Différences entre les versions de « Gueorgui Gapone »

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'''[[File:Gapone 1900.jpg|right|Gapone 1900.jpg]]Gueorgui Apollonovitch Gapone''' (1870-1906) était un pope orthodoxe qui participa, de manière ambigüe, aux [[Révolution_russe_(1905)|événements révolutionnaires de 1905]] en Russie. Il était très populaire chez les [[Classe_ouvrière|ouvriers]] de Petrograd, et il est l'organisateur de la grande manifestation du [[Dimanche_rouge|Dimanche rouge]]. On a su plus tard qu'il était également un agent de l'[[Okhrana|Okhrana]], et chez les [[Socialistes_Révolutionnaires|Socialistes-Révolutionnaires]].
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| '''Gueorgui Gapon''' (1870-1906) était un pope orthodoxe qui participa, de manière ambigüe, aux [[Révolution russe (1905)|événements révolutionnaires de 1905 en]] Russie. Populaire chez les [[Classe ouvrière|ouvriers]] de Petrograd, il a été tour à tour [[Agent provocateur|agent provocateur]] pour le compte de l'Okhrana, et chez les [[Socialistes Révolutionnaires|Socialistes Révolutionnaires]].  
 
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== Biographie ==
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== Biographie ==
  
Gapon, fils d'un riche fermier de la région de Poltava, étudia la théologie. Après la mort de sa femme, il s'installa à Petrograd. Il fut diplômé de l'académie de théologie en 1903.
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=== Ses débuts ===
  
Gueorgui Gapon appliqua le programme [[Paternalisme|paternaliste]] mis en place quelques années plus tôt (1901) par le général Sergueï Vasilievitch Zoubatov, chef du Département de la Police et la police secrète de Petrograd, l'[[Okhrana|Okhrana]]. Ce programme consistait, sous couvert d'une lutte pour le [[Progressime|progrès social]] et de « défendre les droits des ouvriers et d'élever leur morale religieuse », de former des groupes d'hommes étroitement surveillés. De fait, seuls les orthodoxes étaient éligibles à rejoindre cette organisation ayant 12 sections et 8 000 membres. Gapon qui ambitionnait de la développer tant à Kiev qu'à Moscou n'était pas un simple agent de la police ; tout en coopérant, il essayait de tenter de garder une autonomie stratégique et décisionnelle.  
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Gapone naît le 17 février 1870 dans la région de Poltava, dans una famille extrêmement pieuse. Son père était un modeste fermier, et sa mère était analphabète.
  
Au terme de l'année 1904, Gapon entreprit de s'allier aux [[Parti Socialiste Révolutionnaire|Socialistes Révolutionnaires]] aspirant à l'abolition de l'autocratie tsariste.  
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Après la mort de sa femme, il s'installe à Petrograd, et il y obtient un diplôme de l'académie de théologie en 1903.
  
Le 22 janvier [O.S. 9 janvier] 1905, un jour après une grève générale décidée en dehors de Petrograd, Gapon organisa une [[Manifestation|manifestation]] pacifique en vue de présenter une [[Pétition|pétition]] au Tsar.
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Gueorgui Gapone appliqua le programme [[Paternalisme|paternaliste]] mis en place quelques années plus tôt (1901) par le général Sergueï Vasilievitch Zoubatov, chef du Département de la Police et la police secrète de Petrograd, l'[[Okhrana|Okhrana]]. Ce programme consistait, sous couvert d'une lutte pour le [[Progressime|progrès social]] et de ''« défendre les droits des ouvriers et d'élever leur morale religieuse »'', de former des groupes d'hommes étroitement surveillés. De fait, seuls les [[christiannisme_orthodoxe|orthodoxes]] étaient éligibles à rejoindre cette organisation ayant 12 sections et 8 000 membres. Gapone, qui ambitionnait de la développer tant à Kiev quMoscou, n'était pas un simple agent de la police ; tout en coopérant, il essayait de garder une autonomie stratégique et décisionnelle.
<blockquote>«&nbsp;Nous nous présenterons demain, à 14 heures 30, au Palais d'Hiver, pour t'exposer les aspirations de la nation entière&nbsp;: convocation immédiate d'une assemblée constituante, responsabilité des ministres devant le peuple, amnistie, abolition de tous les impôts directs. Jure-nous de satisfaire nos exigences, sinon nous sommes prêts à mourir devant ton palais. Si en proie à des hésitations, tu ne te montres pas au peuple, si tu laisses couler le sang des innoncents, tu briseras le lien moral entre lui et toi&nbsp;». </blockquote>
 
Cette initiative qui rassembla entre 30 000 et 140 000 personnes fut réprimée d'une manière extrêmement brutale par l'armée, laquelle en tirant sur ordre occasionna un millier de morts. Après ce [[Dimanche rouge|Dimanche rouge]], il encouragea les ouvriers à mener des actions plus dures contre le régime, avant de s'exiler à l'étranger.  
 
