Différences entre les versions de « Front unique anti-impérialiste »

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Dans les pays dominés par l'impérialisme, il existe des partis [[anti-impérialistes|anti-impérialistes]] même s'ils sont bourgeois et pro-capitalistes. Les communistes ne peuvent pas renvoyer dos à dos ces forces avec celles qui collaborent totalement avec les puissances impérialistes ([[bourgeoisie compradore|bourgeoisie compradore]]). Comme pour la tactique de [[front unique|front unique]] en général, le guide pratique doit être : "marcher séparément, frapper ensemble".
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Dans les pays dominés par l'impérialisme, il existe des partis [[Anti-impérialistes|anti-impérialistes]] même s'ils sont bourgeois et pro-capitalistes. Les communistes ne peuvent pas renvoyer dos à dos ces forces avec celles qui collaborent totalement avec les puissances impérialistes ([[Bourgeoisie compradore|bourgeoisie compradore]]). Comme pour la tactique de [[Front unique|front unique]] en général, le guide pratique doit être : "marcher séparément, frapper ensemble".  
  
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Les communistes ne peuvent pas se désintéresser de l'oppression impérialiste ([[colonialisme|colonialisme]], [[néo-colonialisme|néo-colonialisme]]...). Premièrement ce serait se couper d'une grande partie des masses qui ont une conscience immédiate de la domination de leur pays par des puissances étrangères. Deuxièmement, cette domination est une conséquence du [[système capitaliste|système capitaliste]] mondial, et en retour elle gêne la claire compréhension de la [[lutte de classe|lutte de classe]] dans les pays dominés, donc il est impératif d'établir ce lien transitoire entre l'anti-impérialisme et l'anticapitalisme.
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Les communistes ne peuvent pas se désintéresser de l'oppression impérialiste ([[Colonialisme|colonialisme]], [[Néo-colonialisme|néo-colonialisme]]...). Premièrement ce serait se couper d'une grande partie des masses qui ont une conscience immédiate de la domination de leur pays par des puissances étrangères. Deuxièmement, cette domination est une conséquence du [[Système capitaliste|système capitaliste]] mondial, et en retour elle gêne la claire compréhension de la [[Lutte de classe|lutte de classe]] dans les pays dominés, donc il est impératif d'établir ce lien transitoire entre l'anti-impérialisme et l'anticapitalisme.  
  
En pratique, une telle politique d'intervention sur ces deux fronts articulés entre eux est la meilleure clé pour stimuler les luttes des exploités :
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''« ''''En formulant des revendications sociales, [les communistes] stimulent et libèrent l’énergie révolutionnaire qui ne se trouvait point d’issue dans les revendications libérales bourgeoises. La classe ouvrière des colonies et semi-colonies doit savoir fermement que, seules, l’extension et l’intensification de la lutte contre le joug impérialiste des métropoles peuvent lui donner un rôle directeur dans la révolution, et que, seules, l’organisation économique et politique et l’éducation politique de la classe ouvrière et des éléments semi-prolétariens peuvent augmenter l’amplitude révolutionnaire du combat contre l’impérialisme.&nbsp;»''<ref name="Orient">[http://www.marxists.org/francais/inter_com/1922/ic4_08.htm Thèses générales sur la question d'Orient], Internationale Communiste, IV° Congrès, 1922</ref>
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Par ailleurs, une conséquence même de la domination impérialiste est que la démocratie bourgeoise est largement incomplète dans les pays dominés, et des rapports sociaux [[Féodalisme|féodaux]] subsistent même dans les moins développés d'entre eux. La bourgeoisie anti-impérialiste est aussi celle qui a le plus la volonté de développer le pays. Le front unique avec ces forces est donc aussi un moyen de lutter efficacement contre les archaïsmes.  
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Par ailleurs, une conséquence même de la domination impérialiste est que la démocratie bourgeoise est largement incomplète dans les pays dominés, et des rapports sociaux [[Féodalisme|féodaux]] subsistent même dans les moins développés d'entre eux. La bourgeoisie anti-impérialiste est aussi celle qui a le plus la volonté de développer le pays. Le front unique avec ces forces est donc aussi un moyen de lutter efficacement contre les archaïsmes.
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L'expérience a montré que les bourgeois ne veulent pas aller jusqu'au bout de leur lutte anti-impérialiste si cela suppose une menace de favoriser la lutte des classes. Or les masses de travailleurs et de paysans pauvres ont facilement tendance à passer d'une simple lutte nationaliste à des revendications de classe, surtout en présence d'un fort mouvement communiste. Il y a donc une contradiction dans les partis nationalistes de la bourgeoisie, et il est doublement important de la comprendre&nbsp;:
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L'expérience a montré que les bourgeois ne veulent pas aller jusqu'au bout de leur lutte anti-impérialiste si cela suppose une menace de favoriser la lutte des classes. Or les masses de travailleurs et de paysans pauvres ont facilement tendance à passer d'une simple lutte nationaliste à des revendications de classe, surtout en présence d'un fort mouvement communiste. Il y a donc une contradiction dans les partis nationalistes de la bourgeoisie, et il est doublement important de la comprendre :
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*cela signifie que l'on ne peut pas s'appuyer sur elle pour mener jusqu'au bout la "révolution nationale démocratique", il n'y a pas "d'[[Étapisme|étapisme]]" possible
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"Frapper ensemble", c'est-à-dire faire l'unité d'action avec tous ceux qui luttent contre l'impérialisme, est un impératif. Ce n'est pas une étape nécessaire ni un combat annexe, c'est une tâche des communistes directement liée au développement de la lutte des classes.<br>  
*et cela signifie aussi que l'on peut s'appuyer sur ces hésitations de la bourgeoisie pour développer la lutte de classe jusqu'à la révolution socialiste ([[révolution permanente|révolution permanente]]).
 
