Changement climatique

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Changement de la température moyenne.svg

Le réchauffement climatique, et plus largement le dérèglement climatique, est la conséquence de l’accentuation de l’effet de serre par les activités humaines. C'est l'un des déséquilibres écologiques les plus préoccupants, et le nœud principal qui montre l'incompatibilité entre l'écologie et le capitalisme.

Le consensus scientifique sur le changement climatique est l'un des plus solides jamais établi. Malgré cela, il existe tout un courant climato-sceptique qui nie le problème, pour refuser tout changement politique.

L’effet de serre atmosphérique est un phénomène naturel permettant à la Terre de bénéficier d’une température moyenne de 15°C, rendant notamment possible la présence de l’eau sous ses trois états et la vie sous la forme que nous lui connaissons. C'est son accentuation rapide depuis la révolution industrielle qui pose problème.

1 Principe de l’effet de serre[modifier | modifier le wikicode]

Le principe de l’effet de serre est analogue à celui d’une serre agricole. L’atmosphère terrestre, comme le plastique ou le verre transparent, laisse passer la plupart du rayonnement provenant du ciel, mais bloque une grande partie du rayonnement quittant la Terre/serre.

779px-Effet_de_Serre.png

Physiquement, cela est dû au fait que :

  • le rayonnement solaire est principalement composé de lumière visible et de proche infrarouge
  • le rayonnement réémis par la terre est principalement composé d’infrarouge lointain
  • les gaz à effets de serre présents dans l’atmosphère (H2O, CO2…) absorbent l’infrarouge lointain en s’échauffant
  • l’atmosphère réchauffée réémet un rayonnement a priori dans toutes les directions
  • cet échauffement concernant davantage les couches inférieures de l’atmosphère, la réémission est principalement vers la Terre
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2 Réchauffement d'origine humaine[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Rejet de gaz à effet de serre[modifier | modifier le wikicode]

L’action de l’homme sur l’effet de serre s’effectue par le rejet de gaz à effets de serre (GES) venant s’ajouter aux gaz naturellement présents. Ces GES n’agissent pas tous avec la même intensité : ils ont une capacité à absorber (absorptivité et « largeur spectrale » sur laquelle ils absorbent) et une « durabilité ». Cet effet est synthétisé dans un indice nommé Potentiel de Réchauffement Global (PRG). Ainsi, le méthane (CH4), même s’il reste beaucoup moins longtemps dans l’atmosphère que le CO2, a un PRG 23 fois plus élevé que lui.

Mais on ne peut pas en rester à une description générale d'une "cause anthropique". Ce ne sont pas n'importe quelles "activités humaines" qui génèrent ces rejets. On estime que 122 entreprises sont à l'origine de 80% de toutes les émissions de dioxyde de carbone.

Emissions CO2 population mondiale riches.png

2.2 Puits naturels et effets non-linéaires[modifier | modifier le wikicode]

Le rejet de GES au niveau des sources (transport, industrie…) ne détermine pas directement la quantité moyenne présente dans l’atmosphère. Une certaine proportion seulement l’atteint (« airborne fraction »), qui serait aux environs de 45%. La première des raisons est qu’une bonne moitié (principalement du CO2) est stockée dans les océans, les tourbières, le pergélisol… ce qu’on appelle des « puits naturels ».

Toutefois, de nombreuses études tendent à montrer que cette proportion augmente.[1] Plus généralement, le réchauffement pourrait engendrer des modifications entraînant un saut qualitatif dans le réchauffement climatique :

  • Chute de l'albédo : la glace fond. Or l'eau liquide est de 2 à 8 fois moins réfléchissante que la glace. Donc la chaleur du soleil est de plus en plus captée.
  • Libération du carbone contenu dans le sol : il y a à peu près 3 fois plus de carbone stocké dans le sol que dans l'atmosphère, et le réchauffement pourrait provoquer sa libération dans l'atmosphère, l'aggravant encore plus. [2]
  • Fonte du pergélisol : le pergélisol (les sols gelés du Nord), qui renferme aussi souvent de la tourbe pourrait également libérer du CO2 en grande quantité en fondant. En Sibérie, du méthane piégé depuis des milliers d’années est dores et déjà libéré par ce phénomène.[3]
  • Déforestation : les végétaux sont une grande source d’absorption de CO2. La déforestation est donc un problème cumulatif au regard du réchauffement global.

