II. Argentine : deux orientations à l'épreuve des faits

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1. Les faits démentent le camarade Germain.[modifier le wikicode]

Dans son texte, le camarade Germain affirme que, à partir du second « cordobazo » (insurrection de la ville de Cordoba), le PRT (C) a eu une orientation incorrecte en tentant de développer une armée populaire. Avant cette affirmation, il fait toute une série de considérations destinées à démontrer que le PRT(C) était dans le vrai et nous dans le faux quant aux perspectives avant le premier « cordobazo ». Comme d'habitude, il dilue un problème concret dans une question de perspective historique. Cela n'intéresse que peu de savoir si quelqu'un a su prévoir un an ou deux à l'avance la possibilité d'une insurrection (comment devrions-nous qualifier Lénine pour ne pas avoir prévu la proximité de la révolution russe !). Ce qui est réellement important et décisif, c'est de préciser quand a surgi une situation insurrectionnelle ou semi-insurrectionnelle, et s'il y a eu une politique correcte pour cette situation. Le camarade Germain ne daigne même pas répondre à ces questions qui lui furent posées par notre texte « Argentine, Bolivie : un bilan ».

Premier fait : le « cordobazo »[modifier le wikicode]

Nous affirmons que nous avons prévu le « cordobazo » et que nous étions pour l'impulser, alors que le PRT(C) ne l'a pas prévu et qu'il était contre le promouvoir. Les preuves à l'appui sont celles mêmes que nous vous avons déjà données dans le texte cité ci-dessus. Dans le sous-chapitre intitulé « Deux positions sur le « cordobazo » », nous avons placé deux citations catégoriques qui démontrent que nous avions prévu, un mois avant le « cordobazo », la montée qui se préparait et comment elle allait se manifester (« manifestations de masse, occupations de facultés, d'édifices publics, résistance aux forces de répression. Il faut étendre et coordonner ces actions. »), tandis que le PRT(C) disait le contraire peu de jours avant le « cordobazo » :

« C'était un suicide d'affronter la police et les autres organismes de répression avec les mains nues » et conseillait de ne pas faire de mobilisations de masse pendant longtemps, jusqu'à ce que les masses soient armées. Qui a eu raison camarade Germain ?

Deuxième fait : les conflits ouvriers[modifier le wikicode]

Il se passe la même chose avec toutes les « preuves » qu'apporte le camarade Germain pour réfuter notre affirmation selon laquelle la ligne guérillériste a provoqué l'éloignement du PRT(C) des actions de la lutte de classes réelle. Nous avons dénoncé que l'organe officiel du PRT(C), durant l'année 1971 (année des conflits ouvriers), n'a publié que trois articles généraux de caractère ouvrier et aucun sur ces conflits, alors que notre Journal en publia 250. Le camarade Germain nous répond par des faits inconnus : « ils ont publié plusieurs numéros spéciaux d'usines et de réunions syndicales ». Lesquels et où, camarade Germain ? Nous ne connaissons qu'un seul numéro d'un seul journal.

Bien sûr, le camarade Germain ne daigne même pas répondre à notre dénonciation : le PRT(C) ne prenait pas en compte les luttes ouvrières dans ses réunions de direction, il n'avait pas d'orientation pour elles et ne mentionnait quelquefois même pas les grèves générales qui se produisaient par intermittence. A Tucuman, une grève générale qui paralysa la province fut précédée par plusieurs jours d'agitation étudiante, un Mai français en miniature. Comme l'agitation étudiante fut plus « violente » que la grève générale, l'organe officiel du PRT(C) commenta ces faits en ignorant cette dernière. Il disait que Tucuman avait vécu des journées intenses... jusqu'au jour de la grève générale dont il ne parle pas. Pour eux, tout se termina ce jour-là, il ne se passa plus rien dans la province (qui resta paralysée pendant deux jours !). Exactement comme si, en analysant le Mai français, nous disions qu'après la nuit des barricades tout redevint normal dans Paris et dans la France, quand en réalité tout avait commencé. Il s'est passé la même chose avec toutes les grèves générales, en commençant par celles qui ont donné lieu au premier « cordobazo ». Nous ne savons pas quelles grèves partielles mena le PRT(C). Peut-être quelques unes, de toute manière très peu, puisque toutes les grèves importantes et les plus connues furent dirigées par les staliniens, les prochinois, le PCR ou nous, et quelquefois soutenus par Politica Obrera ou d'autres groupes d'extrême-gauche, PRT(C) compris. Quelles sont les grèves qu'a dirigé le PRT(C) ?

Troisième fait : la SITRAC-SITRAM[modifier le wikicode]

Nous pouvons dire la même chose de la SITRAC-SITRAM. Personne ici ne connaît la présidente des assemblées générales de SITRAC-SITRAM que cite le camarade Germain. Le président fut toujours le même : le « vieux Pedro ». Dans une de ces AG, parla une camarade très jeune, déléguée, oratrice exceptionnelle, qui appartenait au PRT(C) et qui émut l'AG par son intervention. Le camarade Germain parle-t-il d'elle ? Mais elle n'était pas présidente, camarade Germain. La direction politique dans cette entreprise était aux mains des prochinois, du PCR (ces deux ten­dances dirigeaient les AG) et nous (dirigeants de presque tous les conflits et des commissions internes classistes les plus importantes de Buenos Aires). C'est là la seule vérité. Le PRT(C) n'est jamais apparu comme un secteur d'importance dans ces assemblées générales.

Un critère définitif : comparer les deux organisations[modifier le wikicode]

Mais il n'y a rien de mieux pour comparer l'efficacité de ces deux orientations respectives que de vérifier la réalité actuelle des deux organisations. Commençons par les 40 000 affiliés. Le camarade Germain précise, avec justesse, qu'il ne s'agit pas de militants. C'est précisément pour cette raison que nous les appelons affiliés et non pas militants. Mais le camarade Germain minimise leur importance comme indice de notre influence politique : les affiliés doivent s'enregistrer comme tels face à un juge et aux autorités électorales. Il ne s'agit pas d'une simple signature pour solliciter la légalité, mais de remplir une fiche d'adhésion au parti et à son programme. Nous sommes la seule organisation de gauche qui ait réussi à profiter de cette marge légale, et nous pensons que, sauf pour le Parti communiste, il était difficile pour toute autre de le faire. Mais le camarade. Germain non seulement minimise l'importance du nombre de nos affiliés mais ignore totalement l'ouverture de nos locaux: plus de 50 ont été ouverts dans le pays. Et cela s'est accompagné d'une croissance du nombre de militants (pas « d'affiliés ») du parti et de la jeunesse, dans une moyenne de 400 par mois, à partir de la fin de la campagne électorale. Cela supporte favorablement une comparaison avec des sections plus importantes de la IVème lnternationale. Mais ce qui est le plus important à signaler, c'est le rythme d'expansion et de croissance de l'activité. Nous sommes arrivés à avoir 100 permanents du parti, nous avons eu la participation de plus de 10000 personnes au meeting de clôture de la campagne électorale.

Contre tout cela, le PRT(C) nous oppose le chiffre de participants à une concentration à Tucuman (sa base, avec des trains et des autocars venant de tout le pays) réalisée en alliance avec la gauche péroniste et Tosco. Ils n'eurent que 1500 personnes. A nous seuls, sans accord avec une autre tendance, nous avons réuni à Buenos Aires, entre les militants et les sympathisants, 4000 personnes, dont 2000 étaient des dirigeants ouvriers de base, et l'entrée dans la salle se faisait sur vignettes, ce qui indique que la participation était effectivement assurée par le travail du parti. A Cordoba, une assemblée générale réalisée par toutes les tendances de gauche a réuni 40 délégués et dirigeants ouvriers; une autre réalisée par nous en compta 80. Aujourd'hui à Cordoba, nous sommes la tendance de gauche la plus forte dans les usines les plus importantes. C'est là la réalité actuelle de nos deux organisations, conséquence de la réalité qui existait déjà à l'époque de la SITRAC-SITRAM.

2. Notre prétendue capitulation face à la fraude électorale et au gouvernement militaire.[modifier le wikicode]

Selon le camarade Germain, nous avons publié :

« plusieurs plate-formes pour leur, propre campagne et avec leurs position pour le mouvement des masses ». « Dans aucune n'était mentionné le caractère frauduleux des élections... ». « Cela déboucha sur le triste spectacle "d'Avanzada socialista" rencontrant le dirigeant syndical Tosco, récemment libéré de prison, et l'interrogeant sur ce qu'il pensait de l'idée d'une liste électorale des travailleurs aux élections, recevant pour réponse de Tosco que, avant tout, il faudrait dire que ces élections sont frauduleuses. Les trotskistes reçurent cette leçon d'un sympathisant du Parti communiste. Quelle expérience humiliante pour le camarade Moreno ! » (Germain, "En défense...", BII- juin 1973, n°7, p.69).

D'où le camarade Germain a-t-il tiré cette leçon que nous aurait donnée Tosco ? Dans l'interview qu'il cite, il se passe tout le contraire de ce que dit le camarade Germain.

Première falsification : la « leçon » que Tosco donne à Moreno[modifier le wikicode]

Examinons les citations de notre journal "Avanzada socialista". La première question du reportage fut de savoir si Tosco était pour « le pouvoir pour la classe ouvrière » et la « construction d'un parti ouvrier », comme façon de résoudre le problème de la « libération nationale et sociale ». Tosco répondit évasivement par la négative, disant être pour « l'union des forces populaires avec un programme au contenu transformateur et révolutionnaire ». Nous citons textuellement et dan son intégralité la seconde question :

« A.S : La solution électorale que propose la dictature est un piège prépare pour dévier la montée des masses que connaît l'Argentine. Est-ce votre avis ? (Précisons en passant que « piège » est un terme plus fort et qui définit avec plus de précision que « fraude » la signification de la manœuvre électorale montée par la bourgeoisie argentine) ».

