jours. On y fusilla 200 Russes dont deux chefs de valeur, le colonel Boulatzel et le lieutenant Moukhanov. Plusieurs milliers d’assiégés parvinrent à fuir, 2000 environ succombèrent ou furent massacrés, 5000 furent faits prisonniers.

C’est à Tavastehus, entre Tammerfors et Helsingfors, que se livra la bataille décisive. Près de 25 000 rouges se concentraient vers ce point, refoulés du nord au sud par Mannerheim et du sud au nord par von der Goltz, la retraite vers l’est coupée. Ils emmenaient, malgré les ordres du commandement, leurs familles et, souvent, tout leur mince avoir ; c’était une migration de peuple plutôt qu’un mouvement d’armée. Ces masses, qui devenaient facilement des cohues, ne pouvaient guère manœuvrer. Les blancs les arrosèrent de schrapnells. Cernées, elles se battirent héroïquement deux jours avant de capituler. Quelques milliers d’hommes s’ouvrirent un chemin vers l’est. La capitulation fut suivie d’un massacre. Le massacre des blessés était de règle. Il resta 10 000 prisonniers que l’on interna à Rikhimiaki. Vyborg tomba le 12 mai. Quelques milliers de gardes rouges se réfugièrent en Russie.

Les vainqueurs massacraient les vaincus. On sait depuis l’Antiquité que les guerres de classes sont les plus effroyables. Il n’est pas de plus sanglantes, de plus atroces victoires que celles des classes réactionnaires. Depuis la saignée infligée à la Commune de Paris par la bourgeoisie française, le monde n’avait rien vu de comparable à l’horreur de ce qui se passa en Finlande.

Les anciens « activistes » finnois « devinrent fascistes et les pires ennemis de la révolution d'Octobre ».[4]

3 Bibliographie

3.1 Ecrits d'époque

3.2 Ecrits ultérieurs

  • Risto Alapuro, State and Revolution in Finland, University of California Press, 1988

3.3 Autres articles

3.4 Roman

  Les Gardes Rouges de Tampere de Vaino Linna

4 Notes

  1. Léon Trotsky, Ma vie, 15. Jugement, déportation, évasion, 1930
  2. Edouard Torniainen, La révolution ouvrière en Finlande
  3. Cité dans « La terreur blanche en Finlande » C. D. Kataia
  4. Léon Trotsky, Ma vie, 15. Jugement, déportation, évasion, 1930