On peut aussi concevoir qu'il existe des rétroactions contre-balançant l'effet de serre. Par exemple, le réchauffement pourrait entraîner en certains endroits la pousse de végétation, jouant le rôle de puits à carbone. Mais aucun scientifique réputé ne parie actuelle là dessus pour que le bilan soit positif, et la Terre continuera de se réchauffer sans intervention immédiate.

3 Conséquences[modifier | modifier le wikicode]

3.1 Élévation de la température moyenne[modifier | modifier le wikicode]

La première conséquence d’un accroissement des émissions de GES est la hausse de la température moyenne sur Terre. C’est ce qui fait que l’on parle le plus souvent du phénomène de « réchauffement climatique ». Bien évidemment, il s'agit de la température moyenne, et une vague de froid ponctuelle ne permet en aucun cas de nier la tendance générale.

Les scientifiques considèrent que la température devrait augmenter de 1,8 à 3,4 °C au 21e siècle, en fonction de la quantité de GES émis.

Ces dernières années, la comparaison avec la hausse des températures réellement mesurées et les modélisations du GIEC montrent que ces modélisations ont plutôt tendance à sous-estimer le risque qu'à l'exagérer.

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L'élévation de la température moyenne a toute une série de conséquences en cascade sur le climat, ce qui fait que l'on parle de « changements climatiques ».

3.2 Canicules et mort par surchauffe[modifier | modifier le wikicode]

Le corps humain ne supporte pas de rester longtemps au dessus d'une certaine température (plus de 50°C, moins si l'humidité est élevée). Les températures extrêmes ont été jusqu'à présent rares hors de certains déserts, mais avec le réchauffement, certaines régions très habitées sont déjà en train de devenir invivables l'été en l'absence de climatisation.

C'était le cas en juillet 2016 – mois le plus chaud jamais enregistré dans le monde – dans le golfe Persique. À Bassora, la température a atteint 54°C. Zainab Guman, une étudiante de vingt-six ans, a déclaré au journaliste du Washington Post qu'elle évitait de quitter sa maison pendant la journée tout au long de l'été, car sortir, c'est comme « marcher dans un incendie ».[4]

3.3 Sécheresse et manque d'eau[modifier | modifier le wikicode]

La surchauffe menace aussi d'engendrer des pénuries d'eau.

En novembre 2016, la Bolivie a déclaré l'état d'urgence alors que les villes de La Paz et d'El Alto manquaient d'eau. Les gens devaient faire la queue pendant des heures avec des seaux.

3.4 Avancée des déserts[modifier | modifier le wikicode]

3.5 Extension des maladies[modifier | modifier le wikicode]

Le réchauffement pourrait créer des conditions plus propices aux bactéries et virus dans les zones actuellement trop froides pour eux. On peut craindre notamment l'extension de maladies comme le choléra ou le paludisme.

3.6 Changements dans l’agriculture[modifier | modifier le wikicode]

Le réchauffement et le changement climatique pourraient probablement bouleverser l'agriculture dans la plupart des pays. Des espèces végétales pourraient ne plus se trouver adaptées au climat dans lequel on les utilise. De façon moins extrême, les rendements agricoles pourraient baisser, en moyenne de 5,7% pour le blé.[5]

Il semble aussi que l'augmentation de la concentration en CO2 dans l’atmosphère puisse faire baisser la qualité nutritionnelle des végétaux cultivés. Quand le taux de dioxyde de carbone double, il entraîne une baisse de 8 % en moyenne de la concentration en minéraux dans les plantes[6]. [7]