Tosco répondit en affirmant ce que nous disions dans notre question, que les élections étaient un piège de la dictature. Suivent d'autres questions sans lien avec le sujet en discussion, jusqu'à la 5ème que cite le camarade Germain, disant ceci :

« A.S. : Notre parti a proclamé dans son organe officiel AS qu'il mettait à la disposition de candidatures ouvrières sa représentativité politique gagnée au niveau national. Cela veut dire que nous croyons à la candidature des Tosco, Gregorio Flores, Mera et des meilleurs de l'avant-garde ouvrière qui s'est révélée dans le processus ouvert il y a trois ans. Nous l'avons appelé le Pôle ouvrier et socialiste, puisque le socialisme est la revendication historique des travailleurs. Considérez-vous cela possible et dans ce cas-là y seriez-vous disposés ? »

Germain dit que Tosco aurait répondu : « avant tout, il faudrait dire qu'il s'agit d'élections frauduleuses ». Dans le n° 31 d'AS, du 27-9-72 où fut publié ce reportage, Tosco dit :

« Je comprends que nous, travailleurs, avançons vers une Argentine socialiste. Mais comme je veux agir avec responsabilité, je ne peux donc pas répondre à ce type de questions. Logiquement nous nous battons pour la libération nationale et sociale argentine et notre marche va vers une patrie socialiste. »

Cela signifie que la réponse, à nouveau évasive, donnée par Tosco à notre question, n'a rien à voir avec les paroles que Germain met dans la bouche de ce dirigeant centriste.

Ce problème de citations falsifiées, pour faire apparaître Tosco nous donnant une « leçon », est important pour clarifier la méthode polémique employée par le camarade Germain. Mais pour concrétiser la politique de notre parti, il est beaucoup plus important de voir la campagne constante d'Avanzada socialista, dénonçant les élections comme frauduleuses, ou les campagnes réalisées en faveur d'une lutte pour la légalisation du PC et des autres partis de gauche.

Une autre falsification : notre « silence » contre la dictature[modifier le wikicode]

Mais les falsifications ne s'arrêtent pas là. Dans son document, Germain nous accuse de :

« garder le silence sur l'existence de la dictature, sous prétexte que, de cette façon, soit gagnée la possibilité de réaliser une propagande légale... » (Germain, doc. cité, p.68).

Il est normal que, après avoir "prouvé" que nous avions commis ce méfait, il nous déclare coupable « d'une concession inacceptable à l'électoralisme ». Mais, est-ce que le camarade Germain nous lit ou, ce qui est plus probable, le fait-il d'une manière sélective ? Nous ne pouvons citer l'une après l'autre toutes les fois où nous avons dénoncé l'existence de la dictature dans A.S., dans nos tracts ou dans les interventions publiques de nos camarades. Ce serait une longue tâche ennuyeuse. Les camarades qui lisent l'espagnol peuvent le vérifier facilement. Malheureusement la majeure partie des camarades de l'Internationale ne peuvent pas le faire. Nous attirerons donc l'attention sur la première et la seconde question faites à Tosco dans AS, après sa sortie de prison par exemple. Et nous indiquerons que la défense des prisonniers politiques, l'appel à lutter pour leur liberté et la dénonciation de la répression furent des thèmes permanents de notre presse et de notre campagne électorale.

Pour terminer, nous rappellerons qu'en pleine campagne pour obtenir la légalité, dans deux numéros pris au hasard de cette époque, nous disions ce qui suit, avec ce titre sur toute la page du journal : « Contre le candidat de Lanusse, des candidats ouvriers et socialistes », dans un encadré de cet article ayant pour titre: « Le jeu des interdictions » :

« Le discours de San Nicolas, qui ne nous surprend pas puisque nous avons dénoncé et dénoncé dans ces colonnes le sens de cet "accord", ne peut pas nous faire oublier les tromperies contenues dans le discours antérieur de Lanusse, quand il soutenait que dans le processus d'institutionnalisation ne seront interdits que ceux qui veulent s'interdire volontairement. Maintenant nous savons que resteront sur la touche ceux qui n'acceptent pas les règles du jeu proposées. Mais même si les règles du jeu étaient acceptées, se sont-ils volontairement interdits ceux qui, tombant sous le coup de la Loi 17-401 qui institue le délit d'opinion, sous le contrôle de la Constitution elle même, ne peuvent avoir la légalité et doivent renoncer à l'action publique manifeste ? Se sont-ils interdits volontairement les fonctionnaires, professeurs et instituteurs qui, en application de cette loi, ont dû abandonner leurs moyens d'existence et aller chercher un air plus respirable sous d'autres latitudes ? Se sont-ils interdits volontairement les centaines de fils exemplaires de la classe ouvrière et du peuple qui restent dans les prisons de la République par la seule volonté du pouvoir exécutif ? Et ceux qui ont été condamnés en vertu des lois qui limitent la liberté de pensée, appliquées généreusement par la "Chambre de la Terreur" ? Et les groupements politiques qui n'ont pas encore pu surmonter les obstacles que la loi policière qui réglemente l'activité des partis politiques oppose à leur action ? Se sont-ils interdits volontairement les partis qui n'acceptent pas l'accord de capitulation que leur offre la dictature ? » (AS, 7 juin 1972).

« Les travailleurs ont démontré mille et une fois leur combativité. Particulièrement à partir de 1969, le mouvement ouvrier et populaire n'a pratiquement pas laissé de répit à la dictature militaire, et sa lutte a imposé des changements de gouvernements et de plans politiques. Les soulèvements urbains, les grèves et les mobilisations ont été permanents pendant ces quatre dernières années. Si les victoires n'ont pas encore été majeures, ce n'est pas seulement dû à la brutale répression avec laquelle la dictature défend les institutions du régime, ni aux manœuvres qu'elle effectue au moyen de ses miettes de concessions. C'est grâce à un élément qui agit en faveur de la dictature, qui a plus de force que l'appareil répressif, c'est le contrôle policier et le rôle de frein qu'appliquent : les directions syndicales reconnues par l'autorité de Peron. » (As, 20 septembre 1972).

Il n'est pas nécessaire de donner plus de citations puisque cette campagne s'est intensifiée de plus en plus pour dénoncer en permanence la dictature. Toute notre campagne est contre elle, contre les partis bourgeois, contre le péronisme et particulièrement contre le général Peron.

Camarade Germain, nous ne pensons pas que travestir les faits soit le meilleur moyen d'éduquer les militants de toutes les sections de l'Internationale sur la méthode du mouvement révolutionnaire trotskiste. Laissons de côté les procédés qui ne contribuent pas à débattre sérieusement des positions politiques en jeu.

3. Avons-nous capitulé devant Peron ?[modifier le wikicode]

Après nous avoir accusés de ne pas avoir dénoncé la fraude gouvernementale, le camarade Germain nous accuse d'avoir capitulé devant Peron et devant le péronisme. Sur quelle base ? Sur l'ensemble de notre campagne électorale qui a duré six mois ? Pas du tout. Si le camarade Germain avait revu ces six mois, il n'aurait pas eu d'autre recours que de reconnaître que, avec la dénonciation de la dictature militaire, l'attaque contre le péronisme du point de vue marxiste et prolétarien est le second axe général de notre campagne électorale. Des dizaines d'articles et de titres de la une de notre journal le démontrent.

Une tactique tirée hors de son contexte[modifier le wikicode]

Le camarade Germain centre son accusation sur une de nos tactiques, qui dura un mois, à partir du retour de Peron, et qui consista en un appel à la gauche péroniste pour exiger de Peron qu'il accepte 80% de candidats ouvriers. Nous appelions effectivement la gauche péroniste à se mobiliser sur cet objectif et pour imposer également « un programme de lutte », dernier aspect curieusement « oublié » par le camarade Germain. Si la gauche péroniste acceptait cette condition et que les candidats soient élus par la base, nous étions disposés à un soutien critique de leur lutte.

Pour faire cette critique, le camarade Germain une fois de plus sépare un élément de son contexte historique. Et c'est une grave erreur car il n'y a pas de bons ou mauvais mots d'ordre par nature ou à n'importe quel moment. Il y a peu de mots d'ordre de transition aussi bons et utiles que celui du contrôle ouvrier. Mais ce mot d'ordre, posé pendant la grève générale française au lieu de la lutte pour le pouvoir, se transforme en un mot d'ordre qui entrave le mouvement des masses, qui éloigne le prolétariat de la véritable tâche immédiate qu'il a devant lui, et finit par le dévier vers une impasse et lui faire perdre une occasion historique de victoire. Pendant la 3ème période, Trotski critiqua sans cesse les staliniens pour avoir utilisé le mot d'ordre de formation de soviets (le plus important du Programme de Transition) à un moment où les masses ne pouvaient pas l'appliquer. Au contraire, un mot d'ordre anodin considéré traditionnellement comme non marxiste, comme celui de « paix », pouvait être révolutionnaire dans une situation concrète, quand la bourgeoisie russe et le tsar ne pouvaient pas la concéder et qu'elle était pour les masses une nécessité impérieuse, immédiate. Nous pouvons dire la même chose du partage des terre, mot d'ordre petit-bourgeois, qui en 1917 devint révolutionnaire.

Il devient donc clair que la valorisation d'un mot d'ordre dépend étroitement de la situation concrète dans laquelle il est formulé. C'est ce qui s'est passé avec notre mot d'ordre et ce que laisse de côté le camarade Germain. Alors ? Quelle était la situation concrète dans laquelle nous lancions ce mot d'ordre ? Ou autrement dit, à partir de quelle analyse de la réalité le lancions-nous ?

