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Dans la nuit du 23 au 24, le gouvernement décide de réagir : interdire les journaux bolcheviks qui appellent à l'insurrection, poursuivre en justice le [[Comité_militaire_révolutionnaire|CMR]], appeler des contingents sûrs de la banlieue et du front. Le bruit des décisions prises par le gouvernement se répandit immédiatement dans la ville. Cela déclenchera l'insurrection avec une légère avance.
 
Dans la nuit du 23 au 24, le gouvernement décide de réagir : interdire les journaux bolcheviks qui appellent à l'insurrection, poursuivre en justice le [[Comité_militaire_révolutionnaire|CMR]], appeler des contingents sûrs de la banlieue et du front. Le bruit des décisions prises par le gouvernement se répandit immédiatement dans la ville. Cela déclenchera l'insurrection avec une légère avance.
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[[Smolny|Smolny]] devient aussitôt un véritable quartier général fourmillant d'activité. Le [[VTsIK|VTsIK]] quitte Smolny pour le local de l'Etat-major. Le matin, l'Etat-major s'active et annonce que tous les commissaires du CMR sont congédiés, que les régiments doivent rester dans leurs casernes et que toute manifestation sera gravement punie. Le ministre de la justice [[Maliantovitch|Maliantovitch]] donna l'ordre d'arrêter [[Trotsky|Trotsky]] (ironie : il avait aussi été inculpé en 1905 pour son rôle dans le soviet, et Maliantovitch était alors son avocat). Des contingents sont demandés au front nord et d'autres appelés de la banlieue : un bataillon de choc de Tsarskoïe, des [[Junkers|junkers]] d'Oranienbaum, de l'artillerie de Pavlovsk.
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[[Smolny|Smolny]] devient aussitôt un véritable quartier général fourmillant d'activité. Le [[VTsIK|VTsIK]] quitte Smolny pour le local de l'Etat-major. Le matin, l'Etat-major s'active et annonce que tous les commissaires du CMR sont congédiés, que toute manifestation sera gravement punie et que les régiments doivent rester dans leurs casernes (le CMR aussi avait donné consigne de rester dans les casernes sauf contre-ordre). Le ministre de la justice [[Maliantovitch|Maliantovitch]] donna l'ordre d'arrêter [[Trotsky|Trotsky]] (ironie : il avait aussi été inculpé en 1905 pour son rôle dans le soviet, et Maliantovitch était alors son avocat). Des contingents sont demandés au front nord et d'autres appelés de la banlieue : un bataillon de choc de Tsarskoïe, des [[Junkers|junkers]] d'Oranienbaum, de l'artillerie de Pavlovsk.
    
A 5h30 du matin, un détachement de [[Junkers|junkers]] saisit l'imprimerie bolchévique et neutralise la publication du [[Rabotchi_Pout|''Rabotchi'']] et du ''Soldat''. Le CMR envoie aussitôt deux bataillons réouvrir l'imprimerie. Il est ordonné au [[Croiseur_Aurore|croiseur Aurore]], stationné sur la Neva, de sortir en mer. L'équipage, bolchévik, interroge le CMR qui annule l'ordre. Un téléphonogramme à tous les quartiers et régiments annonce : ''« Les ennemis du peuple ont pris l'offensive pendant la nuit... Le Comité militaire révolutionnaire dirige la résistance contre l'attaque des conspirateurs.'' ''»'' Trotsky demande à l'emetteur radio de l'[[Aurore_(croiseur)|Aurore]] de retransmettre, et d'appeler à arrêter les bataillons lancés sur Petrograd.
 
