Différences entre les versions de « Sous-consommation »

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[http://tintinrevolution.free.fr/fr/mytheconsommation.htm Le mythe de la relance par la consommation], Avanti, Mars-avril 2007
  
 
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Version du 10 août 2011 à 18:31

La sous-consommation est l'autre façon de présenter la surproduction, qui est une des manifestations des crises du capitalisme.

Les théories de la sous-consommation ("sous-consommationnistes") sont des théories d'inspiration keynésienne prétendant expliquer les causes des crises par la sous-consommation des travailleurs.

1 Sous-consommation comme envers de la surproduction

Lorsqu'éclate une crise économique du mode de production capitaliste, cela se manifeste d'abord par une surproduction générale (non limitée à quelques secteurs particuliers). Il est important de relever que cette surproduction est toute relative aux rapports sociaux capitalistes : il n'y a pas trop de marchandises par rapport aux besoins en général, mais trop par rapport aux besoins solvables. Autrement dit les capitalistes n'arrivent pas suffisamment à vendre leurs marchandises de façon rentable. Le régime d'accumulation du capital est brisé, la plus-value n'arrivant plus à se réaliser dans la sphère de l'échange.

Il est théoriquement vrai de considérer que cette surproduction relative équivaut à une sous-consommation relative. Néanmoins, le fait de parler de surproduction met l'accent sur une particularité essentielle du capitalisme : pour la première fois les crises ne se manifestent plus par des pénuries, mais par l'incapacité à produire en fonction des besoins sociaux.

2 Théories de la sous-consommation

En revanche, ce phénomène de surproduction/sous-consommation ne fournit pas en soi d'explication de la crise.

2.1 Une tautologie

Puisque crise économique est synonyme de crise de surproduction, poser la surproduction comme cause de la crise revient à tourner en rond. Cela n'explique pas pourquoi la loi de l'offre et de la demande, qui suffit en tant normal à adapter la production à l'accumulation bourgeoise, n'empêche pas le retour périodique de telles crises de surproduction.

« C'est pure tautologie que de dire : les crises proviennent de ce que la consommation solvable ou les consommateurs capables de payer font défaut. Le système capitaliste ne connaît d'autres modes de consommation que payants, à l'exception de ceux de l'indigent ou du « filou ». Dire que des marchandises sont invendables ne signifie rien d'autre que : il ne s'est pas trouvé pour elles d'acheteurs capables de payer, donc de consommateurs (que les marchandises soient achetées en dernière analyse pour la consommation productive ou individuelle).»[1]

2.2 Une erreur théorique

Les théories de la sous-consommation soutiennent généralement qu'une hausse des salaires permettrait une relance du capitalisme. Leur idée intuitive est simple : plus de consommation, plus de débouchés, donc plus de profits, plus d'investissements et plus de croissance. Or c'est oublier qu'une hausse de salaire représente directement une baisse du taux de profit des bourgeois. La baisse des salaires est au contraire un moyen pour les capitalistes de poursuivre leur accumulation malgré l'alourdissement en capital (hausse de sa "composition organique"). Empiriquement, Marx constatait déjà que le déclenchement des crises était souvent lié à une hausse des salaires !

« Mais si, pour donner une apparence de justification plus profonde à cette tautologie, on dit que la classe ouvrière reçoit une trop faible part de son propre produit et que cet inconvénient serait pallié dès qu'elle en recevrait une plus grande part, dès que s'accroîtrait en conséquence son salaire, il suffit de remarquer que les crises sont chaque fois préparées justement par une période de hausse générale des salaires, où la classe ouvrière obtient effectivement une plus grande part de la fraction du produit annuel destinée à la consommation. Du point de vue de ces chevaliers, qui rompent des lances en faveur du « simple » bon sens, cette période devrait au contraire éloigner la crise. Il semble donc que la production capitaliste implique des conditions qui n'ont rien à voir avec la bonne ou la mauvaise volonté, qui ne tolèrent cette prospérité relative de la classe ouvrière que passagèrement et toujours seulement comme signe annonciateur d'une crise. »

