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La [[Ligue_pour_l'égalité_des_femmes_(Russie)|Ligue pour l'égalité des femmes]], créée en 1907, connaît un certain essor. Elle organise une manifestation d'environ 40 000 femmes le 20 mars, qui pousse le gouvernement provisoire à promettre le droit de vote aux femmes. Celui-ci sera inscrit dans la loi le 20 juillet.
 
La [[Ligue_pour_l'égalité_des_femmes_(Russie)|Ligue pour l'égalité des femmes]], créée en 1907, connaît un certain essor. Elle organise une manifestation d'environ 40 000 femmes le 20 mars, qui pousse le gouvernement provisoire à promettre le droit de vote aux femmes. Celui-ci sera inscrit dans la loi le 20 juillet.
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Ces premières semaines emplies d’espérance et de générosité sont très peu violentes, dans les villes comme dans les campagnes. Aucunes représailles ne furent par exemple exercées contre les anciens serviteurs du tsar, ce dernier étant simplement assigné à résidence ; beaucoup peuvent librement se retirer ou partir à l’étranger, tandis que les exilés (dont Lénine) sont libres de revenir.
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Ces premières semaines emplies d’espérance et de générosité sont très peu violentes, dans les villes comme dans les campagnes. Aucunes représailles ne furent par exemple exercées contre les anciens serviteurs du tsar, ce dernier étant simplement assigné à résidence ; beaucoup peuvent librement se retirer ou partir à l’étranger, tandis que les exilés (dont Lénine) sont libres de revenir. Beaucoup de bâtiments désertés par des nobles sont occupés par les nouvelles organisations des masses, par exemple l'[[Hôtel_particulier_de_la_Kschessinska|hôtel particulier de la Kschessinska]] par les [[bolchéviks|bolchéviks]].
    
Il y eut un peu plus de conflits au front, où la violence était bien plus présente. Les officiers censurèrent dans un premier temps les nouvelles de Pétrograd. Certains soldats apprirent la révolution du côté allemande... Cela ne fit qu'augmenter la défiance envers les officiers une fois les nouvelles apprises. Les troupes qui basculaient du côté de la révolution s'accrochaient un petit ruban rouge. Des soldats s'en prenaient aux officiers qui gardaient des portraits du tsar. Des représailles eurent lieu là où les sévices des officiers avaient été particulièrement violents. Par exemple à Helsingfors (maintenant Helsinki) et à Svéaborg, le soulèvement violent dura une nuit et un jour, et les officiers les plus détestés furent précipités sous la glace. ''«&nbsp;A en juger par ce que raconte Skobélev de la conduite des autorités de Helsingfors et de la flotte – écrit Soukhanov pourtant bien peu disposé à l'indulgence à l'égard de " l'obscure soldatesque " – on doit seulement s'étonner que ces excès aient été si insignifiants.&nbsp;»'' Trotsky précise&nbsp;: ''«&nbsp;Les bolcheviks tout aussi souvent que les conciliateurs allèrent prévenir des excès chez les soldats. Mais les vengeances sanglantes étaient aussi inévitables que le choc en retour après un coup de feu.&nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrr13.htm Histoire de la révolution russe - 13. L’armée et la guerre]'', 1930</ref>''
 
Il y eut un peu plus de conflits au front, où la violence était bien plus présente. Les officiers censurèrent dans un premier temps les nouvelles de Pétrograd. Certains soldats apprirent la révolution du côté allemande... Cela ne fit qu'augmenter la défiance envers les officiers une fois les nouvelles apprises. Les troupes qui basculaient du côté de la révolution s'accrochaient un petit ruban rouge. Des soldats s'en prenaient aux officiers qui gardaient des portraits du tsar. Des représailles eurent lieu là où les sévices des officiers avaient été particulièrement violents. Par exemple à Helsingfors (maintenant Helsinki) et à Svéaborg, le soulèvement violent dura une nuit et un jour, et les officiers les plus détestés furent précipités sous la glace. ''«&nbsp;A en juger par ce que raconte Skobélev de la conduite des autorités de Helsingfors et de la flotte – écrit Soukhanov pourtant bien peu disposé à l'indulgence à l'égard de " l'obscure soldatesque " – on doit seulement s'étonner que ces excès aient été si insignifiants.&nbsp;»'' Trotsky précise&nbsp;: ''«&nbsp;Les bolcheviks tout aussi souvent que les conciliateurs allèrent prévenir des excès chez les soldats. Mais les vengeances sanglantes étaient aussi inévitables que le choc en retour après un coup de feu.&nbsp;»<ref>Léon Trotsky, ''[https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrr13.htm Histoire de la révolution russe - 13. L’armée et la guerre]'', 1930</ref>''
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Le Comité exécutif du soviet se retrouvait de fait à agir en tant que pouvoir gouvernemental. Il élit une commission provisoire pour les approvisionnements et la charge de s'occuper d'une façon générale des besoins des insurgés et de la garnison. Il organise un état-major révolutionnaire provisoire, et décide de faire occuper immédiatement la Banque d'Empire, la Trésorerie, la Monnaie et les services de fabrication des billets. Les tâches et les fonctions du Soviet s'accroissent constamment sous la pression des masses. La révolution trouve son centre incontesté. Les ouvriers, les soldats et bientôt les paysans ne s'adresseront plus désormais qu'au Soviet, qui devient, à leurs yeux, le point de concentration de tous les espoirs et de tous les pouvoirs, l'incarnation même de la révolution. Par exemple lors des [[Journées_d'avril|journées d'avril]], le général [[Affaire_Kornilov|Kornilov]] ordonne de réprimer une manifestation, mais ses soldats invoquent le [[Prikaz_n°1|Prikaz n°1]] et vont demander confirmation au [[Soviet_de_Petrograd|Soviet]], qui refuse.
 
