Bela Kun

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Bela Kun, né Béla Kohn le 20 février 1886 à Szilágycseh et mort le 29 août 1938 à Moscou est un journaliste hongrois, fondateur du Parti communiste de ce pays et dirige la révolution de 1919. Il représente ensuite l'Internationale Communiste en Allemagne (1921) où il multiplie les erreurs. Devient malgré tout un dignitaire de la Komintern. Arrêté en 1932, il est fusillé en 1937 lors des Grandes Purges staliniennes, accusé de trotskisme.

1 Biographie

1.1 1886-1918 : de la Transylvanie à la rencontre avec Lénine

Béla Kun, né Béla Kohn, est issu d'une famille social-démocrate de Szilágycseh en Transylvanie hongroise (aujourd'hui Cehu Silvaniei en Roumanie). Son père, notaire, est juif et sa mère est calviniste, mais aucun des deux n'est pratiquant. Béla Kohn magyarisa son nom en Kun en 1904. Après avoir brièvement commencé des études de droit à l'Université de Kolozsvár, il entre assez jeune en politique, d'abord en Transylvanie puis à Budapest. Il est mobilisé en 1914 et part se battre sur le front russe. Fait prisonnier en 1916, il est interné dans un camp de prisonniers. Là, avec d'autres hongrois comme Tibor Szamuely, il découvre le bolchevisme, les textes de Karl Marx et les révolutionnaires qu'il décide finalement de rejoindre.

En Russie, il rencontre Lénine. Ce dernier le juge intelligent, énergique et doté d'un grand charisme. Les Bolcheviques considèrent que Kun est apte à transposer le modèle communiste en Hongrie. Béla Kun suit alors des cours en tactique révolutionnaire ainsi qu'en propagande. En 1918 et avec la défaite des empires centraux, l'empire austro-hongrois vole en éclats. Lénine pense alors qu'il est temps pour Béla Kun de repartir au pays afin d'y mettre en place une mouvance révolutionnaire. Kun et les autres sympathisants communistes hongrois se joignent à d'autres groupes politiques pour fonder, au mois de novembre 1918, le Parti des communistes de Hongrie.

1.2 1919 : chef de la République des Conseils

À la suite de l'éclatement de l'Empire austro-hongrois, et de l'indépendance floue de la République démocratique hongroise - le président Mihály Károlyi refusant les conditions de la Triple-Entente - les communistes hongrois développent leur propagande et s'allient aux sociaux-démocrates. Le 21 mars 1919, au lendemain de la démission de Károlyi, communistes et sociaux-démocrates proclament la République des conseils de Hongrie (21 mars - 1er août), régime inspiré très nettement de l’expérience des conseils ouvriers en Russie (1905, puis 1917-1918) et en Allemagne (1918-1919). Si Sándor Garbai est le chef officiel du gouvernement, Béla Kun, qui occupe le poste de commissaire aux affaires étrangères, est dans les faits le principal dirigeant du régime ; Tibor Szamuely occupe les fonctions de commissaire aux affaires militaires et tient également un rôle prépondérant.

Au début, Béla Kun bénéficie d'un soutien relatif d'une partie de l'opinion, y compris dans la bourgeoisie et l'armée, parce qu'il cherche à récupérer des territoires hongrois aux dépens des voisins tchèques et roumains, dont sa région d'origine, la Transylvanie.

Mais son gouvernement des soviets applique de façon sectaire et sanglante un régime de type bolchévique, qui fait ressortir l'absence de soutien populaire à l'époque pour une expérience communiste en Hongrie : collectivisation des terres et des entreprises, internement et exécution sommaire d'opposants, politique de terreur rouge. Il fait interdire tous les partis d'opposition, y compris la franc-maçonnerie.

L'invasion franco-serbe et roumaine, jointe au soulèvement nationaliste de droite mené par l'amiral Miklós Horthy, balaie la République des Conseils qui aura duré 133 jours. La Terreur blanche menée par l'Armée nationale de Horthy, réactionnaire et antisémite,  fera dix fois plus de victimes que la terreur rouge.[1]

Dans les dernières semaines, chaotiques, du régime communiste, Kun manque d'être évincé par un putsch conduit par les éléments communistes les plus radicaux, peut-être menés par Tibor Szamuely. Il doit ensuite fuir la Hongrie, et se réfugie finalement en Russie. Dès son arrivée en Russie soviétique, il devient commissaire politique au sein de l'Armée rouge et participe à la guerre civile russe.

Après la victoire des rouges en Crimée, il ordonne notamment l'exécution d'officiers blancs de l'armée de Piotr Nikolaïevitch Wrangel, alors que ceux-ci s'étaient rendus[2]. Établi en Union soviétique, il reste un temps influent au sein de la mouvance communiste et est un dirigeant-clé de la IIIe Internationale. Lénine se méfie cependant de son caractère brutal et impulsif : début 1921, lui et Mátyás Rákosi sont envoyés en Allemagne par Grigori Zinoviev et Karl Radek pour pousser le Parti communiste d'Allemagne à se soulever contre le gouvernement afin de « forcer le cours de la révolution ». L'« action de mars » menée par les communistes allemands sous l'impulsion de Béla Kun est un échec total.

Au congrès du Komintern, en juin de la même année, Lénine condamne la stratégie « gauchiste » menée en Allemagne[3]. Il tourne en dérision ce qu'il appelle en français « les bêtises de Béla Kun » (Victor Serge[4]). Victor Méric témoigne aussi : « Me voilà loin de Bela Kun et de ses «kuneries», comme disait irrespectueusement Lénine. »[5]

1.3 1937-1938 : arrestation et exécution lors des Grandes purges staliniennes

Au cours des Grandes Purges staliniennes, accusé de trotskisme, il est arrêté en 1937. Il est exécuté au Goulag le 29 août 1938 selon les révélations du gouvernement soviétique en février 1989. Béla Kun avait été réhabilité politiquement en 1956 dans le cadre de la déstalinisation.

2 Notes et sources

Un article critique de Lénine : Le communisme, 12 juin 1920

  1. Robert O. Paxton, Le fascisme en action, Seuil, 2004, p. 49
  2. Boris Souvarine, Staline, aperçu historique du bolchévisme, rééd Gérard Lebovici, 1985, p. 222
  3. Jacques Droz, Le Socialisme en Allemagne, in Histoire générale du socialisme, tome 3 : de 1918 à 1945, Presses universitaires de France, 1977, pages 220-221
  4. Victor Serge, Mémoires d'un révolutionnaire : 1901-1941 - Chapitre 4
  5. Victor Méric, Coulisses et tréteaux. À travers la jungle politique et littéraire, 2e série, 1931, 192 p., « Une rencontre avec Bela Kun »