Bourgeoisie comprador

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La bourgeoisie comprador désigne la classe bourgeoise qui, dans les pays dominés, tire sa richesse de sa position d'intermédiaire dans le commerce avec les impérialismes étrangers, par opposition aux bourgeois ayants des intérêts dans le développement de l'économie nationale.

1 Origine du terme

Le terme "comprador" signifie "acheteur" en portugais. Le mot comprador désignait à l'époque coloniale un autochtone, fondé de pouvoir d'une firme étrangère, qui servait d'intermédiaire dans des opérations financières et marchandes entre les Européens et les autochtones en Asie du Sud-Est, notamment à partir des comptoirs portuguais comme Macao et Guangzhou (Canton) en Chine. Les compradores étaient engagés pour vendre aux locaux les marchandises des occidentaux.

Ces compradores étaient souvent riches. Robert Hotung, un célèbre compradore de la fin du 19e siècle au service du conglomérat commercial britannique Jardine, Matheson & Co. était l'homme le plus riche de Hong Kong à l'âge de 35 ans. Sous la première république de Chine il y eut plusieurs compradores notables, comme Zhang Jiahao de Shanghai et Tong king-chanter du Guangdong.

2 Exemples d'analyses

L'importance du clivage entre la bourgeoisie comprador et la bourgeoisie nationale peut éclairer la compréhension de certains événements ou mouvements politiques.

Le 4e congrès de l’Internationale communiste, qui élabore la tactique du « front unique anti-impérialiste », constate que l’impérialisme « transforme dans tous les pays arriérés la couche supérieure féodale (et en partie semi-féodale, semi-bourgeoise) de la société indigène en instrument de sa domination. […] Ainsi les classes dirigeantes des pays coloniaux et semi-coloniaux n'ont-elles ni la capacité ni le désir de diriger la lutte contre l'impérialisme, à mesure que cette lutte se transforme en un mouvement révolutionnaire de masses. »[1]

Le terme a en premier lieu été utilisé par les marxistes pour décrire la bourgeoisie portuaire d'Amérique Latine, directement liée aux capitaux étrangers.

Il a également été très utilisé pour la Chine. On le trouve par exemple dans un article de Mao de 1926.[2]

Trotsky semblait considérer que la bourgeoisie russe d'avant 1917 tendait à être de plus en plus une bourgeoisie compradore, à l'image de celle de la Chine :

« Le système des compradores (intermédiaires commerciaux) en Chine présente le type classique d'une bourgeoisie nationale constituée en agence entre le capital financier étranger et l'économie de son propre pays. Dans la hiérarchie mondiale des États, la Russie occupait avant la guerre une place beaucoup plus élevée que celle de la Chine. Quelle place la Russie aurait-elle occupée après la guerre si la révolution n'était pas venue ? C'est une autre question. Mais l'autocratie russe, d'une part, la bourgeoisie russe, d'autre part, avaient des caractères de plus en plus marqués de compradorisme : l'une et l'autre vivaient et subsistaient de leur liaison avec l'impérialisme étranger, le servaient et ne pouvaient tenir sans s'appuyer sur lui. Il est vrai qu'à la fin des fins elles ne purent résister, même soutenues par lui. La bourgeoisie russe à demi comprador de la finance étrangère avait des intérêts impérialistes mondiaux au même titre qu'un agent rétribué par un pourcentage est intéressé aux affaires de son patron. »[3]

Le marxiste égyptien Samir Amin a étudié le rôle des compradores dans l'économie contemporaine dans un ouvrage de 2011[4]. L'économiste indien Ashok Mitra, a accusé les propriétaires et gestionnaires d'entreprises rattachées à l'industrie indienne du logiciel d'être compradore (cette analyse a conduit certains à utiliser l'expression de «dot.compradors»).

De nombreux mouvements nationaux / anti-impérialistes ont voulu s'appuyer sur une alliance des classes populaires et de la bourgeoisie nationale, souvent en brandissant l'étendard du socialisme ou du communisme.

  • le maoïsme
  • le nassérisme[5] ou ce que l'on a appelé le "socialisme arabe" en général
  • le chavisme ou le "socialisme bolivarien" en général

3 Notes  et sources

  1. Internationale communiste, 4e congrès, Thèses générales sur la question d’Orient, 1922
  2. Mao Zedung, Analyse des classes dans la société chinoise', 1926'
  3. Trotsky, Histoire de la révolution russe, La Russie tsariste et la guerre, 1930
  4. Samir Amin, Maldevelopment: Anatomy of a Global Failure, 2011
  5. “Arab Socialism” and the Nasserite National Movement, A. Sadi, 1963