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La première séance du Soviet fut fixée pour le soir du même jour, au palais de Tauride. Elle s'ouvrit, en effet, à 21 heures, et ratifia le comité exécutif. De nombreux délégués d'ouvriers et de soldats exprimaient leurs félicitations et leur enthousiasme. La volonté générale était d'unifier étroitement la garnison avec les ouvriers en un seul Soviet. Seule une minorité de social-patriotes protestaient contre l'immixtion de l'armée dans la politique.
 
La première séance du Soviet fut fixée pour le soir du même jour, au palais de Tauride. Elle s'ouvrit, en effet, à 21 heures, et ratifia le comité exécutif. De nombreux délégués d'ouvriers et de soldats exprimaient leurs félicitations et leur enthousiasme. La volonté générale était d'unifier étroitement la garnison avec les ouvriers en un seul Soviet. Seule une minorité de social-patriotes protestaient contre l'immixtion de l'armée dans la politique.
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Le Comité exécutif du soviet se retrouvait de fait à agir en tant que pouvoir gouvernemental. Il élit une commission provisoire pour les approvisionnements et la charge de s'occuper d'une façon générale des besoins des insurgés et de la garnison. Il organise un état-major révolutionnaire provisoire, et décide de faire occuper immédiatement la Banque d'Empire, la Trésorerie, la Monnaie et les services de fabrication des billets. Les tâches et les fonctions du Soviet s'accroissent constamment sous la pression des masses. La révolution trouve son centre incontesté. Les ouvriers, les soldats et bientôt les paysans ne s'adresseront plus désormais qu'au Soviet, qui devient, à leurs yeux, le point de concentration de tous les espoirs et de tous les pouvoirs, l'incarnation même de la révolution. Par exemple lors des journées d'avril, le général [[Affaire_Kornilov|Kornilov]] ordonne de réprimer une manifestation, mais ses soldats invoquent le [[Prikaz_n°1|Prikaz n°1]] et vont demander confirmation au [[Soviet_de_Petrograd|Soviet]], qui refuse.
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Le Comité exécutif du soviet se retrouvait de fait à agir en tant que pouvoir gouvernemental. Il élit une commission provisoire pour les approvisionnements et la charge de s'occuper d'une façon générale des besoins des insurgés et de la garnison. Il organise un état-major révolutionnaire provisoire, et décide de faire occuper immédiatement la Banque d'Empire, la Trésorerie, la Monnaie et les services de fabrication des billets. Les tâches et les fonctions du Soviet s'accroissent constamment sous la pression des masses. La révolution trouve son centre incontesté. Les ouvriers, les soldats et bientôt les paysans ne s'adresseront plus désormais qu'au Soviet, qui devient, à leurs yeux, le point de concentration de tous les espoirs et de tous les pouvoirs, l'incarnation même de la révolution. Par exemple lors des [[Journées_d'avril|journées d'avril]], le général [[Affaire_Kornilov|Kornilov]] ordonne de réprimer une manifestation, mais ses soldats invoquent le [[Prikaz_n°1|Prikaz n°1]] et vont demander confirmation au [[Soviet_de_Petrograd|Soviet]], qui refuse.
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Les ouvriers élisaient des socialistes, c'est-à-dire ceux qui étaient non seulement contre la monarchie, mais aussi contre la bourgeoisie. Ils ne faisaient presque aucune différence entre les trois partis socialistes. Mais comme les mencheviks et les SR disposaient de bien plus de cadres intellectuels disponibles, ils eurent plus d'agitateurs et une nette prépondérance dans les élections. Les soldats votaient surtout pour des SR. Les ouvriers, qui voulaient fortement resserrer leur alliance avec les soldats, étaient aussi pour cette raison plus attirés par les menchéviks qui étaient sur la même ligne.
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Les ouvriers élisaient des socialistes, c'est-à-dire ceux qui étaient non seulement contre la monarchie, mais aussi contre la bourgeoisie. Ils ne faisaient presque aucune différence entre les trois partis socialistes. Mais comme les [[mencheviks|mencheviks]] et les [[Parti_SR|SR]] disposaient de bien plus de cadres intellectuels disponibles, ils eurent plus d'agitateurs et une nette prépondérance dans les élections. Les soldats votaient surtout pour des SR. Les ouvriers, qui voulaient fortement resserrer leur alliance avec les soldats, étaient aussi pour cette raison plus attirés par les menchéviks qui étaient sur la même ligne.
    
À Moscou, les nouvelles de Petrograd déclenchent la [[Grève_générale|grève générale]] et provoquent l'élection d'un Comité révolutionnaire provisoire. Plus généralement, la quasi-totalité du pays est couvert en quelques semaines de soviets d’ouvriers, de paysans, de soldats ou de marins.
 
