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'''Grigori Evseïevitch Zinoviev''' (en russe Григо́рий Евсе́евич Зино́вьев), de son vrai nom '''Ovseï-Gerchen Aronovitch Radomyslski-Apfelbaum''', né à [[Kirovohrad|Elizavethrad]] le 11 septembre 1883 et mort le 25 août 1936 à [[Moscou|Moscou]], est un [[Révolutionnaire|révolutionnaire]] [[Bolchevik|bolchevik]].
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'''[[File:Grigory Zinoviev.jpg|right|Grigory Zinoviev.jpg]]Grigori Evseïevitch Zinoviev''' (en russe Григо́рий Евсе́евич Зино́вьев), de son vrai nom '''Ovseï-Gerchen Aronovitch Radomyslski-Apfelbaum''', né à Elizavethrad le 11 septembre 1883 et mort le 25 août 1936 à Moscou, est un révolutionnaire [[Bolchevik|bolchevik]].
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Membre du [[Politburo_du_Parti_communiste_de_l'Union_soviétique|Politburo du Parti communiste de l'Union soviétique]] ([[Parti_communiste_de_l'Union_soviétique|PCUS]]) et président du [[Soviet|soviet]] de [[Saint-Pétersbourg|Léningrad]], il s'associe dans un premier temps avec [[Lev_Kamenev|Lev Kamenev]] et [[Joseph_Staline|Joseph Staline]] pour former une [[Troïka_(politique)|troïka]] qui marginalise [[Léon_Trotski|Léon Trotski]], avant de se rapprocher, au milieu des [[Années_1920|années 1920]], de ce dernier. Zinoviev est finalement éliminé au début des [[Grandes_Purges|Grandes Purges]] mises en œuvre par Staline : condamné à mort lors du premier [[Procès_de_Moscou|procès de Moscou]], il est exécuté le lendemain du jugement, le 25 août 1936.
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Membre du [[Politburo_du_Parti_communiste_de_l'Union_soviétique|Politburo du Parti communiste de l'Union soviétique]] ([[Parti_communiste_de_l'Union_soviétique|PCUS]]) et président du [[Soviet|soviet]] de Léningrad, il s'associe dans un premier temps avec [[Lev_Kamenev|Lev Kamenev]] et [[Joseph_Staline|Joseph Staline]] pour former une troïka qui marginalise [[Léon_Trotski|Léon Trotski]], avant de se rapprocher, au milieu des années 1920, de ce dernier. Zinoviev est finalement éliminé au début des [[Grandes_Purges|Grandes Purges]] mises en œuvre par Staline : condamné à mort lors du premier [[Procès_de_Moscou|procès de Moscou]], il est exécuté le lendemain du jugement, le 25 août 1936.
    
== Biographie ==
 
== Biographie ==
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=== Avant la Révolution ===
 
