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Mais l'unanimisme masque en réalité une redéfinition des clivages en cours. Les [[Classe dominante|classes dominantes]], parmi lesquelles la [[bourgeoisie]] a désormais l'hégémonie, peuvent facilement accepter l'idée républicaine, à condition qu'elle ne soit pas trop « sociale ». Or, du côté des masses populaires, on espère que cette « Ère nouvelle » sera celle de l'égalité. Dans les villes industrielles comme Lille, Limoges, Lyon, Reims, Rouen il y a des manifestations ouvrières pour réclamer des augmentations de [[salaire]], parfois des faits de [[luddisme]] (destruction des machines). Les campagnes connaissent aussi des troubles. Dans les régions montagneuses des Alpes, du Jura ou des Pyrénées les agents des Eaux et Forêts qui restreignent les droits de pacage des chèvres et des moutons sont pris à partie. En Isère et dans le Var, les paysans les moins aisés demandent le rétablissement des droits d'usage qui ont disparu devant les pratiques agricoles modernes mais individualistes des riches paysans. Les salariés agricoles très nombreux réclament des augmentations de salaire. Cette contestation sociale commence à faire peur aux possédants qui redoutent les « partageux », les « rouges », les « communistes ».
 
Mais l'unanimisme masque en réalité une redéfinition des clivages en cours. Les [[Classe dominante|classes dominantes]], parmi lesquelles la [[bourgeoisie]] a désormais l'hégémonie, peuvent facilement accepter l'idée républicaine, à condition qu'elle ne soit pas trop « sociale ». Or, du côté des masses populaires, on espère que cette « Ère nouvelle » sera celle de l'égalité. Dans les villes industrielles comme Lille, Limoges, Lyon, Reims, Rouen il y a des manifestations ouvrières pour réclamer des augmentations de [[salaire]], parfois des faits de [[luddisme]] (destruction des machines). Les campagnes connaissent aussi des troubles. Dans les régions montagneuses des Alpes, du Jura ou des Pyrénées les agents des Eaux et Forêts qui restreignent les droits de pacage des chèvres et des moutons sont pris à partie. En Isère et dans le Var, les paysans les moins aisés demandent le rétablissement des droits d'usage qui ont disparu devant les pratiques agricoles modernes mais individualistes des riches paysans. Les salariés agricoles très nombreux réclament des augmentations de salaire. Cette contestation sociale commence à faire peur aux possédants qui redoutent les « partageux », les « rouges », les « communistes ».
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Dans l'effervescence démocratique, un grand nombre de clubs politiques se forment : plus de 250 à Paris. Les plus caractéristiques sont celui de la ''Société Républicaine Centrale'' de [[Louis-Auguste Blanqui|Blanqui]] ; elle est concurrencée par la ''Société fraternelle centrale'' de [[Étienne Cabet|Cabet]] et le ''Club des Amis du Peuple'' de [[w:François-Vincent Raspail|Raspail]]. La presse, qui jouit désormais de la liberté totale, se développe. [[w:Félicité de La Mennais|Lammenais]] crée ''le Peuple constituant'', [[Pierre-Joseph Proudhon|Proudhon]] collabore au ''[[Le Représentant du peuple|Représentant du Peuple]]'', [[w:Henri Lacordaire|Lacordaire]] publie ''L'Ère nouvelle'', dont le titre est emblématique de l'état d'esprit dominant au début du printemps 1848.
