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=== La guerre et la crise ===
 
=== La guerre et la crise ===
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La situation sociale empire avec la [[Première_guerre_mondiale|Première guerre mondiale]], dans laquelle la Russie est engagée aux côtés de la France et l'Angleterre en tant qu'alliée. Malgré quelques succès des troupes russes en août 1914, la situation tourne rapidement en défaveur de la Russie, qui n'est pas capable de soutenir un effort de guerre moderne, avec son [[Industrie|industrie]] insuffisante, ses [[Transports|transports]] lacunaires et son très mauvais ravitaillement. Au sein de la troupe, les pertes battent tous les records (1 700 000 morts et 5 950 000 blessés) et des mutineries éclatent, le moral des soldats se trouvant au plus bas. Ceux-ci supportent de moins en moins l’incapacité de leurs officiers (on a ainsi vu des unités monter au combat avec des balles ne correspondant pas au calibre de leur fusil), les brimades et les punitions corporelles en usage dans l’armée. En mai 1915, les armées russes reculent puis, au cours de l'hiver 1915-1916, le front se stabilise. À l'arrière, la situation se dégrade : les [[Grève|grèves]] se multipliaient dans les usines (plus d'un million de grévistes en 1916), et les accrochages avec la police se font plus fréquents (4 morts en juin 1915, 16 morts en août...). Les lois de mobilisation provoquent en 1916 une révolte de taille au Kazakhstan. Fin 1916, le total des déserteurs atteint 1 million. Les pertes dans l'armée provoquent aussi un renouvellement dans les cadres, des monarchistes conservateurs étant remplacés par des libéraux.
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La situation sociale empire avec la [[Première_guerre_mondiale|Première guerre mondiale]], dans laquelle la Russie est engagée aux côtés de la France et l'Angleterre en tant qu'alliée. Malgré quelques succès des troupes russes en août 1914, la situation tourne rapidement en défaveur de la Russie, qui n'est pas capable de soutenir un effort de guerre moderne, avec son [[Industrie|industrie]] insuffisante, ses [[Transports|transports]] lacunaires et son très mauvais ravitaillement. Au sein de la troupe, les pertes battent tous les records (1 700 000 morts et 5 950 000 blessés) et des mutineries éclatent, le moral des soldats se trouvant au plus bas. Ceux-ci supportent de moins en moins l’incapacité de leurs officiers (on a ainsi vu des unités monter au combat avec des balles ne correspondant pas au calibre de leur fusil), les brimades et les punitions corporelles en usage dans l’armée. En mai 1915, les armées russes reculent puis, au cours de l'hiver 1915-1916, le front se stabilise. À l'arrière, la situation se dégrade : les [[Grève|grèves]] se multipliaient dans les usines (plus d'un million de grévistes en 1916), et les accrochages avec la [[Police_et_milice_en_1917|police]] se font plus fréquents (4 morts en juin 1915, 16 morts en août...). Les lois de mobilisation provoquent en 1916 une révolte de taille au Kazakhstan. Fin 1916, le total des déserteurs atteint 1 million. Les pertes dans l'armée provoquent aussi un renouvellement dans les cadres, des monarchistes conservateurs étant remplacés par des libéraux.
    
La période précédant 1914 avait été marquée par de fortes grèves, notamment à Petrograd où les [[Bolchéviks|bolchéviks]] sont influents. En 1914, la mobilisation et le [[Nationalisme|nationalisme]] mettent dans un premier temps un coup d'arrêt à la [[Lutte_de_classes|lutte de classes]]. Mais la situation économique et sociale se dégrade vite. La guerre a brusquement coupé le pays des marchés européens dont il dépendait largement. Dans les villes comme dans les campagnes, la misère s’aggravait, pendant que l’opulence et la corruption régnaient à la Cour, dans l’[[Aristocratie|aristocratie]] et la [[Bourgeoisie|bourgeoisie]].
 
La période précédant 1914 avait été marquée par de fortes grèves, notamment à Petrograd où les [[Bolchéviks|bolchéviks]] sont influents. En 1914, la mobilisation et le [[Nationalisme|nationalisme]] mettent dans un premier temps un coup d'arrêt à la [[Lutte_de_classes|lutte de classes]]. Mais la situation économique et sociale se dégrade vite. La guerre a brusquement coupé le pays des marchés européens dont il dépendait largement. Dans les villes comme dans les campagnes, la misère s’aggravait, pendant que l’opulence et la corruption régnaient à la Cour, dans l’[[Aristocratie|aristocratie]] et la [[Bourgeoisie|bourgeoisie]].
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Les exigences économiques (''«&nbsp;Du pain, du travail&nbsp;!&nbsp;»'') sont le déclencheur d'un mouvement revendicatif qui, au départ, n'a rien de révolutionnaire. Néanmoins les social-démocrates conservent une bonne implantation<ref>Le leader ouvrier bolchévik [[Vassili Kaïourov]] a raconté son expérience de la Révolution de Février dans ses mémoires.</ref>, notamment dans le faubourg ouvrier de Vyborg, et leurs années de propagande ont forgé une [[Conscience_de_classe|conscience de classe]].
 
