Guerre civile russe

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Trotsky et l'Armée Rouge.jpg

La guerre civile russe, successive à la Révolution_d’Octobre a duré exactement cinq ans, du 29 octobre 1917 au 25 octobre 1922. Les historiens ne s’accordent pas sur le nombre de morts, évalué entre 8 et 20 millions. De toute façon, la saignée est énorme, d’autant plus qu’elle vient après celle de la Première_guerre_mondiale. En 1922, 4 500 000 enfants russes n’ont ni père ni mère ni famille les prenant en charge.

En novembre 1917, l’aspiration des ouvriers, paysans et soldats à la paix, au pain et à la liberté emporte les autocratiques institutions russes. Cependant des régions entières restent indépendantes vis à vis de Moscou. C’est particulièrement le cas dans le Sud où le général Kalédine, ataman des cosaques du Don se fait proclamer « commandant en chef des cosaques ». Il recrute une armée blanche contre-révolutionnaire parmi les cosaques de la Russie méridionale, proclame « l’indépendance du Don » et se prépare à marcher sur Moscou avec environ 200000 hommes pour renverser le Gouvernement des So­viets. Il dispose de relais nombreux parmi les anciens officiers tsaristes, y compris sur Moscou et Saint Petersbourg.

Ce sont des Américains qui prennent en Russie les premiers contacts avec les groupes opposés à la Révolution, en particulier par Maddin Summers, leur consul général à Moscou, qui a épousé la fille d’un grand seigneur. Leur activité consiste particulièrement à obtenir des subsides pour les armées blanches.

Ces armées et territoires contre-révolutionnaires soutenus par le capitalisme international n’ont pas été assez étudiés par les historiens ; or, je crois qu’ils représentent un maillon décisif entre le pré-fascisme d’avant 1914 et le fascisme des années 1920 et 1930, par exemple en ce qui concerne l’utilisation idéologique de l’antisémitisme.

1 Les débuts de la guerre civile

De décembre 1917 à novembre 1918, les banques sont nationalisées ainsi que les chemins de fer, les moyens de transport et les industries de plus de 500 000 roubles de capital ; la propriété foncière est abolie, sans indemnités. Ces mesures expliquent à elles seules la mobilisation des grandes sociétés industrielles et bancaires pour combattre l’URSS. Elles avaient investi avant-guerre des capitaux considérables en Russie et comptent bien en tirer un retour sur investissement. D’ailleurs, dans un premier temps, elles prennent la révolution comme une aubaine qui va leur permettre de démanteler le pays à leur profit.

Plusieurs gouvernements (anglais, français, américain, canadien, japonais, roumain, polonais, grec, tchécoslovaque, italien...) engagent des moyens considérables pour renverser le régime issu de la Révolution d’Octobre, démanteler l’URSS et profiter de ses richesses. En voici un exemple :

Le 23 décembre 1917, lendemain du début de la Conférence de Brest Litovsk, des représentants de la France et de la Grande-Bretagne se réunissent à Paris et con­cluent un accord secret pour le démembrement de la Russie :

  • l’Angleterre se réserve les provinces baltes et le Caucase (surtout son pétrole)
  • la France choisit l’Ukraine de la Biélorussie à la Bessarabie et au Donetz (fer, charbon, bassin sidérurgique...) ainsi que les rives de la Mer Noire dont Odessa et la Crimée.

2 Les camps dans la guerre civile

  1. l’Armée rouge qui défendait les objectifs de la Révolution d’Octobre
  2. les Armées blanches qui voulaient exterminer les défenseurs du régime installé par la Révolution.
  3. les Armées vertes, essentiellement rurales, qui combattaient à la fois contre l’Armée rouge et contre les armées blanches, refusaient les réquisitions et la conscription.

Ces armées vertes comptaient parfois seulement 500 à 1000 hommes mais elles atteignaient parfois aussi des effectifs bien plus importants : 100000 pour l’"armée populaire de Sibérie", 40000 pour celle de Tambov, jusqu’à 50000 en Ukraine avec Makhno...

3 La victoire de l'Armée Rouge

L’Armée rouge a gagné cette guerre grâce à la profondeur du soulèvement populaire révolutionnaire commencé en 1917

Personne ne peut nier que la révolte populaire de 1917 a représenté une revanche contre une oppression multi-séculaire présentant toutes les caractéristiques du totalitarisme.