Une analyse dynamique du péronisme[modifier le wikicode]

Nous soutenons que notre tactique fut correcte pour la simple raison quelle se base sur une analyse dynamique du péronisme en tant que phénomène politique. Cette analyse dynamique indiquait que le péronisme était engagé avec le gouvernement militaire pour imposer un programme réactionnaire, sa dynamique était de ne faire aucune concession au mouvement ouvrier. C'est cette dynamique que nous avons expliquée aux travailleurs argentins, quand nous leur disions, comme le cite Germain :

« Nous pensons que... Peron défend le patronat et qu'il accepte consciemment l'accord (avec les militaires) » (AS, 15 novembre 1972).

Avec cette dynamique, il était absolument impossible qu'il accepte, non pas 80% de candidats ouvriers et élus par la base sur un programme de lutte, mais qu'il accepte ne serait-ce même qu'un seul ouvrier classiste sur ses listes. Basée sur cette analyse, notre tactique était correcte et logique : proposer à l'avant-garde péroniste une tâche qu'elle trouvait juste mais qu'elle ne pouvait pas faire accepter dans les rangs péronistes. Si l'avant-garde péroniste entreprenait cette tâche, ses efforts se heurteraient à la dynamique du parti péroniste et de Peron, elle ferait une riche expérience et finirait par rompre avec Peron et son parti.

« Exigeons de Peron un plan de lutte pour une augmentation de 50 000 pesos et un salaire minimum de 120 000 réajustable tous les deux mois, et contre le chômage ». « Demandons-lui qu'il donne 80% des candidatures du Parti justicialiste pour que les travailleurs élisent, parmi eux, leurs candidats ! » « Si la responsabilité (de la politique anti-ouvrière du péronisme) ne vient pas de Péron, nous l'aiderons à rompre le « siège » des bureaucrates. Si malheureusement il l'est, comme nous le pensons, ce sont les travailleurs eux-mêmes qui doivent imposer le plan de lutte et les candidats ouvriers ». (idem).

La tâche d'imposer des candidats ouvriers et un programme de lutte au sein du péronisme, nous ne l'avons pas inventée, c'était une aspiration d'un secteur du mouvement ouvrier péroniste, de son aile la plus radicalisée. Nous pensons que, à ce moment historique, Peron ne pouvait pas admettre cette revendication et que dans ces circonstances cela pouvait conduire ce secteur à la rupture avec le péronisme. C'est pour cette raison que, avec ce mot d'ordre, nous avons encouragé la réalisation de cette tâche.

Notre tactique eut du succès et affaiblit le péronisme[modifier le wikicode]

Comme nous l'avions prévu, Peron refusa la proposition et en conséquence une partie de la direction syndicale péroniste de Tucuman rompit avec le péronisme et a gardé de très bonnes relations avec nous. Récemment, le secteur politique le plus conséquent de la gauche péroniste a fait une exigence similaire" à laquelle Peron ne répondit pas, et il s'est produit une rupture de fait.

Alors ? Cette manœuvre tactique, qui ne fut qu'une parmi tant d'autres que nous avons effectuées dans le cadre de notre stratégie électorale d'affrontement à la dictature et à Peron, a-t-elle bénéficié concrètement au péronisme et à Peron ? Personne ne peut affirmer une telle chose. Tout au contraire, elle a affaibli le péronisme, en provoquant une grave rupture dans une province-clé et ouvrant une perspective favorable pour notre parti et pour le mouvement ouvrier.

Et si nous nous étions, trompés ?[modifier le wikicode]

Mais supposons que nous ayons commis une erreur monumentale dans notre analyse et que Peron et son parti aient été en condition de satisfaire aux exigences posées par l'avant-garde péroniste. Supposons que dans notre analyse nous ait échappé l'existence d'une profonde tendance du mouvement ouvrier et de l'avant-garde à vouloir construire un parti de classe, une tendance suffisamment forte pour imposer sa majorité au sein du péronisme, mais encore trop faible pour atteindre le point critique de rupture avec Peron et son parti et pour construire un parti ouvrier indépendant.

Apparemment, une telle force prolétarienne serait positive car elle serait la manifestation de cette tendance progressiste du mouvement ouvrier et de son avant-garde. Son aspect négatif serait la contremanœuvre de Peron qui céderai du terrain afin de tenter d'assimiler cette tendance au sein de son parti pour la neutraliser.

Dans ce cas-là, notre parti devrait faire son autocritique pour s'être trompé dans son analyse, il devrait signaler l'aspect positif de ce phénomène ainsi que ses limites; il devrait se critiquer d'avoir proposé cette tâche à l'avant-garde péroniste, souligner surtout les limites de sa victoire au sein du péronisme et devrait continuer de mener sa politique électorale de présentation de candidats ouvriers, de classe et socialistes. Pour cette dernière tâche, notre parti était dans de parfaites conditions pour le faire, car il ne s'était engagé dans aucun soutien au péronisme.

Avec 80% de candidats ouvriers, le péronisme resterait un parti bourgeois[modifier le wikicode]

Ce ne fut qu'une simple manœuvre tactique qui donna de bons résultats. Nous n'avons jamais prétendu définir un parti bourgeois comme pouvant cesser de l'être par le fait d'avoir 80% de candidats ouvriers. Bien plus, nous sommes d'accord avec le camarade Germain pour dire que le caractère du péronisme ne changerait pas même avec 90% de candidats ouvriers, ni avec un programme de lutte, ni avec des candidats élus par la base. Il ne changera pas car ces candidats, même élus par la base, même sur un programme de lutte, continueront à soutenir qu'ils doivent rester dans le parti péroniste, avec Peron. Ce seul fait politique: la présence de Peron et la confiance des candidats en lui et en la nécessité de s'allier avec lui, démontre que le problème n'est pas numérique, qu'il n'est pas lié à la proportion de candidats ouvriers, mais qu'il est politique. Il est politique car il est lié à la croyance en la nécessité de s'allier avec Peron, un vieil agent de la bourgeoisie argentine. Même si dans ce parti ne restait que Peron et des ouvriers, mais ceux-ci le considérant toujours comme leur grand dirigeant, le péronisme resterait un parti bourgeois.

Une conception trotskiste orthodoxe que la majorité ne partage pas[modifier le wikicode]

Dommage que cette conception trotskiste orthodoxe que nous avons des partis, fronts, etc. ne soit pas partagée par le camarade Germain ni par le reste des camarades de la majorité, ni par la direction de la section française. Si le camarade Germain considère comme une capitulation l'appel fait à l'avant-garde péroniste à lutter pour imposer 80% de candidats ouvriers sur les listes justicialistes et le fait que nous nous soyons engagés à soutenir cette lutte (et non à soutenir électoralement le péronisme), nous ne comprenons pas pourquoi il ne critique pas les camarades français pour avoir soutenu électoralement l'Union de la Gauche.

Nous ne comprenons pas pourquoi, pour le camarade Germain, un front comptant 99,9% de candidats ouvriers (socialistes et communistes) et 0,01% de candidats bourgeois, avec un programme « réformiste » - c'est le cas de l'Union de la Gauche - cesse d'être un front populaire, si le péronisme avec 80% de candidats ouvriers et un programme de lutte n'aurait pas cessé d'être un parti bourgeois. Pour nous, le premier reste un front populaire et le second un parti bourgeois. Pour les camarades français bien sûr, l'Union de la Gauche n'était pas un front populaire puisqu'ils ne le dénoncèrent jamais en tant que tel mais le qualifièrent de « projet réformiste global ».

Un front avec l' « ombre politique de la bourgeoisie »[modifier le wikicode]

Nous ne comprenons pas le raisonnement des camarades français selon lequel l'unité politique avec la bourgeoisie n'est pas l'unité politique avec la bourgeoisie s'il y a peu de bourgeois dans cette unité. Tout comme le péronisme avec 99% de candidats ouvriers, un programme de lutte et Peron serait resté un parti bourgeois, l'Union de la Gauche, avec ses 99,9% de candidats ouvriers et 0,01% de candidats bourgeois et un programme réformiste, reste un front populaire. La grande différence entre notre politique et celle de la section française, c'est que, alors que nous ne nous sommes pas engagés à soutenir le péronisme, même dans les meilleures conditions, les camarades français ont passé leur temps à critiquer l'Union de la Gauche pour terminer par la soutenir.

L'Union de la Gauche française est un peu similaire au front populaire espagnol : il n'y a aucun secteur important de la bourgeoisie, mais l' « ombre politique de la bourgeoisie ». Mais Trotski dénonça sans cesse le front populaire espagnol et il aurait également dénoncé sans cesse l'Union de la Gauche française comme un front populaire.

Pour quel motif les fronts populaires le restent-ils même lorsque n'y participent pas de forts secteurs bourgeois mais l'ombre politique de la bourgeoisie ? C'est très simple: le stalinisme construit ses front populaires avec les bourgeois qui veulent le construire à ce moment-là. En France (comme apparemment en Espagne) ces bourgeois étaient peu nombreux, alors le stalinisme le construit avec ces quelques bourgeois-là.

L'Union de la Gauche française : un embryon de front populaire[modifier le wikicode]

Voyons cela sous un autre angle. Si, comme nous avons fait notre analyse dynamique et prévu que le péronisme ne pouvait accepter des candidatures ouvrières élues par la base sur un programme de lutte, les camarades français avaient fait également une analyse dynamique de l'Union de la Gauche. Supposons qu'ils se soient posés la question : quelles sont les perspectives historiques de ce front ? Quel est son avenir ? Ce que nous ne connaissons pas c'est leur réponse à cette question; mais nous connaissons la nôtre.