Les exigences économiques (''«&nbsp;Du pain, du travail&nbsp;!&nbsp;»'') sont le déclencheur d'un mouvement revendicatif qui, au départ, n'a rien de révolutionnaire. Néanmoins les social-démocrates conservent une bonne implantation<ref>Le leader ouvrier bolchévik [[Vassili Kaïourov]] a raconté son expérience de la Révolution de Février dans ses mémoires.</ref>, notamment dans le faubourg ouvrier de Vyborg, et leurs années de propagande ont forgé une [[Conscience_de_classe|conscience de classe]].
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Le lendemain, le mouvement de protestation s'étend&nbsp;: près de 150 000 ouvriers grévistes convergent vers le centre-ville. N'ayant reçu aucune consigne précise, les [[Cosaques|cosaques]] sont débordés et ne parviennent plus à disperser la foule des manifestants.&nbsp;Les manifestants s’arment en pillant les postes de police. Des meetings s'improvisent.
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Le lendemain, le mouvement de protestation s'étend&nbsp;: près de 150 000 ouvriers grévistes convergent vers le centre-ville. N'ayant reçu aucune consigne précise, les [[Cosaques|cosaques]] sont débordés et ne parviennent plus à disperser la foule des manifestants.&nbsp;Les manifestants s’arment en pillant les postes de [[Police_et_milice_en_1917|police]]. Des meetings s'improvisent.
    
A ce moment-là, du fait de la répression, il y a peu de dirigeants révolutionnaires présents à Petrograd. [[Lénine|Lénine]] et [[Julius_Martov|Martov]] sont à Zurich, [[Léon_Trotski|Trotski]] est à New York, [[Viktor_Tchernov|Tchernov]] à Paris, [[Irakli_Tsereteli|Tsereteli]], [[Fedor_Dan|Dan]] et [[Joseph_Staline|Staline]] en exil en Sibérie. Les socialistes de toute tendance ne réalisent pas immédiatement ce qui est en train de se passer. Le [[Bolchevik|bolchevik]] [[Alexandre_Chliapnikov|Chliapnikov]] (membre du [[Comité_central|comité central]] du parti) pense qu'il s'agit là plus d'une [[Émeute|émeute]] de la faim que d'une révolution en marche.
 
A ce moment-là, du fait de la répression, il y a peu de dirigeants révolutionnaires présents à Petrograd. [[Lénine|Lénine]] et [[Julius_Martov|Martov]] sont à Zurich, [[Léon_Trotski|Trotski]] est à New York, [[Viktor_Tchernov|Tchernov]] à Paris, [[Irakli_Tsereteli|Tsereteli]], [[Fedor_Dan|Dan]] et [[Joseph_Staline|Staline]] en exil en Sibérie. Les socialistes de toute tendance ne réalisent pas immédiatement ce qui est en train de se passer. Le [[Bolchevik|bolchevik]] [[Alexandre_Chliapnikov|Chliapnikov]] (membre du [[Comité_central|comité central]] du parti) pense qu'il s'agit là plus d'une [[Émeute|émeute]] de la faim que d'une révolution en marche.
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Le 25 février 1917, la grève est [[Grève_générale|générale]], avec 240 000 ouvriers, également des petites entreprises, des tramways, des grands magasins... Puis ce fut le tour des étudiants. Les manifestations vont en s'amplifiant. Les slogans sont de plus en plus repris et radicaux&nbsp;: «&nbsp;À bas la guerre&nbsp;!&nbsp;», «&nbsp;À bas l’autocratie&nbsp;!&nbsp;». Dans la soirée, Nicolas II ordonne de ''«&nbsp;faire cesser par la force, avant demain, les désordres à Petrograd&nbsp;»'' et mobilise les troupes de la garnison de la ville. Les confrontations avec les forces de l'ordre provoquent des morts et des blessés des deux côtés. Toutefois, la nuit, une partie de la troupe rejoint progressivement le camp des insurgés, qui peuvent ainsi s’armer plus convenablement. Les autorités avaient bien un plan précis de répression et de quadrillage de la capitale, mais le matériel humain pour l'appliquer se dérobait à elles. Des femmes interpellaient les troupes, s’agrippaient aux fusils et demandaient aux soldats de se joindre à elles. Une scène décrite par Trotsky : ''« Les soldats s’émeuvent, se sentent tout penauds, s’entre-regardent avec anxiété, hésitent encore ; l’un d’eux, enfin, se décide avant les autres et les baïonnettes se relèvent dans un mouvement de repentir au-dessus des épaules des assaillants, le barrage s’ouvre, l’air retentit de hourras joyeux et reconnaissants, les soldats sont entourés, de toutes parts s’élèvent des discussions, des reproches, des appels. »''
 