  
Quelques temps plus tard, le pope Gueorgui Gapon, avec la protection de la police, put se mettre à l'abri à Paris, il y vécut aisément grâce aux aides d'un agent secret. Exilé depuis plusieurs mois, le pope fut de retour à Petrograd en décembre 1905. En échange de sa liberté, le prêtre offrit de donner à la police le plan de campagne des révolutionnaires. En mai 1906, Gueorgui Gapon fut démasqué par les [[Parti Socialiste Révolutionnaire|SR]] comme agent de l'Okhrana. Accusé de trahison, Gapon est pendu dans la campagne finlandaise par Pinhas Rutenberg en accord passé avec le [[Parti Socialiste Révolutionnaire|Parti SR]].
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=== Le Dimanche rouge ===
  
== Sources  ==
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Fin année 1904, Gapone entreprit de s'allier aux [[Parti_Socialiste-Révolutionnaire|socialistes-révolutionnaires]] aspirant à l'abolition de l'autocratie tsariste.
  
[http://fr.wikipedia.org/wiki/Gueorgui_Gapon Biographie] sur Wikipédia[http://www.marxists.org/archive/lenin/works/1905/rd/2.htm#v08fl62-105 <br>Le Père Gapone], Lénine (en anglais)
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En janvier 1905, les grèves se multiplient parmi les usines de Petrograd. Le samedi 21 janvier (8 janvier selon l'ancien calendrier julien), la grève générale mobilise 200 000 ouvriers. Gapone décide alors d'organiser pour le lendemain une grande manifestation pacifique, faisant converger les cortèges des [[banlieues|banlieues]] ouvrières vers le Palais d'Hiver en vue de présenter une [[Pétition|pétition]] au Tsar. Dans la journée, le gouvernement lance un ordre secret pour arrêter Gapone, sans y parvenir.
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<blockquote>«&nbsp;Nous nous présenterons demain, à 14 heures 30, au Palais d'Hiver, pour t'exposer les aspirations de la nation entière&nbsp;: convocation immédiate d'une assemblée constituante, responsabilité des ministres devant le peuple, amnistie, abolition de tous les impôts directs. Jure-nous de satisfaire nos exigences, sinon nous sommes prêts à mourir devant ton palais. Si en proie à des hésitations, tu ne te montres pas au peuple, si tu laisses couler le sang des innoncents, tu briseras le lien moral entre lui et toi&nbsp;».</blockquote>  
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La manifestation du dimanche 22 janvier est un succès, rassemblant entre 30 000 et 140 000 personnes. Mais elle fut réprimée d'une manière extrêmement brutale par l'armée, qui ouvre le feu. Une quarantaine de personnes, dont plusieurs des gardes du corps de Gapone sont tués sur le champ. Gapone est éclipsé par ses gardes du corps, et trouve refuge dans plusieurs appartements privés, y compris celui de l'écrivain [[Maxime_Gorki|Maxime Gorki]]. En tout, il y aura autour de 1000 morts lors de ce ''«&nbsp;[[dimanche_rouge|dimanche rouge]]&nbsp;»''.
  
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Gapone aurait alors dit : ''<span class="citation">«&nbsp;Il n'y a plus de Dieu&nbsp;! Il n'y a plus de tsar&nbsp;!&nbsp;»</span>''. Il se met alors à encourager les ouvriers à mener des actions plus dures contre le régime, avant de s'exiler à l'étranger.
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Quelques temps plus tard, Gapone s'exile en Suisse, où il est accueilli par [[Plekhanov|Plekhanov]] et d'autres leaders [[menchéviks|menchéviks]], puis à Paris. Mais Gapone ne partage pas les convictions idéologiques des [[marxistes|marxistes]] et rejoint les [[socialistes-révolutionnaires|socialistes-révolutionnaires]]. Gapone est également trop connu pour accepter un rôle subalterne dans le mouvement révolutionnaire. Il écrit alors son autobiographie. Pendant cette période d'exil, Gapone reçoit en sous main des subsides de l'Okhrana.
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Gapone retourne incognito à Petrograd en automne 1905 (mais l'accueil n'est pas celui qu'il escomptait), puis de nouveau en décembre 1905. En échange de sa liberté, il offrit de donner à la police le plan de campagne des révolutionnaires. En mai 1906, Gapone fut démasqué par les [[Parti_socialiste_révolutionnaire_(Russie)|SR]] comme agent de l'Okhrana.
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Accusé de trahison, Gapone est pendu le 28 mai 1906 dans la campagne finlandaise par Pinhas Rutenberg en accord passé avec le [[Parti_Socialiste_Révolutionnaire|Parti SR]].
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*<span class="ouvrage"><span class="lang-en" lang="en">Jean-Jacques Marie, Le dimanche rouge, Larousse, 2008</span></span>
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*<span class="ouvrage"><span class="lang-en" lang="en">T.Souliaguine, La Révolution russe 1905 Gapone", bande dessinée, Y.I.L., 2016</span></span>
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*[http://www.marxists.org/archive/lenin/works/1905/rd/2.htm#v08fl62-105 Le Père Gapone], Lénine (en anglais)
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Version du 18 janvier 2017 à 23:47

Gueorgui Apollonovitch Gapone (1870-1906) était un pope orthodoxe qui participa, de manière ambigüe, aux événements révolutionnaires de 1905 en Russie. Il était très populaire chez les ouvriers de Petrograd, et il est l'organisateur de la grande manifestation du Dimanche rouge. On a su plus tard qu'il était également un agent de l'Okhrana, et chez les Socialistes-Révolutionnaires.