Pour nous, la dynamique de l'Union de la Gauche est celle de se constituer demain, dès que les conditions objectives seront favorables, en un front populaire modèle, avec tous les partis bourgeois qui voudront y entrer. Les camarades français sont-ils d'accord pour dire que c'est cette perspective qu'a l'Union de la Gauche ? Si ce n'est pas celle-ci, laquelle ?

Nous affirmons que l'Union de la Gauche française est prête à prendre la dynamique d'un front populaire en bonne et due forme (pas seulement avec l'ombre de la bourgeoisie comme aujourd'hui). Cette définition part de la politique générale, historique du stalinisme. Et cette politique n'est autre que celle de construire des fronts populaires au des unions nationales avec les bourgeoisies nationales, afin de freiner la révolution et instaurer un gouvernement ami de l'URSS. Les camarades de la majorité connaissent-ils un autre objectif historique du stalinisme ? S'ils en connaissent un autre, qu'ils nous le précisent clairement.

La majorité a fait le jeu du front populaire des staliniens français[modifier le wikicode]

En tant que trotskistes, nous pensons que l'objectif du stalinisme est celui que nous signalons. L'Union de la Gauche française n'est donc qu'une tactique électorale de la stratégie stalinienne de construction de fronts populaires. Par ailleurs, cette tactique de construction de fronts populaires électoraux, comme antichambres de gouvernements de front populaire démocratiques-bourgeois, n'est pas exclusivement celle des staliniens français, c'est une tactique mondiale du stalinisme.

C'est une grave erreur de caractérisation qu'ont faite les camarades français en disant que l'Union de la Gauche n'était pas un front populaire puisqu'il y avait peu de bourgeois. Cette erreur de caractérisation les a amenés à une autre grave erreur, ils sont tombés dans l'opportunisme et ont fait le jeu de la politique de front populaire' du stalinisme français.

La question du Front élargi uruguayen[modifier le wikicode]

C'est pour cela que nous ne pouvons que nous étonner que, avec une telle politique en France, les camarades de la majorité fassent tant de scandale sur notre tactique électorale face au péronisme qui ne dura qu'un mois. Mais le scandale ne se limite pas à cela. Les camarades de la majorité nous accusent d'avoir cédé à la pression bourgeoise et stalinienne en Uruguay, pour avoir soutenu le Front élargi aux dernières élections.

Nous pensons que, lorsque l'on nous obligea à voter pour Seregni et d'autres candidats bourgeois pour pouvoir rester dans le Front élargi, nous aurions dû nous retirer et faire un terrible scandale. Nous pensons que ce fut une réussite d'y être entrés, car cela nous a facilité le travail dans le mouvement des masses. L'erreur des camarades uruguayens ne fut pas d'y être entrés mais de ne pas en être sortis à temps, dès que la direction bourgeoise tenta d'imposer sa discipline.

Mais nous pensons que ce fut une grave erreur, pas une trahison, car les camarades uruguayens, comme l'a démontré le camarade Hansen par d'abondantes citations, firent une dénonciation principielle du Front élargi.

Une comparaison : la section uruguayenne et la section française[modifier le wikicode]

Les camarades uruguayens ont fait une erreur lorsqu'ils se sont trouvés face à une alternative : soit rester dans le front et voter pour les candidats de celui-ci (orientation erronée), soit être obligés d'en sortir et faire un grand scandale (orientation correcte). L'opportunisme des camarades uruguayens avait, au moins, une raison de poids : leur travail contre le Front élargi de l'intérieur. L'opportunisme des camarades français fut, par contre gratuit: ils soutenaient l'Union de la Gauche de l'extérieur, sans même avoir l'excuse de devoir le faire formellement pour la détruire de l'intérieur.

Voyons maintenant ce qu'a fait la section française. En France, nous n'étions contraints par aucune exigence tactique quelle qu'elle soit, puisque nous n'avons jamais été à l'intérieur de l'Union de la Gauche, ni pratiqué l'entrisme dans aucun des partis réformistes. Nous ne risquions de perdre absolument rien en ne votant pas pour l'Union de la Gauche. En ne votant pas pour les candidats bourgeois, tout était résolu. Mais nous avons voté pour eux en votant pour l'Union de la Gauche.

Mais les deux erreurs, celle des camarades uruguayens comme celle des camarades français sont de graves erreurs, en aucune manière des trahisons. Ce qui est une véritable trahison, c'est de soutenir électoralement un front populaire ou un mouvement nationaliste bourgeois sans dénoncer que son existence est une trahison du mouvement ouvrier. Cela signifie que le vote en soi est pour nous un problème tactique et non de principe. Ce qui est principal c'est l'orientation, et celle-ci doit être de dénoncer implacablement tout front populaire ou nationaliste bourgeois où se trouve la classe ouvrière, comme une trahison de la part des partis ouvriers réformistes qui les proposent.

Les camarades uruguayens appliquèrent largement cette politique principielle. Nous aussi, en Argentine, avons fait également une implacable dénonciation du péronisme et de l'ébauche de front populaire que tenta de concrétiser le stalinisme argentin à travers l'Alliance populaire révolutionnaire.

Les camarades français ont-ils fait de même ? Les camarades français (avec l'appui des camarades de la majorité) ont mené une campagne sur tous les tons de dénonciation de l'Union de la Gauche. Et cela est très correct. Mais le seul ton qui leur a manqué (toujours avec l'appui inconditionnel de la majorité) fut celui pour dénoncer que l'Union de la Gauche était un front populaire en puissance, un organisme ennemi des intérêts de la classe ouvrière.

Pour critiquer, il faut commencer par s'auto-critiquer[modifier le wikicode]

Si notre caractérisation de la dynamique de l'Union de la Gauche est correcte, si celle-ci n'est que la tactique électorale du Parti communiste français dans le cadre de sa stratégie de construction de front populaire, si notre section française n'a pas dénoncé cette dynamique que va prendre l'Union de la Gauche, si elle l'a soutenue aux élections (et c'est ce qu'elle a fait), nous pouvons malheureusement en tirer une seule conclusion : nous avons voté en France, sans la dénoncer en tant que telle, pour une tactique électorale qui entre dans une stratégie de front populaire. Cet opportunisme a eu l'approbation et l'encouragement des camarades de la majorité. Ne semble-t-il pas au camarade Germain que pour critiquer (même s'il avait raison) une facette secondaire de notre politique électorale, il devrait commencer par se critiquer lui même pour avoir défendu les barbaries que nous avons faites en France ?

Mais il y a pire. Le camarade Hansen a fait une critique publique de la tactique électorale des camarades uruguayens, contre notre avis selon lequel une telle critique devait avant tout être adressée aux camarades boliviens ou, encore mieux, il ne fallait pas porter de critique publique du tout. Ne parait-il pas suffisant au camarade Germain que les camarades uruguayens aient accepté cette critique ? Que veut-il de plus ? Nous ne nous attendons pas de sa part à une attitude semblable à celle de Hansen par rapport à la tactique électorale de la section française.

4. Devions-nous nous présenter aux élections et profiter de la légalité ?[modifier le wikicode]

Selon le camarade Germain, nous avons agi en Argentine comme si nous étions « en Grande-Bretagne avant 1914 ou aux États-Unis en 1938 ou 46 ». Pour lui, la situation de notre pays est similaire à celle de l'Espagne et de la France en 1936. Toutes les analogies sont périlleuses. Dans la situation du prolétariat argentin, et par conséquent dans la situation objective argentine, il existe une contradiction aiguë, peut-être unique mais qui, dans tous les cas, rend impossible la comparaison avec les pays que cite le camarade Germain.

Quelle est cette contradiction ?[modifier le wikicode]

Le mouvement ouvrier argentin est péroniste et reconnaît comme principal leader politique et syndical un dirigeant bourgeois : le général Peron.

Cependant, il a un très haut degré de combativité et d'organisation syndicale. Surmonter cette contradiction veut dire hausser le développement politique de la classe ouvrière jusqu'au niveau atteint par son organisation syndicale et ses luttes, et c'est la principale tâche posée aujourd'hui aux révolutionnaires en Argentine. Cela signifie que la grande tâche historique de cette étape consiste à gagner l'indépendance politique du mouvement ouvrier. Dans aucun des pays énumérés par le camarade Germain (et à l'époque indiquée) n'est posée cette tâche, car le prolétariat y avait ses organisations politiques de classe.

Naturellement, l'indépendance politique du mouvement ouvrier ne pourra s'obtenir que par la mobilisation de classe. Mais cela ne signifie pas que nous ne puissions pas utiliser les élections et la légalité bourgeoise pour soutenir et, dans la mesure du possible, diriger ces deux processus combinés mais non identiques : l'indépendance politique et la mobilisation de la classe ouvrière.

Une analogie plus adéquate : l'Espagne en 1931[modifier le wikicode]

Nous le répétons, les analogies sont périlleuses, car elles mettent l'accent sur les ressemblances et estompent les différences qui peuvent être plus importantes que les premières. Connaissant ce risque, nous oserons en faire une: plus qu'à l'Espagne ou la France en 1936, l'actuelle situation argentine paraît similaire à celle de l'Espagne en 1931. Trotski signalait que s'ouvrait une étape révolutionnaire mais que, comme les masses avaient toujours une grande confiance dans les partis et le parlement bourgeois, il était impératif d'intervenir dans les élections et d'accompagner l'apprentissage par les masses du parlementarisme bourgeois, en participant aux Cortès. Le fait que la situation était révolutionnaire ou pré-révolutionnaire ne constituait pas un obstacle pour intervenir dans les élections. Au contraire, cela le rendait plus nécessaire. Le stalinisme s'opposait à Trotski, proposant l'armement du prolétariat. Écoutons comment Trotski les qualifiait :

« Opposer le mot d'ordre d'armement du prolétariat à la réalité des processus politiques qui coulent dans les veines des masses signifie s'isoler des masses - et les masses des armes. » (déjà cité dans .'The Spanish Revolution").