Le 25 février 1917, la grève est [[Grève_générale|générale]], avec 240 000 ouvriers, également des petites entreprises, des tramways, des grands magasins... Puis ce fut le tour des étudiants. Les manifestations vont en s'amplifiant. Les slogans sont de plus en plus repris et radicaux&nbsp;: «&nbsp;À bas la guerre&nbsp;!&nbsp;», «&nbsp;À bas l’autocratie&nbsp;!&nbsp;». Dans la soirée, Nicolas II ordonne de ''«&nbsp;faire cesser par la force, avant demain, les désordres à Petrograd&nbsp;»'' et mobilise les troupes de la garnison de la ville. Les confrontations avec les forces de l'ordre provoquent des morts et des blessés des deux côtés. Toutefois, la nuit, une partie de la troupe rejoint progressivement le camp des insurgés, qui peuvent ainsi s’armer plus convenablement. Les autorités avaient bien un plan précis de répression et de quadrillage de la capitale, mais le matériel humain pour l'appliquer se dérobait à elles. Des femmes interpellaient les troupes, s’agrippaient aux fusils et demandaient aux soldats de se joindre à elles. Une scène décrite par Trotsky : ''« Les soldats s’émeuvent, se sentent tout penauds, s’entre-regardent avec anxiété, hésitent encore ; l’un d’eux, enfin, se décide avant les autres et les baïonnettes se relèvent dans un mouvement de repentir au-dessus des épaules des assaillants, le barrage s’ouvre, l’air retentit de hourras joyeux et reconnaissants, les soldats sont entourés, de toutes parts s’élèvent des discussions, des reproches, des appels. »''
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La nuit du 25 au 26 février,&nbsp; une centaine de militants révolutionnaires sont arrêtés. Le 26 février étant un dimanche, les usines restèrent fermées. La tsarine écrit d'abord : ''« le calme règne en ville »''. Mais peu à peu, la foule envahit la ville. Vers midi, les [[Junkers|junkers]] (élèves officiers) tirent, faisant 150 morts. La foule reflue vers les faubourgs. Mais les soldats commencent à passer dans le camp des manifestants&nbsp;: la 4<sup>e</sup> compagnie du régiment Pavlovski ouvre le feu sur la police montée. Désemparé, n'ayant plus les moyens de gouverner, l'empereur proclame l'[[État_de_siège|état de siège]], ordonne le renvoi de la ''[[Douma|Douma]]'' et nomme un comité provisoire.
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La nuit du 25 au 26 février,&nbsp; une centaine de militants révolutionnaires sont arrêtés. Le 26 février étant un dimanche, les usines restèrent fermées. La tsarine écrit d'abord : ''« le calme règne en ville »''. Mais peu à peu, la foule envahit la ville. Vers midi, les [[Junkers|junkers]] (élèves officiers) tirent, faisant 150 morts. La foule reflue vers les faubourgs. Mais les soldats commencent à passer dans le camp des manifestants&nbsp;: la 4<sup>e</sup> compagnie du régiment Pavlovski ouvre le feu sur la [[Police_et_milice_en_1917|police]] montée. Désemparé, n'ayant plus les moyens de gouverner, l'empereur proclame l'[[État_de_siège|état de siège]], ordonne le renvoi de la ''[[Douma|Douma]]'' et nomme un comité provisoire.
    
L'[[Insurrection|insurrection]] aurait pu s'arrêter là mais, dans la nuit du 26 au 27 février, un événement fait basculer la situation&nbsp;: la [[Mutinerie|mutinerie]] de deux régiments d'élite, traumatisés d'avoir tiré sur leurs «&nbsp;frères ouvriers&nbsp;». La mutinerie se répand en l'espace de quelques heures. Au matin du 27 février 1917 soldats et ouvriers fraternisent, s'emparent de l'arsenal, distribuent des fusils à la foule et occupent les points stratégiques de la capitale. Au cours de la journée, la garnison de Petrograd (environ 150 000 hommes) est passée du côté des insurgés.
 
L'[[Insurrection|insurrection]] aurait pu s'arrêter là mais, dans la nuit du 26 au 27 février, un événement fait basculer la situation&nbsp;: la [[Mutinerie|mutinerie]] de deux régiments d'élite, traumatisés d'avoir tiré sur leurs «&nbsp;frères ouvriers&nbsp;». La mutinerie se répand en l'espace de quelques heures. Au matin du 27 février 1917 soldats et ouvriers fraternisent, s'emparent de l'arsenal, distribuent des fusils à la foule et occupent les points stratégiques de la capitale. Au cours de la journée, la garnison de Petrograd (environ 150 000 hommes) est passée du côté des insurgés.
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Le renversement du régime à Moscou ne fut qu'un écho de l'insurrection de Pétrograd. Mêmes états d'opinion chez les ouvriers et les soldats, quoique moins vivement exprimés. Des dispositions un peu plus à gauche dans la bourgeoisie. La faiblesse des organisations révolutionnaires encore plus marquée qu'à Pétrograd. Lorsque commencèrent les événements sur la Néva, les intellectuels radicaux de Moscou se consultèrent entre eux sur ce qu'il y avait à faire et ne trouvèrent aucune solution. C'est seulement le 27 février, que dans les fabriques de Moscou, éclatèrent des grèves, suivies de manifestations. Les officiers disaient aux soldats, dans les casernes, que la canaille faisait des émeutes dans la rue et qu'il faudrait la réprimer. Le soldat Chichiline raconte: ''«&nbsp;Mais, dès ce moment-là, les nôtres donnaient au mot "canaille" un sens tout opposé&nbsp;!&nbsp;»'' Vers deux heures de l'après-midi, de nombreux soldats, appartenant à divers régiments, se présentèrent devant la Douma municipale, cherchant le moyen d'adhérer à la révolution. Le lendemain, les grèves prirent de l'extension. Les masses s'avançaient avec leurs drapeaux vers la Douma. [[Nikolaï_Ivanovitch_Mouralov|Mouralov]], soldat&nbsp;[[Bolchevik|bolchevik]] de la compagnie automobile, conduisit à la Douma le premier détachement de troupes solide et discipliné qui occupa la station de TSF et d'autres postes.
 