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Dans l'effervescence démocratique, [[w:Clubs créés en 1848|un grand nombre de clubs politiques se forment]] : jusqu'à 450 à Paris<ref>Michelle Zancarini-Fournel, ''Les Luttes et les Rêves. Une histoire populaire de la France de 1685 à nos jours.'', Paris, La Découverte, 2016, 995 p. (<nowiki>ISBN 978-2-35522-088-3</nowiki>), p. 292</ref>. Les plus caractéristiques sont celui de la ''Société Républicaine Centrale'' de [[Louis-Auguste Blanqui|Blanqui]] ; elle est concurrencée par la ''Société fraternelle centrale'' de [[Étienne Cabet|Cabet]] et le ''Club des Amis du Peuple'' de [[w:François-Vincent Raspail|Raspail]]. La presse, qui jouit désormais de la liberté totale, se développe. [[w:Félicité de La Mennais|Lammenais]] crée ''le Peuple constituant'', [[Pierre-Joseph Proudhon|Proudhon]] collabore au ''[[Le Représentant du peuple|Représentant du Peuple]]'', [[w:Henri Lacordaire|Lacordaire]] publie ''L'Ère nouvelle'', dont le titre est emblématique de l'état d'esprit dominant au début du printemps 1848.
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== Un bref espoir féministe ==
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Deux clubs [[féministes]] furent aussi créés : le ''Club fraternel des lingères'' avec [[Désirée Gay]], et la ''Société de la voix des femmes'' avec [[Eugénie Niboyet]]. Ces militantes avaient été marquées par le [[Claude-Henri de Rouvroy de Saint-Simon|saint-simonisme]] et le [[fouriérisme]].
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Désirée Gay adresse dès le début de la révolution des lettres et pétitions au gouvernement provisoire afin de lui demander de faire passer des lois libérales sur le [[divorce]], d'améliorer la condition des travailleuses et de subventionner des restaurants et blanchisseries permettant aux femmes d'être financièrement indépendantes. Elle sera élue à l'unanimité déléguée à la [[Commission du Luxembourg]], et sera aussi nommée cheffe de division de la Cour des Fontaines dans les [[Ateliers nationaux]].
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En mars 1848, Eugénie Niboyet fonde et dirige un journal ne traitant que de la question des femmes et de leurs droits. ''[[w:La Voix des femmes|La Voix des Femmes]]'', sous-titré « ''Journal socialiste et politique, organe d’intérêts pour toutes les femmes'' », est le premier quotidien français féministe. Elle réussit à rassembler des femmes déjà impliquées comme [[Jeanne Deroin]], [[Désirée Gay]], [[Suzanne Voilquin]], [[Elisa Lemonnier]], et [[w:Anaïs Ségalas|Anaïs Ségalas]], mais aussi des autrices populaires : [[w:Gabrielle Soumet|Gabrielle Soumet]], [[w:Amélie Prai|Amélie Prai]], [[w:Adèle Esquiros|Adèle Esquiros]]. Ce mouvement n'est plus réservé aux femmes : des hommes y contribuent, comme [[w:Jean Macé|Jean Macé]] ou Paulin Niboyet, son fils.
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Le 6 avril : ''La Voix des Femmes'' propose la candidature de [[w:George Sand|George Sand]] à l’Assemblée constituante. Sand désavoue cette initiative et juge durement ces femmes qu'elle affirme ne pas connaître, les caricaturistes croquent Eugénie Niboyet et les journalistes de ''La Voix des Femmes''. Le bruit de l'affaire est retentissant, il se retourne contre les promoteurs de cette initiative, et le gouvernement décide la fin des clubs de femmes. Le 20 juin, Eugénie Niboyet, découragée et meurtrie, cesse la publication de ''La Voix des Femmes'', et les féministes se dispersent pour éviter la répression.
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Alors Désirée Gay fonde avec Jeanne Deroin l'Association mutuelle des femmes et un nouveau journal, ''La Politique des Femmes'', qui n'a que deux numéros, puis ''L'Opinion des femmes''. Elle abandonne à son tour l'action militante à la fin 1849.
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== Le Printemps des peuples ==
 