3.7 Fonte des glaces et niveau de la mer[modifier | modifier le wikicode]

Au Bangladesh, des villages sont abandonnés à la montée de la mer : « « L'océan nous torture », a déclaré Pushpo Rani Das, 28 ans, mère de trois enfants qui a dû déménager quatre fois pour échapper aux tempêtes. « Nous ne pouvons pas l’arrêter. L’eau pénètre dans ma maison à chaque marée haute, surtout pendant la saison des pluies. »[8]

Le réchauffement semble être plus rapide que la moyenne au niveau du pôle Nord. La banquise arctique fond à grande vitesse, diminuant de superficie[9], perdant 40% d’épaisseur [10]. La banquise de l’Antarctique est plus stable (le système climatique global semblant créer une dissymétrie entre les deux pôles), mais on observe d’inquiétants craquèlements. [11]

Les glaciers continentaux sont en recul partout dans le monde. Les glaciers des Alpes ont perdu un tiers de leur surface depuis 1950, et l'accélération du phénomène est très rapide depuis 1980. En juillet et septembre 2016, deux glaciers du Tibet se sont soudainement effondrés dans une gigantesque implosion[12].

L’élévation du niveau de la mer est une conséquence assez médiatisée du réchauffement. En effet, les océans, qui couvrent la majorité de la planète et ont davantage de capacité thermique que les continents, ont absorbé à ce jour 80 à 90 % du surcroît de chaleur. Cette élévation est due pour 30% à la dilatation thermique directe (l'eau chaude prend plus de place que l'eau froide), et pour 60% à la fonte des glaces. Cette montée s'accélère : de 1,8 mm/an avant 1993, elle est passée à 3,4 mm/an.[13] Selon le GIEC, le niveau de la mer pourrait monter jusqu'à 59 cm.

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A noter que la fonte d'un iceberg (morceau de glace flottant dans l'eau) en soi ne provoque pas d'élévation du niveau de l'eau (principe d'Archimède). Si c'est un glacier ou un morceau d'inlandsis (calotte polaire) qui se détache, l'élévation est déjà effective dès qu'il tombe dans l'océan.

3.8 Perturbations climatiques majeures[modifier | modifier le wikicode]

3.8.1 Cyclones et tempêtes plus violents[modifier | modifier le wikicode]

Le rapport de 2007 du GIEC indique qu'il y a 66% de probabilité que les cyclones tropicaux augmentent d'intensité.

Les tempêtes en général pourraient suivre la même tendance.

3.8.2 Circulation thermohaline ralentie[modifier | modifier le wikicode]

La circulation thermohaline est le grand mouvement des eaux océaniques : l'eau salée et froide, donc plus dense, plonge au niveau de pôles, se réchauffe et refait surface au niveau des tropiques, et clôt ensuite la boucle. On connaît encore très mal son rôle au niveau du système climatique mondial. Si certaines hypothèses, comme le "refroidissement de l'Europe par arrêt du Gulf Stream", semblent peu solides, il est certain que la boucle thermohaline a une importance clé.

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Si le GIEC n'envisage pas son arrêt, il estime que la fonte des glaces, en modifiant fortement la salinité, pourrait la ralentir.

3.8.3 Inondations et sécheresse[modifier | modifier le wikicode]

D’après le GIEC, il apparaît que l’écart dans la répartition des pluies se creuse : moins de pluies sur la Méditerranée, le Sahel, l’Afrique australe… plus de pluies sur l’Est de l’Amérique du Nord, le Nord de l’Europe, le centre de l’Asie… Cette tendance va très probablement s'accentuer au cours des prochaines décennies.

Contre toute attente, le réchauffement n'entraînerait pas inexorablement davantage de sécheresse, mais un accroissement des phénomènes climatiques extrêmes.

3.9 Impact sur la faune et la flore[modifier | modifier le wikicode]

La modification des conditions climatiques affecte bien évidemment les espèces animales et végétales. Chaque espèce a une "aire de répartition" optimale, qui se trouve modifiée par les changements de température, d'humidité (assèchement ou au contraire accroissement des précipitations...), voire par les effets sur les autres espèces.

