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Le Parti ouvrier social-démocrate de Russie, ou POSDR (Российская Социал-Демократическая Рабочая Партия, РС-ДР), était la section russe de l'Internationale ouvrière. Fondé en 1898, il se divise dès son 2e congrès (1903) en deux fractions durables : les bolcheviks et les mencheviks. Le parti bolchevik devient par la suite le Parti communiste de l'Union soviétique.

1 Le populisme russe

🔍 Voir : Populisme russe.

Au 19e siècle, le mouvement de contestation dominant est le mouvement narodnik (« populiste »). Ils s'opposaient à la tyrannie du tsarisme et défendaient en même temps une sorte de socialisme utopique. Il s'agissait principalement de membres de l'inelligentsia, souvent très dévoués, mais sans réelle stratégie révolutionnaire (certains ont misé sur l'éducation, d'autres sur des appels au soulèvement des paysans...). Ils ont formé différentes organisations, dont la principale fut Volonté du Peuple (Narodnaïa Volia). qui mène des attentats vers la fin du 19e siècle.

L'influence de la pensée marxiste est assez tardive en Russie, mais elle marque profondément la réflexion politique. En 1872, la traduction du premier tome du Capital de Marx a été achevée par deux émigrés German Lopatine et Nikolaï Danielson (Ce travail de traduction a été repris en 1907 par Vladimir Bazarov). La censure tsariste estimant que ce texte “scientifique” et bien trop dense sera peu lu en Russie autorise sa diffusion, laquelle constitue ainsi tant la première traduction du Capital que la première publication de l'ouvrage de Marx à l'étranger. Or, contrairement aux attentes des censeurs, Le Capital va connaître un grand succès en Russie (les 3000 exemplaires sont écoulés en une année), et engendrer des discussions passionnées dans les milieux radicaux russes, ainsi que des polémiques acharnées sur les “destinées du capitalisme en Russie”, selon le titre de l'ouvrage publié en 1882 par Vorontsov, économiste narodnik.

C'est en luttant contre les conceptions des populistes que se sont formés les marxistes russes, autour de publications comme Nos différends (1885)[1] de Plékhanov ou Le développement du capitalisme en Russie (1899)[2] de Lénine.

En 1883, la première cellule marxiste de Russie, Libération du Travail, est formée par d'anciens populistes : Gueorgui Plekhanov, Pavel Axelrod, Vera Zassoulitch, etc. Une grande partie de l'intelligentsia sera gagnée au marxisme au tournant du 20e siècle, mais le populisme restera un courant influent jusqu'au début des années 1920. Des populistes constituent en 1901 le Parti socialiste-révolutionnaire (SR).

2 Historique du POSDR

2.1 Congrès de fondation (mars 1898)

En mars 1898, un congrès (clandestin) est organisé à Minsk pour tenter d'unifier en un parti diverses organisations marxistes ou ouvrières. Le Congrès réunit moins de 15 délégués[3], venant de trois organisations: le groupe de la Rabotchaia Gazeta de Kiev, le Bund, et les Unions de Lutte pour la libération de la classe ouvrière de Saint-Pétersbourg, Moscou et Ekaterinoslav. L'unique délégué ouvrier présent au Congrès était un militant du Bund. Ce congrès procéda à l'élection d'un Comité Central composé par trois personnes : Boris Eidelman (de la Rabotchaia Gazeta), Arkadi Kremer (du Bund) et Stepan Radchenko (de l'Union de lutte de Saint-Pétersbourg). Pierre Struve était l'un des participants. Lénine, alors en exil à Chouchenskoïé (Sibérie) ne fut pas présent à ce congrès.

Le Congrès adopta un manifeste (dont la rédaction finale fut confiée à Struve) et fixa des règles de fonctionnement du Parti même si, sur le plan formel, il n'adopta ni programme, ni statuts. Le jeune parti fut durement frappé par la répression tsariste. Peu après sa fondation, des arrestations de masse frappèrent 500 militants et sympathisants. Sept des neuf membres du Comité Central furent emprisonnés peu de temps après le congrès de Minsk.

