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Mais une politique qui crée du même coup une situation inédite dans la partie «&nbsp;républicaine&nbsp;» du territoire. Là où l’armée a échoué dans son coup d’état, la République s’efface également, mais cette fois au profit d’une insurrection ouvrière qui a commencé à agir sans elle. <br>  
 
Mais une politique qui crée du même coup une situation inédite dans la partie «&nbsp;républicaine&nbsp;» du territoire. Là où l’armée a échoué dans son coup d’état, la République s’efface également, mais cette fois au profit d’une insurrection ouvrière qui a commencé à agir sans elle. <br>  
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C’est le règne des comités (de toutes sortes et de toute composition) même si c’est inégal selon les régions. Voir document 1 (extrait de Broué et Témine sur les 1ers jours à Barcelone et à Madrid).<br>  
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C’est le règne des comités (de toutes sortes et de toute composition) même si c’est inégal selon les régions. Voir la page [[double pouvoir en Espagne républicaine|double pouvoir en Espagne républicaine]] pour une description de l'ambiance révolutionnaire d'alors.<br>  
    
C’est le paradoxe du coup d’état&nbsp;: destiné à prévenir une révolution (avant qu’il ne soit trop tard), il a précipité les événements et crées une situation révolutionnaire sans précédant dans une moitié de l’Espagne.<br>  
 
C’est le paradoxe du coup d’état&nbsp;: destiné à prévenir une révolution (avant qu’il ne soit trop tard), il a précipité les événements et crées une situation révolutionnaire sans précédant dans une moitié de l’Espagne.<br>  
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Ce qui provoque parfois des scènes plutôt étonnantes. Les anarchistes Garcia Oliver, Durruti et Santillan se rendent au palais de la Généralité de Catalogne le 20 juillet. Le président Companys (un républicain favorable à l’indépendance de la Catalogne) les attend livide (il y a eu beaucoup de fusillés les derniers jours et tout est aux mains des anarchistes&nbsp;!). Companys leur propose de servir comme simple soldat de la révolution (la scène est notamment racontée par Broué et Témine page 112). Les anarchistes rétorquent qu’ils ne veulent pas du pouvoir (mais les mêmes deviendront ministres quelques mois plus tard&nbsp;!).<br>Du coup, le gouvernement reste en place. Simplement, les organisations ouvrières installent à côté de lui un Comité Central des Milices Antifascistes de Catalogne (où la CNT se met volontairement en minorité&nbsp;!). Avec l’illusion que les anarchistes ont de toute façon le pouvoir, puisqu’ils contrôlent tout, même le gouvernement&nbsp;: c’est notre allié, et s’il nous veut du mal, il n’aura pas les moyens de nous combattre…  
 
