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'''[[Image:Berlin november1918.jpg|thumb|right|314x202px]]La révolution allemande''' désigne la période mouvementée de 1918 à 1923, qui a vu l'échec d'une tentative révolutionnaire et l'affaiblissement durable du mouvement ouvrier allemand, et bien delà, de par ses répercussions internationales.  
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'''[[Image:Berlin november1918.jpg|thumb|right|314x202px]]La révolution allemande''' désigne la période mouvementée de 1918 à 1923, qui a vu l'échec d'une tentative de [[révolution socialiste|révolution socialiste]] et l'affaiblissement durable du [[mouvement ouvrier|mouvement ouvrier]] allemand, et bien delà, de par ses répercussions internationales.  
    
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Encore fallait-il pour les révolutionnaires du SPD se fixer clairement cet objectif et prendre à cette fin les mesures pratiques de rupture politique et organisationnelle avec la social-démocratie faillie. Or, tout en se dotant d’un moyen d’expression indépendant, La Lettre de Spartakus, ils n’iront pas dans cette voie, la considérant comme "sectaire". Déjà, la gauche du parti social-démocrate n’avait pas de structure organisée et, en réaction à l’organisation particulièrement rigide de la socialdémocratie, se méfiait de toute centralisation. Rosa Luxembourg repoussait alors – à l'opposé de Lénine - toute "mesure d’organisation» particulière. Pendant la guerre, confrontés à la répression de l’Etat et à celle de l’appareil social-démocrate, les spartakistes se refuseront à rompre avec la social-démocratie, affirmant que le mouvement de masse pourrait la "régénérer", refusant de fonder une "secte" (Luxembourg). Leurs liens organisationnels resteront des plus distendus. Ils ne quitteront la social-démocratie officielle («majoritaire») qu’en 1917, avec le parti «indépendant» qui scissionne sous la pression du mouvement croissant d’agitation dans les masses ("Liebknecht est l’homme le plus populaire dans les tranchées», dit alors Kautsky), parti dirigé d’emblée par de vieux caciques sociaux-démocrates (dont Kautsky est l'archétype). Et même là, les spartakistes se refusent à préparer la rupture avec ce nouveau parti. Se conjugue à ce refus une question d’orientation face à la guerre impérialiste&nbsp;: les spartakistes rejettent le défaitisme révolutionnaire des bolcheviques ("ni en Allemagne, ni en France, ni en Angleterre, ni en Russie, le prolétariat ne peut faire sien le mot d'ordre&nbsp;: victoire ou défaite, un mot d'ordre qui n'a de sens véritable que pour l'impérialisme" écrit la brochure Junius qu’ils éditent en 1916). Ils opposent à la perspective de la "transformation de la guerre impérialiste en guerre civile", formule de Lénine, celle de la "paix" imposée par la lutte du prolétariat. Cette confusion ne facilite pas la rupture, pour le moins, avec la vieille social-démocratie, "majoritaires" comme "indépendants". Le mouvement révolutionnaire spontané sur lequel misait tant Rosa Luxembourg et au compte duquel elle avait travaillé sans relâche jusqu’à l’épuisement s’annonce tout au long de 1917 par la multiplication des grèves et est encore avivé par les révolutions russes. Mais en 1918, les seules organisations visibles et existantes sont les deux partis sociaux-démocrates. La seule organisation semi-clandestine est celle des "délégués révolutionnaires", regroupement de délégués syndicaux d’usine dotés d’une grande audience et opposés à la politique de "paix civile" des dirigeants nationaux des syndicats. Lorsque la révolution allemande éclate, il n’y a même pas de noyau de parti ouvrier révolutionnaire. 1918&nbsp;: la révolution prolétarienne qui met fin à la guerre en fracassant le régime du Kaiser Annoncé par des mouvements croissants de grèves, de mutineries, nourri directement par la victoire de la révolution d'Octobre en Russie, l'éruption révolutionnaire du prolétariat allemand se produit en novembre 1918. A partir du refus des marins basés à Kiel d'aller à un nouveau massacre décidé par l'état-major, de l'envoi par ceux-ci d'émissaires dans toute l'Allemagne pour appeler à leur secours la classe ouvrière, du 6 au 9 novembre, l’Allemagne se couvre de conseils d’ouvriers et de soldats qui commencent à se substituer aux organismes de l’Etat bourgeois allemand, jusque au sein de l’armée. Le 9 novembre, la révolution atteint Berlin. Sa puissance est telle que l’empereur s’enfuit sans combattre. Au-dessus du vieil appareil d’Etat, des ministères maintenus tels