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Mais il est fondamental de garder comme principe "marcher séparément", c'est-à-dire conserver l'indépendance des communistes, continuer à faire de la propagande pour la révolution socialiste, continuer à soutenir les luttes des prolétaires... Vouloir étouffer ou temporiser les luttes sociales sous prétexte de faire d'abord "l'unité nationale" est le début de la trahison, et cela conduit quasi-obligatoirement à la défaite du mouvement ouvrier.  
 
 
"Frapper ensemble", c'est-à-dire faire l'unité d'action avec tous ceux qui luttent contre l'impérialisme, est un impératif. Ce n'est pas une étape nécessaire ni un combat annexe, c'est une tâche des communistes directement liée au développement de la lutte des classes.<br>
 
 
 
Mais il est fondamental de garder comme principe "marcher séparément", c'est-à-dire conserver l'indépendance des communistes, continuer à faire de la propagande pour la révolution socialiste, continuer à soutenir les luttes des prolétaires... Vouloir étouffer ou temporiser les luttes sociales sous prétexte de faire d'abord "l'unité nationale" est le début de la trahison, et cela conduit quasi-obligatoirement à la défaite du mouvement ouvrier.
 
  
 
== Naissance de cette tactique  ==
 
== Naissance de cette tactique  ==
  
La tactique du «&nbsp;front unique anti-impérialiste&nbsp;» (FUA) s'appuie sur la théorie de l’impérialisme que Lénine a élaborée au début du XX<sup>ème</sup> siècle. Lors de son IIIème Congrès, l'[[Internationale communiste|Internationale communiste]] avait défini la tactique du «&nbsp;[[front unique ouvrier|front unique ouvrier]]&nbsp;» (FUO) pour les pays impérialistes où se pose la question de l'unité avec des [[Parti_ouvrier_bourgeois|partis ouvriers réformistes]]. En 1922, lors du IV<sup>ème</sup> Congrès, le «&nbsp;front unique anti-impérialiste&nbsp;» (FUA) est décrit (en analogie explicite avec le FUO) dans les «&nbsp;Thèses générales sur la question d’Orient&nbsp;».
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La tactique du «&nbsp;front unique anti-impérialiste&nbsp;» (FUA) s'appuie sur la théorie de l’impérialisme que Lénine a élaborée au début du XX<sup>ème</sup> siècle. Lors de son IIIème Congrès, l'[[Internationale communiste|Internationale communiste]] avait défini la tactique du «&nbsp;[[Front unique ouvrier|front unique ouvrier]]&nbsp;» (FUO) pour les pays impérialistes où se pose la question de l'unité avec des [[Parti ouvrier bourgeois|partis ouvriers réformistes]]. En 1922, lors du IV<sup>ème</sup> Congrès, le «&nbsp;front unique anti-impérialiste&nbsp;» (FUA) est décrit (en analogie explicite avec le FUO) dans les «&nbsp;Thèses générales sur la question d’Orient&nbsp;».  
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<blockquote>''«&nbsp;De même que le mot d’ordre du front prolétarien unique a contribué et contribue encore en Occident à démasquer la trahison par les social-démocrates des intérêts du prolétariat, de même le mot d’ordre du front anti-impérialiste unique contribuera à démasquer les hésitations et les incertitudes des divers groupes du nationalisme bourgeois. ''»<ref name="Orient" /><br> </blockquote>  
''« De même que le mot d’ordre du front prolétarien unique a contribué et contribue encore en Occident à démasquer la trahison par les social-démocrates des intérêts du prolétariat, de même le mot d’ordre du front anti-impérialiste unique contribuera à démasquer les hésitations et les incertitudes des divers groupes du nationalisme bourgeois.''<ref name="Orient" /><br>
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== Exemples et contre-exemples ==
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== Exemples et contre-exemples ==
 