Le renversement du régime à Moscou ne fut qu'un écho de l'insurrection de Pétrograd. Mêmes états d'opinion chez les ouvriers et les soldats, quoique moins vivement exprimés. Des dispositions un peu plus à gauche dans la bourgeoisie. La faiblesse des organisations révolutionnaires encore plus marquée qu'à Pétrograd. Lorsque commencèrent les événements sur la Néva, les intellectuels radicaux de Moscou se consultèrent entre eux sur ce qu'il y avait à faire et ne trouvèrent aucune solution. C'est seulement le 27 février, que dans les fabriques de Moscou, éclatèrent des grèves, suivies de manifestations. Les officiers disaient aux soldats, dans les casernes, que la canaille faisait des émeutes dans la rue et qu'il faudrait la réprimer. Le soldat Chichiline raconte: ''«&nbsp;Mais, dès ce moment-là, les nôtres donnaient au mot "canaille" un sens tout opposé&nbsp;!&nbsp;»'' Vers deux heures de l'après-midi, de nombreux soldats, appartenant à divers régiments, se présentèrent devant la Douma municipale, cherchant le moyen d'adhérer à la révolution. Le lendemain, les grèves prirent de l'extension. Les masses s'avançaient avec leurs drapeaux vers la Douma. [[Nikolaï_Ivanovitch_Mouralov|Mouralov]], soldat&nbsp;[[Bolchevik|bolchevik]] de la compagnie automobile, conduisit à la Douma le premier détachement de troupes solide et discipliné qui occupa la station de TSF et d'autres postes.
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Les prisons s'ouvrirent. Le même Mouralov ramena tout un camion de prisonniers politiques délivrés. Saluant, la main à la visière, un sous-commissaire de police demandait au révolutionnaire si l'on devait aussi relâcher les Juifs. [[Dzerjinski|Dzerjinski]], à peine sorti de la maison de force et non encore débarrassé de ses vêtements de détenu, prenait la parole dans l'enceinte de la Douma où le [[Soviet_de_Moscou|Soviet]] était déjà en formation. Doroféiev, artilleur, devait raconter plus tard comment les ouvriers de la confiserie Siou se présentèrent, le 1<sup>er</sup> mars, avec des drapeaux, à la caserne de la brigade d'artillerie, fraternisèrent avec les soldats et comment, dans l'excès de leur joie, nombre de ces hommes ne purent s'empêcher de pleurer. Il y eut dans la ville quelques coups de feu tirés en embuscade, mais dans l'ensemble, il ne se produisit point de collisions armées et il n'y eut pas de victimes.
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Les prisons s'ouvrirent. Le même Mouralov ramena tout un camion de prisonniers politiques délivrés. Saluant, la main à la visière, un sous-commissaire de [[Police_et_milice_en_1917|police]] demandait au révolutionnaire si l'on devait aussi relâcher les Juifs. [[Dzerjinski|Dzerjinski]], à peine sorti de la maison de force et non encore débarrassé de ses vêtements de détenu, prenait la parole dans l'enceinte de la Douma où le [[Soviet_de_Moscou|Soviet]] était déjà en formation. Doroféiev, artilleur, devait raconter plus tard comment les ouvriers de la confiserie Siou se présentèrent, le 1<sup>er</sup> mars, avec des drapeaux, à la caserne de la brigade d'artillerie, fraternisèrent avec les soldats et comment, dans l'excès de leur joie, nombre de ces hommes ne purent s'empêcher de pleurer. Il y eut dans la ville quelques coups de feu tirés en embuscade, mais dans l'ensemble, il ne se produisit point de collisions armées et il n'y eut pas de victimes.
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Dans un bon nombre de villes provinciales, le mouvement ne se déclencha que le 1<sup>er</sup> mars. A Tver, les ouvriers, abandonnant le travail, allèrent manifester devant les casernes et, mêlés aux soldats, défilèrent dans les rues de la ville. A Nijni-Novgorod, des milliers de gens s'assemblèrent devant l'édifice de la municipalité qui, comme dans la plupart des villes, tenait lieu de "palais de Tauride". Après une harangue du maire, les ouvriers, portant leurs drapeaux rouges, allèrent délivrer les détenus politiques. Sur les 21 contingents qui formaient la garnison, 18 vinrent, avant le soir, adhérer spontanément à la révolution. A Samara et à Saratov, il y eut des meetings, et des soviets de députés ouvriers se constituèrent. A Kharkov, le maître de police, ayant eu le temps de se renseigner à la gare sur les événements, monta en voiture devant une foule surexcitée, et, levant sa casquette, cria&nbsp;: ''«&nbsp;Vive la Révolution&nbsp;! Hourra&nbsp;!&nbsp;»''
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Dans un bon nombre de villes provinciales, le mouvement ne se déclencha que le 1<sup>er</sup> mars. A Tver, les ouvriers, abandonnant le travail, allèrent manifester devant les casernes et, mêlés aux soldats, défilèrent dans les rues de la ville. A Nijni-Novgorod, des milliers de gens s'assemblèrent devant l'édifice de la municipalité qui, comme dans la plupart des villes, tenait lieu de "palais de Tauride". Après une harangue du maire, les ouvriers, portant leurs drapeaux rouges, allèrent délivrer les détenus politiques. Sur les 21 contingents qui formaient la garnison, 18 vinrent, avant le soir, adhérer spontanément à la révolution. A Samara et à Saratov, il y eut des meetings, et des soviets de députés ouvriers se constituèrent. A Kharkov, le maître de [[Police_et_milice_en_1917|police]], ayant eu le temps de se renseigner à la gare sur les événements, monta en voiture devant une foule surexcitée, et, levant sa casquette, cria&nbsp;: ''«&nbsp;Vive la Révolution&nbsp;! Hourra&nbsp;!&nbsp;»''
    