quels, est dressé à la hâte une direction de six sociaux-démocrates (trois majoritaires et trois indépendants) baptisés "commissaires du peuple". Karl Liebknecht salue à Berlin la "Révolution Socialiste". Comme l’avait indiqué Lénine, c’est la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile contre le gouvernement de son propre impérialisme qui permet d’en finir avec la guerre. Dans la foulée de la révolution russe, la révolution allemande de 1918, le prolétariat par son action de classe s’avère être la seule force capable de mettre fin à la boucherie impérialiste après quatre années de massacres. Le 11 novembre, l’état-major allemand signe l’armistice. Mais le sort de la République, une fois le Kaiser parti, n’est pas réglé. A ce moment, c’est une façade rouge, indispensable pour qui veut être entendu des masses, qui a été jetée sur un appareil d’Etat intact, celui des bourgeois prussiens et de leur étatmajor. Le gouvernement des "commissaires du peuple" va proclamer dès le 12 novembre des mesures importantes&nbsp;: instauration au moins formelle des libertés démocratiques élémentaires, début de législation du travail (promesse de la journée de huit heures, conventions collectives, allocations chômage, etc.), que le patronat entérine dès le 15 en signant un accord avec les syndicats sur ces points. C’est que la bourgeoisie risque de tout perdre&nbsp;: elle a parfaitement conscience du caractère profondément socialiste de la révolution allemande (que d’ailleurs tous proclament, y compris les "majoritaires"), ce qui est attesté par la floraison des conseils d'ouvriers et de soldats, organes mêmes du pouvoir ouvrier. Mais l’existence des conseils en soi ne suffit pas. "Assemblée nationale ou gouvernement des conseils" (Rosa Luxembourg) Après s’être proclamés "commissaires du peuple" et avoir affirmé le caractère socialiste de la République, les sociauxdémocrates majoritaires - sur lesquels la bourgeoisie allemande a placé ses derniers espoirs – vont s’employer à ravaler les conseils au rang d’auxiliaires de l’Etat bourgeois. Ebert, qui préside le nouveau gouvernement, ainsi que toute la socialdémocratie, combattent pour que les conseils soient des organes consultatifs, de cogestion, dans les entreprises, les villes, et ce en particulier dans l’armée, passant un accord secret avec l’état-major sur cette question. Mais pour y parvenir, il faut ériger un autre organisme de pouvoir&nbsp;: le gouvernement provisoire convoque des élections à une Assemblée Constituante pour le 16 février 1919. Les conseils d’ouvriers et de soldats doivent, eux, tenir leur congrès à Berlin le 16 décembre 1918. Et c'est exactement dans les termes cités "Assemblée nationale ou gouvernement des conseils" qu'est formulé le deuxième point de l'ordre du jour de ce congrès. C'est, comme l'écrit Rosa Luxembourg au même moment dans Die Rote Fahne (Le Drapeau rouge, organe des spartakistes), "la question cardinale de la révolution". Toute la puissance de la social-démocratie est mobilisée contre le pouvoir des conseils. "Les masses ne sont pas mûres", affirment les chefs sociaux-démocrates et leur organe central, le Vorwärts. Pour eux, la dictature du prolétariat n’amènerait qu’une catastrophe (ce discours sur la non-maturité des masses est servi, on le sait, sur une toute autre échelle, dès la moindre grève, par les appareils pour refuser d’appeler au combat). A cela, Rosa Luxembourg répond avec justesse et ironie (Die Rote Fahne, 3 décembre 1918)&nbsp;: "Ce sont seulement les combats de la révolution qui amèneront le prolétariat à une pleine maturité, à tous les sens du terme. Le commencement de la révolution fut le signe que ce processus de maturation commençait. Il se poursuivra rapidement et le Vorwärtz dispose d’un bon étalon auquel il pourra mesurer l’accession du prolétariat à la pleine maturité. Le jour où ses rédacteurs s’envoleront de leurs sièges, et avec eux messieurs Scheidemann, Ebert, David et consorts, pour rejoindre le Hohenzollern ou Ludendorff là où ils sont, ce jour-là, la pleine maturité sera acquise". La social-démocratie majoritaire, répétons-le, se pare du drapeau du socialisme. Aussi affirme-t-elle que ce sera la tâche de l’Assemblée constituante que de le réaliser en votant les lois ad hoc. Elle oppose – et ce ne sera pas la dernière fois dans l’Histoire – la "ligne de la démocratie", dont l’Assemblée parlementaire constituante définirait ultérieurement en quelque sorte le contenu, au mouvement du prolétariat pour son propre pouvoir. Rosa Luxembourg fustigera cette vision "pacifique" et "démocratique" du passage au socialisme: " Et si la classe capitaliste constate qu’elle se trouve en minorité, elle déclarera avec un soupir, en tant que parti parlementaire discipliné&nbsp;: "Rien à faire&nbsp;! Nous voyons que nous sommes battus aux voix, soit&nbsp;! Nous en convenons et nous transmettons aux travailleurs tous nos domaines, nos usines, nos mines, tous nos coffre-forts ignifugé et tous nos beaux profits"(…) Ces messieurs les junkers et capitalistes ne se tiennent tranquilles qu’aussi longtemps que le gouvernement révolutionnaire se contente de poser un léger maquillage esthétique sur le régime du salariat&nbsp;; ils ne sont gentils qu’aussi longtemps que le nerf vital, l’artère de la domination de classe de la bourgeoisie, le profit, restent intacts. Si le profit est pris à la gorge, si la propriété privée est offerte au couteau du sacrifice, alors c’en sera fini de la bonhomie". (Die Rote Fahne, 20 novembre 1918) Aussi justes que sonnent les mots de Rosa Luxembourg, "l’argument" décisif est le poids d'organisation de la social-démocratie. Plus l’on s’élève dans les degrés formés par la centralisation des conseils ouvriers, plus celle-ci est majoritaire. Pour cela, elle piétine d’ailleurs sans remords la démocratie ouvrière, imposant des représentations "paritaires" quand elle est ultra minoritaire. Du coup, au congrès des Conseils, les quatre cinquièmes des délégués sont contrôlés par la social-démocratie, contre cent aux indépendants (et parmi eux une moitié pour l’aile gauche des délégués révolutionnaires, une dizaine de spartakistes). Le congrès rejette les résolutions sur le pouvoir des Conseils, refuse d’entendre les délégations exigeant qu’ils prennent position en ce sens, représentant des dizaines de milliers de manifestants réunis à l’initiative des spartakistes. Le Congrès donne les pleins pouvoir au gouvernement Ebert-Scheidemann et avance les élections à la constituante au 19 janvier. Par contre, il adopte une résolution abolissant les grades dans l’armée, y donnant le pouvoir dans aux conseils, l’élection des officiers, bref, de mise à mort de l’Etat-major. Majoritaire dans le congrès, la social-démocratie ne peut maîtriser ses propres troupes sur cette question. Mais tout se concentrait sur la question du gouvernement, y compris quand il serait question plus tard de savoir qui appliquerait cette résolution. Et le congrès des Conseils est sur ce point central une victoire incontestable pour la social-démocratie allemande. <br>  
 
Encore fallait-il pour les révolutionnaires du SPD se fixer clairement cet objectif et prendre à cette fin les mesures pratiques de rupture politique et organisationnelle avec la social-démocratie faillie. Or, tout en se dotant d’un moyen d’expression indépendant, La Lettre de Spartakus, ils n’iront pas dans cette voie, la considérant comme "sectaire". Déjà, la gauche du parti social-démocrate n’avait pas de structure organisée et, en réaction à l’organisation particulièrement rigide de la socialdémocratie, se méfiait de toute centralisation. Rosa Luxembourg repoussait alors – à l'opposé de Lénine - toute "mesure d’organisation» particulière. Pendant la guerre, confrontés à la répression de l’Etat et à celle de l’appareil social-démocrate, les spartakistes se refuseront à rompre avec la social-démocratie, affirmant que le mouvement de masse pourrait la "régénérer", refusant de fonder une "secte" (Luxembourg). Leurs liens organisationnels resteront des plus distendus. Ils ne quitteront la social-démocratie officielle («majoritaire») qu’en 1917, avec le parti «indépendant» qui scissionne sous la pression du mouvement croissant d’agitation dans les masses ("Liebknecht est l’homme le plus populaire dans les tranchées», dit alors Kautsky), parti dirigé d’emblée par de vieux caciques sociaux-démocrates (dont Kautsky est l'archétype). Et même là, les spartakistes se refusent à préparer la rupture avec ce nouveau parti. Se conjugue à ce refus une question d’orientation face à la guerre impérialiste&nbsp;: les spartakistes rejettent le défaitisme révolutionnaire des bolcheviques ("ni en Allemagne, ni en France, ni en Angleterre, ni en Russie, le prolétariat ne peut faire sien le mot d'ordre&nbsp;: victoire ou défaite, un mot d'ordre qui n'a de sens véritable que pour l'impérialisme" écrit la brochure Junius qu’ils éditent en 1916). Ils opposent à la perspective de la "transformation de la guerre impérialiste en guerre civile", formule de Lénine, celle de la "paix" imposée par la lutte du prolétariat. Cette