  
L'histoire de la [[Révolution_chinoise_(1925-1927)|deuxième révolution chinoise]] est un cas fondamental à étudier. Dans un premier temps, à partir de 1922, l'alliance tactique entre les communistes et les nationalistes du Kuomintang (KMT) est un succès. Les rangs des communistes grossissent rapidement, permettant de stimuler la lutte des classes, pendant que le camp anti-impérialiste est renforcé. Mais à partir de 1924, le [[Parti communiste chinois|Parti communiste chinois]] commence à se subordonner plus profondément au KMT, acceptant de mettre en veilleuse son caractère de classe. Le principe d'indépendance du front unique n'est plus respecté, et cela va avoir des conséquences funestes : en 1927, le KMT écrase les communistes, précisément parce qu'ils devenaient trop influants et menaçant, et parce qu'ils n'ont pas fait usage de leur force... Il faut savoir rompre un front unique !
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L'histoire de la [[Révolution chinoise (1925-1927)|deuxième révolution chinoise]] est un cas fondamental à étudier. Dans un premier temps, à partir de 1922, l'alliance tactique entre les communistes et les nationalistes du Kuomintang (KMT) est un succès. Les rangs des communistes grossissent rapidement, permettant de stimuler la lutte des classes, pendant que le camp anti-impérialiste est renforcé. Mais à partir de 1924, le [[Parti communiste chinois|Parti communiste chinois]] commence à se subordonner plus profondément au KMT, acceptant de mettre en veilleuse son caractère de classe. Le principe d'indépendance du front unique n'est plus respecté, et cela va avoir des conséquences funestes&nbsp;: en 1927, le KMT écrase les communistes, précisément parce qu'ils devenaient trop influants et menaçant, et parce qu'ils n'ont pas fait usage de leur force... Il faut savoir rompre un front unique&nbsp;!  
  
 
== Notes et sources  ==
 
== Notes et sources  ==
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[http://groupecri.free.fr/article.php?id=239 ''La lutte contre la guerre impérialiste et la tactique du front unique anti-impérialiste''], CRI des travailleurs  
 
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[[Catégorie:Politique_révolutionnaire]][[Catégorie:Nationalisme]][[Catégorie:Mouvement_ouvrier]]
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[[Catégorie:Politique_révolutionnaire]] [[Catégorie:Nationalisme]] [[Catégorie:Mouvement_ouvrier]]

Version du 6 juillet 2012 à 15:52

Le front unique anti-impérialiste est une tactique des communistes révolutionnaires depuis Lénine et Trotski, visant à l'unité d'action entre travailleurs et nationalistes bourgeois contre les forces impérialistes ou pro-impérialistes

1 Principe

Dans les pays dominés par l'impérialisme, il existe des partis anti-impérialistes même s'ils sont bourgeois et pro-capitalistes. Les communistes ne peuvent pas renvoyer dos à dos ces forces avec celles qui collaborent totalement avec les puissances impérialistes (bourgeoisie compradore). Comme pour la tactique de front unique en général, le guide pratique doit être : "marcher séparément, frapper ensemble".

1.1 Lutte de classe et lutte anti-impérialiste

Les communistes ne peuvent pas se désintéresser de l'oppression impérialiste (colonialisme, néo-colonialisme...). Premièrement ce serait se couper d'une grande partie des masses qui ont une conscience immédiate de la domination de leur pays par des puissances étrangères. Deuxièmement, cette domination est une conséquence du système capitaliste mondial, et en retour elle gêne la claire compréhension de la lutte de classe dans les pays dominés, donc il est impératif d'établir ce lien transitoire entre l'anti-impérialisme et l'anticapitalisme.

En pratique, une telle politique d'intervention sur ces deux fronts articulés entre eux est la meilleure clé pour stimuler les luttes des exploités :

« En formulant des revendications sociales, [les communistes] stimulent et libèrent l’énergie révolutionnaire qui ne se trouvait point d’issue dans les revendications libérales bourgeoises. La classe ouvrière des colonies et semi-colonies doit savoir fermement que, seules, l’extension et l’intensification de la lutte contre le joug impérialiste des métropoles peuvent lui donner un rôle directeur dans la révolution, et que, seules, l’organisation économique et politique et l’éducation politique de la classe ouvrière et des éléments semi-prolétariens peuvent augmenter l’amplitude révolutionnaire du combat contre l’impérialisme. »[1]

Par ailleurs, une conséquence même de la domination impérialiste est que la démocratie bourgeoise est largement incomplète dans les pays dominés, et des rapports sociaux féodaux subsistent même dans les moins développés d'entre eux. La bourgeoisie anti-impérialiste est aussi celle qui a le plus la volonté de développer le pays. Le front unique avec ces forces est donc aussi un moyen de lutter efficacement contre les archaïsmes.