Ce qui provoque parfois des scènes plutôt étonnantes. Les anarchistes Garcia Oliver, Durruti et Santillan se rendent au palais de la Généralité de Catalogne le 20 juillet. Le président Companys (un républicain favorable à l’indépendance de la Catalogne) les attend livide (il y a eu beaucoup de fusillés les derniers jours et tout est aux mains des anarchistes&nbsp;!). Companys leur propose de servir comme simple soldat de la révolution (la scène est notamment racontée par Broué et Témine page 112). Les anarchistes rétorquent qu’ils ne veulent pas du pouvoir (mais les mêmes deviendront ministres quelques mois plus tard&nbsp;!).<br>Du coup, le gouvernement reste en place. Simplement, les organisations ouvrières installent à côté de lui un Comité Central des Milices Antifascistes de Catalogne (où la CNT se met volontairement en minorité&nbsp;!). Avec l’illusion que les anarchistes ont de toute façon le pouvoir, puisqu’ils contrôlent tout, même le gouvernement&nbsp;: c’est notre allié, et s’il nous veut du mal, il n’aura pas les moyens de nous combattre…  
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'''Pourtant les problèmes arrivent vite&nbsp;! '''<br>D’abord la guerre, avec des effets immédiats. Durruti part immédiatement avec 20 000 hommes (et femmes&nbsp;!) pour sauver Saragosse. Le résultat est un jeu de dupes&nbsp;: chantage à l’arrière (toutes les armes pour le front, discipline, production, centralisation)&nbsp;; et sacrifices au front (les milices du POUM et de la CNT sont les plus exposées et sans armes).<br>Les révolutionnaires se battent contre Franco, mais à l’arrière le pouvoir central se reconstruit. Pas à pas. C’est aussi une des leçons d’Espagne&nbsp;: on peut reconstruire un appareil d’Etat bourgeois parfois avec trois fois rien au départ.<br>Voir document 2 (Broué-Témine chapitre IX sur la restauration de l’Etat)&nbsp;: des comités qui acceptent de s’intégrer aux municipalités. Des milices intégrées dans une nouvelle police ou militarisées sur le front. Des entreprises nationalisées et désormais dirigées par des “&nbsp;techniciens&nbsp;” au détriment des formes de contrôle ouvrier. Parfois avec le consentement, parfois grâce à une série de petits coups de force…  
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'''Pourtant les problèmes arrivent vite&nbsp;! '''<br>D’abord la guerre, avec des effets immédiats. Durruti part immédiatement avec 20 000 hommes (et femmes&nbsp;!) pour sauver Saragosse. Le résultat est un jeu de dupes&nbsp;: chantage à l’arrière (toutes les armes pour le front, discipline, production, centralisation)&nbsp;; et sacrifices au front (les milices du POUM et de la CNT sont les plus exposées et sans armes).<br>Les révolutionnaires se battent contre Franco, mais à l’arrière le pouvoir central se reconstruit. Pas à pas. C’est aussi une des leçons d’Espagne&nbsp;: on peut reconstruire un appareil d’Etat bourgeois parfois avec trois fois rien au départ.<br>Des comités qui acceptent de s’intégrer aux municipalités. Des milices intégrées dans une nouvelle police ou militarisées sur le front. Des entreprises nationalisées et désormais dirigées par des “&nbsp;techniciens&nbsp;” au détriment des formes de contrôle ouvrier. Parfois avec le consentement, parfois grâce à une série de petits coups de force…  
    
A Barcelone, cela prend plutôt l’allure d’une guerre larvée permanente. Mais la CNT et le POUM sont pris dans une contradiction insoluble. A la base, leurs militants résistent à cette reprise en main. Mais en même temps ces organisations décident de participer au gouvernement. <br>  
 
A Barcelone, cela prend plutôt l’allure d’une guerre larvée permanente. Mais la CNT et le POUM sont pris dans une contradiction insoluble. A la base, leurs militants résistent à cette reprise en main. Mais en même temps ces organisations décident de participer au gouvernement. <br>  
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D’une manière assez paradoxale, l’issue dépendait beaucoup de la CNT mais aussi du POUM.  
 
