Capitalocène

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1 Anthropocène ou Capitalocène ?

La notion d'Anthropocène émerge au début des années 1990 pour désigner une époque géologique succédant à l'Holocène, et caractérisée par une incidence globale et significative des activités humaines sur l'écosystème terrestre. Le terme a ensuite été popularisé au cours des années 90 et 2000, pour largement dépasser aujourd'hui le seul cadre de la géologie, et ce bien que la date exacte du début de cette période soit encore sujet à débat.

Certains géologues critiquent cependant ce terme en argumentant que l'impact des activités humaines se poursuivra sur une durée bien trop courte pour constituer une époque géologique à part entière, dont la durée moyenne est de près de 12 Ma.


D'autres chercheurs, comme l'historien Jason W Moore ou l'économiste Raj Patel ont pu apporter une critique du concept d’anthropocène portant plus sur l'étymologie du terme. En effet, parler d'"époque de l'Homme" (de antropos, être humain et kainos, suffixe relatif aux époques géologiques) implique une responsabilité globale de l'être humain, en tant qu'espèce, dans les modifications de l'environnement. Or, l'analyse des données, par exemple sur les émissions de Co2, invite à relativiser ce discours :

  • Au niveau des émissions cumulées de Co2 depuis 1850, les États-Unis comptent pour près de 25%, à égalité avec les pays européens, et suivis par la Chine (10%) et la Russie (7,5%).
  • Si l'on rapporte les émissions de Co2 aux modes de consommations, on peut estimer que 50% des émissions sont imputables aux 10% des habitants les plus riches de la planète.
  • Si on les rapporte aux modes de productions, 100 firmes peuvent être reliées à près de 71% émissions de l'ensemble des gaz à effet de serre.

On constate donc que le changement climatique n'est pas le fait de l'ensemble de l'humanité, dans la mesure où la responsabilité va grandement varier selon les pays ou les classes (tant au sens sociologique que marxiste du terme) à considérer.


Au delà de ces considérations statistiques, l'étude de l'histoire montre que l'avènement d'une économie basée sur les énergies fossiles n'était en rien une fatalité ou une conséquence inévitable de l'évolution humaine, mais bien le produit de choix stratégiques faits par les capitalistes et les états bourgeois, poussés par les contradictions inhérentes au mode de production capitaliste. Le terme de Capitalocène semble alors beaucoup plus indiqué pour désigner une éventuelle nouvelle époque géologique.

2 Aux origines de l'économie fossile

Dans son ouvrage L’Anthropocène contre l'Histoire, le géographe Andreas Malm expose le passage d'une industrie basée sur l'eau à une industrie basée sur la vapeur dans l'Angleterre des années 1830.

Pendant très longtemps, la machine à vapeur de James Watt (mise en production vers 1776) est restée impopulaire auprès des industriels, qui lui préféraient l'énergie hydraulique. Celle-ci domine effectivement l'industrie britannique jusqu'au milieu des années 1820. En effet, du fait notamment de sa disponibilité naturelle, l'énergie hydraulique était bien plus économique. Jusque dans les années 1870 au moins, toutes les études réalisées par les industriels ou économistes montrent la rentabilité supérieure de l'eau sur la vapeur. Ce n'est donc pas l'efficience de la machine de Watt qui explique l'inversion du rapport de force en sa faveur à partir de 1825/1830 et le déclin de l'hydraulique. Cela ne s'explique pas non plus par une éventuelle rareté de l'énergie hydraulique (la grande majorité du potentiel hydraulique anglais est resté inexploité).