Révolution socialiste

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Une révolution socialiste est une révolution menée dans le but de renverser le mode de production capitaliste et l'État bourgeois, pour mettre en place le socialisme. On parle aussi parfois de révolution prolétarienne par référence à la classe révolutionnaire.

Pour le socialisme scientifique, elle ne peut être accomplie que par l'auto-organisation des travailleurs combinée à la ligne politique d'un parti ouvrier révolutionnaire, et doit impérativement se généraliser au monde entier pour être définitivement victorieuse.

1 Conditions de la révolution socialiste

1.1 Conditions objectives

Contrairement à une vision idéaliste, pour le marxisme, le socialisme n'est pas une utopie qui pourrait advenir parce que suffisamment d'hommes se mettent à y rêver, mais parce que de profonds facteurs matériels le rendent non seulement possible, mais nécessaire au progrès social. Fondamentalement, l'évolution historique des modes de production nous a conduit au capitalisme, qui est lui-même traversé de contradictions qu'il est incapable de résoudre. Le capitalisme a amené les forces productives a un niveau sans précédent, ce qui place l'abondance et la prospérité à portée de mains, mais il prive la masse des travailleurs qu'il emploie de tout choix sur la finalité de la production et donc sur les décisions politiques essentielles. Le capitalisme détruit toujours plus les anciens rapports de production et tend à réduire la société à deux classes : le prolétariat et la bourgeoisie. Le premier, composé de le masse de ceux qui n'ont que leur force de travail à vendre, est concentré sur des lieux de travail, avec des intérêts communs face à la minorité exploiteuse. Tout ceci forme les conditions objectives à une révolution sociale en vue de ce renverser ce système dépassé.

On peut a priori décliner ces conditions objectives en deux axes plus précis.

Premièrement, un niveau "absolu" de développement des forces productives, correspondant à l'existance d'une classe ouvrière et de moyens de production "suffisants". L'interprétation de ce point soulève cependant de nombreux débats. La Deuxième internationale accordait beaucoup d'importance à ce facteur, au point de considérer la révolution impossible dans un pays comme la Russie. Il aurait fallu selon son schéma qu'il y ait d'abord une révolution bourgeoise et une longue période de développement capitaliste. Les bolchéviks ont rompu pratiquement avec ce schéma, et Trotski a théorisé la révolution permanente en réponse. Cependant l'ensemble des bolchéviks considéraient comme nécessaire que la révolution s'étende à d'autres pays, et surtout les pays industrialisés. Ils estimaient que le niveau des forces productives en Russie n'était pas suffisant pour que la révolution perdure, du moins jusqu'au tournant stalinien du "socialisme dans un seul pays". Cette vision est cependant critiquée, par exemple par Mansoor Hekmat[1].

Deuxièmement, ce sont souvent les crises économiques qui ouvrent potentiellement des périodes révolutionnaires qui peuvent menacer le capitalisme. Ainsi Marx écrivait :

« Lors d’une prospérité générale, au cours de laquelle les forces productives de la société bourgeoise se développent avec toute la luxuriance possible dans les rapports sociaux bourgeois, il ne peut être question de véritable révolution. Celle-ci n’est possible qu’aux périodes où deux facteurs, les forces productives modernes et les formes bourgeoises de production, entrent en conflit les unes avec les autres… Une nouvelle révolution ne sera possible qu’à la suite d’une nouvelle crise : l’une est aussi certaine que l’autre. »[2]

Mais sans organisation politique révolutionnaire de la classe ouvrière, absolument rien ne garantit cette éventualité.

« Il n'y a pas de situation absolument sans issue [pour le capitalisme]. » Lénine

1.2 Conditions subjectives

L'existence de ces conditions objectives ne signifie bien sûr pas qu'elles soient suffisantes. Il n'existe pas de loi permettant de déduire des évolutions de l'infrastructure économique les événements historiques dans leur immense complexité. En premier lieu, la conscience de classe des travailleurs est absolument nécessaire. Or celle-ci est sans cesse en compétition avec l'aliénation de l'idéologie bourgeoise, et connaît des hauts et des bas. De plus, en plus de cette conscience, il est nécessaire que les militants socialistes parviennent à proposer un parti révolutionnaire s'appuyant sur le marxisme et favorisant la coordination des efforts d'auto-organisation des masses, d'abord au niveau national, puis rapidement au niveau international, grâce à la construction de l'internationalisme.

« Sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire. » Lénine

1.3 Situation révolutionnaire

Lorsque les conditions sont réunies, on peut parler de situation révolutionnaire. Il y a bien sûr un lien entre l'aspect objectif et l'aspect subjectif, même si ce lien est complexe.

2 Le sujet révolutionnaire

Pour les communistes révolutionnaires, c'est le prolétariat qui a la possibilité historique de renverser le capitalisme. En effet, c'est lui qui forme la majorité aux intérêts communs opposés aux capitalistes, et son émancipation ne peut se faire qu'en socialisant les moyens de production. C'est la classe qui est le produit "brut" du capitalisme, contrairement à d'autres, comme la petite-paysannerie ou la petite-bourgeoisie, qui sont souvent menacées par l'évolution économique du système, mais qui ont quelque chose à y perdre.

« Les classes moyennes, petits fabricants, détaillants, artisans, paysans, tous combattent la bourgeoisie parce qu'elle est une menace pour leur existence en tant que classes moyennes. Elles ne sont donc pas révolutionnaires, mais conservatrices; bien plus, elles sont réactionnaires : elles cherchent à faire tourner à l'envers la roue de l'histoire. Si elles sont révolutionnaires, c'est en considération de leur passage imminent au prolétariat : elles défendent alors leurs intérêts futurs et non leurs intérêts actuels; elles abandonnent leur propre point de vue pour se placer à celui du prolétariat. » Marx [3]

3 Pendant et après la révolution

Ce qui pourrait advenir suite à une révolution socialiste relève certes de la prospective. Mais si l'on s'appuie dores et déjà sur une analyse matérialiste du capitalisme, certaines conséquences en découlent.

3.1 Dictature du prolétariat

L'histoire a montré que la classe dominante utilise tous les recours, y compris la violence la plus sauvage, pour écraser les révoltes contre son autorité menacée. C'est le cas bien sûr aussi pour la répression que la bourgeoisie utilise lorsque le mouvement socialiste la met en péril. C'est ce qui a fait dire à Karl Marx que les régimes politiques bourgeois, au delà de leurs grandes différences, sont tous fondamentalement une "dictature du capital", qui montre son vrai visage quand l'ordre établi est attaqué.

C'est précisément pour cela qu'il a utilisé sa formule militante de "dictature du prolétariat" pour définir les mesures révolutionnaires que la classe travailleuse devrait prendre pour vaincre l'opposition bourgeoise. Cela ne désigne ni plus ni moins que le gouvernement des travailleurs, issu de la révolution socialiste.

3.2 Socialisme, communisme et extinction de l'État

On peut à grands traits concevoir deux phases : le socialisme (ou phase inférieure du communisme), et le communisme à proprement parler. En effet dans un premier temps la société garde les stigmates de son organisation par le capitalisme, et est imprégnée de son idéologie. En particulier, même si la production est socialisée, il paraît nécessaire pour un temps de conserver la forme du salariat, avec un salaire proportionnel au travail fourni. À plus forte raison, il est impossible "d'abolir" l'argent par décret...

Mais le développement harmonieux des forces productives en adéquation avec les besoins et la répartition du travail ne peut que rendre rapidement obsolète cette forme bourgeoise. Rien n'empêchera alors de mettre en application l'adage de Marx « De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins ». De même, l'échange de biens se réduisant à de l'échange d'argent dont personne ne manque, l'argent devient inutile. Le passage progressif du socialisme au communisme est une extinction progressive des formes bourgeoises. La société qui se construit alors est une société sans classe, et par là même conduit à l'extinction de l'État.

