Libéralisme

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Le libéralisme est un terme polysémique : au sens économique, il correspond à l'ensemble des doctrines qui prônent le « libre-échange », la diminution et l'abolition des règles commerciales et de l'intervention étatique, la recherche du profit comme moteur de l'économie (capitalisme) ; au sens politique, à une souplesse dans la dictature exercée sur le prolétariat par la classe dominante (démocratie capitaliste).

1 Libéralisme économique et libéralisme politique

De nombreux libéraux aiment présenter la démocratie et le libéralisme politique comme allant de pair avec le libéralisme économique. Mais il a toujours existé une certaine contradiction entre les deux facettes. En effet, les revendications populaires ont souvent paru incontrôlables et effrayantes pour les élites, et on peut relever l'existence de deux tendances politiques depuis les origines du libéralisme : d'un côté des réformateurs très modérés issus des élites, méfiants vis-à-vis des foules plébéiennes / prolétaires, de l'autre les mouvements collectifs de ces derniers.

Déjà chez Tocqueville, il y avait une tension entre liberté et démocratie.

Dans la Russie tsariste d'avant 1917, on distinguait souvent "les libéraux" (les bourgeois derrière le parti KD) et "les démocrates" (les SR et les SD).

Friedrich Hayek va jusqu'à opposer deux libéralismes, celui de Smith et Burke, à celui de Voltaire, Rousseau, ou Condorcet, qui sont pour lui les ancêtres du socialisme[1].

Ainsi un certain nombre de penseurs du libéralisme assument franchement de mettre en avant essentiellement la question de la propriété privée des moyens de production, et donc un primat du libéralisme économique. Ainsi Ludwig von Mises écrivait :

« Le programme du libéralisme devrait donc, résumé en un seul mot, se formuler ainsi : propriété, c'est-à-dire propriété privée des moyens de production (car la propriété privée des biens de consommation va de soi, et elle est admise même par les socialistes et les communistes). Toutes les autres exigences du libéralisme découlent de cette exigence fondamentale. »[2]

En cohérence avec cette position, von Mises considérait que le fascisme pouvait ponctuellement sauver le libéralisme économique :

« On ne peut nier que le fascisme et les mouvements similaires cherchant à mettre en place des dictatures sont remplis des meilleures intentions et que leur intervention a, pour l'instant, sauvé la civilisation européenne. Le mérite qui en revient au fascisme demeurera éternellement dans l'histoire. Mais bien que sa politique ait apporté provisoirement le salut, elle n'est pas de nature à nous assurer les succès futurs. Le fascisme était une solution d'urgence. Le considérer comme quelque chose de plus serait une erreur fatale. »

De même, Friedrich Hayek se dit contre les dictatures en général, mais a soutenu que celles-ci peuvent être un régime transitoire nécessaire, et qu'il préfèrait une "dictature libérale" à une "démocratie totalitaire" (ce qui signifie pour lui une démocratie ne garantissant pas la propriété privée capitaliste). C'est ce qui l'a conduit très concrètement, lui et les Chicago Boys (économistes néolibéraux de l'Ecole de Chicago) à soutenir activement la dictature de Pinochet au Chili (anti-socialiste et néolibérale).

Bien sûr, face au socialisme et plus encore face au communisme stalinisé, de nombreux idéologues et politiciens libéraux vont insister sur le lien entre les deux facettes du libéralisme. Ainsi le socialisme conduirait nécessairement à une position "anti-libérale" et donc anti-démocratique. Le monde libre occidental serait le garant de la démocratie, tandis que le communisme serait intrinsèquement source de totalitarisme. Mais étant donné que les masses ont une fâcheuse tendance à porter des revendications sinon anticapitalistes, du moins gênantes pour les profits, les théoriciens néolibéraux émettent de sérieuses réserves sur la démocratie.

Samuel Huntington en 1975 écrivait qu’il fallait “de la modération dans la démocratie. Le système politique a besoin “d’une certaine dose d’apathie et de non-engagement” de la part des gouvernés. “Les tensions susceptibles de prévaloir dans une société post-industrielle exigeront probablement un modèle de prise de décision gouvernementale plus autoritaire et plus efficace”.[3]

2 Notes

  1. Friedrich Hayek, The Principles of a Liberal Social Order, 1966
  2. Ludiwg Von Mises, Le Libéralisme, 1927
  3. Samuel Huntington, Postindustrial politics : How Benign will it be, 1974