Le Comité exécutif du soviet se retrouvait de fait à agir en tant que pouvoir gouvernemental. Il élit une commission provisoire pour les approvisionnements et la charge de s'occuper d'une façon générale des besoins des insurgés et de la garnison. Il organise un état-major révolutionnaire provisoire, et décide de faire occuper immédiatement la Banque d'Empire, la Trésorerie, la Monnaie et les services de fabrication des billets. Les tâches et les fonctions du Soviet s'accroissent constamment sous la pression des masses. La révolution trouve son centre incontesté. Les ouvriers, les soldats et bientôt les paysans ne s'adresseront plus désormais qu'au Soviet, qui devient, à leurs yeux, le point de concentration de tous les espoirs et de tous les pouvoirs, l'incarnation même de la révolution. Par exemple lors des [[Journées_d'avril|journées d'avril]], le général [[Affaire_Kornilov|Kornilov]] ordonne de réprimer une manifestation, mais ses soldats invoquent le [[Prikaz_n°1|Prikaz n°1]] et vont demander confirmation au [[Soviet_de_Petrograd|Soviet]], qui refuse.
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Les ouvriers élisaient des socialistes, c'est-à-dire ceux qui étaient non seulement contre la monarchie, mais aussi contre la bourgeoisie. Ils ne faisaient presque aucune différence entre les trois partis socialistes. Mais comme les [[mencheviks|mencheviks]] et les [[Parti_SR|SR]] disposaient de bien plus de cadres intellectuels disponibles, ils eurent plus d'agitateurs et une nette prépondérance dans les élections. Les soldats votaient surtout pour des SR. Les ouvriers, qui voulaient fortement resserrer leur alliance avec les soldats, étaient aussi pour cette raison plus attirés par les menchéviks qui étaient sur la même ligne.
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Les ouvriers élisaient des socialistes, c'est-à-dire ceux qui étaient non seulement contre la monarchie, mais aussi contre la bourgeoisie. Ils ne faisaient presque aucune différence entre les trois partis socialistes. Mais comme les [[Mencheviks|mencheviks]] et les [[Parti_SR|SR]] disposaient de bien plus de cadres intellectuels disponibles, ils eurent plus d'agitateurs et une nette prépondérance dans les élections. Les soldats votaient surtout pour des SR. Les ouvriers, qui voulaient fortement resserrer leur alliance avec les soldats, étaient aussi pour cette raison plus attirés par les menchéviks qui étaient sur la même ligne.
    
À Moscou, les nouvelles de Petrograd déclenchent la [[Grève_générale|grève générale]] et provoquent l'élection d'un Comité révolutionnaire provisoire. Plus généralement, la quasi-totalité du pays est couvert en quelques semaines de soviets d’ouvriers, de paysans, de soldats ou de marins.
 
À Moscou, les nouvelles de Petrograd déclenchent la [[Grève_générale|grève générale]] et provoquent l'élection d'un Comité révolutionnaire provisoire. Plus généralement, la quasi-totalité du pays est couvert en quelques semaines de soviets d’ouvriers, de paysans, de soldats ou de marins.
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Entre ce comité et le soviet de Petrograd, de longues négociations aboutissent, le 2 mars 1917, à un compromis. Le soviet reconnaît, en attendant la convocation d'une [[Assemblée_constituante_(Russie)|Assemblée constituante]], la légitimité d'un [[Gouvernement_provisoire_(Russie)|gouvernement provisoire]] à tendance [[Libéralisme|libérale]], composé majoritairement de représentants du [[Parti_constitutionnel_démocratique|Parti KD]] (et ne comptant aucun socialiste dans ses rangs). Cependant, le [[Gouvernement_provisoire_(Russie)|gouvernement provisoire de Russie]] est sommé d'appliquer un vaste programme de réformes démocratiques, fondé sur l'octroi des [[Libertés_fondamentales|libertés fondamentales]], le [[Suffrage_universel|suffrage universel]], l'abolition de la [[Peine_de_mort|peine de mort]], de l'[[Antisémitisme|antisémitisme]] d'Etat et de toute forme de discrimination légale, la suppression de la [[Police|police]], la reconnaissance des droits du soldat-citoyen et une [[Amnistie|amnistie]] immédiate de tous les [[Crime_politique|prisonniers politiques]]. L’Église orthodoxe, sous tutelle depuis Pierre le Grand, s'organise librement. Cependant l'Eglise n'est pas [[Séparation_de_l'Eglise_et_de_l'Etat|séparée de l'Etat]] et de l'école, et la gestion de l'état civil lui est laissée... Le [[Droit_au_divorce|droit au divorce]] n'est pas accordé aux femmes.
 