== Le Printemps des peuples ==
 
{{See also|Printemps des peuples}}
 
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=== Premières mesures ===
 
=== Premières mesures ===
Les premières mesures du gouvernement provisoire se veulent en rupture avec la période précédente. La [[peine de mort]] est abolie dans le domaine politique. Les [[w:Châtiment corporel|châtiments corporels]] sont supprimés le 12 mars et la [[w:Contrainte judiciaire|contrainte par corps]] le 19 mars.  
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Les premières mesures du gouvernement provisoire se veulent en rupture avec la période précédente. La [[peine de mort]] est abolie dans le domaine politique. Les [[w:Châtiment corporel|châtiments corporels]] sont supprimés le 12 mars et la [[w:Contrainte judiciaire|contrainte par corps]] le 19 mars. Le 4 mars une ''[[w:Commission pour l'abolition de l'esclavage|Commission pour l'abolition de l'esclavage]]'' (présidée par [[w:Victor Schœlcher|Schœlcher]]) est mise en place : elle conduira le 27 avril à un [[w:Décret d'abolition de l'esclavage du 27 avril 1848|décret d'abolition]]... et d'indemnisation des anciens esclavagistes.  
    
Dans le domaine politique, les changements sont importants. La [[liberté de la presse]] et celle de [[Liberté de réunion|réunion]] sont proclamées le 4 mars. Le 5 mars le gouvernement institue le [[suffrage universel]] masculin, en remplacement du [[suffrage censitaire]] en vigueur depuis 1815 (le corps électoral passe soudain de 250 000 à 9 millions d'électeurs). La [[Garde nationale]], jusque-là réservée aux notables, aux boutiquiers, est ouverte à tous les citoyens (mesure qui indispose une partie des anciens Gardes nationaux qui manifesteront leur mécontentement le 15 mars). Toute une frange de la [[jeunesse]] ouvrière de Paris se retrouve soudain enrôlée, non sans fierté, mais cela contribuera vite (d'autant plus que les chefs sont de la bourgeoisie) à en faire une force de [[police]] utilisable contre leurs camarades de classe.  
 
Dans le domaine politique, les changements sont importants. La [[liberté de la presse]] et celle de [[Liberté de réunion|réunion]] sont proclamées le 4 mars. Le 5 mars le gouvernement institue le [[suffrage universel]] masculin, en remplacement du [[suffrage censitaire]] en vigueur depuis 1815 (le corps électoral passe soudain de 250 000 à 9 millions d'électeurs). La [[Garde nationale]], jusque-là réservée aux notables, aux boutiquiers, est ouverte à tous les citoyens (mesure qui indispose une partie des anciens Gardes nationaux qui manifesteront leur mécontentement le 15 mars). Toute une frange de la [[jeunesse]] ouvrière de Paris se retrouve soudain enrôlée, non sans fierté, mais cela contribuera vite (d'autant plus que les chefs sont de la bourgeoisie) à en faire une force de [[police]] utilisable contre leurs camarades de classe.  
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Les républicains radicaux en sont conscients, et savent qu'ils doivent faire campagne à la campagne pour diffuser les idées républicaines. Ils ont donc besoin de temps. Une manifestation ouvrière parisienne, le 17 mars, obtient le report des élections au 23 avril. Le 16 avril, une autre manifestation, réclamant un second report, est écrasée par Ledru-Rollin s'appuyant sur la Garde nationale.  
 
Les républicains radicaux en sont conscients, et savent qu'ils doivent faire campagne à la campagne pour diffuser les idées républicaines. Ils ont donc besoin de temps. Une manifestation ouvrière parisienne, le 17 mars, obtient le report des élections au 23 avril. Le 16 avril, une autre manifestation, réclamant un second report, est écrasée par Ledru-Rollin s'appuyant sur la Garde nationale.  
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=== L'esclavage dans les colonies ===
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Le 4 mars une commission est mise en place pour résoudre le problème de l'[[esclavage]] dans les colonies françaises. Ses travaux en permettent l'abolition le 27 avril.
      
=== Tournant conservateur suite au 23 avril ===
 
=== Tournant conservateur suite au 23 avril ===

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