1 Biographie

1.1 Ses débuts

Gapone naît le 17 février 1870 dans la région de Poltava, dans una famille extrêmement pieuse. Son père était un modeste fermier, et sa mère était analphabète.

Après la mort de sa femme, il s'installe à Petrograd, et il y obtient un diplôme de l'académie de théologie en 1903.

Gueorgui Gapone appliqua le programme paternaliste mis en place quelques années plus tôt (1901) par le général Sergueï Vasilievitch Zoubatov, chef du Département de la Police et la police secrète de Petrograd, l'Okhrana. Ce programme consistait, sous couvert d'une lutte pour le progrès social et de « défendre les droits des ouvriers et d'élever leur morale religieuse », de former des groupes d'hommes étroitement surveillés. De fait, seuls les orthodoxes étaient éligibles à rejoindre cette organisation ayant 12 sections et 8 000 membres. Gapone, qui ambitionnait de la développer tant à Kiev qu'à Moscou, n'était pas un simple agent de la police ; tout en coopérant, il essayait de garder une autonomie stratégique et décisionnelle.

1.2 Le Dimanche rouge

Fin année 1904, Gapone entreprit de s'allier aux socialistes-révolutionnaires aspirant à l'abolition de l'autocratie tsariste.

En janvier 1905, les grèves se multiplient parmi les usines de Petrograd. Le samedi 21 janvier (8 janvier selon l'ancien calendrier julien), la grève générale mobilise 200 000 ouvriers. Gapone décide alors d'organiser pour le lendemain une grande manifestation pacifique, faisant converger les cortèges des banlieues ouvrières vers le Palais d'Hiver en vue de présenter une pétition au Tsar. Dans la journée, le gouvernement lance un ordre secret pour arrêter Gapone, sans y parvenir.

« Nous nous présenterons demain, à 14 heures 30, au Palais d'Hiver, pour t'exposer les aspirations de la nation entière : convocation immédiate d'une assemblée constituante, responsabilité des ministres devant le peuple, amnistie, abolition de tous les impôts directs. Jure-nous de satisfaire nos exigences, sinon nous sommes prêts à mourir devant ton palais. Si en proie à des hésitations, tu ne te montres pas au peuple, si tu laisses couler le sang des innoncents, tu briseras le lien moral entre lui et toi ».

La manifestation du dimanche 22 janvier est un succès, rassemblant entre 30 000 et 140 000 personnes. Mais elle fut réprimée d'une manière extrêmement brutale par l'armée, qui ouvre le feu. Une quarantaine de personnes, dont plusieurs des gardes du corps de Gapone sont tués sur le champ. Gapone est éclipsé par ses gardes du corps, et trouve refuge dans plusieurs appartements privés, y compris celui de l'écrivain Maxime Gorki. En tout, il y aura autour de 1000 morts lors de ce « dimanche rouge ».

Gapone aurait alors dit : « Il n'y a plus de Dieu ! Il n'y a plus de tsar ! ». Il se met alors à encourager les ouvriers à mener des actions plus dures contre le régime, avant de s'exiler à l'étranger.

1.3 La fin

Quelques temps plus tard, Gapone s'exile en Suisse, où il est accueilli par Plekhanov et d'autres leaders menchéviks, puis à Paris. Mais Gapone ne partage pas les convictions idéologiques des marxistes et rejoint les socialistes-révolutionnaires. Gapone est également trop connu pour accepter un rôle subalterne dans le mouvement révolutionnaire. Il écrit alors son autobiographie. Pendant cette période d'exil, Gapone reçoit en sous main des subsides de l'Okhrana.

Gapone retourne incognito à Petrograd en automne 1905 (mais l'accueil n'est pas celui qu'il escomptait), puis de nouveau en décembre 1905. En échange de sa liberté, il offrit de donner à la police le plan de campagne des révolutionnaires. En mai 1906, Gapone fut démasqué par les SR comme agent de l'Okhrana.

Accusé de trahison, Gapone est pendu le 28 mai 1906 dans la campagne finlandaise par Pinhas Rutenberg en accord passé avec le Parti SR.

2 Sources

  • (en) Abraham Ascher, The Revolution of 1905, t. I : Russia in Disarray, Stanford, Stanford University Press, (1re éd. 1988), 412 p. (ISBN 0-8047-2327-3), chap. 3 (« Gapon and Bloody Sunday »)
  • Jean-Jacques Marie, Le dimanche rouge, Larousse, 2008
  • T.Souliaguine, La Révolution russe 1905 Gapone", bande dessinée, Y.I.L., 2016
  • Le Père Gapone, Lénine (en anglais)