Par exemple en France, les communautés d'oiseaux se sont déplacées de 100 km vers le Nord en vingt ans[14]. D'autres espèces comme la chenille processionnaire s'étendent vers le Nord. En mer, de nombreux poissons tendent à monter vers les pôles. Pour de nombreuses plantes observées depuis 1930 en Californie, l'optimum climatique a diminué de 80 m d'altitude[15].

Paradoxalement, des espèces peuvent mourir d'une soudaine vague de froid. Par exemple, des courants d'eau froide dus à la fonte accélérée des glaces polaires ont fait échouer des milliers de tortues au Texas.

Les conséquences sont innombrables. Au premier abord, on peut les résumer par une menace sur la biodiversité, d'autant plus que la modification des optimums peut conduire à des extinctions au sein même des parcs naturels. Mais étant donné la profonde complexité de l'écosystème mondial, une extinction brusque d'espèces, comme elle est déjà en train de se produire, pourrait avoir de graves conséquences sur la capacité de contrôle de l'homme sur la nature, et donc sur sa maîtrise de sa propre société.

4 Prolétaires et opprimé·es en première ligne[modifier | modifier le wikicode]

Comme pour l'ensemble des problèmes écologiques qui se posent à l'humanité, la division en classes sociales et l'impérialisme font que le prix à payer est par nature inégal entre les hommes.

Si des pays doivent pâtir le plus du changement climatique, ce seront les pays dominés par les grandes puissances. Certes il y a des facteurs purement géographiques à cela, mais ils sont tragiquement amplifiés par la domination économique.

Par exemple, la montée des eaux menace principalement les grandes côtes des pays pauvres comme le Bangladesh, tandis qu'une région comme la Hollande, déjà sous le niveau de la mer, peut se protéger par de puissantes digues, et a bien plus de moyens pour sauver des vies en cas de catastrophe.

De même, la profonde détresse sur le plan de la santé dans les pays dominés est un crime au regard de la puissance de l'industrie pharmaceutique occidentale, sourde à cette demande non solvable. Les éventuelles maladies supplémentaires frappant l'ensemble du globe ne feraient qu'accentuer cette inégalité.

La chute des rendements agricoles menace prioritairement les pays du Sud (baisse estimée de 11 à 20% pour le blé en Haute-Egypte, contre 4% pour la France[5]). Cela ne fait qu'ajouter à une inégalité déjà structurelle entre l'agro-alimentaire du Nord et l'agriculture du Sud, artisanale et orientée par les capitalistes vers l'export.

Certains des désastres écologiques frappent le plus durement des régions d'Afrique. Fin 2016, plusieurs villages de l’Est du Soudan ont été engloutis dans des tempêtes de sable. L'alternance entre sécheresses et averses torrentielles désagrègent le sol, et les forêts comme les champs fertiles disparaissent. « C'est particulièrement effrayant quand la maison est couverte [de sable] la nuit et qu'on ne peut qu'attendre dans l'obscurité jusqu'au matin pour creuser un chemin pour sortir », a déclaré Hamud El-Nour Hamdallah, 70 ans.[16]

Mais y compris au sein des pays impérialistes, le changement climatique ne peut pas affecter autant les bourgeois que les prolétaires. Dans un pays comme la France, 14% renoncent à des soins pour des raisons pécuniaires. Face à la montée des eaux, il va de soi que les très riches auront largement le choix entre renforcer leur maison ou acheter où bon leur semble. Si des catastrophes touchent l'agriculture, il va de soi que ce n'est pas la brutale montée des prix qui empêchera les capitalistes de se nourrir...

5 Production capitaliste et émissions de GES[modifier | modifier le wikicode]

5.1 Courbe environnementale de Kuznets[modifier | modifier le wikicode]

Courbe environnement.png

Dans les années 1990, des économistes théorisent le concept de courbe environnementale de Kuznets, qui reprend le principe de la courbe de Kuznets en l'appliquant aux dégradations environnementales. La logique est la suivante :

  • Pays peu développés : Faibles dégradations dues à une faible activité économique
  • Pays en développement : Augmentation de l'impact environnemental avec l'activité économique croissante
  • Pays développés : Diminution du fait d'évolutions technologiques, sociales et réglementaires

Les données empiriques n'apportent malheureusement que peu de preuves de la dynamique théorisée par les adeptes des courbes de Kuznets. Par exemple, les courbe des émissions de CO2 en fonction du temps[17] des principaux pays émetteurs entre 1970 et 2017 ne fait apparaître cette tendance pour aucune nation, même les plus développées.