=== Avant la Révolution ===
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en [[Ukraine|Ukraine]] en 1883 de parents juifs journaliers agricoles, autodidacte confirmé, Zinoviev ''«&nbsp;est épais, avec un visage consulaire plutôt pâle, massif, une abondante chevelure ébouriffée, un regard gris bleu<ref name="VS160"> [[Victor Serge]] (1951), ''Vie et mort de Léon Trotsky'', chap. IV, section 7 (p.  »''160 éd. La Découverte, 2003, 2010)</ref>. Il milite d'abord dans le sud de l'[[Empire_russe|Empire russe]]. Émigré en [[1902|1902]] à [[Berne|Berne]], où il étudie la chimie et le droit jusqu'en 1905, il y rencontre [[Georgui_Plekhanov|Georgui Plekhanov]] et [[Lénine|Lénine]]&nbsp;: ce dernier le pousse à entrer au parti bolchevik, ce qu'il fait l'année suivante. Il joue un rôle important dans l'organisation du [[Parti_ouvrier_social-démocrate_de_Russie|POSDR]] (Parti ouvrier social-démocrate de Russie) à [[Saint-Pétersbourg|Saint-Pétersbourg]]. Après l'échec de la [[Révolution_de_1905|révolution de 1905]], son activité principale se concentre dans le journalisme et les publications du parti.''
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Zinoviev est né en Ukraine en 1883 de parents juifs journaliers agricoles. Il milite d'abord dans le sud de l'Empire russe. Émigré en 1902 à Berne, où il étudie la chimie et le droit jusqu'en 1905, il y rencontre [[Georgui_Plekhanov|Georgui Plekhanov]] et [[Lénine|Lénine]]&nbsp;: ce dernier le pousse à entrer au parti bolchevik, ce qu'il fait l'année suivante. Il joue un rôle important dans l'organisation du [[Parti_ouvrier_social-démocrate_de_Russie|POSDR]] (Parti ouvrier social-démocrate de Russie) à Saint-Pétersbourg. Après l'échec de la [[Révolution_de_1905|révolution de 1905]], son activité principale se concentre dans le journalisme et les publications du parti.
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Poursuivi par la police, il quitte la Russie de [[1908|1908]] à [[1917|1917]]. Il est élu au comité central du POSDR en [[1907|1907]] à [[Londres|Londres]]. L'année suivante, il rejoint Lénine à [[Genève|Genève]] et devient son bras droit jusqu'en [[1912|1912]], responsable du parti à [[Cracovie|Cracovie]], territoire appartenant alors à l'[[Autriche-Hongrie|Autriche-Hongrie]] et où s'est réfugiée une partie de la direction du Parti. La [[Première_Guerre_mondiale|Première Guerre mondiale]] les rapproche encore. Après la [[Révolution_de_Février|révolution de Février]], ils rentrent ensemble en Russie dans le fameux «&nbsp;convoi plombé&nbsp;» organisé par les [[Allemagne|Allemands]] en avril 1917.
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Poursuivi par la police, il quitte la Russie de 1908 à 1917. Il est élu au comité central du POSDR en 1907 à Londres. L'année suivante, il rejoint Lénine à Genève et devient son bras droit jusqu'en 1912, responsable du parti à Cracovie, territoire appartenant alors à l'Autriche-Hongrie et où s'est réfugiée une partie de la direction du Parti. La [[Première_Guerre_mondiale|Première Guerre mondiale]] les rapproche encore. Après la [[Révolution_de_Février|révolution de Février]], ils rentrent ensemble en Russie dans le fameux «&nbsp;convoi plombé&nbsp;» organisé par les Allemands en avril 1917.
    
=== De la Révolution aux années 1930 ===
 
=== De la Révolution aux années 1930 ===
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Entré dans la clandestinité après les [[Journées_de_juillet_1917|journées de juillet 1917]], Zinoviev s'oppose, avec Kamenev, au soulèvement armé préparé par Lénine. Plus encore, après la [[Révolution_d'Octobre|victoire d'Octobre]], il se prononce pour un rapprochement avec les [[Mencheviks|mencheviks]] et les [[Parti_socialiste_révolutionnaire_(Russie)|SR]] (socialiste-révolutionnaires). Ces choix lui seront, ainsi qu'à Kamenev, vivement reprochés par la suite.
 
