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==Partis et syndicats==
 
==Partis et syndicats==
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Les rapports entre partis et syndicats sont variables selon les pays et les époques. En Allemagne, les [[Sozialdemokratische Partei Deutschlands|social-démocrates]] ont été à l'initiative des syndicats et ont longtemps gardé l'ascendant. A l'inverse, en Angleterre, ce sont les syndicats qui ont créé le Labour party. Cependant, les syndicats de par leur nature ont rapidement eu tendance à devenir beaucoup plus massifs que les partis, ce qui a finit par donner à la [[bureaucratie syndicale]] une influence prépondérante.
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Les rapports entre partis et syndicats sont variables selon les pays et les époques. En Allemagne, les [[Sozialdemokratische Partei Deutschlands|social-démocrates]] ont été à l'initiative des syndicats et ont longtemps gardé l'ascendant. A l'inverse, en Angleterre, ce sont les syndicats qui ont créé le [[Parti travailliste (Royaume-Uni)|Labour party]]. Cependant, les syndicats de par leur nature ont rapidement eu tendance à devenir beaucoup plus massifs que les partis, ce qui a finit par donner à la [[bureaucratie syndicale]] une influence prépondérante.
    
Aux États-Unis, les syndicats et partis ouvriers ont toujours connu une relative indépendance. En France, le problème des rapports entre partis et syndicats est particulièrement à vif avant 1914 (autour de la [[Charte_d'Amiens|Charte d'Amiens]]) et après 1968. La CGT nie, contre toute évidence, sa subordination au [[PCF|PCF]]. À l’inverse, certains syndicats, telle la [[CFDT|CFDT]], refusent de voir leurs droits définis par les partis.
 
Aux États-Unis, les syndicats et partis ouvriers ont toujours connu une relative indépendance. En France, le problème des rapports entre partis et syndicats est particulièrement à vif avant 1914 (autour de la [[Charte_d'Amiens|Charte d'Amiens]]) et après 1968. La CGT nie, contre toute évidence, sa subordination au [[PCF|PCF]]. À l’inverse, certains syndicats, telle la [[CFDT|CFDT]], refusent de voir leurs droits définis par les partis.
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En Allemagne, les partis socialistes sont apparus avant que n'apparaissent un mouvement syndical puissant. Mais au début du 20<sup>e</sup> siècle, les organisations syndicales se développent et se centralisent rapidement. De par leur influence idéologique et le fait qu'ils aient la plupart du temps été les premiers organisateurs du mouvement ouvrier, les cadres du [[Sozialdemokratische Partei Deutschlands|parti social-démocrate]] (SPD) gardèrent un certain temps un rôle dirigeant. On considérait alors « la social-démocratie allemande » comme un ensemble, constitué de toutes les organisations (associatives, syndicales...) et dirigé politiquement par le SPD, vu comme [[avant-garde]].
 