Une seule variable liée au dioxyde de carbone semble suivre cette tendance de baisse dans les pays développés et de hausse dans les pays en développement, l'intensité CO2 c'est-à-dire le montant de CO2 libéré par unité de production[18]. En effet, la technologie et les normes progressant, les moyens de production des pays développés deviennent plus ''propres'' et émettent de moins en moins de CO2 à production égale. Sauf que la production ne reste pas égale, et ne peut pas le rester puisque la course au profit dans laquelle sont investis les capitalistes leur impose d’augmenter régulièrement la production (même si ce n'est évidemment pas le seul paramètre sur lequel ils peuvent jouer pour augmenter leurs profits).

Si le montant de CO2 libéré par unité de production ne diminue pas assez vite pour compenser l'augmentation du nombre d'unités produites, les émissions totales de CO2 ne diminuent pas. La courbe de Kuznets n'est donc valable que pour l'intensité CO2 mais pas pour les émissions totales.

Mais la principale faiblesse des courbes de Kuznets est surtout de ne pas tenir compte de la mobilité du capital dans une économie mondialisée, et des incitations pour les capitalistes à user de cette mobilité (dumping social et environnemental). Pour s'en convaincre, appliquons la logique des courbes de Kuznets au profit potentiellement réalisable par un capitaliste[19] :

  • Pays peu développés -> Faible potentiel de profit (absence d'infrastructures énergétiques et industrielles fiable et d'une main-d’œuvre habituée au travail en usine)
  • Pays en développement -> Augmentation du potentiel (présence des infrastructures de base et d'une main-d’œuvre abondante, précaire et peu protégée)
  • Pays développés -> Diminution du potentiel (augmentation des salaires, émergence de réglementations sociales et environnementales)
Courbe de Kuznets inverse

On voit que le potentiel de profit prend la forme d'une courbe de Kuznets, comme l'intensité CO2 !

Cela met en évidence les limites d'une logique considérant les pays séparément : les capitalistes vont chercher à maximiser le profit en étant présent au sommet de la courbe de Kuznets, or en faisant cela ils vont également maximiser l'intensité CO2, donc la pollution générée. En prenant en compte la mobilité du capital, on peut donc définir une "courbe de Kuznets inverse" qui montre le mouvement du capital sur cette courbe.

Cette analyse met en évidence un fait déjà bien connu (les capitalistes délocalisent leurs moyens de production pour maximiser leur profit), et le lie à la problématique de l'augmentation des émissions de CO2, en montrant que cet état de fait n'est pas un évènement ponctuel, mais bien une caractéristique structurelle du capitalisme : tant que les capitalistes en auront la possibilité, ils exploiteront la mobilité du capital pour se trouver en permanence au sommet de la courbe de Kuznets, maximisant ainsi leurs profit, mais également les émissions de CO2. De fait, les capitalistes commencent déjà à délocaliser à nouveau leurs usines installées en Chine[20], à mesure que le niveau de vie et l'écologie progressent dans le pays.

6 Réponses politiques[modifier | modifier le wikicode]

6.1 Climato-sceptiques[modifier | modifier le wikicode]

Street art à Londres

Toute un ensemble de forces politiques ont nié et continuent de nier ou minimiser le changement climatique, ou le présentent comme un phénomène naturel. De très nombreuses études montrent qu'il y a une très forte corrélation entre ces positions climato-sceptiques, et le fait d'être de droite, d'avoir d'être un homme blanc conservateur.[21][22][23][24]