Dans les campagnes, les nouvelles de la révolution venaient des villes voisines, partiellement des autorités, mais principalement des marchés, des travailleurs, des soldats en permission. Le village accueillit l'événement par une réaction plus lente et moins enthousiaste que celle de la ville, mais non moins profonde&nbsp;: le village vit le rapport de la révolution avec la guerre et la question de la terre.
 
Dans les campagnes, les nouvelles de la révolution venaient des villes voisines, partiellement des autorités, mais principalement des marchés, des travailleurs, des soldats en permission. Le village accueillit l'événement par une réaction plus lente et moins enthousiaste que celle de la ville, mais non moins profonde&nbsp;: le village vit le rapport de la révolution avec la guerre et la question de la terre.
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Parallèlement et à la constitution du soviet de Petrograd et ce même 27 février, la [[Douma_d'État_de_l’Empire_russe|Douma]] forme un Comité provisoire pour «&nbsp;le rétablissement de l'ordre gouvernemental et public&nbsp;» à 15 h. Ils sont dirigés par [[Michel_Rodzianko|Michel Rodzianko]], ancien officier du Tsar, monarchiste et riche propriétaire terrien. Pour ce comité, la priorité est au retour à l'ordre, et d'abord, au retour des soldats mutinés dans leurs baraquements. Dans leur proposition, le Comité provisoire inclut [[Tchkhéidzé|Tchkhéidzé]] et [[Kérensky|Kérensky]]. Tchkhéidzé refuse, Kérensky accepte.
 
Parallèlement et à la constitution du soviet de Petrograd et ce même 27 février, la [[Douma_d'État_de_l’Empire_russe|Douma]] forme un Comité provisoire pour «&nbsp;le rétablissement de l'ordre gouvernemental et public&nbsp;» à 15 h. Ils sont dirigés par [[Michel_Rodzianko|Michel Rodzianko]], ancien officier du Tsar, monarchiste et riche propriétaire terrien. Pour ce comité, la priorité est au retour à l'ordre, et d'abord, au retour des soldats mutinés dans leurs baraquements. Dans leur proposition, le Comité provisoire inclut [[Tchkhéidzé|Tchkhéidzé]] et [[Kérensky|Kérensky]]. Tchkhéidzé refuse, Kérensky accepte.
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Les représentants du Soviet demandent dès ce premier jour au Comité de la Douma de prendre le pouvoir, ce qu'il accepte finalement à 23h. Ils diront ensuite qu'ils ont pris le sens des responsabilités, Milioukov expliquait notamment qu'il fallait réagir car des troupes allaient être envoyées contre Petrograd. En réalité, Rodzianko était en proie à la plus grande hésitation, et un député monarchiste,Choulguine, l'assurait lui-même qu'il s'agissait de la bonne décision&nbsp;:
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Les représentants du Soviet demandent dès ce premier jour au Comité de la Douma de prendre le pouvoir, ce qu'il accepte finalement à 23h. Ils diront ensuite qu'ils ont pris le sens des responsabilités, Milioukov expliquait notamment qu'il fallait réagir car des troupes allaient être envoyées contre Petrograd. En réalité, Rodzianko était en proie à la plus grande hésitation, et un député monarchiste, Choulguine, l'assurait lui-même qu'il s'agissait de la bonne décision&nbsp;:
 
<blockquote>''«&nbsp;Il n'y a là aucune révolte. Prenez le pouvoir en qualité de sujet fidèle... Si les ministres se sont sauvés, quelqu'un doit tout de même les remplacer... Il peut y avoir deux issues&nbsp;: ou bien tout s'arrangera, le souverain désignera un nouveau gouvernement, nous lui remettrons le pouvoir. Si cela ne réussit pas, si nous ne recueillons pas le pouvoir, celui-ci tombera entre les mains de gens déjà élus par une certaine canaille, dans les usines... &nbsp;»''</blockquote>  
 