confusion ne facilite pas la rupture, pour le moins, avec la vieille social-démocratie, "majoritaires" comme "indépendants". Le mouvement révolutionnaire spontané sur lequel misait tant Rosa Luxembourg et au compte duquel elle avait travaillé sans relâche jusqu’à l’épuisement s’annonce tout au long de 1917 par la multiplication des grèves et est encore avivé par les révolutions russes. Mais en 1918, les seules organisations visibles et existantes sont les deux partis sociaux-démocrates. La seule organisation semi-clandestine est celle des "délégués révolutionnaires", regroupement de délégués syndicaux d’usine dotés d’une grande audience et opposés à la politique de "paix civile" des dirigeants nationaux des syndicats. Lorsque la révolution allemande éclate, il n’y a même pas de noyau de parti ouvrier révolutionnaire. 1918&nbsp;: la révolution prolétarienne qui met fin à la guerre en fracassant le régime du Kaiser Annoncé par des mouvements croissants de grèves, de mutineries, nourri directement par la victoire de la révolution d'Octobre en Russie, l'éruption révolutionnaire du prolétariat allemand se produit en novembre 1918. A partir du refus des marins basés à Kiel d'aller à un nouveau massacre décidé par l'état-major, de l'envoi par ceux-ci d'émissaires dans toute l'Allemagne pour appeler à leur secours la classe ouvrière, du 6 au 9 novembre, l’Allemagne se couvre de conseils d’ouvriers et de soldats qui commencent à se substituer aux organismes de l’Etat bourgeois allemand, jusque au sein de l’armée. Le 9 novembre, la révolution atteint Berlin. Sa puissance est telle que l’empereur s’enfuit sans combattre. Au-dessus du vieil appareil d’Etat, des ministères maintenus tels quels, est dressé à la hâte une direction de six sociaux-démocrates (trois majoritaires et trois indépendants) baptisés "commissaires du peuple". Karl Liebknecht salue à Berlin la "Révolution Socialiste". Comme l’avait indiqué Lénine, c’est la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile contre le gouvernement de son propre impérialisme qui permet d’en finir avec la guerre. Dans la foulée de la révolution russe, la révolution allemande de 1918, le prolétariat par son action de classe s’avère être la seule force capable de mettre fin à la boucherie impérialiste après quatre années de massacres. Le 11 novembre, l’état-major allemand signe l’armistice. Mais le sort de la République, une fois le Kaiser parti, n’est pas réglé. A ce moment, c’est une façade rouge, indispensable pour qui veut être entendu des masses, qui a été jetée sur un appareil d’Etat intact, celui des bourgeois prussiens et de leur étatmajor. Le gouvernement des "commissaires du peuple" va proclamer dès le 12 novembre des mesures importantes&nbsp;: instauration au moins formelle des libertés démocratiques élémentaires, début de législation du travail (promesse de la journée de huit heures, conventions collectives, allocations chômage, etc.), que le patronat entérine dès le 15 en signant un accord avec les syndicats sur ces points. C’est que la bourgeoisie risque de tout perdre&nbsp;: elle a parfaitement conscience du caractère profondément socialiste de la révolution allemande (que d’ailleurs tous proclament, y compris les "majoritaires"), ce qui est attesté par la floraison des conseils d'ouvriers et de soldats, organes mêmes du pouvoir ouvrier. Mais l’existence des conseils en soi ne suffit pas. "Assemblée nationale ou gouvernement des conseils" (Rosa Luxembourg) Après s’être proclamés "commissaires du peuple" et avoir affirmé le caractère socialiste de la République, les sociauxdémocrates majoritaires - sur lesquels la bourgeoisie allemande a placé ses derniers espoirs – vont s’employer à ravaler les conseils au rang d’auxiliaires de l’Etat bourgeois. Ebert, qui préside le nouveau gouvernement, ainsi que toute la socialdémocratie, combattent pour que les conseils soient des organes consultatifs, de cogestion, dans les entreprises, les villes, et ce en particulier dans l’armée, passant un accord secret avec l’état-major sur cette question. Mais pour y parvenir, il faut ériger un autre organisme de pouvoir&nbsp;: le gouvernement provisoire convoque des élections à une Assemblée Constituante pour le 16 février 1919. Les conseils d’ouvriers et de soldats doivent, eux, tenir leur congrès à Berlin le 16 décembre 1918. Et c'est exactement dans les termes cités "Assemblée nationale ou gouvernement des conseils" qu'est formulé le deuxième point de l'ordre du jour de ce congrès. C'est, comme l'écrit Rosa Luxembourg au même moment dans