Assez logiquement, les capitalistes ont plus intérêt que des prolétaires à nier des résultats qui viennent remettre en question la façon dont ils s'enrichissent. C'est en particulier le cas du patronat du secteur des énergies fossiles. Les compagnies pétrolières ont financé de nombreuses études sur le climat dans le but de fabriquer du doute, et ont retardé l'émergence du consensus scientifique sur la question.[25] En 2009 ils ont monté en épingle un « Climategate » qui est un non-sujet, mais qui a contribué à faire croire à certains que le « GIEC nous manipule ». Encore aujourd'hui, aux États-Unis, le lobby de ce secteur s'active contre toute mesure contraignante.[26] Il a massivement soutenu l'élection de Donald Trump, qui une fois arrivé au pouvoir a retiré les États-Unis de l'accord de Paris et a ordonné à l'agence environnementale fédérale (EPA) de cesser toute mention du changement climatique.

Les plus fervents idéologues du laisser-faire économique ont aussi tendance à nier le changement climatique, parce qu'il est un exemple flagrant d'inefficacité du libre-marché.

Parce que des mesures écologiques constitueraient une entrave au principe de libre-échange et de croissance économique, une part importante des libéraux adopta rapidement une position climatosceptique : pour ces derniers, le réchauffement est un évènement normal ou, du moins, anodin de l'histoire de la planète, qui finira, à terme, par se combler...

6.2 L'impasse des mesurettes bourgeoises[modifier | modifier le wikicode]

Sous la pression des luttes, une certaine prise en compte du changement climatique s'est retrouvée peu à peu intégrée au discours politique « dominant », même si les Trump, Bolsonaro ou Milei montrent à quel point ce n'est pas une hégémonie. Mais même lorsqu'ils reconnaissent verbalement l'objectif de réduction des gaz à effet de serre, les politiciens en font un thème expurgé de tous ses aspects subversifs, qui leur sert seulement à se poser comme pro-science (par rapport aux droitiers les plus caricaturaux), soucieux de l'intérêt général, d'une gestion « en bon père de famille » etc. C'est principalement sous la forme de l'idéologie du développement durable que s'est faite cette assimilation par la classe dominante d'une "conscience écologique" parmi les citoyens.

En prenant en compte les externalités, la forte croissance du routier et de l'aérien au détriment du rail n'a pas de rationalité économique.

Cette idéologie lénifiante revenant à l'illusion/mensonge d'un capitalisme vert est le dénominateur commun entre le PCF, le PS, les Verts et l'UMP. Il pose un cadre commun de débat entre des entrepreneurs désireux d'investir un marché vert (réel ou "greenwashed"), des politiciens électoralistes brassant de l'air, et des écologistes sincères mais profondément bernés.

Aujourd'hui les réformateurs plus ou moins de bonne foi adoptent une vision dans laquelle il faudrait trouver des dispositifs pour que les externalités (qui sont implicitement minimisées, vues comme exceptionnelles) soient prises en compte par le marché.

La variante la plus modérée est celle qui consiste à vouloir monétiser les pollutions, pour qu'il existe un « signal-prix » intégrable par le marché. L’exemple type est le marché des droits à polluer (cap and trade). Ce genre d'usine à gaz a été mis en place dans beaucoup de pays, pour un résultat nul sur les gaz à effet de serre.

La version légèrement plus critique (car elle donne un rôle plus actif à l'État et repose sur une moindre confiance dans l'auto-régulation du marché) est celle des dispositifs type taxe carbone : taxer les marchandises en fonction des émissions de GES qu’il a fallu pour les produire ou les transporter. Il s'agit de « responsabiliser les acteurs », inciter les industriels à produire plus « vert » et les acheteurs à « consommer responsable ».

Ce genre de mesure se heurte à une profonde contradiction : pour avoir un effet notable, il faudrait que la taxe soit élevée. Mais si elle est élevée, elle a à la fois un effet anti-social (comme tous les impôts indirects elle frappe plus durement les prolétaires) et un effet perturbateur pour certains secteurs capitalistes, qui feront du lobbying contre. Comme les politiciens ne veulent ni déranger trop leurs amis patrons et actionnaires, ni se rendre trop impopulaires (exemple : recul face aux gilets jaunes[27]), ils fixent des montants très faibles pour ces taxes carbones. Ces taxes sont donc condamnées à avoir une efficacité extrêmement faible.