Le Manifeste lancé au nom du Ier congrès laissait encore à désirer sur bien des points. Il restait muet sur la nécessité, pour le prolétariat, de conquérir le pouvoir politique ; il ne disait rien de l'hégémonie du prolétariat, il restait également muet sur les alliés du prolétariat dans sa lutte contre le tsarisme et la bourgeoisie. Dans ses décisions et dans son Manifeste, le congrès proclamait la création du Parti ouvrier social-démocrate de Russie. C'est dans cet acte formel, destiné à jouer un grand rôle au point de vue de la propagande révolutionnaire, que réside l'importance du Ier congrès du POSDR.

Affirmant son analyse marxiste, le POSDR proclame que malgré la prédominance de la paysannerie à l'époque, le vrai potentiel révolutionnaire résiderait à terme dans le prolétariat industriel.

2.2 « Iskristes » contre « économistes »

Avant le second congrès en 1903, un jeune intellectuel nommé Vladimir Ilitch Oulianov rejoint le parti. En 1901, de l'étranger où ils étaient venus rejoindre les anciens immigrés du groupe Libération du Travail, Vladimir Oulianov et Julius Martov commencent la publication clandestine de l'Iskra (L'Étincelle). Ils voulaient grâce à cette publication bâtir un grand parti centralisant, si nécessaire de façon volontariste, les différents groupes socialistes et cercles ouvriers existant en Russie. En février 1902, Oulianov publie, sous le pseudonyme de Lénine, la brochure Que faire ?, qui expose sa conception organisationnelle du parti.

Très rapidement se développe à l'intérieur du POSDR l'opposition entre deux tendances : « iskristes » et « économistes ». Le terme économistes désignait les sociaux-démocrates russes qui luttaient plus pour l'amélioration des conditions de vie immédiate des ouvriers (« revendications économiques ») que pour les questions démocratiques (« revendication politique »), qu'il fallait laisser à la bourgeoisie libérale.

Lénine et l'Iskra attaquèrent les « économistes » dès leur apparition. Ils dénonçaient leur position comme de l'opportunisme, mettant la classe ouvrière à la remorque de la bourgeoisie, et défendaient ainsi l'importance de construire le parti.[4]

2.3 La division entre mencheviks et bolcheviks

Le 30 juillet 1903, le second congrès réunit à Bruxelles, puis à Londres émigrés et intellectuels vivant à l'étranger, pour tenter de constituer une force politique unifiée. Le Bund ne participe que partiellement aux travaux du congrès. Ne pouvant obtenir une ligne autonome au sein du parti, leurs délégués quittent le Congrès.

Le parti (et les rédacteurs de l'Iksra) se scinde ensuite en deux fractions le 17 novembre : les bolcheviks (de bolchinstvo, « majorité »), dirigés par Lénine et les mencheviks (de menchinstvo, « minorité »), dirigés par Martov. Le terme de majorité provient du résultat d'un vote effectué au congrès au sujet de questions d'organisation et de stratégie, bien que le parti bolchevik soit resté en minorité politique jusqu'en octobre 1917.

Schématiquement, les bolcheviks rassemblent autour de Lénine un courant en apparence homogène, alors que les mencheviks regroupent différentes tendances : sociaux-démocrates traditionnels, tendance plus à gauche de Martov et tendance « gauchiste » de Trotski. La scission est surtout due aux divergences en matière d'organisation. À la conception léniniste d'un parti de cadres, formé de révolutionnaires professionnels, s'oppose la conception d'un parti de masse, où l'adhésion au parti est ouverte plus largement. Malgré toutes les tentatives de réunification, les deux parties demeurent inconciliables.

Trotski siège au IIe Congrès au titre de délégué de l'Union sibérienne. Après y avoir combattu durement le Bund, il se retrouve lors de la scission du côté menchevik. Il continue alors pour une courte période à collaborer à l'Iskra, contrôlée par les mencheviks. Pour fournir à ses mandants un exposé de son action lors du congrès, il publie en 1904 le Rapport de la délégation sibérienne dans lequel il s'attaque à Lénine, le comparant à Robespierre, l'accusant de mettre le parti « dans un état de siège », de lui « imposer sa poigne de fer », et de transformer « son modeste comité central en comité de salut public ».