4 Révolution permanente

5 Cas particuliers

5.1 Révolution non nécessaire

Marx et Engels avaient évoqué la possibilité pour l'Angleterre d'un passage au socialisme sans "révolution" au sens de rupture violente avec l'ordre établi, à une époque où celle ne disposait que d'un appareil répressif d'État très peu développé. Mais l'Angleterre a rapidement mis de côté son libéralisme dans ce domaine, et s'est alignée sur les autres États capitalistes.

5.2 D'une société pré-capitaliste au socialisme

Marx avait évoqué à propos des communes paysannes russes l'éventualité de leur passage direct au socialisme, si elles étaient englobées dans une révolution socialiste avant que le développement capitaliste les ait dissoutes.

Dans ses premières années, l'Internationale communiste a une conception et une pratique très proche de la "révolution permanente" trotskiste. Si elle prend note du retard économiques des "pays arriérés", elle y défend que même des tâches "petite-bourgeoises" comme la réforme agraire peuvent être réalisées sans s'en remettre aux nationalistes bourgeois, et que « les masses des pays arriérés, conduites par le prolétariat conscient des pays capitalistes développés, arriveront au communisme sans passer par les différents stades du développement capitaliste[4]

Le programme de 1928 de l'Internationale communiste évoque la possibilité que des pays où le capitalisme n'existe pas ou quasiment pas, d'un passage direct au socialisme à condition d'une aide des autres pays où le prolétariat a vaincu[5].

6 Conceptions socialistes différentes

6.1 Conception anarchiste

L'anarchisme et ses différents courants ne donnent pas une vision définie de la révolution. Pour nous c'est précisément parce que c'est une idéologie métaphysique qui ne peut saisir la dynamique historique. Les anarchistes ont pour point commun de rejeter l'intervention des partis et de prôner "l'abolition de l'État", mais tandis que certains, spontanéistes, comptent sur le débouché naturel d'un mouvement de révolte sur la révolution, d'autres, anarcho-syndicalistes, envisagent le syndicat comme la cellule de base de la future organisation sociale, d'autres, proudhoniens, préconisent le mutuellisme pour faire "tâche d'huile", etc...

6.2 Conception blanquiste

Du nom de Louis-Auguste Blanqui, révolutionnaire du XIXème siècle qui fomentait avec ses hommes de confiance des complots, visant à s'emparer du pouvoir par un coup d'État. C'est une vision qui fait bien sûr complètement abstraction de l'auto-organisation des masses, et qui est partiellement rattaché au courant du socialisme utopique.

6.3 Conception castriste/guévariste

Aussi appelée foquisme, c'est l'idée que la révolution peut découler de l'extension d'une guerrilla qui renverserait le pouvoir.

6.4 Conception réformiste

Les réformistes rejettent par définition l'idée de révolution, et prétendent changer la société graduellement, accédant à l'État par les élections et défendant des réformes sociales. Cependant la nature réformiste/révolutionnaire d'un parti est parfois ambigüe, et aux ambiguités théoriques correspondent souvent des ambiguités sémantiques, comme "transformer révolutionnairement la société", "défendre un projet de société révolutionnaire"...

7 Tentatives historiques

Différentes tentatives de révolution socialiste ont eu lieu, mais ont toutes échoué, à différents stades. Apprendre des erreurs commises alors est d'une importance cruciales pour les communistes.

  • La Commune de Paris (1871) fut la première expérience substantielle, mais sans direction politique, ce qui causa son écrasement sanglant par la réaction.
  • La Révolution d'Octobre fut la première victoire d'une révolution socialiste dans un pays, mais l'extension internationale de la révolution échoua, ce qui condamna le nouvel État ouvrier à la dégénerescence.
  • La révolution allemande fut un immense espoir, mais il lui manqua une direction politique aguerrie. Elle révéla aussi tragiquement que l'opportunisme conduit les socialistes dans le camp réactionnaire en de telles circonstances.
  • La révolution espagnole fut également un grand moment d'auto-organisation des prolétaires, mais les anarchistes qui en étaient la force motrice la conduirent malgré eux à l'échec.
  • La révolution chinoise de 1927 fut littéralement tuée par la politique internationale de l'Internationale stalinisée.

8 Notes et sources