Impérialisme russe

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Pour certains marxistes, la Russie est une puissance impérialiste. Ce point est toutefois controversé.

1 Russie d'avant 1917

Avant 1917, à peu près tous le monde considérait l'Empire russe comme une grande puissance. Au 19e siècle, la puissance de cette force féodale inquiétait tous les progressistes, y compris les socialistes comme Marx et Engels. De fait, le régime tsariste était intervenu en 1848 en Europe de l'Est pour mater les soulèvements démocratiques.

Par ailleurs au début du 20e siècle, l'Empire russe englobe toute une mosaïque de peuples ethniquement non russes. Les non-russes sont plus nombreux que les russes, mais sont durement opprimés. Cela donnait à la question nationale en Russie une importance particulière.

En 1914, contre le chauvinisme grand-russe qui se ravive à l'occasion de l'Union sacrée, Lénine rappelle la nécessité de lutter contre la "prison des peuples" : « Pour nous, représentants de la nation impérialiste de l’Extrême-Est européen et d’une bonne partie de l’Asie, il serait indécent d’oublier l’importance de la question nationale. »[1]

Bien sûr, la puissance d'un Empire comme la Russie ne reposait pas sur la vigueur de son économie, qui était au contraire en décrochage par rapport à l'occident. Même l'avantage de sa grande armée et de sa grande population était en train de se réduire rapidement à mesure que celle-ci était de plus en plus obsolète, comme l'a révélé la débacle russe dans la guerre de 1914-1918. La nature de la société russe d'avant 1917 est d'ailleurs complexe : les marxistes parlaient de pays semi-féodal / semi-capitaliste.

Karl Radek résumera quels étaient les deux principaux obstacles sur le chemin de la révolution prolétarienne au 19e siècle, en même temps que les changements en cours :

« Premièrement : Le capitalisme anglais, despote du marché mondial sans la destruction duquel toutes les révolutions européennes sont vouées à l'échec, car il incarne la force la plus puissante du capitalisme. Deuxièmement, toute victoire en Europe occidentale était menacée par une deuxième puissance réactionnaire en Orient. Cette puissance, c'était la Russie tsariste et féodale qui, bien qu'à cette époque, sous l'influence du développement capitaliste elle commençât à se désagréger et ne puisât plus sa force que dans la rivalité des puissances capitalistes, n'en avait pas moins à sa disposition des millions de paysans abêtis qu'elle eût pu envoyer en Europe pour réprimer un mouvement révolutionnaire. En Occident, toute révolution pouvait de ce fait être noyée dans le sang par les troupes du tsar. »[2]

Il est à noter que la réflexion sur l'impérialisme ne faisait que commencer au début du 20e siècle, d'abord parmi quelques économistes bourgeois ou social-démocrates, puis dans l'ouvrage de Lénine sur le « stade impérialiste », écrit en 1916.

En analysant les impérialismes occidentaux, Lénine considère que leur pouvoir est fondé sur le capital financier. Cela l'amenait nécessairement à reconnaître que le cas de la Russie (et du Japon) était particulier :

« Au Japon et, en Russie, le monopole de la force militaire, l'immensité du territoire ou des commodités particulières de spoliation des allogènes, de la Chine, etc., suppléent en partie, remplacent en partie le monopole du capital financier contemporain, moderne. »

Ou encore :

« En Russie, l'impérialisme capitaliste du type moderne s’est pleinement révélé dans la politique du tsarisme à l'égard de la Perse, de la Mandchourie, de la Mongolie; mais ce qui, d'une façon générale, prédomine en Russie, c'est l'impérialisme militaire et féodal. »[3]

Plus tard (1930), Trotski fera une analyse insistant davantage sur la dépendance de la Russie d'avant 1917 :

« La Russie payait ainsi le droit d'être l'alliée de pays avancés, d'importer des capitaux et d'en verser les intérêts, c'est-à-dire, en somme, le droit d'être une colonie privilégiée de ses alliées ; mais, en même temps, elle acquérait le droit d'opprimer et de spolier la Turquie, la Perse, la Galicie, et en général des pays plus faibles, plus arriérés qu'elle-même. L'impérialisme équivoque de la bourgeoisie russe avait, au fond, le caractère d'une agence au service de plus grandes puissances mondiales.