D’une manière assez paradoxale, l’issue dépendait beaucoup de la CNT mais aussi du POUM.  
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La CNT a une influence et un milieu militant infiniment plus important que le POUM. Mais c’est une organisation très hétérogène, qui explose littéralement lorsqu’elle est confrontée à ses propres contradictions politiques (notamment au moment des événements de mai 1937). La CNT ne veut pas prendre le pouvoir après juillet mais elle accepte d’avoir des ministres quelques mois après et participe à la reconstruction de l’Etat bourgeois. Il est difficile d’en comprendre toutes les raisons. Il y a bien sûr les pressions en ce sens, la solidarité malgré tout contre le fascisme… Le document 3 donne quand même un aperçu sur l’état de confusion qui existe alors, sur la question de l’Etat.
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La CNT a une influence et un milieu militant infiniment plus important que le POUM. Mais c’est une organisation très hétérogène, qui explose littéralement lorsqu’elle est confrontée à ses propres contradictions politiques (notamment au moment des événements de mai 1937). La CNT ne veut pas prendre le pouvoir après juillet mais elle accepte d’avoir des ministres quelques mois après et participe à la reconstruction de l’Etat bourgeois. Il est difficile d’en comprendre toutes les raisons. Il y a bien sûr les pressions en ce sens, la solidarité malgré tout contre le fascisme…<ref>Extrait du journal de la CNT Solidaridad Obrera (4 novembre 1936)
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Le POUM aurait pu jouer un autre rôle, celui d’une direction politique de rechange, en rompant définitivement son alliance avec le FP, en proposant systématiquement cette politique à la CNT, éventuellement contre ses dirigeants attachés à rester ministres. Du moins c’était le point de vue de Trotsky (document 4). Mais ce n’était pas celui des dirigeants du POUM qui estiment encore aujourd’hui (voir le témoignage de Wilebaldo Solano cité dans la bibliographie) qu’il n’y avait pas d’autre politique possible que celle qu’ils ont menée…  
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" L’entrée de la CNT dans le gouvernement central est l’un des événements politiques les plus importants de l’histoire politique de notre pays. Tant sur le plan des principes que par conviction, la CNT a toujours été anti-étatiste et ennemie de toute forme de gouvernement. Mais les circonstances ont changé la nature du gouvernement espagnol et de l’Etat espagnol.
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Aujourd’hui, le gouvernement, en tant qu’instrument de contrôle des organes de l’Etat, a cessé d’être une force d’oppression contre la classe ouvrière, de même que l’Etat ne représente plus un organisme qui divise la société en classes. L’un et l’autre opprimeront même moins le peuple maintenant que des membres de la CNT y sont intervenus. "</ref><br>
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Le POUM aurait pu jouer un autre rôle, celui d’une direction politique de rechange, en rompant définitivement son alliance avec le FP, en proposant systématiquement cette politique à la CNT, éventuellement contre ses dirigeants attachés à rester ministres. Du moins c’était le [[Point_de_vue_de_Trotsky_sur_le_POUM|point de vue de Trotsky]]. Mais ce n’était pas celui des dirigeants du POUM qui estiment encore aujourd’hui<ref>Lire le témoignage de Wilebaldo Solano cité dans la bibliographie.</ref> qu’il n’y avait pas d’autre politique possible que celle qu’ils ont menée…  
    
A chaque fois, la réponse de Nin est la même&nbsp;: c’est la CNT qui a les moyens, pas nous (et donc sans eux nous n’avons pas les moyens de préparer les masses à la conquête du pouvoir, il faut donc transiger et même revendiquer une place au sein de la République, en attendant que la situation murisse davantage). <br>Pourtant il y a eu au moins un moment où le POUM aurait pu gagner une réelle influence de masses&nbsp;: c’est en mai 1937. C’est en tout cas ce que tente de démontrer le récit de Felix Morrow (voir bibliographie). Certes, c’est un moment difficile car la révolution a déjà commencé à refluer. Mais l’écart est alors considérable entre une partie importante des militants de la CNT (notamment les jeunes) qui veulent balayer le gouvernement de la Généralité de la Catalogne et leurs chefs. Le POUM n’ose pas. <br>Il subit immédiatement après la répression des staliniens qui ont désormais les moyens d’appliquer une véritable politique de terreur.  
 
A chaque fois, la réponse de Nin est la même&nbsp;: c’est la CNT qui a les moyens, pas nous (et donc sans eux nous n’avons pas les moyens de préparer les masses à la conquête du pouvoir, il faut donc transiger et même revendiquer une place au sein de la République, en attendant que la situation murisse davantage). <br>Pourtant il y a eu au moins un moment où le POUM aurait pu gagner une réelle influence de masses&nbsp;: c’est en mai 1937. C’est en tout cas ce que tente de démontrer le récit de Felix Morrow (voir bibliographie). Certes, c’est un moment difficile car la révolution a déjà commencé à refluer. Mais l’écart est alors considérable entre une partie importante des militants de la CNT (notamment les jeunes) qui veulent balayer le gouvernement de la Généralité de la Catalogne et leurs chefs. Le POUM n’ose pas. <br>Il subit immédiatement après la répression des staliniens qui ont désormais les moyens d’appliquer une véritable politique de terreur.  

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