À Moscou, les nouvelles de Petrograd déclenchent la [[Grève_générale|grève générale]] et provoquent l'élection d'un Comité révolutionnaire provisoire. Plus généralement, la quasi-totalité du pays est couvert en quelques semaines de soviets d’ouvriers, de paysans, de soldats ou de marins.
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Entre ce comité et le soviet de Petrograd, de longues négociations aboutissent, le 2 mars 1917, à un compromis. Le soviet reconnaît, en attendant la convocation d'une [[Assemblée_constituante_(Russie)|Assemblée constituante]], la légitimité d'un [[Gouvernement_provisoire_(Russie)|gouvernement provisoire]] à tendance [[Libéralisme|libérale]], composé majoritairement de représentants du [[Parti_constitutionnel_démocratique|Parti KD]] (et ne comptant aucun socialiste dans ses rangs). Cependant, le [[Gouvernement_provisoire_(Russie)|gouvernement provisoire de Russie]] est sommé d'appliquer un vaste programme de réformes démocratiques, fondé sur l'octroi des [[Libertés_fondamentales|libertés fondamentales]], le [[Suffrage_universel|suffrage universel]], l'abolition de la [[Peine_de_mort|peine de mort]], de l'[[Antisémitisme|antisémitisme]] d'Etat et de toute forme de discrimination légale, la suppression de la [[Police|police]], la reconnaissance des droits du soldat-citoyen et une [[Amnistie|amnistie]] immédiate de tous les [[Crime_politique|prisonniers politiques]]. L’Église orthodoxe, sous tutelle depuis Pierre le Grand, s'organise librement. Cependant l'Eglise n'est pas [[Séparation_de_l'Eglise_et_de_l'Etat|séparée de l'Etat]] et de l'école, et la gestion de l'état civil lui est laissée... Le [[Droit_au_divorce|droit au divorce]] n'est pas accordé aux femmes.
 
Entre ce comité et le soviet de Petrograd, de longues négociations aboutissent, le 2 mars 1917, à un compromis. Le soviet reconnaît, en attendant la convocation d'une [[Assemblée_constituante_(Russie)|Assemblée constituante]], la légitimité d'un [[Gouvernement_provisoire_(Russie)|gouvernement provisoire]] à tendance [[Libéralisme|libérale]], composé majoritairement de représentants du [[Parti_constitutionnel_démocratique|Parti KD]] (et ne comptant aucun socialiste dans ses rangs). Cependant, le [[Gouvernement_provisoire_(Russie)|gouvernement provisoire de Russie]] est sommé d'appliquer un vaste programme de réformes démocratiques, fondé sur l'octroi des [[Libertés_fondamentales|libertés fondamentales]], le [[Suffrage_universel|suffrage universel]], l'abolition de la [[Peine_de_mort|peine de mort]], de l'[[Antisémitisme|antisémitisme]] d'Etat et de toute forme de discrimination légale, la suppression de la [[Police|police]], la reconnaissance des droits du soldat-citoyen et une [[Amnistie|amnistie]] immédiate de tous les [[Crime_politique|prisonniers politiques]]. L’Église orthodoxe, sous tutelle depuis Pierre le Grand, s'organise librement. Cependant l'Eglise n'est pas [[Séparation_de_l'Eglise_et_de_l'Etat|séparée de l'Etat]] et de l'école, et la gestion de l'état civil lui est laissée... Le [[Droit_au_divorce|droit au divorce]] n'est pas accordé aux femmes.
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Le compromis du 2 mars 1917 marque la naissance d'un [[Double_pouvoir|double pouvoir]], où s'opposent deux conceptions différentes de l'avenir de la société russe. D'un côté, le gouvernement provisoire est soucieux de faire de la Russie une grande puissance libérale et capitaliste et d'orienter la vie politique russe sur la voie du [[Régime_parlementaire|parlementarisme]]. De l'autre, les soviets tentent d'instaurer une autre façon de faire de la politique, en représentant de manière directe les « masses ».
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Le compromis du 2 mars marque la naissance d'un [[Double_pouvoir|double pouvoir]], où s'opposent deux conceptions différentes de l'avenir de la société russe. D'un côté, le [[Gouvernement_provisoire_russe|gouvernement provisoire]] est soucieux de faire de la Russie une grande puissance libérale et capitaliste et d'orienter la vie politique russe sur la voie du [[Régime_parlementaire|parlementarisme]]. De l'autre, les soviets représentent une autre façon de faire de la politique, en représentant de manière plus directe les « masses ». Mais les socialistes [[conciliateurs|conciliateurs]] font tout pour calmer ces masses. Le 5 mars, ils font voter au Soviet (par 1170 voix contre 30) une résolution appelant tous les ouvriers à reprendre le travail. Comme les grèves continuaient, le 8 mars, le journal menchevik publia un appel aux grévistes, proclamant qu'ils discréditaient le soviet en ne lui obéissant pas.
    