Entré dans la clandestinité après les [[Journées_de_juillet_1917|journées de juillet 1917]], Zinoviev s'oppose, avec Kamenev, au soulèvement armé préparé par Lénine. Plus encore, après la [[Révolution_d'Octobre|victoire d'Octobre]], il se prononce pour un rapprochement avec les [[Mencheviks|mencheviks]] et les [[Parti_socialiste_révolutionnaire_(Russie)|SR]] (socialiste-révolutionnaires). Ces choix lui seront, ainsi qu'à Kamenev, vivement reprochés par la suite.
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Membre suppléant du [[Politburo_du_Parti_communiste_de_l'Union_soviétique|Politburo du Parti communiste de l'Union soviétique]] dès sa création, il en devient dès le X<sup>e</sup> Congrès du PCUS (1921) membre titulaire, aux côtés de [[Lénine|Lénine]], Kamenev, Trotsky et de Staline — [[Nikolaï_Krestinski|Nikolaï Krestinski]] ayant été écarté. Il préside également le [[Soviet_de_Petrograd|Soviet de Petrograd]] en décembre 1917 et tient fermement les rênes de cette organisation, la plus importante du pays, et défend la ville à deux reprises contre les [[Russes_blancs|Russes blancs]]. Il dirige, aussi, depuis sa création en 1919, le Comité exécutif de l'Internationale communiste (''[[Komintern|Komintern]]''), où son influence sera déterminante dans l'évolution des partis communistes européens, notamment en [[France|France]]. Il est ainsi à [[Bakou|Bakou]] en [[Septembre_1920|septembre 1920]], lors du [[Premier_congrès_des_peuples_d'Orient|Premier congrès des peuples d'Orient]] puis, le mois suivant, au Congrès de [[Halle_(Saxe-Anhalt)|Halle]] du [[Parti_social-démocrate_indépendant_d'Allemagne|PUSD]] allemand, au cours duquel il prononce un discours de quatre heures. Le Congrès aboutit à une scission qui rejoint le [[Parti_communiste_d'Allemagne|Parti communiste d'Allemagne]] (KPD). Certaines stratégies sont cependant peu heureuses, comme le montre le soutien discutable qu’il apporte au secrétaire général [[Albert_Treint|Albert Treint]] au sein du [[Parti_communiste_français|PCF]] jusqu’à l’éviction de ce dernier, ou son analyse imprudente de la [[Révolution_allemande_de_1918-1919|révolte spartakiste]], qui s'achève dans l'échec cuisant de l'insurrection de [[1920|1920]].
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Membre suppléant du [[Politburo_du_Parti_communiste_de_l'Union_soviétique|Politburo du Parti communiste de l'Union soviétique]] dès sa création, il en devient dès le X<sup>e</sup> Congrès du PCUS (1921) membre titulaire, aux côtés de [[Lénine|Lénine]], Kamenev, Trotsky et de Staline — [[Nikolaï_Krestinski|Nikolaï Krestinski]] ayant été écarté. Il préside également le [[Soviet_de_Petrograd|Soviet de Petrograd]] en décembre 1917 et tient fermement les rênes de cette organisation, la plus importante du pays, et défend la ville à deux reprises contre les [[Russes_blancs|Russes blancs]]. Il dirige, aussi, depuis sa création en 1919, le Comité exécutif de l'Internationale communiste (''[[Komintern|Komintern]]''), où son influence sera déterminante dans l'évolution des partis communistes européens, notamment en France. Il est ainsi à Bakou en septembre 1920, lors du [[Premier_congrès_des_peuples_d'Orient|Premier congrès des peuples d'Orient]] puis, le mois suivant, au Congrès de Halle du [[Parti_social-démocrate_indépendant_d'Allemagne|PUSD]] allemand, au cours duquel il prononce un discours de quatre heures. Le Congrès aboutit à une scission qui rejoint le [[Parti_communiste_d'Allemagne|Parti communiste d'Allemagne]] (KPD). Certaines stratégies sont cependant peu heureuses, comme le montre le soutien discutable qu’il apporte au secrétaire général [[Albert_Treint|Albert Treint]] au sein du [[Parti_communiste_français|PCF]] jusqu’à l’éviction de ce dernier, ou son analyse imprudente de la [[Révolution_allemande_de_1918-1919|révolte spartakiste]], qui s'achève dans l'échec cuisant de l'insurrection de 1920.
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Très tôt, ne cachant pas ses ambitions, Zinoviev contribue fortement à évincer [[Léon_Trotski|Léon Trotski]] du pouvoir, s'associant à Kamenev et Staline pour former une troïka lors du XII<sup>e</sup> Congrès du PCUS (1923) afin de marginaliser l'organisateur de l’[[Armée_rouge|Armée rouge]]. Il se considère alors, non sans présomption, l'héritier légitime du chef du parti bolchévik qui, malade, ne peut réellement, à partir de [[1922|1922]], reprendre la direction du gouvernement. Il organise en [[1923|1923]] un procès à grand spectacle contre l'[[Église_catholique_romaine_en_Russie|Église catholique]] mené par [[Nikolaï_Krylenko|Nikolaï Krylenko]], à l'issue duquel les évêques [[Constantin_Budkiewicz|Constantin Budkiewicz]], [[Léonide_Féodoroff|Léonide Féodoroff]] et [[Jan_Cieplak|Jan Cieplak]] sont condamnés à mort ou au [[Goulag|camp de travail]].