<blockquote>''«&nbsp;Il n'y a là aucune révolte. Prenez le pouvoir en qualité de sujet fidèle... Si les ministres se sont sauvés, quelqu'un doit tout de même les remplacer... Il peut y avoir deux issues&nbsp;: ou bien tout s'arrangera, le souverain désignera un nouveau gouvernement, nous lui remettrons le pouvoir. Si cela ne réussit pas, si nous ne recueillons pas le pouvoir, celui-ci tombera entre les mains de gens déjà élus par une certaine canaille, dans les usines... &nbsp;»''</blockquote>  
 
Rodzianko frémissait d'indignation impuissante à voir que des soldats inconnus, "&nbsp;obéissant à des ordres donnés on ne savait par qui&nbsp;", procédaient à l'arrestation de hauts dignitaires de l'ancien régime et les amenaient à la Douma. Le chambellan se trouvait ainsi, en quelque sorte, chef de prison vis-à-vis de personnes avec lesquelles, certes, il n'était pas toujours d'accord, mais qui restaient pour lui, toutefois, des gens de son milieu.
 
Rodzianko frémissait d'indignation impuissante à voir que des soldats inconnus, "&nbsp;obéissant à des ordres donnés on ne savait par qui&nbsp;", procédaient à l'arrestation de hauts dignitaires de l'ancien régime et les amenaient à la Douma. Le chambellan se trouvait ainsi, en quelque sorte, chef de prison vis-à-vis de personnes avec lesquelles, certes, il n'était pas toujours d'accord, mais qui restaient pour lui, toutefois, des gens de son milieu.
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Mais la ligne change le 12 mars lorsque [[Kamenev|Kamenev]] et [[Staline|Staline]] reviennent de leur exil en Sibérie et prennent la direction. La [[Pravda|Pravda]] du 15 mars avait écrit que les bolcheviks soutiendraient résolument le gouvernement provisoire ''«&nbsp;dans la mesure où il lutte contre la réaction ou la contre-révolution&nbsp;»''. Une formule floue que raillera [[Lénine|Lénine]]. Selon Chliapnikov, ce revirement est accueilli avec jubilation au gouvernement provisoire et à la direction du soviet, tandis qu’une opposition de gauche se lève au sein du parti, notamment dans son bastion ouvrier de la capitale, le district de Vyborg, dont le comité ''« demande même l’exclusion du parti de Staline et de Kamenev »''.
 
Mais la ligne change le 12 mars lorsque [[Kamenev|Kamenev]] et [[Staline|Staline]] reviennent de leur exil en Sibérie et prennent la direction. La [[Pravda|Pravda]] du 15 mars avait écrit que les bolcheviks soutiendraient résolument le gouvernement provisoire ''«&nbsp;dans la mesure où il lutte contre la réaction ou la contre-révolution&nbsp;»''. Une formule floue que raillera [[Lénine|Lénine]]. Selon Chliapnikov, ce revirement est accueilli avec jubilation au gouvernement provisoire et à la direction du soviet, tandis qu’une opposition de gauche se lève au sein du parti, notamment dans son bastion ouvrier de la capitale, le district de Vyborg, dont le comité ''« demande même l’exclusion du parti de Staline et de Kamenev »''.
      
Le 29&nbsp;mars s’ouvre à Pétrograd la première conférence nationale bolchévique depuis la révolution, divisée entre la droite défensiste et la gauche révolutionnaire. Pour cette dernière, ''« la révolution russe ne peut obtenir un maximum de libertés démocratiques et de réformes sociales que si elle devient le point de départ d’un mouvement révolutionnaire du prolétariat occidental »'', pour cela ''« il faut préparer la lutte contre le gouvernement provisoire »'', le soviet étant ''« un embryon de pouvoir révolutionnaire »'' et la ''« garde rouge ouvrière »'' un outil central afin de l’imposer.
 
Le 29&nbsp;mars s’ouvre à Pétrograd la première conférence nationale bolchévique depuis la révolution, divisée entre la droite défensiste et la gauche révolutionnaire. Pour cette dernière, ''« la révolution russe ne peut obtenir un maximum de libertés démocratiques et de réformes sociales que si elle devient le point de départ d’un mouvement révolutionnaire du prolétariat occidental »'', pour cela ''« il faut préparer la lutte contre le gouvernement provisoire »'', le soviet étant ''« un embryon de pouvoir révolutionnaire »'' et la ''« garde rouge ouvrière »'' un outil central afin de l’imposer.
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Lénine, qui est arrivé à [[Petrograd|Petrograd]] dans la nuit du 3 au 4 avril, présente ses thèses (que l'on retiendra comme [[Thèses_d'avril|''Thèses d'avril'']]) à la réunion du Parti bolchevik du 4 avril. Il en avait déjà tracé les grandes lignes dans le train (le fameux ''«&nbsp;[[Wagon_plombé|wagon plombé]]&nbsp;»'') qui le ramenait vers la Russie. Il prône un redressement immédiat de la ligne politique. Dès son arrivée à Petrograd, en gare de Finlande, Lénine engueule [[Kamenev|Kamenev]] sur ce qu'il écrivait dans la [[Pravda|Pravda]].
 