2.4 Le POSDR pendant la Révolution russe de 1905

Tout comme plus tard en février 1917, la Révolution russe de 1905 surprend toutes les composantes du « mouvement ouvrier » russe, à commencer par celles du POSDR. Fidèles à leurs conceptions, les menchéviks voient dans les évènements de 1905 et l'apparition des soviets le moyen de construire enfin le large et véritable parti social-démocrate, les comités ouvriers étant appelés dans l'avenir à se transformer en syndicats. Les bolchéviks eux tentent de plaquer sur la situation la tactique léniniste développée dans Que faire ?. Il s'agit pour eux de « convaincre ces organisations (les soviets) d'accepter le programme du parti social-démocrate comme étant le seul conforme aux vrais intérêts du prolétariat ». Après l'acceptation de ce programme, elles doivent évidemment déterminer leur attitude envers le parti social-démocrate, reconnaître sa direction et finalement se fondre dans ce parti. Cette position sera nuancée après l'arrivée de Lénine qui tout en se méfiant de cet organe spontanément apparu, ne répudiait pas à l'idée d'y travailler.

2.5 Le PODSR et les Douma

Les sociaux-démocrates boycottent les élections de la première Douma d'État de l'Empire russe (avril-juillet 1906), mais sont représentés à la deuxième Douma (février-juin 1907). Ils détiennent avec les socialistes-révolutionnaires 83 sièges. La deuxième Douma est dissoute sous prétexte d'une conspiration subversive de l'armée.

Sous de nouvelles lois électorales, la présence des sociaux-démocrates à la troisième Douma (1907) est réduite à 19. Leur chef de file est Nicolas Tchkhéidzé (Nicolas Tchéidzé), brillant orateur. À la quatrième Douma (1912), les sociaux-démocrates sont définitivement divisés. Les mencheviks ont cinq membres et les bolcheviks sept, dont Roman Malinovski, qui s'avérera être un agent de l'Okhrana.

2.6 Le POSDR au pouvoir

Lors de la révolution de Février 1917, les mencheviks sont majoritaires, avec l'appui des sociaux-révolutionnaires. Ils élisent Nicolas Tchkhéidzé à la tête du Comité exécutif du Soviet de Petrograd, qui refuse à plusieurs reprises de participer au gouvernement provisoire successeur du régime tsariste, notamment au poste de ministre du Travail. Irakli Tsereteli accepte de rejoindre le gouvernement d'Alexandre Kerenski aux Postes et Télégraphes, puis à l'Intérieur.

Lors de la révolution d'Octobre, les bolcheviks s'emparent du pouvoir politique : Léon Trotski remplace Nicolas Tchkhéidzé. Lénine devient président du Conseil des commissaires du peuple (ou Sovnarkom).

En novembre 1917, les élections de l'Assemblée constituante russe ne sont pas favorables aux bolcheviks : l'assemblée est dissoute lors de sa première réunion.

En mars 1918, le courant bolchevik prend le nom de Parti communiste de Russie (bolchévik). La faction menchevik est exclue des soviets en 1918, puis interdite après la révolte de Kronstadt en 1921. En janvier 1934, le parti devient le Parti communiste (bolchevik) d'Union soviétique, puis le Parti communiste de l'Union soviétique en octobre 1952.

3 Notes et références

  1. Plekhanov, Our Differences, 1885
  2. Lénine, Le développement du capitalisme en Russie, 1899
  3. Dominique Colas, « La dictature démocratique et la démocratie populaire. Oxymore et pléonasme dans les usages de démocratie chez quelques marxistes », Mots,‎ (lire en ligne)
  4. Histoire du Parti communiste (bolchévik) de l'U.R.S:S. 1949, p.27

4 Bibliographie

  • Collectif, Histoire du Parti communiste /bolchévik/ de l'U.R.S.S : Précis rédigé par une commission du Comité central du P.C.(b) de l'U.R.S.S, Moscou, Éditions en langues étrangères, (1re éd. 1938), 408 p.
  • Korine Amacher, La Russie 1598-1917 : Révoltes et mouvements révolutionnaires, Gollion, Infolio, coll. « Illico » (no 28), , 222 p. (ISBN 978-2-88474-229-0, présentation en ligne)

5 Liens externes