A 5h30 du matin, un détachement de [[Junkers|junkers]] saisit l'imprimerie bolchévique et neutralise la publication du [[Rabotchi_Pout|''Rabotchi'']] et du ''Soldat''. Le CMR envoie aussitôt deux bataillons réouvrir l'imprimerie. Il est ordonné au [[Croiseur_Aurore|croiseur Aurore]], stationné sur la Neva, de sortir en mer. L'équipage, bolchévik, interroge le CMR qui annule l'ordre. Un téléphonogramme à tous les quartiers et régiments annonce : ''« Les ennemis du peuple ont pris l'offensive pendant la nuit... Le Comité militaire révolutionnaire dirige la résistance contre l'attaque des conspirateurs.'' ''»'' Trotsky demande à l'emetteur radio de l'[[Aurore_(croiseur)|Aurore]] de retransmettre, et d'appeler à arrêter les bataillons lancés sur Petrograd.
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Le soir à la réunion du [[Soviet_de_Petrograd|Soviet]], Trotsky dément encore une insurrection offensive : ''« Le Comité ne permit pas à Kerensky de faire sortir de Petrograd les troupes révolutionnaires et prit la défense de la presse ouvrière. Est-ce là une insurrection ? L'Aurore est aujourd'hui là où elle se trouvait la nuit dernière. Est-ce là une insurrection ? »'' Il réaffirme que le [[Deuxième_congrès_des_soviets|Congrès]] disposera de ''« ce demi-pouvoir [qui] attend un coup de balai historique »'', mais prépare toutefois les esprits à ce qui en réalité était déjà prévu pour la nuit : ''« Si, cependant, le gouvernement, dans les 24 ou 48 heures dont il dispose encore, essayait d'en profiter pour planter un poignard dans le dos de la révolution, nous le déclarons une fois de plus : l'avant-garde de la révolution répondra coup pour coup et au fer par de l'acier »''.
 