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Très tôt, ne cachant pas ses ambitions, Zinoviev contribue fortement à évincer [[Léon_Trotski|Léon Trotski]] du pouvoir, s'associant à [[Kamenev|Kamenev]] et Staline pour former une troïka lors du XII<sup>e</sup> Congrès du PCUS (1923) afin de marginaliser l'organisateur de l’[[Armée_rouge|Armée rouge]]. Il se considère alors, non sans présomption, l'héritier légitime du chef du parti bolchévik qui, malade, ne peut réellement, à partir de 1922, reprendre la direction du gouvernement. Il organise en 1923 un procès à grand spectacle contre l'Église catholique mené par [[Nikolaï_Krylenko|Nikolaï Krylenko]], à l'issue duquel les évêques Constantin Budkiewicz, Léonide Féodoroff et Jan Cieplak sont condamnés à mort ou au [[Goulag|camp de travail]].
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Alors que Staline consolide son pouvoir en tant que secrétaire général du PCUS, ce qui lui permet de contrôler les nominations en son sein, Zinoviev devient l'un de ses principaux concurrents&nbsp;: son poste de président du soviet de Léningrad (ex-Pétrograd) lui assure le soutien de «&nbsp;plusieurs milliers d'adhérents, liés par de vieilles amitiés et par la cohésion de l'appareil du Parti&nbsp;»<ref name="VS159">[[Victor Serge]] (1951), ''Vie et mort de Léon Trotsky'', chap. IV, section 6 (p. 159 éd. La Découverte, 2003, 2010) </ref>, dont Ivan Bakaév, organisateur de la révolte de [[Kamychine|Kamychine]] en 1906 et président de la [[Tchéka|Tchéka]] de Petrograd, Grigori Evdokimov, membre du Comité central (exécuté en 1936 avec Zinoviev), et Mikhaïl Lachévitch (1894-1928), vice-commissaire à la Défense en 1924. Selon [[Victor_Serge|Victor Serge]], il «&nbsp;dépasse&nbsp;» cependant ces derniers par «&nbsp;sa culture générale, sa longue expérience de l'émigration en Europe occidentale, ses talents de théoricien vulgarisateur, d'orateur polyglotte, d'écrivain facile, de leader reconnu&nbsp;»<ref name="VS160" />. De plus, sa fonction de directeur du Komintern lui donne une assise internationale avec [[Ruth_Fischer|Ruth Fischer]] et [[Arkadi_Maslov|Arkadi Maslov]] en Allemagne et Albert Treint en France<ref name="VS159" />. Lors du XIV<sup>e</sup> Congrès du PCUS (Moscou, décembre 1925), Zinoviev, qui «&nbsp;cumule la direction de la III<sup>e</sup> Internationale, du comité régional, du Parti et du Soviet&nbsp;» de Leningrad<ref name="VS156">[[Victor Serge]] (1951), ''Vie et mort de Léon Trotsky'', chap. IV, section 6 (p. 156 éd. La Découverte, 2003, 2010) </ref>, est le seul à pouvoir s'opposer à Staline&nbsp;: toutes les autres délégations ont été désignées par des secrétaires nommés par Staline<ref name="VS156" />. Il forme alors l'Opposition de Leningrad, et se rapproche de Trotski et de l'[[Opposition_de_gauche|Opposition de gauche]], admettant ''a posteriori'' la justesse des mises en garde de Trotski, en 1923, contre la bureaucratisation du parti<ref> [[Victor Serge]] (1951), ''Vie et mort de Léon Trotsky'', chap. IV, section 6 (p. 158 éd. La Découverte, 2003, 2010)</ref>. Avec Kamenev et Trotski, ils forment alors la «&nbsp;[[Troïka_des_purs|troïka des purs]]&nbsp;», hostile à la [[Nouvelle_politique_économique|NEP]] (dont Trotski avait soutenu la mise en place) et surtout favorable à l'instauration du ''«&nbsp;socialisme dans plusieurs pays&nbsp;»''. Staline prône, au contraire, le «&nbsp;socialisme dans un seul pays&nbsp;» et le maintien de la NEP. Cette posture vaut au secrétaire général une certaine popularité dans le pays, tandis que l'appareil du parti lui est déjà acquis.