Dès le 1<sup>er</sup> mars, le comité provisoire de la Douma s'occupa de la formation d'un cabinet ministériel, à partir des personnalités que le Bloc progressiste avait mis en avant de nombreuses fois pour demander un gouvernement de coalition au Tsar. La seule personnalité nouvelle, reflet de la pression des masses, était [[Kérensky|Kérensky]].
 
Dès le 1<sup>er</sup> mars, le comité provisoire de la Douma s'occupa de la formation d'un cabinet ministériel, à partir des personnalités que le Bloc progressiste avait mis en avant de nombreuses fois pour demander un gouvernement de coalition au Tsar. La seule personnalité nouvelle, reflet de la pression des masses, était [[Kérensky|Kérensky]].
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*les <span class="mw-redirect">bolchéviks</span> soutenaient que la révolution bourgeoise pouvait être accomplie même sans les libéraux bourgeois, partie hésitante de la bourgeoisie, par la ''«&nbsp;[[Dictature_démocratique_des_ouvriers_et_des_paysans|dictature démocratique des ouvriers et des paysans]]&nbsp;»''.  
 
*les <span class="mw-redirect">bolchéviks</span> soutenaient que la révolution bourgeoise pouvait être accomplie même sans les libéraux bourgeois, partie hésitante de la bourgeoisie, par la ''«&nbsp;[[Dictature_démocratique_des_ouvriers_et_des_paysans|dictature démocratique des ouvriers et des paysans]]&nbsp;»''.  
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Mais la ligne change le 12 mars lorsque [[Kamenev|Kamenev]] et [[Staline|Staline]] reviennent de leur exil en Sibérie et prennent la direction. La [[Pravda|Pravda]] du 15 mars écrit que les bolcheviks soutiendront résolument le gouvernement provisoire ''«&nbsp;dans la mesure où il lutte contre la réaction ou la contre-révolution&nbsp;»''. Une formule floue que raillera [[Lénine|Lénine]]. Selon Chliapnikov, ce revirement est accueilli avec jubilation au gouvernement provisoire et à la direction du soviet, tandis qu’une opposition de gauche se lève au sein du parti, notamment dans son bastion ouvrier de la capitale, le [[district_de_Vyborg|district de Vyborg]], dont le comité ''« demande même l’exclusion du parti de Staline et de Kamenev »''.
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Mais la ligne change le 12 mars lorsque [[Kamenev|Kamenev]] et [[Staline|Staline]] reviennent de leur exil en Sibérie et prennent la direction. La [[Pravda|Pravda]] du 15 mars écrit que les bolcheviks soutiendront résolument le gouvernement provisoire ''«&nbsp;dans la mesure où il lutte contre la réaction ou la contre-révolution&nbsp;»''. Une formule floue que raillera [[Lénine|Lénine]]. Selon Chliapnikov, ce revirement est accueilli avec jubilation au gouvernement provisoire et à la direction du soviet, tandis qu’une opposition de gauche se lève au sein du parti, notamment dans son bastion ouvrier de la capitale, le [[District_de_Vyborg|district de Vyborg]], dont le comité ''« demande même l’exclusion du parti de Staline et de Kamenev »''.
    
Le 29&nbsp;mars s’ouvre à Pétrograd la première conférence nationale bolchévique depuis la révolution, divisée entre la droite défensiste et la gauche révolutionnaire. Pour cette dernière, ''« la révolution russe ne peut obtenir un maximum de libertés démocratiques et de réformes sociales que si elle devient le point de départ d’un mouvement révolutionnaire du prolétariat occidental »'', pour cela ''« il faut préparer la lutte contre le gouvernement provisoire »'', le soviet étant ''« un embryon de pouvoir révolutionnaire »'' et la ''« garde rouge ouvrière »'' un outil central afin de l’imposer.
 
Le 29&nbsp;mars s’ouvre à Pétrograd la première conférence nationale bolchévique depuis la révolution, divisée entre la droite défensiste et la gauche révolutionnaire. Pour cette dernière, ''« la révolution russe ne peut obtenir un maximum de libertés démocratiques et de réformes sociales que si elle devient le point de départ d’un mouvement révolutionnaire du prolétariat occidental »'', pour cela ''« il faut préparer la lutte contre le gouvernement provisoire »'', le soviet étant ''« un embryon de pouvoir révolutionnaire »'' et la ''« garde rouge ouvrière »'' un outil central afin de l’imposer.

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