Le soir à la réunion du [[Soviet_de_Petrograd|Soviet]], Trotsky dément encore une insurrection offensive : ''« Le Comité ne permit pas à Kerensky de faire sortir de Petrograd les troupes révolutionnaires et prit la défense de la presse ouvrière. Est-ce là une insurrection ? L'Aurore est aujourd'hui là où elle se trouvait la nuit dernière. Est-ce là une insurrection ? »'' Il réaffirme que le [[Deuxième_congrès_des_soviets|Congrès]] disposera de ''« ce demi-pouvoir [qui] attend un coup de balai historique »'', mais prépare toutefois les esprits à ce qui en réalité était déjà prévu pour la nuit : ''« Si, cependant, le gouvernement, dans les 24 ou 48 heures dont il dispose encore, essayait d'en profiter pour planter un poignard dans le dos de la révolution, nous le déclarons une fois de plus : l'avant-garde de la révolution répondra coup pour coup et au fer par de l'acier »''.
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Des [[Junkers|junkers]] occupent les gares et vers 15h coupent les ponts tournants. C'est un signe fort : la monarchie avait toujours fait ça en cas de trouble dans la capitale, comme en [[Insurrection_de_Février_1917|Février]]. Une bataille s'engage pour le contrôle des ponts. Les ouvriers et soldats parvenaient à débloquer les ponts soit par la persuasion, soit par la menace. Certains ponts furent coupés et rétablis à plusieurs reprises. L'[[Aurore_(croiseur)|Aurore]] s'approche du Pont Nicolas, et les junkers s'enfuient. Le soir, des [[Police_et_milice_en_1917|milicens]] tentent en vain de s'en prendre au journal ''Rabotchi i Soldat''. Une dizaine de junkers s'aventura dans [[Vyborg|Vyborg]] pour chercher [[Lénine|Lénine]] et se retrouva vite enfermée à la [[forteresse_Pierre-et-Paul|forteresse Pierre-et-Paul]]. Le central téléphonique et télégraphique est occupé et les [[fonctionnaires_russes_en_1917|agents]] (hostiles aux bolchéviks) surveillés.
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Des [[Junkers|junkers]] occupent les gares et vers 15h coupent les ponts tournants. C'est un signe fort : la monarchie avait toujours fait ça en cas de trouble dans la capitale, comme en [[Insurrection_de_Février_1917|Février]]. Une bataille s'engage pour le contrôle des ponts. Les ouvriers et soldats parvenaient à débloquer les ponts soit par la persuasion, soit par la menace. Certains ponts furent coupés et rétablis à plusieurs reprises. L'[[Aurore_(croiseur)|Aurore]] s'approche du Pont Nicolas, et les junkers s'enfuient. Le soir, des [[Police_et_milice_en_1917|milicens]] tentent en vain de s'en prendre au journal ''Rabotchi i Soldat''. Une dizaine de junkers s'aventura dans [[Vyborg|Vyborg]] pour chercher [[Lénine|Lénine]] et se retrouva vite enfermée à la [[Forteresse_Pierre-et-Paul|forteresse Pierre-et-Paul]]. Le central téléphonique et télégraphique est occupé et les [[Fonctionnaires_russes_en_1917|agents]] (hostiles aux bolchéviks) surveillés.
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Vers 2h du matin les principales opérations commencent. Des troupes du CMR occupent les gares, la centrale électrique, les arsenaux et les entrepôts d'approvisionnement, le service des eaux, la banque d'Etat, les grandes imprimeries, et le pont du Palais. Les junkers s'enfuient ou se laissent arrêter, et on libère des prisonniers. A l'inverse, parmi les soldats fatigués du CMR, un sursaut de discipline réapparaît, et en même temps beaucoup d'initatives. Dans tous les régiments, on arrête les officiers qui ne se sont pas encore enfuis. Le commandant Polkovnikov envoie dans la nuit au Grand Quartier Général et à l'Etat-major du front Nord :
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''«&nbsp;La situation de Petrograd est épouvantable. Il n'y a pas de manifestations ni de désordres dans les rues, Mais on s'empare méthodiquement des établissements, des gares, il y a des arrestations... Les junkers abandonnent leurs postes sans résistance... Rien ne garantit qu'il n'y ait pas une tentative pour mettre la main sur le gouvernement provisoire.&nbsp;»''
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Après minuit se tient une séance unifiée des [[Comité_exécutif_central_pan-russe|Comités exécutifs centraux des soviets]]. Les [[menchéviks|menchéviks]] y sont sans leurs principaux leaders, et entourés de délégués du Congrès, invités, en majorité bolchéviks. Ils soutiennent que la contre-révolution est plus forte que jamais, que ''«&nbsp;des fous mènent la révolution à sa perte, comme en 1905&nbsp;»'' (allusion au [[Trotsky|président du Soviet]]) et qu'il faudra passer sur le cadavre du [[VTsIK|VTsIK]]. Un cri surgit : ''«&nbsp;Mais c'est déjà un cadavre!&nbsp;»''
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Au même moment au Palais d'Hiver, [[Kerensky|Kerensky]] se fâche avec les [[conciliateurs|conciliateurs]] qui ne le soutiennent pas assez franchement, et promet à ses officiers réactionnaires d'aller jusqu'au bout dans la revanche s'ils peuvent contre-attaquer avec des cosaques. Mais les cosaques ne sortirent pas. Kerensky fit même appel aux groupes armés organisés par le [[parti_SR|parti SR]], mais le peu qu'il en restait ne lui répondaient plus.
    
