Salaire réel

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Le sel a été une des premières formes de rétribution, et a donné le mot salaire.

Le salaire réel est la part de la richesse (valeur ajoutée) qui revient effectivement aux salariés.

Cela correspond plus ou moins à la notion de pouvoir d'achat, basée sur le revenu disponible.

1 Revenu disponible, salaire réel et pouvoir d'achat[modifier | modifier le wikicode]

Le salaire au sens large comprend le salaire direct ("salaire net") et le salaire socialisé (remboursements par la Sécurité sociale, retraites...), ce qui fait que c'est une notion plus large qu'un simple transfert d'argent direct. Il est néanmoins possible de calculer le "revenu disponible"[1] :

  • Revenu disponible = Salaire net - Impôts + Prestations sociales

Mais ce revenu disponible ne représente pas le pouvoir d'achat, parce que la valeur de la monnaie change (appréciation/dépréciation) et parce que les prix des marchandises changent (inflation/déflation).

  • Ainsi le pouvoir d'achat, ou salaire réel, est : 
Sr = Revenu disponible / Indice des prix

La difficulté pratique est surtout l'évaluation de l'indice des prix.

2 Évolutions[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Angleterre du début du 19e siècle[modifier | modifier le wikicode]

La révolution industrielle qui démarre à la fin du 18e siècle au Royaume-Uni fait exploser la productivité du travail, la production totale et la production par tête. Pourtant, les innombrables ouvrier·ères, hommes, femmes et enfants qui versent sang et sueur pour faire sortir de terre ce nouveau monde industriel vivent dans des conditions plus misérables que les anciens paysans et artisans.

Les salaires réels stagnent entre 1790 et 1840 au Royaume-Uni. Ce phénomène a été appelé « pause d'Engels ».

2.2 France avant 1914[modifier | modifier le wikicode]

En France, les salaires réels ont augmenté de 50% dans les deux décennies précédant 1914.

2.3 France - Tournant de la rigueur (1983)[modifier | modifier le wikicode]

L'impact de l'arrivée au pouvoir de Mitterrand (soutenu par les socialistes et les communistes) en 1981, puis du tournant de la rigueur, peut être observé dans les chiffres suivants :

  • Entre fin 1980 et fin 1982, le SMIC a augmenté de 37% alors que l'indice des prix a augmenté de 25% : le SMIC "réel" a donc augmenté de 12%
  • Entre fin 1982 et fin 1984, le SMIC a augmenté de 20% alors que l'indice des prix a augmenté de 15% : le SMIC "réel" a donc augmenté de 5%
  • Entre fin 1984 et fin 1986, le SMIC a augmenté de 10,5% alors que l'indice des prix a augmenté de 10,9% : le SMIC "réel" a donc baissé de 0,4%

Le salaire et plus généralement les conditions de travail des fonctionnaires se sont dégradées, suivant la même pente que leurs collègues du privé.

«Les traitements de base des fonctionnaires semblent donc tous avoir été entraînés vers le bas, par le "tournant de la rigueur", entamé en fait dès 1982. Les syndicats de la fonction publique n'ont pas eu le pouvoir de (ou n'ont pas voulu) s'opposer à ces baisses de pouvoir d'achat. Nous émettons enfin l'hypothèse que l'acceptation par les fonctionnaires du déclin salarial se double d'un prix à payer très important, mais seulement en partie observé, en termes d'effort des agents, de qualité du service, et de qualité des recrutements. Le déclin salarial accompagne donc, selon toute vraisemblance, une décadence du service public lui-même, et dont les conséquences possibles à long terme sont inquiétantes.»[2]

2.4 France 1959 2007[modifier | modifier le wikicode]

Sur le graphe suivant, on peut observer le décrochage entre le salaire superbrut (salaire net + salaire socialisé) et la productivité. Le salaire net a encore plus décroché, en raison du chômage et du vieillissement de la population, qui a été de fait financé par les travailleurs.

ProductivitéSalaireSuperbrutNetFrance.png

2.5 France depuis 2008[modifier | modifier le wikicode]

Le niveau de vie des 50% les plus modestes est en baisse depuis la crise de 2008, alors que les 10% les plus riches ont un niveau de vie au plus haut.

2.6 États-Unis 1947 2003[modifier | modifier le wikicode]

Sur ce graphe[3], le salaire réel horaire est appelé "coût salarial horaire réel" (point de vue capitaliste).

Product-salaires.png

On retrouve nettement le décrochage entre les "Trente Glorieuses" et le tournant néolibéral.

2.7 Espagne 1954 2001[modifier | modifier le wikicode]

Ce graphe[4] traduit sensiblement la même périodisation, quoique de façon moins spectaculaire qu'aux États-Unis.

ProductivitéSalairesEspagne.png

En gris : les périodes où le salaire réel évolue moins vite que la productivité du travail, ce qui équivaut à hausse du taux d'exploitation.

3 Pouvoir d'achat[modifier | modifier le wikicode]

Affiche du PCF valorisant le pouvoir d'achat

Le terme de pouvoir d'achat est davantage utilisé, à l'origine, par les économistes bourgeois. Il permet de mettre l'accent sur « l'utilité » ou la « fonction » du salaire dans l'économie de marché.

De nombreux courants réformistes du mouvement ouvrier, ainsi que des réformateurs bourgeois, se sont mis à utiliser l'analyse keynésienne pour soutenir que l'augmentation du pouvoir d'achat des salarié·es est nécessaire pour relancer la consommation et donc l'économie[5]. Dans la logique de nombreux réformistes, cela permet de se parer d'un enrobage « scientifique », au delà d'une simple posture revendicative de « plus de salaire pour les ouvrier·ères ».

Mais en réalité, cela conduit surtout à naturaliser l'économie bourgeoise (y compris dans sa variante keynésienne) et ses catégories (consommateur, entrepreneur...), et à invisibiliser les rapports de domination qui sont au coeur du salariat. De plus, cela tend avaliser la société de consommation comme seul horizon pour la satisfaction de nos besoins humains. C'est pourquoi les communistes révolutionnaires refusent de mettre en avant la question du pouvoir d'achat dans leur discours.

4 Salaire et bonheur[modifier | modifier le wikicode]

5 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

http://www.capitalisme-et-crise.info/fr

  1. http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/revenu-disponible.htm
  2. Bouzidi, B., Jaaidane, T. & Gary-Bobo, R. (2007). Les traitements des enseignants français, 1960-2004 : La voie de la démoralisation ?. Revue d'économie politique, 117, 323-363
  3. Source BLS (Bureau of Labour Statistics)
  4. Sergio Camara Izquierdo : "The Dynamics of The Profit Rate in Spain (1954-2001)"
  5. La Dépêche, Parti Communiste. Le relance par le pouvoir d'achat, 2009