Die Rote Fahne (Le Drapeau rouge, organe des spartakistes), "la question cardinale de la révolution". Toute la puissance de la social-démocratie est mobilisée contre le pouvoir des conseils. "Les masses ne sont pas mûres", affirment les chefs sociaux-démocrates et leur organe central, le Vorwärts. Pour eux, la dictature du prolétariat n’amènerait qu’une catastrophe (ce discours sur la non-maturité des masses est servi, on le sait, sur une toute autre échelle, dès la moindre grève, par les appareils pour refuser d’appeler au combat). A cela, Rosa Luxembourg répond avec justesse et ironie (Die Rote Fahne, 3 décembre 1918)&nbsp;: "Ce sont seulement les combats de la révolution qui amèneront le prolétariat à une pleine maturité, à tous les sens du terme. Le commencement de la révolution fut le signe que ce processus de maturation commençait. Il se poursuivra rapidement et le Vorwärtz dispose d’un bon étalon auquel il pourra mesurer l’accession du prolétariat à la pleine maturité. Le jour où ses rédacteurs s’envoleront de leurs sièges, et avec eux messieurs Scheidemann, Ebert, David et consorts, pour rejoindre le Hohenzollern ou Ludendorff là où ils sont, ce jour-là, la pleine maturité sera acquise". La social-démocratie majoritaire, répétons-le, se pare du drapeau du socialisme. Aussi affirme-t-elle que ce sera la tâche de l’Assemblée constituante que de le réaliser en votant les lois ad hoc. Elle oppose – et ce ne sera pas la dernière fois dans l’Histoire – la "ligne de la démocratie", dont l’Assemblée parlementaire constituante définirait ultérieurement en quelque sorte le contenu, au mouvement du prolétariat pour son propre pouvoir. Rosa Luxembourg fustigera cette vision "pacifique" et "démocratique" du passage au socialisme: " Et si la classe capitaliste constate qu’elle se trouve en minorité, elle déclarera avec un soupir, en tant que parti parlementaire discipliné&nbsp;: "Rien à faire&nbsp;! Nous voyons que nous sommes battus aux voix, soit&nbsp;! Nous en convenons et nous transmettons aux travailleurs tous nos domaines, nos usines, nos mines, tous nos coffre-forts ignifugé et tous nos beaux profits"(…) Ces messieurs les junkers et capitalistes ne se tiennent tranquilles qu’aussi longtemps que le gouvernement révolutionnaire se contente de poser un léger maquillage esthétique sur le régime du salariat&nbsp;; ils ne sont gentils qu’aussi longtemps que le nerf vital, l’artère de la domination de classe de la bourgeoisie, le profit, restent intacts. Si le profit est pris à la gorge, si la propriété privée est offerte au couteau du sacrifice, alors c’en sera fini de la bonhomie". (Die Rote Fahne, 20 novembre 1918) Aussi justes que sonnent les mots de Rosa Luxembourg, "l’argument" décisif est le poids d'organisation de la social-démocratie. Plus l’on s’élève dans les degrés formés par la centralisation des conseils ouvriers, plus celle-ci est majoritaire. Pour cela, elle piétine d’ailleurs sans remords la démocratie ouvrière, imposant des représentations "paritaires" quand elle est ultra minoritaire. Du coup, au congrès des Conseils, les quatre cinquièmes des délégués sont contrôlés par la social-démocratie, contre cent aux indépendants (et parmi eux une moitié pour l’aile gauche des délégués révolutionnaires, une dizaine de spartakistes). Le congrès rejette les résolutions sur le pouvoir des Conseils, refuse d’entendre les délégations exigeant qu’ils prennent position en ce sens, représentant des dizaines de milliers de manifestants réunis à l’initiative des spartakistes. Le Congrès donne les pleins pouvoir au gouvernement Ebert-Scheidemann et avance les élections à la constituante au 19 janvier. Par contre, il adopte une résolution abolissant les grades dans l’armée, y donnant le pouvoir dans aux conseils, l’élection des officiers, bref, de mise à mort de l’Etat-major. Majoritaire dans le congrès, la social-démocratie ne peut maîtriser ses propres troupes sur cette question. Mais tout se concentrait sur la question du gouvernement, y compris quand il serait question plus tard de savoir qui appliquerait cette résolution. Et le congrès des Conseils est sur ce point central une victoire incontestable pour la social-démocratie allemande. <br>  
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[[Image:RévolutionAllemandePierreBroué.jpg|center|524x698px]]
    
== Fondation du Parti Communiste&nbsp;: l’infantilisme révolutionnaire <br>  ==
 
== Fondation du Parti Communiste&nbsp;: l’infantilisme révolutionnaire <br>  ==
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