L'incapacité des bourgeois et de ceux qui les suivent à résoudre les problèmes écologiques se concentre en un point fondamental : la volonté de ne pas toucher à la propriété privée des moyens de production et d'échange.

6.3 Géo-ingénierie du climat[modifier | modifier le wikicode]

Un certain nombre d'ingénieurs ou scientifiques échafaudent des pistes technologiques pour agir directement sur le climat (géo-ingénierie).

  • Captation du CO2 en sortie des centrales thermiques et injection dans le sol (séquestration du carbone).
  • Sachant que l'essentiel de la photosynthèse est réalisée par le phytoplancton, certains préconisent de le stimuler en fertilisant les océans. Mais de telles mesures pourraient conduire à de l'eutrophisation massive et à des zones mortes (anoxie des océans).
  • Le météorologue et prix Nobel de chimie Paul Crutzen suggère de déverser du soufre dans l’atmosphère au moyen de canons ou d’avions. Les vapeurs sulfureuses pourraient capter une partie des rayons solaires et freiner le réchauffement de la terre.
  • Augmenter la réflexion (albedo) des rayons solaires dans l’espace (par la création d’îles blanches ou par des satellites).

Il y a de nombreuses raisons d'être méfiants sur ce genre de technologies laissées aux mains de la bourgeoisie. Et il y a quelque chose de révoltant à l'idée que ce type de solutions puisse être envisagé, et servir à éviter toute remise en question des rapports de production, voire au contraire à donner de nouveaux débouchés à l'industrie capitaliste. Cependant face à l'ampleur des dégâts causés par le changement climatique, on ne peut exclure a priori qu'il soit rationnel de se pencher sur certaines de ces solutions. Par exemple, la technologie pour ajouter un système de captation du CO2 sur une centrale à charbon est déjà au point, mais elle nécessite de consommer environ 25% de la production de la centrale pour faire fonctionner ce procédé (dans les conditions capitalistes, ce n'est pas rentable)[28]. Vu le nombre de centrales thermiques à remplacer dans le monde, il est possible que dans une situation d'urgence, un gouvernement socialiste décide transitoirement d'installer ce genre de système.

6.4 Mesures socialistes et internationalistes[modifier | modifier le wikicode]

Une action profonde et dans tous les domaines, appuyée sur la science mais gérée socialement, ne peut être lancée que si le salariat est aboli et que le prolétariat prend en main la gestion de toute la production. Parmi les mesures que devrait probablement prendre dès que possible un tel gouvernement des travailleur·ses pour limiter autant que possible le changement climatique :

  • Réorientation de la production d'énergie
    • Généralisation du solaire thermique
    • Utilisation du potentiel géothermique et hydroélectrique là où c'est pertinent
    • Recherches sur le solaire photovoltaïque, installation là où pertinent
    • Recherches sur le niveau de centralisation de la production énergétique pertinent
    • Débat le plus rationnel possible sur l'énergie nucléaire
  • Mesures générales
    • Fin des brevets et transfert total et immédiat de technologies à l'international
    • Indicateurs globaux (énergie grise, bilan carbone...) et fiables généralisés dans l'industrie
    • Recherches interdisciplinaires de fond pour faire progresser notre compréhension de l'écologie