En Allemagne, les partis socialistes sont apparus avant que n'apparaissent un mouvement syndical puissant. Mais au début du 20<sup>e</sup> siècle, les organisations syndicales se développent et se centralisent rapidement. De par leur influence idéologique et le fait qu'ils aient la plupart du temps été les premiers organisateurs du mouvement ouvrier, les cadres du [[Sozialdemokratische Partei Deutschlands|parti social-démocrate]] (SPD) gardèrent un certain temps un rôle dirigeant. On considérait alors « la social-démocratie allemande » comme un ensemble, constitué de toutes les organisations (associatives, syndicales...) et dirigé politiquement par le SPD, vu comme [[avant-garde]].
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Mais les syndicats montèrent en puissance et dépassèrent le parti. En 1895, année de la mort d'[[Friedrich Engels|Engels]], les syndicats social-démocrates n'atteignaient que 300 000 membres et étaient concurrencés par les syndicats dirigés par des libéraux et des catholiques, tandis que le SPD avait un poids électoral de  1 500 000 votes (19,7%). En 1900, ils étaient devenus la première puissance syndicale, avec 600 000 membres, et en 1904 ils dépassaient le million. En 1906, ils comptaient 1 689 709 membres, contre 384 327 pour le SPD. Vers 1906, parmi les électeurs social-démocrates, 50% étaient membres des syndicats, et 9% membres du parti.<ref name=":0">Carl Emil Schorske, German Social Democracy, 1905–1917: the development of the great schism (1955, Harvard University Press)</ref>
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La première [[confédération syndicale allemande]] (''Generalkommission der Gewerkschaften Deutschlands'') a été fondée le 14 mars 1892 à Halberstadt. Elle réunissait 57 organisations représentant environ 300 000 adhérents. A ce moment-là, elle est fortement concurrencée par les syndicats dirigés par des libéraux et des catholiques, héritage des [[lois antisocialistes]] qui l'avait handicapée.
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Les dirigeants des centrales syndicales se retrouvent à la tête d'une organisation très puissante, de plus en plus [[Bureaucratie syndicale|bureaucratisée]] et habituée à la [[collaboration de classe]]. En pratique, elle prend de moins en moins d'initiative offensive dans la [[lutte des classes]]. En particulier, alors que des [[Grève générale|grèves générales]] spontanées commencent à apparaître ([[Grève générale de 1902 en Belgique|1902 en Belgique]], [[Révolution russe (1905)|1905 en Russie]]...), les syndicats les voient d'un mauvais œil. En Allemagne même, la direction syndicale fait tout pour canaliser les nombreuses grèves, notamment la grève des mineurs (qui menaçait l'économie de paralysie) qu'elle incite à reprendre le travail.
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Mais les syndicats social-démocrates montèrent en puissance et dépassèrent le parti. En 1900, ils étaient devenus la première puissance syndicale, avec 600 000 membres, et en 1904 ils dépassaient le million. En 1906, ils comptaient 1 689 709 membres, contre 384 327 pour le SPD. Vers 1906, parmi les électeurs social-démocrates, 50% étaient membres des syndicats, et 9% membres du parti.<ref name=":0">Carl Emil Schorske, German Social Democracy, 1905–1917: the development of the great schism (1955, Harvard University Press)</ref>
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Les syndicats allemands tiennent leur congrès à Cologne en mai 1905, et condamnent l'usage de la grève générale (que [[Carl Legien]] appelait « l'obscurité générale ») et même le fait de faire de la propagande pour. Ils soutenaient qu'ils n'avaient pas les moyens pour soutenir une grève générale et qu’ils avaient besoin de la paix sociale pour continuer leur progression numérique. Quelques mois plus tard, au congrès du parti, [[August Bebel|Bebel]] marque son hostilité aux révisionnistes qui rejettent la grève générale, affirmant que «&nbsp;''la grève des masses doit être retenue comme une mesure défensive ''».
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Les dirigeants des centrales syndicales se retrouvent à la tête d'une organisation très puissante, de plus en plus [[Bureaucratie syndicale|bureaucratisée]] et habituée à la [[collaboration de classe]]. En pratique, elle prend de moins en moins d'initiative offensive dans la [[lutte des classes]]. 
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Le dirigeant de la [[Commission générale des syndicats allemands]] durant deux décennies, [[Carl Legien]], par ailleurs député à plusieurs reprises du SPD, s'appuya sur la fraction du patronat qui entendait composer avec les organisations syndicales. Il théorisa l'évolution de celles-ci vers le [[légalisme]], la défense des intérêts [[Idéologies corporatistes|corporatistes]], le rejet de l'idée d'une grève générale et, au-delà, de toute perspective révolutionnaire.
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Les chefs de ces syndicats, qui affirmaient avoir « besoin de calme dans le mouvement ouvrier » pour se développer, se réfugièrent dans une prétendue indépendance et neutralité politique, tout en condamnant certaines directives du SPD comme « dangereusement marxistes ».  En 1913, c'est pourtant Legien qui fut désigné à la tête du [[Secrétariat syndical international]] réunissant les centrales européennes et leurs sept millions et demi d'adhérents. Preuve que ce courant avait déjà des assises solides dans tout le mouvement syndical.
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En particulier, alors que des [[Grève générale|grèves générales]] spontanées commencent à apparaître ([[Grève générale de 1902 en Belgique|1902 en Belgique]], [[Révolution russe (1905)|1905 en Russie]]...), les syndicats les voient d'un mauvais œil. En Allemagne même, la direction syndicale fait tout pour canaliser les nombreuses grèves, notamment la grève des mineurs (qui menaçait l'économie de paralysie) qu'elle incite à reprendre le travail.
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Les syndicats allemands tiennent leur congrès à Cologne en mai 1905, et condamnent l'usage de la grève générale (que [[Carl Legien]] appelait « l'obscurité générale ») et même le fait de faire de la propagande pour. Ils soutenaient qu'ils n'avaient pas les moyens pour soutenir une grève générale et qu’ils avaient besoin de la paix sociale pour continuer leur progression numérique. Quelques mois plus tard, au congrès du parti, [[August Bebel|Bebel]] marque son hostilité aux révisionnistes qui rejettent la grève générale, affirmant que «&nbsp;''la grève des masses doit être retenue comme une mesure défensive ''».  
    
Il reçoit le soutien de [[Rosa_Luxemburg|Rosa Luxemburg]], qui rentre de Russie et publie ''[[Grève de masse, parti et syndicat|Grève de masse, Parti et syndicat]]'', où elle réfute les positions des syndicalistes&nbsp;: elle dénonce leur caractère mécanique (attendre que toute la classe ouvrière soit organisée), leur attitude de comptable (les caisses des syndicats ne permettent pas de soutenir une grève générale) et met en avant que c’est dans la lutte que les travailleurs réalisent les plus grands progrès dans leur organisation et donc dans leur auto-émancipation.
 
Il reçoit le soutien de [[Rosa_Luxemburg|Rosa Luxemburg]], qui rentre de Russie et publie ''[[Grève de masse, parti et syndicat|Grève de masse, Parti et syndicat]]'', où elle réfute les positions des syndicalistes&nbsp;: elle dénonce leur caractère mécanique (attendre que toute la classe ouvrière soit organisée), leur attitude de comptable (les caisses des syndicats ne permettent pas de soutenir une grève générale) et met en avant que c’est dans la lutte que les travailleurs réalisent les plus grands progrès dans leur organisation et donc dans leur auto-émancipation.

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