N’oublions pas la vie extrêmement difficile des paysans subissant en permanence la morgue et la cupidité d’une noblesse dorée. Dans les siècles passés, la Russie avait déjà connu des soulèvements populaires immenses (Razine, Pougatchev...) terminés par des exécutions par milliers. Une fois la révolution d’Octobre lancée, la seule solution pour les pauvres consistait à aller jusqu’au bout.

N’oublions pas que le soulèvement révolutionnaire de 1917 s’explique en grande partie par les souffrances des soldats et les tueries de la Première guerre mondiale.

Jean-Jacques Marie cite :

  • Un monarchiste chrétien, fils d’industriel Oleg Volkov "Des profondeurs des masses paysannes montait quelque chose d’effrayant, qui réveillait le souvenir des révoltes populaires vécues par nos aïeux".
  • Un banquier en 1917 "En Russie éclate un incendie à côté duquel la révolte de Pougatchev, les jacqueries, 1793 apparaîtront comme des troubles insignifiants."

4 Comment les bolchéviques ont t-ils gagnés la guerre civile ?

Premièrement, l’Armée rouge a compté des centaines de milliers de militants politiques, d’ouvriers, de petits paysans, de jeunes absolument déterminés à chasser le tsarisme, à instaurer une société meilleure. Beaucoup sont morts "par le froid et la famine", "par les neiges et les tempêtes", sur des terres gelées, blessés sans médecins pour les soigner parce qu’ils pensaient instaurer pour toujours la paix, la liberté, la justice sociale...

Il suffit de lire le compte rendu de quelques batailles décisives pour se convaincre de l’importance de la conviction politique dans ces victoires remportées par l’Armée rouge.

Cet enthousiasme se rencontrait aussi dans les armées blanches. Des milliers, peut être des dizaines de milliers de combattants sont morts pour la Sainte Russie avec la même force de conviction. Mais cette détermination conservatrice concernait un nombre nettement inférieur de combattants par rapport aux forces soviétiques. De plus, les armées blanches ont compté beaucoup d’officiers issus du tsarisme qui n’ont pas changé durant la guerre civile leurs attitudes de privilégiés et ont beaucoup handicapé leur camp par exemple dans les troupes de Koltchak.

Deuxième, "Ce n’est pas par la terreur que l’on fait des armées (...). Pour notre armée, le ciment le plus fort, ce furent les idées d’Octobre. » (Trotsky)

« Le communisme ne sera instauré que par la persuasion et par l’exemple. » (Trotsky 1919)

Le 22 octobre 1919, alors que Petrograd est soumise à l’offensive de l’Armée Blanche de Ioudenitch, soutenu par le gouvernement britannique, et risque de tomber, Trotsky publie l’ordre du jour n° 158 exigeant le respect de la vie des prisonniers :

« Camarades soldats de l’Armée rouge ! Épargnez les prisonniers ! Recevez amicalement les transfuges. Dans l’armée blanche, les ennemis vénaux, corrompus, sans honneur, les ennemis du peuple travailleur sont une insignifiante minorité. La majorité écrasante est faite d’hommes dupés ou mobilisés de force. Une part importante même des officiers de la Garde Blanche combat contre la Russie soviétique sous la menace de la trique, ou parce qu’elle a été trompée par les agents des financiers russes et anglo-français et des propriétaires. » Et Trotsky souligne plus loin que son appel « ne s’adresse pas seulement aux simples soldats, mais aussi aux officiers ». 

Le témoignage de dissidents soviétiques présente sur ce point un intérêt crucial :

  • Un vieux dissident soviétique, Grigori Pomerantz, raconte dans la revue russe Novy Mir d’août 2001 l’épisode suivant, très révélateur. En 1950, il avait comme voisin au Goulag un paysan « devenu antisoviétique », mais, dit-il, « en 1920, après avoir entendu un discours de Trotsky ou de Zinoviev, il était prêt à partir à l’assaut du ciel. Et pas seulement lui, son régiment tout entier (...). Les rouges étaient prêts à donner leur vie pour le monde des soviets, pour un monde sans mendiants et sans infirmes. » Il ajoute " Croyez-en un soldat de la guerre : aucune bataille n’a jamais été gagnée par la terreur. La terreur est un moyen auxiliaire dans le combat ; le facteur décisif, c’est l’enthousiasme."
  •  Le général Grigorenko, également dissident et très, très critique sur le comportement de l’armée rouge durant la guerre civile constate cependant que les habitants de son village qui avaient subi les deux terreurs, blanche et rouge, ont pris le parti de la terreur rouge et condamné la terreur blanche.

5  Notes et références