Se présenter aux élections en plein milieu de la révolution bolivienne ?[modifier le wikicode]

Mais il y a une analogie que le camarade Germain n'a pas eu l'idée de mentionner, celle de la Bolivie en 1952 et 56.

Pendant ces années-là en Bolivie existaient des milices ouvrières et la possibilité d'une insurrection ouvrière et paysanne qui impose « tout le pouvoir à la COB avec ses milices ». C'était une situation beaucoup plus aiguë qu'en Argentine après le « cordobazo », les masses boliviennes avaient renversé définitivement la dictature militaire au moyen d'une insurrection et avaient gardé les armes. Dans une telle situation, bien plus révolutionnaire que celle de l'Argentine, la direction de notre Internationale proposait systématiquement pour la Bolivie la présentation aux élections. Le IV° Congrès de l'Internationale, par la plume du camarade Germain conseillait en 1954 pour la Bolivie une :

« campagne pour des élections générales avec droit de vote pour tous les hommes et toutes les femmes de plus de 18 ans pour élire une Assemblée constituante et présenter des listes ouvrières de la COB aux élections » (Résolution du IV° Congrès, juin 1954, p.54).

Et cette analogie s'étend à juin 1956, quand le POR se présenta aux élections malgré leur caractère d'escroquerie.

Ces analogies sont assez illustratrives. Cependant, les camarades de la majorité se refusent à répondre catégoriquement à notre question: devions-nous oui ou non nous présenter à ces élections ? Pour eux, se présenter aux élections n'est pas décisif, ce qui est décisif c'est la politique avec laquelle nous nous y présentons. C'est là une manière incorrecte d'envisager le problème.

Sans participation aux élections, il ne pouvait pas y avoir de politique correcte[modifier le wikicode]

Quelle est la signification de l'affirmation de Trotski que nous avons citée, selon laquelle on ne doit pas lancer de mots d'ordre éloignés des « processus politiques qui coulent dans les veines des masses » ? Cela signifie-t-il que, parce que les masses se font des illusions sur les élections nous devons nous laisser entraîner dans l'électoralisme ? Trotski n'a jamais rien affirmé de cela. Il affirmait que c'est seulement à partir de ces processus politiques réels que nous pouvons concrétiser notre politique.

Si les masses se font des illusions sur les élections, si sur tous les lieux de travail on en parle, si même (comme ce fut le cas en Argentine) les mobilisations sont freinées par l'attente que des élections (ou la victoire du péronisme) résolvent les problèmes, si tout cela se produit, la seule manière de formuler notre politique c'est à partir de cette question des élections qui accapare l'attention du mouvement des masses.

Les mots d'ordre généraux de l'étape changent-ils pour autant ? Non, ils ne changent pas, mais nous ne pouvons les formuler qu'à partir des élections. Elles sont le point de départ obligatoire pour dénoncer qu'elles sont un piège, pour dire que la seule voie est celle de la mobilisation et pour insister sur la nécessité d'un parti ouvrier indépendant de la bourgeoisie. Nous pouvons dire exactement la même chose sans participer au processus électoral, mais les masses, entraînées par lui, ne nous écouteront pas.

Par conséquent, c'est une obligation pour les révolutionnaires de participer aux élections quand les masses croient en elles. Peu importe dans quelle étape de la lutte des classes nous sommes. La première chose à définir, c'est la base de départ sur laquelle nous donner une politique correcte.

Ce qui est arrivé aux sectes argentines[modifier le wikicode]

Dans notre pays, il y eut plusieurs organisations marxistes (Politica Obrera, le PCR, l'ERP) qui disaient comme nous que les élections et le parlementarisme étaient une tromperie et qu'il fallait poursuivre les mobilisations. Mais elles ne le dirent pas à partir du processus électoral dans lequel étaient engagées les masses, mais de l'extérieur. Les résultats sont visibles : ces organisations n'ont pas su se faire entendre par les masses ni par l'avant-garde ouvrière, elles avaient l'air de martiens parlant une langue distincte et de thèmes distincts de ceux que les masses discutaient. Ils sortirent des élections beaucoup plus faibles qu'auparavant et au bord de la liquidation totale. Par contre, en disant en général la même chose que ces organisations, en y ajoutant la nécessité d'un parti ouvrier indépendant (formulée par nos candidats ouvriers), les élections furent un des points-clés du développement et de la croissance de notre parti, elles signifièrent un saut qualitatif.

La majorité raisonne comme les sectes argentines[modifier le wikicode]

C'est là que réside l'erreur des camarades de la majorité. Ils raisonnent comme les sectes argentines dont nous venons de parler et qui pensaient que ce qui est important c'est la politique, et que se présenter aux élections est secondaire. Pour nous, c'est exactement le contraire : à ce moment-là, ce n'est qu'en nous présentant aux élections que nous pouvions formuler notre politique. Si nous ne nous étions pas présentés, nous n'aurions pu formuler aucune politique correcte, car nous nous serions éloignés de la réalité « des processus qui coulent dans les veines des masses ». Nous aurions pu dire la même chose, mais nous devenions alors un groupuscule sectaire de propagande, à cent lieues du problème concret, immédiat, présent des masses argentines. Et même pire, nous laissions les masses entraînées, sans aucune opposition, par les partis bourgeois, abandonnées sans position de classe face au problème le plus important pour elles alors, le processus électoral.

C'est pour cela que nous insistons, en Argentine, on ne pouvait formuler aucune politique révolutionnaire sans partir d'une participation aux élections. C'était une question stratégique que nous devions d'abord résoudre et nous l'avons résolue. Voyons maintenant avec quelle tactique nous nous y sommes présentés.

Notre tactique électorale et les mobilisations[modifier le wikicode]

Le camarade Germain a porté de graves accusations contre notre organisation. Principalement une: que notre activité centrale, dans une étape pré-révolutionnaire avec d'intenses mobilisations ouvrières et populaires, a été électorale et non mobilisatrice. Il dit que nous avons fait ainsi de :

« la question des candidats indépendants de la classe ouvrière dans des élections frauduleuses sous une dictature décadente, et non la question de renverser la dictature (comment généraliser les « cordobazos ! » vers un « argentinazo »), l'axe principal de son activité politique » (Germain, document cité, p.70).

Nous ne savons pas d'où le camarade Germain tire cela. Examinons nos documents électoraux (publiés dans une brochure) et notre plate-forme électorale. Dans le document adopté le 17 décembre 1972, il existe tout un chapitre intitulé « Utiliser les élections pour expliquer la nécessité d'un "argentinazo" ». Nous y disions que :

« Pour cela, les grands mots d'ordre de notre campagne électorale doivent être : Pour la liberté des prisonniers politiques et syndicaux ! Pour les libertés démocratiques, pour l'abrogation de toutes les lois répressives ! A bas le gouvernement militaire actuel ! A bas le gouvernement bourgeois alternatif ! Faisons un "argentinazo" pour nous libérer définitivement ; de l'impérialisme et du capitalisme ! »

Et nous précisions plus loin :

« Nous ne voulons pas des morts ni des blessés des "cordobazos", mais nous devons nous y préparer car ils seront inévitables, puisque les exploiteurs nous l'imposent ».

Notre plate-forme électorale et notre utilisation de la télévision[modifier le wikicode]

Par décision du parti et à la même date, la plate-forme électorale comporta sept points. Cette résolution reçut une ample publicité et fut publiée dans la brochure déjà mentionnée. Voici ces sept points :

« 1) libération des prisonniers politiques et syndicaux ; 2) Pour les libertés démocratiques, à bas la législation répressive ; 3) A bas le gouvernement militaire ; 4) Dehors le futur gouvernement capitaliste ; 5) Résistons à la répression impérialiste et capitaliste par un « argentinazo » qui impose un gouvernement ouvrier et populaire ; 6) Pas une voix pour les militaires ni pour les bureaucrates syndicaux, pas une voix pour les « docteurs » ni pour les patrons. Votez pour vos camarades, pour les candidats ouvriers ; 7) Pas une voix pour les candidats patronaux de Coria et Miguel » (les deux bureaucrates syndicaux les plus importants et connus à ce moment-là. Coria du Bâtiment et Miguel de la Métallurgie ). ("Le PST face aux élections", p. 3,4 et 6).

En accord avec les dispositions de la loi électorale, le gouvernement nous concéda deux heures de passage à la télévision. Ces deux heures ont tourné autour d'une seule idée: tout ce que nous avons obtenu c'est grâce au « cordobazo » et aux mobilisations ouvrières et populaires, (et l'intervention était accompagnée par la projection de films de ces mobilisations) ; par conséquent, les élections sont une fraude qui nous mène dans une impasse ; ce qu'il faut faire c'est un « argentinazo », une insurrection ouvrière et populaire pour renverser le gouvernement.