Lénine, qui est arrivé à [[Petrograd|Petrograd]] dans la nuit du 3 au 4 avril, présente ses thèses (que l'on retiendra comme [[Thèses_d'avril|''Thèses d'avril'']]) à la réunion du Parti bolchevik du 4 avril. Il en avait déjà tracé les grandes lignes dans le train (le fameux ''«&nbsp;[[Wagon_plombé|wagon plombé]]&nbsp;»'') qui le ramenait vers la Russie. Il prône un redressement immédiat de la ligne politique. Dès son arrivée à Petrograd, en gare de Finlande, Lénine engueule [[Kamenev|Kamenev]] sur ce qu'il écrivait dans la [[Pravda|Pravda]].
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Etant donné le pouvoir populaire direct qu'ont les ouvriers et les soldats dans les soviets, le gouvernement provisoire ne contrôle pas tout, et il y a de fait une situation de [[Dualité_de_pouvoir|dualité de pouvoir]]. Au lieu de faire confiance au gouvernement provisoire, Lénine propose de revendiquer ''«&nbsp;tout le pouvoir aux soviets&nbsp;!&nbsp;»''. Lénine considère que la [[Dictature_démocratique_des_ouvriers_et_des_paysans|formule bolchévique]] a été confirmée, mais qu''’«&nbsp;il faut savoir compléter et corriger les vieilles formules&nbsp;»''<ref>Lénine, ''[https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/04/vil19170409.htm Sur la dualité du pouvoir]'', ''Pravda'' n° 28, 9 avril 1917</ref>, car ''«&nbsp;personne autrefois ne songeait, ni ne pouvait songer, à une dualité du pouvoir&nbsp;»''. Il fait l'analyse que la ''dictature des ouvriers est paysans'' est non pas le gouvernement provisoire, mais ce pouvoir des soviets, ''«&nbsp;du même type que la Commune de Paris de 1871&nbsp;»''. Le gouvernement provisoire ne lance pas de [[Réforme_agraire|réforme agraire]], ne décrète pas une république démocratique et ne cherche pas à convoquer immédiatement d'[[Assemblée_constituante_(Russie)|Assemblée constituante]], ce n'est donc pas un vrai gouvernement révolutionnaire, même du point de vue de la [[révolution_démocratique-bourgeoise|révolution démocratique-bourgeoise]].
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Etant donné le pouvoir populaire direct qu'ont les ouvriers et les soldats dans les soviets, le gouvernement provisoire ne contrôle pas tout, et il y a de fait une situation de [[Dualité_de_pouvoir|dualité de pouvoir]]. Au lieu de faire confiance au gouvernement provisoire, Lénine propose de revendiquer ''«&nbsp;tout le pouvoir aux soviets&nbsp;!&nbsp;»''. Lénine considère que la [[Dictature_démocratique_des_ouvriers_et_des_paysans|formule bolchévique]] a été confirmée, mais qu''’«&nbsp;il faut savoir compléter et corriger les vieilles formules&nbsp;»''<ref>Lénine, ''[https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/04/vil19170409.htm Sur la dualité du pouvoir]'', ''Pravda'' n° 28, 9 avril 1917</ref>, car ''«&nbsp;personne autrefois ne songeait, ni ne pouvait songer, à une dualité du pouvoir&nbsp;»''. Il fait l'analyse que la ''dictature des ouvriers est paysans'' est non pas le gouvernement provisoire, mais ce pouvoir des soviets, ''«&nbsp;du même type que la Commune de Paris de 1871&nbsp;»''. Le gouvernement provisoire ne lance pas de [[Réforme_agraire|réforme agraire]], ne décrète pas une république démocratique et ne cherche pas à convoquer immédiatement d'[[Assemblée_constituante_(Russie)|Assemblée constituante]], ce n'est donc pas un vrai gouvernement révolutionnaire, même du point de vue de la [[Révolution_démocratique-bourgeoise|révolution démocratique-bourgeoise]].
    
Les [[Thèses_d'avril|thèses]] de Lénine semblèrent trop radicales aux dirigeants bolcheviks de l’intérieur qui restaient accrochés à l'idée d'un gouvernement classique. Le 8 avril, 13 des 15 membres de la direction [[Bolchevik|bolchevik]] de Petrograd rejetèrent les thèses de Lénine. [[Kamenev|Kamenev]] déclare&nbsp;: ''«&nbsp;Pour ce qui est du schéma général du camarade Lénine, il nous parait inacceptable dans la mesure où il présente comme achevée la révolution démocratique bourgeoise et compte sur une transformation immédiate de cette révolution en révolution socialiste.&nbsp;»''
 
Les [[Thèses_d'avril|thèses]] de Lénine semblèrent trop radicales aux dirigeants bolcheviks de l’intérieur qui restaient accrochés à l'idée d'un gouvernement classique. Le 8 avril, 13 des 15 membres de la direction [[Bolchevik|bolchevik]] de Petrograd rejetèrent les thèses de Lénine. [[Kamenev|Kamenev]] déclare&nbsp;: ''«&nbsp;Pour ce qui est du schéma général du camarade Lénine, il nous parait inacceptable dans la mesure où il présente comme achevée la révolution démocratique bourgeoise et compte sur une transformation immédiate de cette révolution en révolution socialiste.&nbsp;»''
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Le 10 mars, la [[Pravda|''Pravda'']] appelle à transformer la guerre interimpérialiste en une guerre civile qui libérera les peuples du joug des classes dominantes, maintenant l'ancienne [[Défaitisme_révolutionnaire|ligne léniniste]].
 