=== Prise du palais d'Hiver (25-26) ===
 
=== Prise du palais d'Hiver (25-26) ===
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Dès 10h le 25, [[Smolny|Smolny]] diffusa dans le pays un bulletin de victoire : ''«&nbsp;Le gouvernement provisoire est déposé. Le pouvoir d'Etat est passé aux mains du Comité militaire révolutionnaire&nbsp;»''. Il s'agissait d'être proactifs, de se comporter comme un pouvoir. Mais il restait encore formellement le [[Palais_d'Hiver|Palais d'Hiver]], le [[Grand_Quartier_Général_(Russie)|GQG]] et tous les relais provinciaux du pouvoir.&nbsp; Mais déjà apparaissaient des affiches annonçant la victoire de l'insurrection. On n'avait pas eu le temps même de les coller et des automobiles les distribuaient. Sur l'avenue Nevsky, principale artère bourgeoise, certains riaient :&nbsp; ''«&nbsp;Vous avez entendu : les bolcheviks ont pris le pouvoir ? Ils en ont pour trois jours tout au plus. Ah ! Ah ! Ah !&nbsp;»'' Mais il y avait peu de monde dans les rues. Dans les établissements gouvernementaux et dans les services publics, le travail avait cessé. Mais de nombreux magasins restaient ouverts. On servait dans les restaurants, mais plutôt dans les arrière-salles. Les tramways circulaient.
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Ce matin-là, du ministère de la Guerre (pas encore occupé), le général Levitsky indiquait au [[Grand_Quartier_Général_(Russie)|Grand Quartier Général]] : ''«&nbsp;Les contingents qui se trouvent dans le palais d'Hiver ne le gardent que pour la forme, car ils ont résolu de ne pas agir effectivement. Dans l'ensemble, l'impression est que le gouvernement provisoire se trouve dans la capitale d'un état ennemi, ayant achevé la mobilisation mais n'ayant pas ouvert les hostilités.&nbsp;»'' Le palais d'Hiver devait lui aussi être pris la nuit du 24-25. Un plan détaillé avait été fait dès le 23 par [[Podvoïsky|Podvoïsky]], [[Vladimir_Antonov-Ovseïenko|Antonov]] et [[Tchoudnovsky|Tchoudnovsky]]. Mais le temps estimé pour les préparatifs avait été sous-estimé, et une série d'erreurs ajoutèrent du retard.
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A 14h35, la séance extraordinaire du Soviet de Petrograd fut ouverte par un rapport de [[Trotsky|Trotsky]] qui déclara que le gouvernement provisoire n'existait plus, et qu'on n'avait pas connaissance d'une seule victime. ''«&nbsp;Le palais d'Hiver n'est pas encore pris, mais son sort sera réglé dans quelques moments.&nbsp;»'' Podvoïsky avait annoncé à Smolny au plus tard midi. Cela prendrait encore 12h. [[Lénine|Lénine]] fit sa première apparition en public depuis juillet, annonçant la suite : ''«&nbsp;La troisième révolution russe doit, en fin de compte, mener à la victoire du socialisme&nbsp;»''.
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Les insurgés donnent aux junkers qui gardent le Palais l'ultimatum d'évacuer. Un peu plus tard, une délégation de junkers dit au gouvernement qu'ils sont prêts à remplir leur devoir jusqu'au bout ''«&nbsp;si seulement l'espoir existe de recevoir des renforts&nbsp;»''. [[Kerensky|Kerensky]] s'enfuit alors vers le front, officiellement pour s'assurer des renforts, à bord de la voiture de l'ambassadeur des Etats-Unis. Avec son fanion états-unien, les insurgés la laissaient passer.
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Le 3° bataillon de motocyclistes, appelé du front, s'arrête de lui-même en route pour demander par télégramme au [[Soviet_de_Petrograd|Soviet de Petrograd]] des précisions. Le CMR saluta le bataillon et l'invita à envoyer représentants. Le [[Deuxième_congrès_des_soviets|Congrès des soviets]] apprendra dans la nuit leur ralliement à la révolution.
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Le première journée du [[Deuxième_congrès_des_soviets|Congrès]] qui s'ouvre le 25 est passée en réunion de partis. Chacun attend le dénouement au sujet du Palais d'Hiver. Podvoïsky assura ensuite qu'à 18h il serait pris, mais ce ne fut pas le cas. Smolny gronde tellement que Podvoïsky et Antonov arrêtent de donner des délais. Peu à peu de plus en plus d'autos blindés passent du côté bolchévik. On change à la hâte leurs noms patriotiques à la peinture rouge. Au Palais le moral est au plus bas, mais dans la cour sont encore disposés des canons et des pièces d'artillerie pour la défense. Des sentinelles sont désarmées par des hommes du Soviet qui approchent avec l'apparence de simples passants et qui sortent un révolver au dernier moment.
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Plus tard, des [[junkers|junkers]] commencent à tirer vers la place, que personne n'occupe encore. Cela renforce l'attentisme des assaillants, qui attendent les matelots de Cronstadt. Ce délai permit à quelques renforts cosaques d'arriver (malgré de fortes frictions parmi eux), puis 40 chevaliers de Saint-Georges, et enfin un [[Bataillons_de_femmes|bataillon de choc féminin]].
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Finalement, les matelots de [[Cronstadt|Cronstadt]] arrivent, puis 5 vaisseaux de guerre de la [[flotte_de_la_Baltique|flotte de la Baltique]]. A présent le palais est encerclé avec plus de forces qu'il n'en faut. Après 18h, le siège du Palais est vraiment étanche. [[Vladimir_Antonov-Ovseïenko|Antonov]] fit transmettre au Palais un ultimatum : ''«&nbsp;Rendez-vous et désarmez la garnison du palais d'Hiver ; dans le cas contraire, la forteresse et les vaisseaux de guerre ouvriront le feu ; vingt minutes pour réfléchir&nbsp;»''. Les ministres décident de ne pas répondre, et de demander l'aide de la [[Douma_de_Petrograd|Douma municipale]].
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Une demi-heure plus tard, un détachement soviétique investit sans rencontrer de résistance l’Etat-major, accolé au Palais d'Hiver. Le remplaçant de Polkovnikov, qui avait été déchu un peu plus tôt, démissionne. On éteignit les lumières dans le Palais. Une fusillade fit les premiers morts de l'insurrection.
    