Le système des compradores (intermédiaires commerciaux) en Chine présente le type classique d'une bourgeoisie nationale constituée en agence entre le capital financier étranger et l'économie de son propre pays. Dans la hiérarchie mondiale des États, la Russie occupait avant la guerre une place beaucoup plus élevée que celle de la Chine. Quelle place la Russie aurait-elle occupée après la guerre si la révolution n'était pas venue ? C'est une autre question. Mais l'autocratie russe, d'une part, la bourgeoisie russe, d'autre part, avaient des caractères de plus en plus marqués de compradorisme : l'une et l'autre vivaient et subsistaient de leur liaison avec l'impérialisme étranger, le servaient et ne pouvaient tenir sans s'appuyer sur lui. »[4]

Néanmoins, jusqu'en 1917, les bolchéviks traitaient dans leurs prises de position la Russie comme les autres puissances impérialistes. Lénine mettaient sur le même plan les « nations dominatrices (grands-russes, anglo-américains, allemands, français, italiens, japonais, etc.) », parlant aussi bien des « monarchies impérialistes » que des « bourgeoisies impérialistes ».[5] Ceci est cohérent dans la stratégie de Lénine avec sa position de « défaitisme révolutionnaire ».

Or, pour certains trotskistes contemporains (FLTI...), la Russie d'avant 1917 était une semi-colonie.

2 Russie soviétique

 Les débats sur la Russie entre 1917 et 1991 sont encore différents, puisque pour la plupart des marxistes l'URSS était un Etat ouvrier auquel on ne pourrait pas appliquer la catégorie « d'impérialisme ».

Du vivant de Trotski, la nature impérialiste ou non de l'URSS a été beaucoup débattue, le plus souvent en lien avec le débat sur la nature de l'URSS (capitalisme_d'Etat ? collectivisme bureaucratique ?...). L'évolution de l'URSS après la Seconde guerre mondiale n'a fait que relancer le débat :

3 Russie contemporaine

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3.1 Caractéristiques générales

Suite à l'éclatement de l'URSS, la Russie connaît un véritable effondrement économique dans les années 1990. De nombreuses entreprises géantes sont démantelées et privatisées. Dans les faits elles passent sous le contrôle d'anciens bureaucrates qui deviennent de grands patrons (oligarques). Mais étant donné que de larges pans de l'ancien appareil productifs ne sont pas adaptés à la recherche de rentabilité dans le cadre du marché, seuls certaines entreprises ou branches d'entreprises sont conservées et de très nombreux secteurs sont abandonnées. Le chômage explose et le choc social est énorme. En 1998, la crise est profonde et la lutte de classe notable.

En conséquence, la Russie voit son influence politique s'effondrer sur la scène internationale. L'ancien bloc de l'Est est en proie à des forces centrifuges, de nombreux pays se tournent économiquement et diplomatiquement vers l’UE et les USA, des régimes pro-russes basculent lors de « révolutions de couleur »… Le pays essaie néanmoins de conserver sa proche périphérie (guerres en Tchétchénie...).

Poutine, arrivé au pouvoir en 1999, instaure un régime bonapartiste pour redresser le pays. Il a nationalisé certaines industries stratégiques comme l'énergie (en particulier le gaz, qui alimente une bonne partie de l'Europe). La centralisation du capital et le lien avec l'Etat est plus élevée que dans la plupart des autres puissances capitalistes. Poutine a modernisé l'armée russe et exacerbé le nationalisme russe. Selon de nombreux analystes, l'armée russe est la deuxième la plus puissante du monde après l'armée des Etats-Unis.

Depuis les années 2000, la Russie a retrouvé une croissance assez forte, même si elle est surtout centrée sur les matières premières. Elle a accumulé de fortes réserves de devises.

Elle a aussi regagné une influence politique de premier plan, surtout dans les années 2010. Cela s'est notamment illustré dans le bras de fer avec les occidentaux autour de l'Ukraine et l'annexion de la Crimée, à laquelle les occidentaux n'ont pas eu le rapport de force pour répondre. Puis avec le soutien à Bachar al Assad malgré la volonté des occidentaux.

3.2 Différentes positions

  • La Revolutionary Communist International Tendency (RCIT) a élaboré une analyse concluant sur le fait que la Russie est devenue dans les années 2000 une puissance impérialiste.[6][7]
  • Les courants staliniens, mais aussi d'autres courants "socialisants" (bolivariens...) tendent à s'aligner sur la Russie et la considérer comme progressiste, voire anti-impérialiste
  • Pour certains courants trotskistes (LIT, FTQI, CLQI[8]...), la Russie est une semi-colonie.
  • Au sein de Quatrième internationale (ex Secrétariat unifié), plusieurs théorisent que la Russie est devenue une puissance impérialiste.[9]

4 Notes et sources