Le 10 mars, la [[Pravda|''Pravda'']] appelle à transformer la guerre interimpérialiste en une guerre civile qui libérera les peuples du joug des classes dominantes, maintenant l'ancienne [[Défaitisme_révolutionnaire|ligne léniniste]].
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Cela change avec le retour de [[Staline|Staline]] et [[Kamenev|Kamenev]] le 12 mars. Dans la ''Pravda'' du 15&nbsp;mars, Kamenev se rallie à la position de « défense nationale » partagée, avec des nuances, par le gouvernement provisoire et par la direction réformiste du soviet de Pétrograd : ''« quand une armée affronte une autre armée, ce serait une proposition inepte que de proposer à l’une d’elles de déposer les armes et de rentrer chez elle. Ce ne serait pas une politique de paix, mais une politique d’esclavage qu’un peuple libre rejetterait avec dégoût »'' ; il faut ''« répondre à une balle par la balle, à un obus par l'obus. »'' Staline, de son côté, approuve le manifeste que le soviet vient d’adopter ''« pour une paix sans annexions ni compensations »''. Cela suppose une politique de pression ''« pacifique »'' sur les bourgeoisies et gouvernements impérialistes qui sont en train de s’affronter au prix de millions de morts :''« notre slogan est le suivant : faire pression sur le gouvernement provisoire en vue de le contraindre (…) à amener tous les pays belligérants à entamer des pourparlers de paix immédiats (…) Et que chaque homme, jusqu’à cette échéance, reste à son poste de combat. »'' Et il précise le 16&nbsp;mars : ''« le mot d’ordre "à bas la guerre" est inutile. »''
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Cela change avec le retour de [[Staline|Staline]] et [[Kamenev|Kamenev]] le 12 mars. Dans la ''Pravda'' du 15&nbsp;mars, Kamenev se rallie à la position de « défense nationale » partagée, avec des nuances, par le gouvernement provisoire et par la direction réformiste du soviet de Pétrograd : ''« quand une armée affronte une autre armée, ce serait une proposition inepte que de proposer à l’une d’elles de déposer les armes et de rentrer chez elle. Ce ne serait pas une politique de paix, mais une politique d’esclavage qu’un peuple libre rejetterait avec dégoût »''&nbsp;; il faut ''« répondre à une balle par la balle, à un obus par l'obus. »'' Staline, de son côté, approuve le manifeste que le soviet vient d’adopter ''« pour une paix sans annexions ni compensations »''. Cela suppose une politique de pression ''« pacifique »'' sur les bourgeoisies et gouvernements impérialistes qui sont en train de s’affronter au prix de millions de morts :''« notre slogan est le suivant : faire pression sur le gouvernement provisoire en vue de le contraindre (…) à amener tous les pays belligérants à entamer des pourparlers de paix immédiats (…) Et que chaque homme, jusqu’à cette échéance, reste à son poste de combat. »'' Et il précise le 16&nbsp;mars : ''« le mot d’ordre "à bas la guerre" est inutile. »''
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A la conférence nationale bolchévique du 29&nbsp;mars, Staline évoque la réunification avec la partie des mencheviks se situant ''« sur une ligne Zimmerwald-Kienthal »''. Or même si [[Conférence_de_Zimmerwald_(1915)|Zimmerwald]] fut un point de ralliement de la gauche, elle a vite été dominée par un pacifisme [[centriste|centriste]] dénoncé par Lénine.
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A la conférence nationale bolchévique du 29&nbsp;mars, Staline évoque la réunification avec la partie des mencheviks se situant ''« sur une ligne Zimmerwald-Kienthal »''. Or même si [[Conférence_de_Zimmerwald_(1915)|Zimmerwald]] fut un point de ralliement de la gauche, elle a vite été dominée par un pacifisme [[Centriste|centriste]] dénoncé par Lénine.
    
A son retour le 4 avril, Lénine dénonce les ''«&nbsp;défensistes&nbsp;»'', même s'il n'est plus clairement ''«&nbsp;[[Défaitisme_révolutionnaire|défaitiste]]&nbsp;»'' comme sous le tsarisme.
 
A son retour le 4 avril, Lénine dénonce les ''«&nbsp;défensistes&nbsp;»'', même s'il n'est plus clairement ''«&nbsp;[[Défaitisme_révolutionnaire|défaitiste]]&nbsp;»'' comme sous le tsarisme.

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