Notre campagne électorale et les luttes ouvrières[modifier le wikicode]

Mais il y a quelque chose de beaucoup plus important et beaucoup plus concret. A l'époque de la campagne électorale devait se réaliser le renouvellement des conventions collectives de travail. Le parti prévoyait que d'importantes mobilisations ouvrières se produiraient autour de ces renouvellements. La conclusion était évidente: empêcher que les élections ne dévient la classe ouvrière de ses luttes, comme c'était le plan de la bourgeoisie et de la bureaucratie syndicale. Nous prenions bien entendu en compte la réalité de la lutte de classes. Il y a une foule de citations, nous en prendrons une parmi tant d'autres. Dans le document « Faisons une campagne révolutionnaire et socialiste », nous disions :

« Le grand mot d'ordre national du parti en ce moment doit être : empêchons que les élections dévient la classe ouvrière de sa lutte pour de bonnes conventions et pour une augmentation substantielle des salaires » « Notre position doit être : les élections sont en train de provoquer une ivresse qui fait oublier à la classe ouvrière ses véritables grands problèmes concrets de ce moment, les salaires de misère... »

Et dans un chapitre spécial intitulé : « La campagne électorale et les conflits ouvriers », nous ajoutions :

« C'est l'axe essentiel de notre campagne électorale, avec sa conséquence pratique : il nous faudra intervenir dans tous les conflits pour les conventions qui éclateront. L'activité électorale ne doit pas être un motif pour nous éloigner des conflits, au contraire, la campagne devra nous permettre de détecter et participer à beaucoup plus de conflits que d'habitude. Si nous agissons ainsi, notre campagne ne sera pas électoraliste, sinon, malgré toutes les phrases révolutionnaires que nous employons, nous dévierons des expériences et des luttes réelles de notre classe vers le propagandisme ». « En résumé, nous pouvons dire que la campagne électorale ne signifie pas abandonner l'activité habituelle du parti dans les luttes concrètes de la classe ouvrière, des luttes pour des augmentations de salaire aux « cordobazos », mais amplifier et développer l'énorme expérience que nous avons de ce type de luttes. » (PST, doc.cité, p.22-23).

La campagne électorale fut l'application au millimètre près de ces résolutions. A travers elle, la liaison du parti avec les conflits ouvriers se multiplia. De nombreux militants eurent un rôle remarquable dans la lutte pour les conventions, comme dans d'innombrables luttes partielles, par usine ou par branche. Citons quelques-uns des nombreux exemples possibles. Dans la Métallurgie, il y eut une mobilisation très importante contre les réductions que la direction voulait effectuer sur les augmentation de salaires négociées avec le patronat. Notre parti fut en première ligne de cette mobilisation qui toucha de nombreuses usines. Dans l'usine sidérurgique la plus importante du pays, la SOMISA à San Nicolas, le candidat de notre parti dirigea l'occupation de l'usine, affrontant les méthodes brutales de la bureaucratie syndicale contre lui. Dans la longue grève à l'usine de plastiques Pan à Tucuman, un dirigeant du parti fut élu au comité de grève, bien qu'il ne soit pas ouvrier de l'usine. Ce n'est pas un hasard si, dans les derniers jours de la campagne électorale, le numéro un de la bureaucratie syndicale, le secrétaire général de la CGT Jose Rucci, attaqua violemment notre candidat aux présidentielles dans un télégramme qu'il lui envoya spécialement, chose qu'il ne fit pour aucun autre candidat.

Nous voulons une réponse : fallait-il participer aux élections oui ou non ?[modifier le wikicode]

Il est donc clair maintenant qu'il est faux de dire que nous ayons fait de la participation « aux élections le principal axe de notre activité politique » comme l'affirme le camarade Germain. Au contraire, nous avons utilisé l'activité électorale comme une arme de plus dans la lutte de classes. Le problème est politique mais le camarade Germain n'y répond pas. Il ne le pose même pas. Était-il impérieux pour un parti trotskiste argentin d'utiliser la légalité et les élections jusqu'au maximum des possibilités ? Fallait-il se présenter aux élections ? Le camarade Germain répond évasivement par des généralités : en général et en principe, il n'est pas incorrect de se présenter à des élections. La question est : dans le cas concret argentin, fallait-il le faire ou non, camarade Germain ? Parce que les situations sont concrètes et qu'il faut leur donner des réponses concrètes.

Une des orientations de base d'un parti trotskiste est d'utiliser la légalité et les élections. Avons-nous appliqué ou non cette orientation de base, camarade Germain ? Le PRT(C) a-t-il bien fait ou non en ne l'appliquant pas ? Ce n'est qu'après avoir donné des réponses catégoriques à ces questions que nous pourrons commencer la discussion sur notre tactique électorale et sur nos mots d'ordre. Ce n'est qu'alors que nous pourrons discuter si nous avons bien fait ou non de centrer la propagande électorale sur la dénonciation de la dictature et la nécessité de la renverser, sur l'abrogation des lois répressives et sur la nécessité d'un "argentinazo"; si nous avons bien fait ou non de centrer notre activité sur la lutte de classes, subordonnant la campagne électorale à cette activité et la combinant à elle.

Parce que, si nous avons mal fait en nous présentant à ces élections, les mots d'ordre et l'orientation de notre travail autour de ces élections ont dû être mauvais également. Peu importe que ces mots d'ordre et cette orientation soient bons en soi. Mais si nous avons bien fait, s'il fallait se présenter aux élections, nous avons réussi en ce qui est décisif, dans la réponse concrète à une situation concrète, même si nous nous étions éventuellement trompés sur les mots d'ordre et l'orientation de notre travail, qui furent cependant exactement ceux que prône le camarade Germain comme corrects.

5. La politique guérillériste de la majorité.[modifier le wikicode]

Alors que nous nous orientions vers l'utilisation de la légalité et la présentation de candidats aux élections afin de mieux intervenir dans le mouvement des masses, le PRT(C) développait une orientation radicalement opposée : la guérilla urbaine et le terrorisme, bénéficiant ainsi de l'appui enthousiaste de la majorité de l'Internationale.

Les critiques viennent bien tard[modifier le wikicode]

Aujourd'hui, alors que pour tout le mouvement le désastre de cette orientation est évident, le camarade Germain tente de la critiquer rétrospectivement. Il nous dit maintenant que ce fut une erreur que le PRT(C) se soit consacré, après le second « cordobazo », à la constitution d'une armée révolutionnaire. Pour le camarade Germain donc, la politique du PRT(C) ne commença à être erronée qu'à partir du début 1971. Cependant, les dirigeants de la majorité applaudissaient alors à cette politique et ne surent pas la critiquer au moment voulu. Écoutons le camarade Maïtan, dirigeant avec le camarade Germain de la tendance majoritaire :

« la perspective stratégique des camarades argentins est celle qui fut établie par le IX° Congrès mondial de la IV° Internationale, élaborée et précisée par les deux derniers congrès nationaux du PRT » (IP, vol.9, n°16, 26 avril 1971, p.388).

Les Congrès nationaux auxquels se réfère l'article furent ceux qui, quelques mois avant le second « cordobazo », décidèrent la construction de l'Armée révolutionnaire du peuple (ERP), résolution que Germain trouve aujourd'hui erronée, trois ans plus tard.

Un bilan enthousiaste de l'activité de l'ERP[modifier le wikicode]

Pour qu'il ne reste aucun doute! sur quelle était la position de la majorité face à l'orientation qu'imprimait à son activité la section officielle argentine, citons le résumé des actions menées par le PRT(C) pendant la période des grandes mobilisations des masses argentines, résumé extrait du même article :

« Ces actions, qui se sont produites en une succession rapide à partir du début de l'année et spécialement en février et la première quinzaine de mars, et qui ont fait grande impression sur la presse bourgeoise quotidienne et hebdomadaire, peuvent être classées dans les catégories suivantes: a) actions en vue d'acquérir des fonds au moyen d'expropriations menées dans la vieille tradition bolchevique (le coup le plus spectaculaire fut celui de Cordoba et selon la presse argentine il rapporta à ses organisateurs un butin de 121 millions de pesos) ; b) actions en vue de l'acquisition d'armes et de médicaments (le coup le plus spectaculaire fut celui d'une clinique de Buenos Aires) ; c) actions en vue de gagner la sympathie des couches les plus nécessiteuses par la remise de nourriture (viande, lait, etc.) prise aux grandes firmes distributrices ; d) actions liées aux luttes ouvrières (la plus importante jusqu'à aujourd'hui fut celle que mena un détachement armé qui envahit l'usine Fiat de Cordoba et y appela à une réunion). » (IP cité p.388).

Et cela fut publié à l'époque du second "cordobazo", c'est-à-dire alors que s'était déjà révélée erronée l'orientation du PRT(C), selon ce que vient de découvrir le camarade Germain. Orientation erronée ? Sans aucun doute. Mais la majorité ne peut nier sa part de responsabilité dans cette orientation par son appui total. Choisissons trois exemples, pour les trois dirigeants principaux de la majorité, de leurs déclarations après le second « cordobazo », pour démontrer que leur critique au PRT(C) et à l'ERP est récente.

Les dirigeants de la majorité font l'éloge du PRT(C)[modifier le wikicode]

En juin 1971, des mois après le second "cordobazo", Maïtan écrivait :

« Toute l'Internationale devrait se réjouir du fait que dans la période qui va de la fin de l'année passée jusqu'à début juin 71 - après sa propre reconstruction et les difficultés qu'affrontent d'autres groupes - l'ERP, fondée par le PRT, est apparue comme la plus dynamique des organisations qui mènent la lutte armée en Argentine, capable de réaliser une large gamme d'actions à un rythme intensif et avec une efficacité certaine. S'agit-il d'actions qui n'entrent pas dans les critères du marxisme révolutionnaire ou du léninisme ? » ("Discussion on latin America" 1968-71, p.173).

Pierre Frank, également des mois après le second « cordobazo », faisait cette évaluation générale de la ligne politique du PRT(C). En août 71, il écrivait :

« En ce qui concerne les activités de nos camarades de la section argentine, le PRT et son organisation armée l'ERP, nous ne les considérons pas comme ultra-gauches. Nous pensons que leur politique correspond en grande part aux nécessités actuelles de la lutte de classes dans leur pays ». ("lettre de Frank au Congrès du SWP").

Germain, en avril 1972, un an après le second « cordobazo », déclarait encore son accord avec l'orientation générale du PRT(C) vers la lutte armée :

« Ensuite, tout en affirmant notre accord avec l'orientation générale du PRT de développement de la lutte armée, nous exprimons l'espoir que nos camarades trouvent le moyen de lier la lutte de la manière la plus intime au développement de la lutte des masses, avec une orientation politique claire vers la révolution socialiste et prolétarienne, contre tout concept de révolution par étapes ». ("la Gauche", 21 avril 1972).