7 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

  1. Contributions to accelerating atmospheric CO2 growth from economic activity, carbon intensity, and efficiency of natural sinks, 2010
  2. Selon le chercheur australien Chris Freeman, un bon tiers du carbone terrestre a jusqu'à présent été retenu dans les tourbières grâce entre autres à de faibles températures. Le New Scientist publie en 2004 une autre estimation : la tourbe en Europe, Sibérie et en Amérique du nord contiendrait l'équivalent de 70 ans de développement industriel.
  3. Katey Walter Anthony, Méthane, un péril fait surface, 390, Pour la Science, (avril 2010)
  4. Jason Samenow, ‘Two Middle East Locations Hit 129 Degrees, Hottest Ever in Eastern Hemisphere, Maybe the World’, Washington Post, 22 July 2016.
  5. 5,0 et 5,1 Bing Liu, Senthold Asseng, Christoph Müller et al., ‘Similar Estimates of Temperature Impacts on Global Wheat Yield by Three Independent Methods’, Nature Climate Change 6 (2016): 1130–7.
  6. (en) I. Loladze, « Hidden shift of the ionome of plants exposed to elevated CO2 depletes minerals at the base of human nutrition », eLife, 3, e02245,‎ .
  7. (en) Samuel S. Myers, Antonella Zanobetti, Itai Kloog, Peter Huybers, Andrew D. B. Leakey, Arnold J. Bloom et Eli Carlisle, « Increasing CO2 threatens human nutrition », Nature, vol. 510, no 7503,‎ , p. 139–142 (ISSN 0028-0836, DOI 10.1038/nature13179, Bibcode 2014Natur.510..139M, lire en ligne).
  8. Karen McVeigh, ‘On the Climate Change Frontline: The Disappearing Fishing Villages of Bangladesh’, Guardian, 20 January 2017.
  9. Comme le montrent notamment des photos satellites de la NASA
  10. Thinning of the Arctic sea-ice, PNUD, 2008
  11. Voir Robin Bell, « L'eau, une menace pour les calottes polaires », dans Pour la Science, no 367] et Futura Science
  12. Kate Ravilious, ‘Climate Change likely Cause of Freak Avalanches’, Guardian, 4 December 2016.
  13. La montée des océans : jusqu'où ?, Pour la Science, no 388, février 2010
  14. Résultats du Suivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC), Octobre 2005
  15. Report Changes in Climatic Water Balance Drive Downhill Shifts in Plant Species’ Optimum Elevations ; Science 21 January 2011
  16. Hannah McNeish, ‘ “We Have almost Been Buried”: The Sudanese Villages Being Swallowed by Sand’, Guardian, 17 November 2016; Hannah McNeish, ‘Farmers in Sudan Battle Climate Change and Hunger as Desert Creeps Closer’, Guardian, 19 December 2016.
  17. https://www.futura-sciences.com/planete/questions-reponses/gaz-effet-serre-pays-emettent-plus-co2-1178/
  18. https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/EN.ATM.CO2E.EG.ZS?end=2014&locations=SE-FR-US-CN-IN&name_desc=true&start=1960&view=chart
  19. http://revueperiode.net/capital-fossile-vers-une-autre-histoire-du-changement-climatique/
  20. https://www.lepoint.fr/monde/la-guerre-commerciale-pousse-des-entreprises-chinoises-a-l-exode-11-09-2018-2250232_24.php
  21. Matthew J. Hornsey, Emily A. Harris, Paul G. Bain and Kelly S. Fielding, ‘Meta-Analysis of the Determinants and Outcomes of Belief in Climate Change’, Nature Climate Change 6 (2016): 623.
  22. E.g. Bruce Tranter and Kate Booth, ‘Scepticism in a Changing Climate: A Cross-National Study’, Global Environmental Change 33 (2015): 154–64
  23. McCright et al. ‘Ideology’; Aaron M. McCright, Riley E. Dunlap and Sandra T. Marquart-Pyatt, ‘Political Ideology and Views about Climate Change in the European Union’, Environmental Politics 25 (2016): 338–58.
  24. Samantha K. Stanley, Marc S. Wilson and Taciano L. Milfont, ‘Exploring Short-Term Longitudinal Effects of Right-Wing Authoritarianism and Social Dominance Orientation on Environmentalism’, Personality and Individual Differences 108 (2017): 174–7.
  25. Naomi Oreskes, Erik M. Conway, Les Marchands de doute, 2010 (également adapté en documentaire en 2014)
  26. The Guardian, Secret funding helped build vast network of climate denial thinktanks, Feb 2013
  27. Europe 1, Taxe carbone : vers un nouveau modèle plus "équitable" ?, Février 2019
  28. Le Réveilleur, La Capture et Séquestration de Carbone pour réduire nos émissions de CO2, 2020