Expropriations (braquages)

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Le lieu du célèbre braquage de la banque de Tiflis

Les « expropriations » étaient le nom donné à certaines activités de braquages de banques et autres institutions menées par les révolutionnaires russes pour se financer, principalement par des militants du Parti ouvrier social-démocrate russe (marxiste), mais aussi par des Socialistes-révolutionnaires et des anarchistes.

1 Historique

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Au sein du POSDR (1903), ce sont surtout des bolchéviks qui pratiquent les expropriations. Le financement du parti fut toujours difficile, mais encore plus après le reflux contre-révolutionnaire qui suit 1905. Surtout que les intellectuels furent les premiers à quitter le parti.

Ce fut ce qui décida les bolchéviks, et Lénine le premier, à lancer des braquages de banques et autres institutions. Ils les appelaient les « expropriations », ou « exés ».[1]

Par exemple, un groupe de 15 bolchéviks de Lettonie, dirigés par Nikolaï Burenine, a organisé un braquage de la banque d'Etat de l'Empire russe de Helsinki le 26 février 1906.[2]

Ou encore le 20 septembre (a.s) 1906, Staline dirige un groupe de 25 bolchéviks qui prennent d'assaut un bateau convoyant des fonds[3]. Staline proclame à l'équipage :

« Nous sommes des révolutionnaires, pas des criminels. Nous avons besoin d'argent pour la Révolution et nous ne prendrons que des fonds du Trésor. Obéissez à mes ordres et il n'y aura pas de sang. Mais si vous songez à résister, nous vous tuons tous et nous faisons sauter le navire. »

L'opération fut un succès (16 000 roubles volées), et Staline donna 10 roubles à chaque marin.

Lénine soutenait activement cette politique. Il avait chargé Staline de former un groupe d'expropriateurs qui ne soit pas affilié directement aux bolchéviks, en lui demandant de mettre à la tête de ce groupe quelqu'un « qui préfèrerait mourrir plutôt que parler en cas d'arrestation ». Staline choisit un militant géorgien, Simon Ter-Pétrossian, qui sera connu sous le pseudonyme de Kamo.

Le groupe de Kamo comprenait environ 10 personnes. Il recrutait notamment des jeunes géorgiennes qui utilisaient la séduction pour obtenir des informations sur les transferts de fonds des Banques d'Etat.

A l'automne 1906, Maxim Litvinov est envoyé dans le Caucase par Krassine pour travailler avec Kamo et augmenter la collecte de fonds. Litvinov et Kamo parviennent à obtenir des munitions à Varna, en Bulgarie, et à les introduire en contrebande à l'aide d'un bateau nommé Zara. Kamo avait placé une bombe sur le bateau et tenait prêt le détonateur dans sa cabine, pour s'assurer qu'il ne puisse pas tomber dans les mains de la police russe.

Le Zara se retrouva dans une tempête en quittant Varna. De l'eau se mit à inonder le bateau et les moteurs furent noyés. Kamo voulut faire exploser la bombe, mais elle n'explosa pas... Après 20 heures d'isolement, l'équipage étant à moitié mort de froid, un bateau de pêche les trouve, juste avant que le Zara ne coule. L'équipage parvient à regagner la Russie séparément, mais la plupart se font arrêter (mais pas Kamo).

Lors du 4e congrès du POSDR (Stockholm), une majorité de 64 voix contre 4, avec 20 abstentions, soutint une résolution menchevique interdisant les « exés ». Cela signifiait que des délégués bolcheviks avaient voté avec les mencheviks. Dans son rapport sur le congrès de Stockholm, Lénine évita toute mention de la résolution sur les actions armées, au motif qu’il n’était pas présent lors de la discussion. « De plus, il ne s’agit pas, à l’évidence, d’une question de principe ».

« Il est très peu probable que l’absence de Lénine ait été accidentelle ; il ne voulait tout simplement pas avoir les mains liées. »[1]

Trotski, bien que nettement plus à gauche que les menchéviks, critiquait sévèrement les expropriations :

« Lorsque la révolution fut brisée, les expropriations à main armée et les attentats des terroristes devenaient inévitablement une cause de désorganisation pour le parti le plus révolutionnaire. Le congrès de Londres, par les voix des menchéviks, des Polonais et d'une partie des bolcheviks, avait interdit les expropriations. Mais elles continuèrent après le congrès de Londres, nuisant au parti. »[4]

Lors du 5e congrès (Londres, mai-juin 1907), une résolution condamnant le recours aux expropriations est soumise au vote par les menchéviks. Elle est votée à 65%, malgré la majorité détenue par les bolchéviks, car une partie d'entre eux votent pour. Il y eut seulement 6% de votes contre, les autres s’abstenant ou ne prenant pas part au vote.

Lorsque des délégués crièrent de la salle : « Et Lénine ? Et Lénine ? », il profita de sa place à la tribune pour éviter d’enregistrer son vote. « Enigmatique, il se contentait de rire ».[5]

Sur ce point, Staline fit par la suite un compte rendu peu convainquant :

Sur les résolutions mencheviques, seulement celle concernant les actions de partisans a été adoptée, et ce de façon tout à fait accidentelle : sur ce point les bolcheviks n’ont pas accepté la confrontation, ou plutôt, ils n’ont pas souhaité la mener jusqu’au bout, essentiellement par désir de « donner aux camarades mencheviks au moins une occasion de se réjouir ».[6]

Trotski fit un compte rendu public du congrès dans le Vorwärts, dans lequel il prônait la réunification du parti en dénonçant les deux extrêmes, l'aile droite des menchéviks, et l'aile gauchiste, en particulier les bolchéviks faisant des expropriations. Lénine en fut extrêmement irrité.[7] Martov également condamnait publiquement les expropriations.[1]

Ironiquement, une des « expropriations » les plus connues eut lieu quelques semaines après le congrès à Tiflis, par Staline et Kamo. Cette action rapporta 341.000 roubles, qui furent dûment transférés dans la caisse des bolcheviks à l’étranger. Mais comme le butin consistait en billets de banque de haute dénomination, il n’était pas facile de les échanger dans des banques étrangères, qui avaient été alertées. Plusieurs bolcheviks importants, parmi lesquels le futur commissaire du peuple aux affaires étrangères Litvinov, furent arrêtés en Europe occidentale lorsqu’ils essayèrent de changer l’argent.

La polémique fait rage autour de l'activité des boiéviki, ces groupes armés qui se livrent au terrorisme.[8]

Entre mai et juillet 1910, l'ouvrier anarchiste Piotr Archinov prend part à différentes « expropriations »[9].

En 1910, Trotski écrit un article dans le Vorwaerts, journal du SPD, contre l'aile droitière et liquidatrice des menchéviks et contre l'aile gauchiste des bolchéviks, surtout contre ceux qui participent aux “expropriations”. Ce dernier point fait scandale, vu comme une déloyauté envers le parti. Trotski se souvient que dans le contexte du 8e congrès de l'Internationale : « Lénine tenta d'obtenir de la délégation russe un blâme pour mon article. Ce fut, de toute notre vie, le moment où le conflit fut le plus aigu entre nous. »[4]

2 Notes