== Suites immédiates ==
 
== Suites immédiates ==
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Le 24, des ouvriers bolchéviks, notamment de Poutilov, proposaient au CMR de se lancer dans le désarmement des ''junkers''. [[Trotsky|Trotsky]] expliqua plus tard que cela aurait dû être fait&nbsp;:
 
Le 24, des ouvriers bolchéviks, notamment de Poutilov, proposaient au CMR de se lancer dans le désarmement des ''junkers''. [[Trotsky|Trotsky]] expliqua plus tard que cela aurait dû être fait&nbsp;:
<blockquote>''«&nbsp;Si cette mesure, convenablement préparée, d'accord avec les équipes non combattantes des écoles, avait été appliquée dans la nuit du 24 au 25, la prise du palais d'Hiver n'aurait présenté aucune difficulté. Si les junkers avaient été désarmés, même dans la nuit du 25 au 26, après la prise du palais d'Hiver, il n'y aurait pas eu tentative de contre-insurrection le 29 novembre. Mais les dirigeants manifestaient encore en bien des points "de la magnanimité", en réalité un excès d'assurance optimiste, et ne prêtaient pas toujours assez d'attention à la voix raisonnable de la base&nbsp;: l'absence de Lenine fut sensible aussi en ce point. Les conséquences des omissions commises durent être corrigées par les masses, il y eut inutilement des victimes des deux côtés. Dans une lutte sérieuse, il n'y a pire cruauté qu'une "magnanimité " inopportune .&nbsp;»''</blockquote>  
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<blockquote>''«&nbsp;Si cette mesure, convenablement préparée, d'accord avec les équipes non combattantes des écoles, avait été appliquée dans la nuit du 24 au 25, la prise du palais d'Hiver n'aurait présenté aucune difficulté. Si les junkers avaient été désarmés, même dans la nuit du 25 au 26, après la prise du palais d'Hiver, il n'y aurait pas eu tentative de contre-insurrection le 29 novembre. Mais les dirigeants manifestaient encore en bien des points "de la magnanimité", en réalité un excès d'assurance optimiste, et ne prêtaient pas toujours assez d'attention à la voix raisonnable de la base&nbsp;: l'absence de Lenine fut sensible aussi en ce point. (...) Il y eut inutilement des victimes des deux côtés. Dans une lutte sérieuse, il n'y a pire cruauté qu'une "magnanimité " inopportune .&nbsp;»''</blockquote>  
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Trotsky fit personnellement relâcher un groupe de junkers sous leur promesse de ne plus s'engager contre le pouvoir des soviets. Il reconnaît lui-même ses doutes. D'un côté c'était imprudent car la victoire n'était pas encore acquise, de l'autre, vu les hésitations qui existaient parmi les junkers, cela envoyait le signal qu'on pouvait se rendre sans crainte, évitant ainsi qu'ils se battent à tout prix.
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Des personnalités importantes furent à moment donné aux mains des insurgés. Stankevitch, principal commissaire du GGQ arrivé le 24 du front est arrêté puis relâché. Le matin du 25 il tente en vain avec quelques junkers de reprendre le local téléphonique. On les laisse partir sans combat. Le directeur du ministère de la Guerre, Manikovsky, est arrêté, envoyé à la caserne du régiment Pavlovsky, puis relâché après avoir convaincu que son arrestation pouvait démolir tout le mécanisme administratif et entraîner des désagréments pour les soldats au front. Prokopovitch également fut arrêté et relâché.
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=== Marxisme et blanquisme ===
 