Le keynésianisme a connu son heure de gloire dans l'Après-guerre, époque où il était à la fois rendu possible par la forte rentabilité des entreprises, et rendu nécessaire par la menace ouvrière. De 1973 à 1983, les politiques économiques, y compris celles des partis social-démocrates, ont brusquement basculé vers le néolibéralisme, remisant les relances keynésiennes au placard. Dans les dernières décennies, parmi le mouvement antilibéral naissant, beaucoup présentent cela comme une politique contingente qui aurait été une "erreur", sous-entendant qu'il suffirait de revenir à la relance keynésienne pour revenir aux Trente glorieuses, voire de tendre vers le socialisme.[2]

2.3 Une illusion politique

Bien que ce ne soit pas automatique, de telles théories sont souvent liées à des illusions réformistes. En effet, penser que la hausse des salaires permettrait une solution "gagnant-gagnant" pour le travail et le capital permet de se dispenser de tout discours anticapitaliste. Sans surprise, on retrouve très souvent, et depuis longtemps, l'antienne keynésienne dans la bouche des grands syndicats[3] qui souhaitent certes paraître plus crédibles aux yeux de leur base, mais veulent tout sauf des mobilisations révolution.

Les partis de la gauche bourgeoise et a fortiori les partis ouvriers bourgeois reprennent eux aussi très souvent ces discours, même si, dans le cas des partis au pouvoir, ils se gardent bien d'appliquer une politique si contraire aux intérêts actuels de la bourgeoisie.

Seuls les anticapitalistes sont des antilibéraux conséquents, il est important que les marxistes mettent en avant une analyse des crises basée sur la tendance à la baisse du taux de profit. Cela permet à la fois de mettre à nu théoriquement les contradictions fondamentales du système, de ne pas mener le mouvement des travailleurs dans une impasse, et de justifier un programme transitoire.

3 Un thème pour le prolétariat, pas pour la bourgeoisie!

Parler de sous-consommation renvoie implicitement à un autre problème qui est celui de la sous-consommation absolue des exploités, qui est comme le rappelait Engels, une question sociale qui ne date pas d'hier :

« La sous-consommation des masses est une condition nécessaire de toutes les formes de société reposant sur l'exploitation, donc aussi de la société capitaliste; mais seule la forme capitaliste de la production aboutit à des crises. La sous-consommation est donc aussi une condition préalable des crises et elle y joue un rôle reconnu depuis longtemps; mais elle ne nous explique pas plus les causes de l'existence actuelle des crises que celles de leur absence dans le passé. »[4]

C'est du point de vue des intérêts des prolétaires que nous devons aborder ce thème. Nous devons revendiquer une augmentation des salaires, non pas parce que c'est "bon pour l'économie" (sous-entendu "capitaliste"), non pas parce que c'est "possible" (sous-entendu "sous le capitalisme"), mais parce que c'est l'intérêt immédiat de tous ceux qui n'arrivent pas à boucler leurs fins de mois, et parce que c'est un mot d'ordre unificateur de notre classe. Dans la situation de crise actuelle, l'augmentation des salaires est un mot d'ordre que nous devons utiliser dans un programme transitoire.

4 Notes et sources

Peut-on sortir de la crise en augmentant les salaires ?, Revue Que faire ?, Août-septembre 2010

Le mythe de la relance par la consommation, Avanti, Mars-avril 2007

  1. Karl Marx, Le Capital, Livre II
  2. Exemples : [1][2]
  3. CGT : [3][4][5] | FSU : [6][7] | FO : [8] | La CFDT n'en parle pas vu qu'elle n'est même pas prête à se battre pour l'augmentation des salaires...
  4. Friedrich Engels, L'Anti-Dühring, 1847