Symbole des trois flèches

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Drei Pfeile.svg

Le symbole des trois flèches est apparu dans les années 1930 comme symbole antifasciste. Il a notamment été utilisé par le Parti socialiste (SFIO) en France, jusqu'en 1969.

1 Historique[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Antifascisme allemand[modifier | modifier le wikicode]

Ce symbole fut d'abord utilisé par le Front d'airain (Eiserne Front), organisation de défense antifasciste allemande créée en 1931 : sa fonction première est de barrer les croix gammées du parti nazi sur les murs et les affiches.

Il a été créé par Serge Tchakhotine, un théoricien de la propagande, menchévik exilé depuis la révolution d'Octobre. et ayant rejoint le Parti social-démocrate d'Allemagne (SPD). Tchakhotine voulait lutter sur le même terrain que les nazis et les fascistes qui s'étaient engagés plus tôt dans la propagande moderne, avec des symboles faisant un appel à l'émotion des masses. Tchakhotine organisa avec ses propres ressources, contre l'avis de son parti, la propagande dans certaines régions d'Allemagne. C'est là où les trois flèches furent les plus utilisées, par des sections dissidentes plus combattives du SPD, que la résistance aux nazis fut la plus forte.

Three Arrows election poster of the Social Democratic Party of Germany, 1932 - Gegen Papen, Hitler, Thälmann.png
AfficheSPD-juillet1932.png
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En juin 1932, une petite organisation, Internationaler Sozialistischer Kampfbund (ISK), appelle à « construire un front uni ouvrier, pas seulement au niveau parlementaire mais aussi dans l'auto-défense ».[1] Elle diffuse un Appel urgent à l'unité, adressé au SPD et au KPD, signé par 33 intellectuels de premier plan, comme Albert Einstein, et une affiche figurant côte à côté le symbole des trois flèches et les deux drapeaux de l'Action antifasciste (faux-nez du KPD).

Malgré l'éloignement de Tchakhotine, dénonçant la passivité de la direction devant les évènements, le SPD s'est réapproprié le logo des trois flèches, qui devient le logo du parti à l'été 1932. Il fut notamment utilisé sur des affiches de propagande électorale, dont une célèbre où l'on voit une flèche frappant la royauté et l'empire, la deuxième le nazisme, et la troisième le communisme (faucille et marteau).

1.2 Diffusion dans la SFIO[modifier | modifier le wikicode]

En 1934, ce symbole se répand parmi les militants socialistes, notamment dans la Fédération de la Seine (Ile-de-France actuelle), les Jeunesses socialistes et les proches de Marceau Pivert. C'est donc plutôt la gauche du parti qui l'utilise. Ce symbole guerrier heurte beaucoup de socialistes, qui regrettent ce qu'ils voient comme un abandon de la propagande-formation-éducation des origines.

La SFIO n'avait pas de véritable logo. Elle continue de présenter les trois flèches comme un symbole de la lutte antifasciste uniquement, mais pas du parti. Elle rappelle à chaque occasion à ses militants que « le drapeau rouge avec les lettres PS est le véritable insigne ». Mais ce logo gagne beaucoup de terrain, parce qu'il a une certaine efficacité. On peut notamment y associer des mots d’ordre ternaires comme « pain, paix, liberté » ou « Unité, Activité, Discipline » ou « le parti, le syndicat, la coopérative ». À partir de 1936, les trois flèches signent de plus en plus les affiches, les tracts et le matériel de propagande diffusé par la SFIO.

Les trois flèches symbolisant la SFIO aux côtés du PCF et du Parti radical, pendant le Front populaire

Il ne semble pas que les trois flèches aient été utilisées pendant la Seconde guerre mondiale, tout au moins sur les documents du PS clandestin conservés. Mais peut-être ont-elles été tracées sur les murs en signe de résistance ou sur certains tracts. Hormis l'inclinaison des flèches à 45° et l'orientation des pointes à gauche vers le bas, le logo n'a jamais été standardisé.

Tract-sfio-1936.jpg
Au moment même où les trois flèches sont très présentes dans l'univers symbolique des socialistes, le logo de l'Amicale des Anciens du Parti socialiste reprend, en 1937,le symbole du poing serré et du soleil dans lequel s'inscrit le sigle PS SFIO.