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Alors que Staline consolide son pouvoir en tant que secrétaire général du PCUS, ce qui lui permet de contrôler les nominations en son sein, Zinoviev devient l'un de ses principaux concurrents&nbsp;: son poste de président du soviet de Léningrad (ex-Pétrograd) lui assure le soutien de plusieurs milliers d'adhérents, liés par de vieilles amitiés et par la cohésion de l'appareil du Parti, dont Ivan Bakaév, organisateur de la révolte de Kamychine en 1906 et président de la [[Tchéka|Tchéka]] de Petrograd, Grigori Evdokimov, membre du Comité central (exécuté en 1936 avec Zinoviev), et Mikhaïl Lachévitch (1894-1928), vice-commissaire à la Défense en 1924. Selon [[Victor_Serge|Victor Serge]], il «&nbsp;dépasse&nbsp;» cependant ces derniers par «&nbsp;sa culture générale, sa longue expérience de l'émigration en Europe occidentale, ses talents de théoricien vulgarisateur, d'orateur polyglotte, d'écrivain facile, de leader reconnu&nbsp;»<ref name="VS51">[[Victor Serge]], ''Vie et mort de Léon Trotsky'', 1951</ref>. De plus, sa fonction de directeur du Komintern lui donne une assise internationale avec [[Ruth_Fischer|Ruth Fischer]] et [[Arkadi_Maslov|Arkadi Maslov]] en Allemagne et Albert Treint en France. Lors du XIV<sup>e</sup> Congrès du PCUS (Moscou, décembre 1925), Zinoviev, qui cumule la direction de la III<sup>e</sup> Internationale, du comité régional, du Parti et du Soviet de Leningrad, est le seul à pouvoir s'opposer à Staline&nbsp;: toutes les autres délégations ont été désignées par des secrétaires nommés par Staline. Il forme alors l'Opposition de Leningrad, et se rapproche de Trotski et de l'[[Opposition_de_gauche|Opposition de gauche]], admettant ''a posteriori'' la justesse des mises en garde de Trotski, en 1923, contre la bureaucratisation du parti. Avec Kamenev et Trotski, ils forment alors la «&nbsp;[[Troïka_des_purs|troïka des purs]]&nbsp;», hostile à la [[Nouvelle_politique_économique|NEP]] (dont Trotski avait soutenu la mise en place) et surtout favorable à l'instauration du ''«&nbsp;socialisme dans plusieurs pays&nbsp;»''. Staline prône, au contraire, le «&nbsp;[[socialisme_dans_un_seul_pays|socialisme dans un seul pays]]&nbsp;» et le maintien de la NEP. Cette posture vaut au secrétaire général une certaine popularité dans le pays, tandis que l'appareil du parti lui est déjà acquis.
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En effet, l'Opposition unifiée tient peu de temps dans le bastion de Léningrad. L'épuration énergique de [[Sergueï_Kirov|Sergueï Kirov]] dans l'ancienne capitale la prive de ses soutiens les plus forts. Peu après, Zinoviev est forcé d'abandonner la direction de l'[[Komintern|Internationale]], où il est remplacé par [[Nikolaï_Boukharine|Nikolaï Boukharine]], ainsi que du Soviet de Leningrad&nbsp;: il est nommé, à la place, à la codirection du [[Centrosoyouz|Centrosoyouz]], à [[Moscou|Moscou]], l'organisation commerciale des coopératives étatisées<ref name="VS159" />. Il est finalement exclu du PCUS lors du XV<sup>e</sup> Congrès (décembre [[1927|1927]]), et ne retrouvera plus son audience précédente en dépit de sa réintégration en [[1929|1929]], motivée par des considérations tactiques partisanes de la part de Staline, lequel, ayant vaincu ses rivaux, adopte désormais leurs thèses en prônant la collectivisation. Il n'est cependant pas réadmis au Comité central, et demeure à un poste moyen. À la suite de l'affaire Rioutine, il est à nouveau exclu avec Kamenev en octobre 1932, puis ré-intégré en décembre 1933, et contraint à une auto-critique humiliante lors du XVII<sup>e</sup> Congrès du PCUS (janvier 1934).
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En effet, l'Opposition unifiée tient peu de temps dans le bastion de Léningrad. L'épuration énergique de [[Sergueï_Kirov|Sergueï Kirov]] dans l'ancienne capitale la prive de ses soutiens les plus forts. Peu après, Zinoviev est forcé d'abandonner la direction de l'[[Komintern|Internationale]], où il est remplacé par [[Nikolaï_Boukharine|Nikolaï Boukharine]], ainsi que du Soviet de Leningrad&nbsp;: il est nommé, à la place, à la codirection du [[Centrosoyouz|Centrosoyouz]], à Moscou, l'organisation commerciale des coopératives étatisées. Il est finalement exclu du PCUS lors du XV<sup>e</sup> Congrès (décembre 1927), et ne retrouvera plus son audience précédente en dépit de sa réintégration en 1929, motivée par des considérations tactiques partisanes de la part de Staline, lequel, ayant vaincu ses rivaux, adopte désormais leurs thèses en prônant la collectivisation. Il n'est cependant pas réadmis au Comité central, et demeure à un poste moyen. À la suite de l'affaire Rioutine, il est à nouveau exclu avec Kamenev en octobre 1932, puis ré-intégré en décembre 1933, et contraint à une auto-critique humiliante lors du XVII<sup>e</sup> Congrès du PCUS (janvier 1934).
    