=== Marxisme et blanquisme ===
    
Les [[Bolchéviks|bolchéviks]], en tant que [[Marxistes|marxistes]], ne souhaitaient pas et ne pensaient pas possible de réaliser une véritable [[Révolution_sociale|révolution]] par un [[Coup_d'Etat|coup d'Etat]] qui ne représente pas les aspirations des larges masses. En cela ils se différencient du [[Blanquisme|blanquisme]]. Mais à partir de septembre, cette condition est réunie. Lénine considère aussitôt que l'insurrection devient une tâche du moment.
 
Les [[Bolchéviks|bolchéviks]], en tant que [[Marxistes|marxistes]], ne souhaitaient pas et ne pensaient pas possible de réaliser une véritable [[Révolution_sociale|révolution]] par un [[Coup_d'Etat|coup d'Etat]] qui ne représente pas les aspirations des larges masses. En cela ils se différencient du [[Blanquisme|blanquisme]]. Mais à partir de septembre, cette condition est réunie. Lénine considère aussitôt que l'insurrection devient une tâche du moment.
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=== Difficultés historiographiques ===
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Les informations qui arrivent aux Etats-majors ne sont point consignées sur le papier, ou bien sont rédigées distraitement, et les papiers se perdent. Les souvenirs imprimés plus tard sont secs et pas toujours exacts, étant donné qu'ils proviennent, pour la plupart, de témoins d'occasion. Les ouvriers, matelots et soldats, qui étaient les effectifs inspirateurs et dirigeants des opérations, prirent bientôt la tête des premiers détachements de l'Armée rouge et, en majorité, tombèrent sur différents champs de bataille de la guerre civile.
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=== Coup d'Etat ? ===
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Une des critiques les plus courants sur l'insurrection des 24-25 octobre est qu'elle aurait été un [[coup_d'Etat|coup d'Etat]], et pas un mouvement populaire de masse. Le contraste avec la plupart des révolutions est net : pas de foules en liesses descendant spontanément dans les rues, pas de retournement soudain contre la [[Police_et_milice_en_1917|police]], presque pas de morts...
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Mais précisément, les ouvriers et soldats de Petrograd avaient déjà connu cette fusion populaire, principalement en Février, et de plus en plus fortifiée au fil des mois. Le niveau d'organisation des casernes et des quartiers ouvriers n'avait fait que se renforcer. Ces masses populaires formaient une unité politique de masse comme il y en a rarement eu dans l'histoire, et cet ensemble avait incontestablement confiance dans les leaders bolchéviks. Des explosions spontanées avaient déjà eu lieu, comme en juillet, et avaient échoué parce qu'elles manquaient de vision d'ensemble pour choisir le bon moment. En ces journées d'Octobre, toutes les conditions étaient réunies. Pourquoi les bolchéviks n'auraient-ils pas pris la décision de frapper le plus méthodiquement possible pour l'emporter ?
    
== Notes ==
 
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