1.3 Adoption officielle après-guerre[modifier | modifier le wikicode]

En novembre 1944, signe des temps, le congrès national extraordinaire se termine aux accents de la Marseillaise puis de L'internationale. Vincent Auriol, présentant les grandes lignes du congrès dans le Populaire, en donne les raisons :

« Fidèle à la pensée des grands révolutionnaires et aux principes du socialisme scientifique, il (Le PS SFIO) a affirmé sa double volonté d’achever la révolution interrompue, escroquée par la bourgeoisie, et d’organiser la grande communauté humaine. Il a proclamé son permanent souci de l’intérêt national et de l’intérêt international étroitement solidaires. Cette double pensée, il a décidé de la symboliser par son drapeau rouge désormais orné du bonnet phrygien à cocarde tricolore. »

Ce même congrès a, en effet, décidé de la création d’un nouvel insigne : « bonnet phrygien avec cocarde tricolore et lettres PS enlacées » en remplacement du drapeau rouge avec lettre PS. Le Parti socialiste, régénéré, doit imposer une nouvelle image. Il sait maintenant l'importance d'une propagande efficace pour gagner l'adhésion des électeurs.

En ce présentant comme les héritiers des révolutionnaires de 1789, en affichant Marianne, les socialistes interprètent encore et toujours les symboles de la République. Dans les semaines qui suivent, des tracts, dépliants et affiches, diffusés à des milliers d'exemplaires, reprennent ce nouvel emblème pour le populariser. Après le matraquage des propagandes vichyste et nazi, il faut submerger les citoyens d'autres images "positives". Le Parti socialiste SFIO, comme les autres partis, malgré les restrictions de papiers, et sans grandes ressources, va s'en donner les moyens. Les affiches de Paul Ordner et de Henri Monier popularisent ces "nouveaux" éléments de l'imagerie socialiste.

Mais l'insigne, adopté sans consultation de la "base", rencontre l’hostilité des militants du Parti, notamment dans la fédération de la Seine. Il rappelle trop l’insigne du Parti radical et risque d'être raillé par les communistes. Le 22 décembre 1944, au Comité directeur, Lambert, délégué à la propagande désigné par le comité directeur, « signale les protestations qu’il a reçues à propos du projet d’insigne du Parti. Après échange de vue entre les camarades présents, le comité directeur décide d’ouvrir un concours. Les projets, légendes et explications du symbole seront soumis à la conférence des secrétaires fédéraux. »

La revue Esprit, dans son numéro d’avril 1945, dans une note sur l'actualité politique, signale la polémique autour de l’insigne du parti qui a rebondi lors de la réunion des secrétaires fédéraux, en février. Le bonnet phrygien rappelle désagréablement aux militants socialistes le parti radical, ce qui incite certains à proposer de reprendre l'ancien symbole, le drapeau rouge. « Mais, conclut la chronique, il y a une troisième solution - et il y a toujours une troisième solution et c’est celle qui a été adoptée - on a repris les trois flèches, ce qui n’est pas compromettant. »

Nous ne savons pas si le concours envisagé a effectivement été organisé (en tout cas, le Bulletin Intérieur n’en parle pas) mais “les trois flèches” deviennent effectivement l’insigne officiel du Parti. Le rapport de propagande pour le congrès d’août 1945 note que cet insigne a reçu un bon accueil. Par ce choix, le parti marque son attachement aux luttes antifascistes, et adopte un insigne de combat. Il fait aussi du neuf avec du vieux, officialisant l'usage d'un symbole déjà éprouvé dans les luttes de l'entre-deux-guerres ; et il ne donne pas l’impression de reculer. Mais le bonnet phrygien est conservé dans la panoplie des images.

En 1969, la SFIO se refonde en un nouveau Parti socialiste, et abandonne ce logo. Il sera remplacé par la rose au poing après le congrès d'Épinay de 1971.

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En 1946, à la une du bulletin interieur, les trois flèches sont associées à une marianne au bonnet phrygien.

2 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]