=== La fin ===
 
=== La fin ===
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En août 1936, après des mois de préparation minutieuse dans les prisons de la police soviétique, Zinoviev, Kamenev et quatorze autres, essentiellement des bolcheviks de la première heure, se retrouvent à nouveau devant le tribunal pour un procès public. Cette fois, on les accuse d'avoir formé une organisation terroriste dont on prétend qu'elle est responsable de l'assassinat de Kirov et de tentatives d'assassinat contre Staline et contre d'autres chefs du gouvernement soviétique. Le procès conduit à la condamnation à mort des accusés, dont Zinoviev et Kamenev, exécutés aussitôt après la sentence, le 25 août 1936<ref> Voir par ex. le récit qu'en fait l'historien [[Pierre Broué]] dans ''Le parti bolchévique'' (1963), chap. XV {{lire en ligne|lien=http://www.marxists.org/francais/broue/works/1963/00/broue_pbolch_15.htm}} </ref>.
 
En août 1936, après des mois de préparation minutieuse dans les prisons de la police soviétique, Zinoviev, Kamenev et quatorze autres, essentiellement des bolcheviks de la première heure, se retrouvent à nouveau devant le tribunal pour un procès public. Cette fois, on les accuse d'avoir formé une organisation terroriste dont on prétend qu'elle est responsable de l'assassinat de Kirov et de tentatives d'assassinat contre Staline et contre d'autres chefs du gouvernement soviétique. Le procès conduit à la condamnation à mort des accusés, dont Zinoviev et Kamenev, exécutés aussitôt après la sentence, le 25 août 1936<ref> Voir par ex. le récit qu'en fait l'historien [[Pierre Broué]] dans ''Le parti bolchévique'' (1963), chap. XV {{lire en ligne|lien=http://www.marxists.org/francais/broue/works/1963/00/broue_pbolch_15.htm}} </ref>.
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Ce procès (dit du «&nbsp;groupe terroriste trotskyste-zinoviéviste&nbsp;») est le premier des procès à grand spectacle que furent les [[Procès_de_Moscou|procès de Moscou]]. Il ouvre la voie à ceux qui vont suivre, spectacle étonnant qui sidère, comme le montre la lecture des journaux de l’époque, y compris ''[[L’Humanité|l’Humanité]]'', la plupart des observateurs étrangers. De «&nbsp;vieux bolcheviks&nbsp;» s’accusent mutuellement des pires crimes, puis les avouent les uns après les autres et terminent ces aveux incroyables par des [[Autocritique|autocritiques]] qui sont autant d’envolées lyriques à la gloire de Staline.
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Ce procès (dit du «&nbsp;groupe terroriste trotskyste-zinoviéviste&nbsp;») est le premier des procès à grand spectacle que furent les [[Procès_de_Moscou|procès de Moscou]]. Il ouvre la voie à ceux qui vont suivre, spectacle étonnant qui sidère, comme le montre la lecture des journaux de l’époque, y compris ''[[L’Humanité|l’Humanité]]'', la plupart des observateurs étrangers. De «&nbsp;vieux bolcheviks&nbsp;» s’accusent mutuellement des pires crimes, puis les avouent les uns après les autres et terminent ces aveux incroyables par des autocritiques qui sont autant d’envolées lyriques à la gloire de Staline.
    