Selon la majorité, la « lutte armée » de l'ERP à dépassé Saint-Domingue[modifier le wikicode]

Finalement, Maïtan, Germain et Frank résumèrent leur évaluation du PRT-ERP dans la résolution adoptée en décembre 72, plus d'un an et demi après le second « cordobazo ». Ils caractérisèrent les actions du PRT-ERP comme élevant le niveau de « lutte armée (au) point le plus haut atteint en Amérique latine depuis la révolution cubaine, dans la mesure où elles représentaient une tentative d'intégrer la lutte armée à la dynamique concrète de la lutte des masses » (HDB, vol.10, n°6, p.18).

Pour Frank, Maïtan, Germain et le POR(C) qui, au cours d'un CC réuni en Bolivie en avril 71, adoptait une résolution pour « soutenir toutes les actions du PRT et de l'ERP », le PRT-ERP était arrivé à un niveau de lutte armée plus élevé que celui des masses dominicaines quand elles résistèrent à l'invasion de 30000 marines américains, ou celui des luttes armées qui se produisaient dans le mouvement des masses paysannes au Pérou, dirigé par Hugo Blanco.

Tout cela est une preuve documentée des positions des dirigeants de la tendance majoritaire du CEI « après le second « cordobazo » », par rapport à la « lutte armée » du PRT- ERP.

6. La politique actuelle du camarade Germain : du guérillérisme au syndicalisme révolutionnaire ultra-gauche de la grève générale en soi.[modifier le wikicode]

Aujourd'hui le camarade Germain tente de se désolidariser des échecs, déchargeant la responsabilité des anciens enthousiasmes pour le PRT(C) sur le camarade Maïtan. Il se lave également les mains de savoir s'il était correct ou non que nous nous présentions aux élections. Mais en dépit de ce flou, il nous donne indirectement une réponse programmatique pour notre pays.

Le programme du camarade Germain pour l'Argentine[modifier le wikicode]

« Mais, dans une situation pré-révolutionnaire, un marxiste révolutionnaire ne dit pas aux ouvriers qu'avoir des candidats ouvriers dans une élection est un pas en avant. Il devrait leur dire : « Si la dictature est en recul, c'est le résultat, de six "cordobazos" et de l'apparition de groupes se consacrant à la lutte armée. Continuez dans cette voie. Construisez des comités locaux d'usines et de quartiers pour vous organiser de façon permanente pour vos mobilisations. Commencez par unifier tous les syndicalistes, étudiants, femmes et militants radicalisés qui sont prêts à s'unir pour ces préparatifs. Coordonnez nationalement les fractions classistes des syndicats et liez-les aux comités d'avant-garde. Commencez votre armement. Méfiez-vous d'une continuation ou d'un rapide retour à de violentes répressions et confrontations. Ne cédez pas aux illusions parlementaires. Le capitalisme argentin ne peut vous garantir une augmentation significative de niveau de vie. C'est pour cela que la lutte de classes s'aiguise de jour en jour. C'est la raison pour laquelle vous devez poursuivre la voie des "cordobazos". N'importe quel recul de l'armée aujourd'hui ne sera que temporaire. De grands chocs avec l'armée sont inévitables. Ne les affrontez pas de façon spontanée et désorganisée. Préparez-vous et organisez-vous pour cela. Préparez une grève générale insurrectionnelle » ». (Germain, doc. cité p .38).

Ce programme si soigneusement développé n'a rien à voir avec notre pays. Il ne dit pas un mot de la CGT et des syndicats, de leurs dirigeants pourris et traîtres. Pas un mot sur le péronisme, sur Peron et sa présentation aux élections. Il ne mentionne même pas le fait que la classe ouvrière croit en Peron et qu'elle le soutiendra massivement dans sa présentation aux élections !

Le programme d'un côté, la réalité argentine... de l'autre[modifier le wikicode]

Malheureusement pour le camarade Germain, la réalité argentine ne coïncide absolument pas avec son schéma. Le mouvement ouvrier est solidement organisé dans les syndicats et sur le plan politique il suit Peron. Quand le camarade Germain parle des « cordobazos » (nous supposons qu'il englobe les mobilisations de Rosario, Tucuman et Mendoza, car sinon nous ne voyons pas comment il arrive à en compter six), il oublie que ces luttes commencèrent sur des appels à des grèves et à des concentrations que réalisèrent les organisations traditionnelles du mouvement ouvrier, les syndicats et directions régionales de la CGT. Ces mobilisations furent le produit d'une combinaison particulière de circonstances, dont une des plus importantes fut que Peron, des secteurs de la bureaucratie syndicale, d'importants secteurs de la bourgeoisie et toute la classe moyenne étaient contre les gouvernements militaires. Cela se refléta même dans une division des propres rangs de l'armée. A partir de Lanusse, ces secteurs bureaucratiques et toute la bourgeoisie s'orientèrent vers les élections, entraînant la classe moyenne et la classe ouvrière. C'est pour cela que les « cordobazos » décrurent et ne se répétèrent pas avec la même force que le premier. Le problème de la direction du mouvement. Ouvrier commença à passer au premier plan. La combinaison extrêmement favorable de circonstances disparut, en particulier la répulsion de la classe moyenne et du prolétariat envers les gouvernements bourgeois se réduisit à la répulsion du régime militaire. Avant les élections, une étape de nouvelle confiance dans les gouvernements bourgeois s'ouvrit, du moins dans la mécanique électorale bourgeoise, en conséquence de la confiance en Peron.

Le camarade Germain peut trouver ici une réponse à la contradiction qu'il nous reproche dans sa question : « Comment se fait-il que l'Argentine ait été mûre pour l'insurrection généralisée en mai 70 et pas mûre début 72 ? ». Parce que les circonstances ont changé. Parce que Peron, dirigeant indiscuté, ne l'oublions pas, des masses argentines, entra dans le jeu électoral et fit ainsi dévier les masses de l'affrontement extra-parlementaire avec le régime vers l'affrontement électoral.

Évidemment, cela ne signifia pas que la situation avait changé à l'échelle historique. Le changement était conjoncturel puisque le processus moléculaire continuait. Mais si nous voulions aider à la maturation, il nous fallait accompagner le nouvel apprentissage du mouvement des masses, épuiser l'expérience de « son » gouvernement et de « son » candidat Peron. Il n'y avait pas d'autre issue.

Une « grève générale insurrectionnelle » sans objectif ni organisation[modifier le wikicode]

Ce qui est le plus marquant dans la position du camarade Germain, c'est son caractère centré exclusivement sur la question de l'organisation et de la préparation de la grève générale, sans mot d'ordre ni proposition quels qu'ils soient, à moins que l'on ne considère comme tels les observations programmatiques de type général ou les leçons traditionnelles de la lutte de classes.

Qui va préparer la grève générale ? Et sur quel objectif ? Pour renverser le gouvernement ? Qui le remplacera ? Faut-il « organiser » et « préparer » une grève générale sans mot d'ordre lié à la lutte de classes dans le pays ? Si la grève générale devait se faire contre la fraude électorale, aurait-il fallu l'appeler pour obtenir que Peron se présente aux élections, étant donné que le gouvernement militaire ne le lui permettait pas ? Si c'est le cas, pourquoi cela n'est il pas dit clairement ? Sinon, fallait-il appeler à la grève générale pour un autre objectif, ignorant la réalité du péronisme et des élections ? Si oui, le camarade Germain aurait-il l'amabilité de nous indiquer quel pourrait être cet objectif capable de mobiliser le prolétariat argentin pour la grève générale insurrectionnelle, en laissant de côté ses organisations syndicales et sa direction politique ? Mais si la grève générale est insurrectionnelle pour remplacer le gouvernement, cela nous pose le problème de la classe moyenne, de la faire passer de notre côté ou la neutraliser. Avec quels mots d'ordre ? la laissons-nous livrée à son propre sort ?

Peut-être l'objectif est-il le pouvoir aux comités d'usines et de quartiers ? Mais ces comités, il faut commencer par les construire (comme nous le dit le camarade Germain lui-même), et nous pouvons témoigner qu'ils n'ont été construits nulle part et qu'il n'existe même pas l'ébauche de cette nouvelle forme d'organisation. Alors que faire ? Appeler ces organismes inexistants à « préparer » et lancer la grève générale insurrectionnelle ou attendre qu'ils se soient développés et renforcés avant de les charger d'une telle tâche ? Pendant ce temps, que faisons nous des seules organisations ouvrières existantes, la CGT et les syndicats ? Ont-ils un rôle à remplir ? Étant donné que les fractions syndicales classistes sont très faibles, peuvent-elles appeler quand même à la, grève générale insurrectionnelle ? Ou doivent-elles auparavant disputer la direction des syndicats et des masses aux directions bureaucratiques traîtres ?

Une version contemporaine de l'anarcho-syndicalisme[modifier le wikicode]

Et l'insurrection, qui la prépare ? qui la dirige ? N'est-il pas honteux de lancer cette ligne sans poser la nécessité des piquets ouvriers armés ? Est-ce un oubli ? N'est-il pas impardonnable d'oublier ce mot d'ordre fondamental pour la préparation de la grève générale ? Est-il suffisant de donner aux ouvriers des mots d'ordre ultra-généraux comme (ce que nous appelons une « lapalissade ») « de grands affrontements avec l'armée seront inévitables, préparez-vous et organisez-vous vous-mêmes », au lieu de préciser la forme d'organisation adaptée à cet objectif ?