Entre ce comité et le soviet de Petrograd, de longues négociations aboutissent, le 2 mars 1917, à un compromis. Le soviet reconnaît, en attendant la convocation d'une [[Assemblée_constituante_(Russie)|Assemblée constituante]], la légitimité d'un [[Gouvernement_provisoire_(Russie)|gouvernement provisoire]] à tendance [[Libéralisme|libérale]], composé majoritairement de représentants du [[Parti_constitutionnel_démocratique|Parti KD]] (et ne comptant aucun socialiste dans ses rangs). Cependant, le [[Gouvernement_provisoire_(Russie)|gouvernement provisoire de Russie]] est sommé d'appliquer un vaste programme de réformes démocratiques, fondé sur l'octroi des [[Libertés_fondamentales|libertés fondamentales]], le [[Suffrage_universel|suffrage universel]], l'abolition de la [[Peine_de_mort|peine de mort]], de l'[[Antisémitisme|antisémitisme]] d'Etat et de toute forme de discrimination légale, la suppression de la [[Police|police]], la reconnaissance des droits du soldat-citoyen et une [[Amnistie|amnistie]] immédiate de tous les [[Crime_politique|prisonniers politiques]]. L’Église orthodoxe, sous tutelle depuis Pierre le Grand, s'organise librement. Cependant l'Eglise n'est pas [[Séparation_de_l'Eglise_et_de_l'Etat|séparée de l'Etat]] et de l'école, et la gestion de l'état civil lui est laissée... Le [[Droit_au_divorce|droit au divorce]] n'est pas accordé aux femmes.
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Le compromis du 2 mars marque la naissance d'un [[Double_pouvoir|double pouvoir]], où s'opposent deux conceptions différentes de l'avenir de la société russe. D'un côté, le [[Gouvernement_provisoire_russe|gouvernement provisoire]] est soucieux de faire de la Russie une grande puissance libérale et capitaliste et d'orienter la vie politique russe sur la voie du [[Régime_parlementaire|parlementarisme]]. De l'autre, les soviets représentent une autre façon de faire de la politique, en représentant de manière plus directe les «&nbsp;masses&nbsp;». Mais les socialistes [[conciliateurs|conciliateurs]] font tout pour calmer ces masses. Le 5 mars, ils font voter au Soviet (par 1170 voix contre 30) une résolution appelant tous les ouvriers à reprendre le travail. Comme les grèves continuaient, le 8 mars, le journal menchevik publia un appel aux grévistes, proclamant qu'ils discréditaient le soviet en ne lui obéissant pas.
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Le compromis du 2 mars marque la naissance d'un [[Double_pouvoir|double pouvoir]], où s'opposent deux conceptions différentes de l'avenir de la société russe. D'un côté, le [[Gouvernement_provisoire_russe|gouvernement provisoire]] est soucieux de faire de la Russie une grande puissance libérale et capitaliste et d'orienter la vie politique russe sur la voie du [[Régime_parlementaire|parlementarisme]]. De l'autre, les soviets représentent une autre façon de faire de la politique, en représentant de manière plus directe les «&nbsp;masses&nbsp;». Mais les socialistes [[Conciliateurs|conciliateurs]] font tout pour calmer ces masses. Le 5 mars, ils font voter au Soviet (par 1170 voix contre 30) une résolution appelant tous les ouvriers à reprendre le travail. Comme les grèves continuaient, le 8 mars, le journal menchevik publia un appel aux grévistes, proclamant qu'ils discréditaient le soviet en ne lui obéissant pas.
    
Dès le 1<sup>er</sup> mars, le comité provisoire de la Douma s'occupa de la formation d'un cabinet ministériel, à partir des personnalités que le Bloc progressiste avait mis en avant de nombreuses fois pour demander un gouvernement de coalition au Tsar. La seule personnalité nouvelle, reflet de la pression des masses, était [[Kérensky|Kérensky]].
 
Dès le 1<sup>er</sup> mars, le comité provisoire de la Douma s'occupa de la formation d'un cabinet ministériel, à partir des personnalités que le Bloc progressiste avait mis en avant de nombreuses fois pour demander un gouvernement de coalition au Tsar. La seule personnalité nouvelle, reflet de la pression des masses, était [[Kérensky|Kérensky]].

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