« D’autre part, ce mot d’ordre aidera au développement de la volonté révolutionnaire et à la clarification de la conscience de classe des travailleurs en les incitant à lutter au premier rang, non seulement contre l’impérialisme, mais encore contre toute espèce de survivance du féodalisme. »

L'expérience a montré que les bourgeois ne veulent pas aller jusqu'au bout de leur lutte anti-impérialiste si cela suppose une menace de favoriser la lutte des classes. Or les masses de travailleurs et de paysans pauvres ont facilement tendance à passer d'une simple lutte nationaliste à des revendications de classe, surtout en présence d'un fort mouvement communiste. Il y a donc une contradiction dans les partis nationalistes de la bourgeoisie, et il est doublement important de la comprendre :

  • cela signifie que l'on ne peut pas s'appuyer sur elle pour mener jusqu'au bout la "révolution nationale démocratique", il n'y a pas "d'étapisme" possible
  • et cela signifie aussi que l'on peut s'appuyer sur ces hésitations de la bourgeoisie pour développer la lutte de classe jusqu'à la révolution socialiste (révolution permanente).

« Cette lutte est d’autant plus nécessaire que les classes dirigeantes indigènes sont enclines à des compromis avec le capital étranger et que ces compromis portent atteinte aux intérêts primordiaux des masses populaires. »

1.2 Frapper ensemble, marcher séparément

"Frapper ensemble", c'est-à-dire faire l'unité d'action avec tous ceux qui luttent contre l'impérialisme, est un impératif. Ce n'est pas une étape nécessaire ni un combat annexe, c'est une tâche des communistes directement liée au développement de la lutte des classes.

Mais il est fondamental de garder comme principe "marcher séparément", c'est-à-dire conserver l'indépendance des communistes, continuer à faire de la propagande pour la révolution socialiste, continuer à soutenir les luttes des prolétaires... Vouloir étouffer ou temporiser les luttes sociales sous prétexte de faire d'abord "l'unité nationale" est le début de la trahison, et cela conduit quasi-obligatoirement à la défaite du mouvement ouvrier.

2 Naissance de cette tactique

La tactique du « front unique anti-impérialiste » (FUA) s'appuie sur la théorie de l’impérialisme que Lénine a élaborée au début du XXème siècle. Lors de son IIIème Congrès, l'Internationale communiste avait défini la tactique du « front unique ouvrier » (FUO) pour les pays impérialistes où se pose la question de l'unité avec des partis ouvriers réformistes. En 1922, lors du IVème Congrès, le « front unique anti-impérialiste » (FUA) est décrit (en analogie explicite avec le FUO) dans les « Thèses générales sur la question d’Orient ».

« De même que le mot d’ordre du front prolétarien unique a contribué et contribue encore en Occident à démasquer la trahison par les social-démocrates des intérêts du prolétariat, de même le mot d’ordre du front anti-impérialiste unique contribuera à démasquer les hésitations et les incertitudes des divers groupes du nationalisme bourgeois. »[1]

3 Exemples et contre-exemples

L'histoire de la deuxième révolution chinoise est un cas fondamental à étudier. Dans un premier temps, à partir de 1922, l'alliance tactique entre les communistes et les nationalistes du Kuomintang (KMT) est un succès. Les rangs des communistes grossissent rapidement, permettant de stimuler la lutte des classes, pendant que le camp anti-impérialiste est renforcé. Mais à partir de 1924, le Parti communiste chinois commence à se subordonner plus profondément au KMT, acceptant de mettre en veilleuse son caractère de classe. Le principe d'indépendance du front unique n'est plus respecté, et cela va avoir des conséquences funestes : en 1927, le KMT écrase les communistes, précisément parce qu'ils devenaient trop influants et menaçant, et parce qu'ils n'ont pas fait usage de leur force... Il faut savoir rompre un front unique !

4 Notes et sources

La lutte contre la guerre impérialiste et la tactique du front unique anti-impérialiste, CRI des travailleurs

  1. 1,0 et 1,1 Thèses générales sur la question d'Orient, Internationale Communiste, IV° Congrès, 1922