== Les contradictions et les échecs d’un disciple de Lénine ==
 
== Les contradictions et les échecs d’un disciple de Lénine ==
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Ami très proche de Lénine – qui aurait même envisagé d’adopter un de ses enfants, faute d’en avoir avec [[Nadejda_Kroupskaïa|Nadejda Kroupskaïa]] – doué d’évidentes capacités intellectuelles, notamment oratoires, il était destiné à jouer un rôle éminent dans l’histoire du pays après la révolution d’Octobre. Le soutien de Vladimir Illitch, comme celui du Parti bolchévique, ne lui ont jamais manqué, comme le prouve l’importance des responsabilités qui ont été les siennes de 1917 à 1927. Lors du déclenchement de la terreur rouge, en septembre 1918, il a dit&nbsp;: «&nbsp;Sur les cent millions d'habitants que compte la Russie soviétique, nous devons en entraîner avec nous quatre-vingt-dix millions. Quant au reste, nous n'avons rien à en dire. Ils doivent être réduits à néant.&nbsp;»<ref>[[Richard Pipes]], ''La Révolution russe'', PUF, Paris, p. 760</ref>.
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Ami très proche de Lénine – qui aurait même envisagé d’adopter un de ses enfants, faute d’en avoir avec [[Nadejda_Kroupskaïa|Nadejda Kroupskaïa]] – doué d’évidentes capacités intellectuelles, notamment oratoires, il était destiné à jouer un rôle éminent dans l’histoire du pays après la révolution d’Octobre. Le soutien de Vladimir Illitch, comme celui du Parti bolchévique, ne lui ont jamais manqué, comme le prouve l’importance des responsabilités qui ont été les siennes de 1917 à 1927. Lors du déclenchement de la terreur rouge, en septembre 1918, il a dit&nbsp;: «&nbsp;Sur les cent millions d'habitants que compte la Russie soviétique, nous devons en entraîner avec nous quatre-vingt-dix millions. Quant au reste, nous n'avons rien à en dire. Ils doivent être réduits à néant.&nbsp;»<ref>Richard Pipes, ''La Révolution russe'', PUF, Paris, p. 760</ref>.
    
Pour autant, les choix stratégiques de Zinoviev, tout au long de son ascension dans la direction du parti et plus encore aux commandes du Komintern, ne lui ont pas permis d’affermir ses positions. Ses travers ont été soulignés, comme le fait [[Boris_Souvarine|Boris Souvarine]] dans son ''Staline'' quand il cite les hommages douteux à sa personnalité qui conduisent par exemple sa ville natale (Elisabethgrad, devenue [[Kirovograd|Kirovograd]] pendant l'époque soviétique) à changer de nom à son honneur et s'appeler ''Zinovievsk''. Hors ces aspects anecdotiques, les erreurs qu’il a commises sont plus graves. Réputé et plus encore critiqué pour un [[Autoritarisme|autoritarisme]] sans pitié, il a peu à peu constitué contre lui une opposition qui se cristallisera autour de Staline, lequel, en utilisant les mêmes armes que son adversaire, se révèlera un manœuvrier redoutable dans la lutte pour le pouvoir.
 
Pour autant, les choix stratégiques de Zinoviev, tout au long de son ascension dans la direction du parti et plus encore aux commandes du Komintern, ne lui ont pas permis d’affermir ses positions. Ses travers ont été soulignés, comme le fait [[Boris_Souvarine|Boris Souvarine]] dans son ''Staline'' quand il cite les hommages douteux à sa personnalité qui conduisent par exemple sa ville natale (Elisabethgrad, devenue [[Kirovograd|Kirovograd]] pendant l'époque soviétique) à changer de nom à son honneur et s'appeler ''Zinovievsk''. Hors ces aspects anecdotiques, les erreurs qu’il a commises sont plus graves. Réputé et plus encore critiqué pour un [[Autoritarisme|autoritarisme]] sans pitié, il a peu à peu constitué contre lui une opposition qui se cristallisera autour de Staline, lequel, en utilisant les mêmes armes que son adversaire, se révèlera un manœuvrier redoutable dans la lutte pour le pouvoir.
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<br/> [[Category:Russie / URSS]][[Category:Marxistes]]
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