Le fond du problème, c'est que la position du camarade Germain n'est pas trotskiste mais syndicaliste. Il présente la préparation de la grève générale comme une tâche supra-historique, comme la panacée universelle, sans lien avec les étapes de la lutte de classes, sans aucun mot d'ordre (et encore moins une politique), sans prendre en compte le niveau réel de la conscience et de l'organisation du mouvement ouvrier, ni ses besoins à chaque moment, et sans poser la nécessité de l'organisation de piquets armés. Exactement comme le faisaient les anarcho-syndicalistes.

7. La section officielle rompt avec l'Internationale.[modifier le wikicode]

La majorité nous critique en affirmant que nous n'avons pas de perspectives claires et précises. Nous pensons le contraire. Ce sont les camarades de la majorité qui jamais n'ont de bons pronostics, ni de perspectives claires. Pour le démontrer, rien n'est meilleur que la politique suivie par une des sections fondamentales de la majorité : la section argentine. Toute l'Internationale sait que celle-ci était un des piliers de la tendance majoritaire en ce qui concerne l'Amérique latine, depuis le IXème Congrès mondial.

Maintenant, elle a quitté l'Internationale, en accusant celle-ci d'être petite bourgeoise et d'avoir un programme erroné. Quand les camarades de la majorité ont-ils prévu ce cours probable de la section argentine ? Et quelles mesures ont-ils adoptées pour le combattre et l'empêcher ? Pendant des années, on n'a entendu que des éloges sur la section argentine, on la donnait toujours en exemple pour l'application de la ligne adoptée. Le résultat est visible.

Qui a su prévoir que le PRT(C) romprait avec l'Internationale ?[modifier le wikicode]

Dans ce cas-là également, la majorité veut se couvrir en faisant des critiques rétroactives. L'organe de la section anglaise "Red Weekly", qui reflète les positions de la majorité, publiait dans son n°13 du 27 juillet 1973, une note sur la mort de Joe Baxter, dans laquelle il est dit que Baxter, Pujols et Bonnet reconnaissaient, « les tendances populistes et la confusion idéologique » au sein du PRT(C). Cela a dû bien sûr se produire au moins avant septembre 71, puisque Pujols a été assassiné à cette date.

Il est très important d'admettre qu'il y avait déjà longtemps que des dirigeants du PRT(C) étaient préoccupés par les déviations de cette organisation. Les dirigeants internationaux de la majorité n'avaient-ils pas la même préoccupation ? Et si oui, qu'ont-ils fait pour éviter le développement de ces déviations ? Rien. tout au contraire, ils ont continué à soutenir et défendre la politique de la section officielle qui la conduisait avec une logique implacable vers la rupture avec le trotskisme.

Nous dénoncions le caractère anti-trotskiste du groupe reconnu comme section officielle, et quand la rupture se produisit dans le PRT, la majorité a ébauché par l'intermédiaire du camarade Maïtan une théorie: les déviations théoriques maoïstes étaient la conséquence de l'éducation que leur avait donnée Moreno. Ce dernier était théoriquement et politiquement pro-maoiste et les dirigeants de la section officielle avaient été éduqués à cette école. Dans ce cas-là, peu importe si l'organe officiel de cette section avait caractérisé Moreno de maniaque trotskiste, mais cette fausse accusation avait des prétentions de sérieux et apportait des citations (tirées de leur contexte comme d'habitude) d'un document publié, quand Moreno était en prison, à partir d'un brouillon de notes et de commentaires. Ce qui importait était de construire une théorie pour démontrer que la section officielle avait été fondée par les véritables marxistes révolutionnaires et que les divergences avec l'Internationale étaient une conséquence du passé ("moréniste") et n'impliquait pas un danger pour l'avenir.

La majorité cachait les véritables positions du PRT(C) à la base de notre Internationale[modifier le wikicode]

Les positions anti-trotskistes se développèrent avec de plus en plus de force et les camarades de la majorité continuèrent à les expliquer comme un héritage de Moreno. Mais, dans le but de défendre la section officielle (pendant qu'on « l'éduquait »), fut commis le pire des crimes que l'on puisse commettre vis à vis de la base de l'Internationale : elle ne fut pas informée des positions de la section officielle, on la trompa en les cachant.

Sous prétexte que ce n'était pas une position officielle, on empêcha la publication du "Livre rouge" ("La seule voie pour le pouvoir et pour le socialisme"). Ce n'est que lorsque la direction de la section l'exigea que le SU le fit en anglais mais pas en français. Mais même alors, on n'informa pas que la section continuait à attaquer les positions du trotskysme et remettait en cause le rôle de l'Internationale dans son organe officiel. Ce n'est que lorsque le PRT(C) rompit avec la majorité que l'Internationale publia le "Livre rouge" en français.

Le camarade Germain embellit les positions du PRT(C)[modifier le wikicode]

Dans son document, le camarade Germain fait deux critiques à la section : ses positions pro-cubaines et pro-maoistes sur le plan international, et sa stratégie de construction d'une armée populaire. Entre ces deux critiques il définit la seconde comme la plus importante, laissant au second plan la question internationale. Mais il ne fait pas seulement passer au second plan les positions du PRT(C) au niveau international, il les embellit, ce qui est encore plus grave. Selon le camarade Germain :

« Les camarades du PRT(C) comprennent correctement que la IV°Internationale est aujourd'hui le seul noyau initial de la future Internationale révolutionnaire de masse » (Germain, doc. cité, p.42).

Par contre, les camarades du PRT(C) répétaient publiquement depuis 70 :

« Nous confirmons notre adhésion à l'intention de prolétariser l'Internationale, de la transformer en une organisation révolutionnaire et de l'orienter vers la formation d'une nouvelle Internationale révolutionnaire basée sur les partis chinois, cubain, coréen, vietnamien, albanais et des organisations sœurs qui luttent de façon révolutionnaire contre le capitalisme et l'impérialisme dans chaque pays. » (Résolutions du V° Congrès et du CC et CE postérieurs, p.42).

Où donc le camarade Germain a-t-il lu que le PRT(C) comprenait « que la IV°Internationale est aujourd'hui le seul noyau initial de la future Internationale révolutionnaire de masse » ? Selon lui :

« Pour la direction du PRT, cette fusion est envisagée avec toutes les forces engagées dans les luttes objectivement révolutionnaires... » (Germain, "En défense...", vol. X, n°4, avril 1973, p.18).

En complétant cela par ce que nous avons lu dans la déclaration de la direction du PRT(C), nous venons d'apprendre que, pour le camarade Germain, les PC chinois, coréen et albanais sont « engagés dans des luttes objectivement révolutionnaires ».

Qui eut une caractérisation juste du PRT (C)[modifier le wikicode]

Nous ne suivrons pas le camarade Germain dans les tortueux méandres qu'il construit pour embellir les positions du PRT(C). Il existe une seule vérité que les camarades de la majorité se sont efforcés de cacher : le PRT(C) attaquait depuis des années notre Internationale, disant quelle n'était pas révolutionnaire et ne constituait qu'un simple élément de seconde importance pour la construction d'une nouvelle internationale basée sur les partis staliniens pro-chinois, les véritables révolutionnaires.

Et pendant toutes ces années, nous nous sommes distingués de la majorité pour avoir l'attitude opposée: nous avons dénoncé inlassablement le caractère révisionniste de cette organisation populiste et prévu sa rupture finale inévitable avec l'Internationale. En 1968, quand se produisit la rupture dans notre partit nous disions que la fraction "Combatiente" était un front sans principes qui éclaterait en mille morceaux. Nous ne nous sommes pas trompés, depuis lors ils ont connu plus de huit ruptures d'importance. Nous faisions une caractérisation de classe: ils reflétaient des secteurs de la petite bourgeoisie désespérée par la crise insoluble de l'économie argentine. Nous disions qu'il fallait les combattre politiquement (en les respectant et en les défendant comme de valeureux et honnêtes révolutionnaires) et qu'il fallait défendre notre Internationale et l'héritage du marxisme révolutionnaire trotskiste. Au dernier CEI, nous avons proposé au camarade Germain un front unique de défense de notre Internationale face aux attaques publiques et à l'inévitable rupture. Qui avait raison ? Les faits n'ont pas tardé à rendre leur verdict.

Les responsabilités de la majorité[modifier le wikicode]

Selon la majorité les deux fractions résultant de la scission du PRT en 1968 avaient un défaut commun congénital : le trotsko-maoïsme (le « morénisme » redouté et répudié). Le PRT(C) et le PRT(L.V.) avaient donc une même formation. Bien ! "El Combatiente" se lia à la majorité et finit par rompre de manière publique et brutale avec l'Internationale. "La Verdad" par contre, se lia à la minorité et continue à se revendiquer du trotskysme avec plus de force que jamais. Elle reste et restera dans l'Internationale.

D'après les prémisses de la majorité, cette dynamique est incompréhensible. Des deux organisations d'origine commune, celle qu'ils ont « éduquée » est précisément celle qui est partie en claquant la porte.

Mais l'explication est simple, à condition d'abandonner les prémisses de la majorité. Sitôt fait, deux raisons apparaissent très clairement ; d'une part, nous n'étions pas des maoïstes déguisés mais des trotskistes orthodoxes, et nous nous sommes liés à la tendance qui défendait conséquemment le trotskysme dans l'Internationale (la minorité), et dans cette liaison nous avons renforcé notre orientation trotskiste. D'autre part, "El Combatiente" était un accord sans principes entre plusieurs secteurs, dont le principal noyau reflétait la petite bourgeoisie désemparée de l'intérieur du pays. Il s'allia solidement avec la majorité car celle-ci s'orientait vers l'abandon de l'héritage trotskiste en faveur du populisme guérillériste. Mais cette union dura ce que ce que dure une unité sans principe : "El Combatiente" rencontra des forces plus puissantes auxquelles se lier (en particulier Cuba) et l'idylle finit par une rupture bruyante.